Plafonnement du prix des voyages scolaires : balises communes portées au départ de la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire

Plafonnement du prix des voyages scolaires : balises communes portées au départ de la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire

La ministre Caroline Désir a annoncé au parlement sa volonté de plafonner le cout des excursions et voyages scolaires. Cela constituerait une avancée importante dans l’accès à la gratuité scolaire, attendue de longue date : dans la lignée du Pacte pour un enseignement d’excellence, depuis 2019, un décret demande au gouvernement de définir des plafonds en primaire comme en secondaire, pour en finir avec les pratiques abusives et limiter la concurrence entre écoles. Toutefois, le montant des plafonds et les années d’études concernées seront des enjeux essentiels pour que cette mesure porte ses fruits et ne génère pas d’effets pervers. Si « les voyages forment la jeunesse », trop nombreux sont les jeunes exclus pour des raisons financières de la participation à un voyage. Nous appelons à des balises équilibrées, qui garantissent l’organisation de plusieurs séjours de qualité pédagogique en primaire comme en secondaire, empêchent les pratiques abusives et permettent à tous les élèves, en particulier ceux dont les familles sont en difficulté financière, d’y participer.

Un élève sur vingt en primaire ne peut pas participer aux voyages scolaires que son école organise à cause de leur cout, et en secondaire, c’est un sur dix. L’absence totale de régulation du prix des voyages que la Fédération Wallonie-Bruxelles a pratiquée jusqu’ici a généré au fil du temps des situations d’exclusion sociale terribles. Quel stigmate un jeune de huit ou treize ans porte-t-il quand tous ses camarades de classe partent trois jours ou une semaine, et que lui-même ne peut pas les accompagner parce que ses parents ne sont pas en mesure d’assumer des couts aussi élevés ? Quelle souffrance peut exister dans une famille ne pouvant s’offrir de vacances, mais appelée par l’école à financer des excursions et séjours aux prix démentiels sous peine de voir leur enfant mis à l’écart de l’expérience que vont vivre ses condisciples ? Rappelons qu’en 2021, 15 % des Wallons déclarent n’avoir pas les moyens financiers de participer régulièrement à une activité de loisirs, et plus de 3 Wallons sur 10 n’arrivent pas à se payer une semaine de vacances annuelles1. Et à Bruxelles, 30 % des ménages ont des difficultés à boucler leur budget2

Cette situation très grave existait déjà avant la crise. Mais alors qu’actuellement, aux conséquences sociales d’une crise sanitaire se sont ajoutées pour une part significative de la population les inondations et ses conséquences dramatiques, une inflation galopante et le cout de l’énergie, le cout de la fréquentation de l’école devient de plus en plus insoutenable à mesure que les inégalités sociales s’aggravent et que la précarité touche de plus en plus de couches de la population. Dans ces circonstances, l’organisation même de voyages scolaires accessibles à tous et porteurs de sens est mise en péril, alors qu’ils devraient permettre de sortir de la morosité, apporter évasion et épanouissement.

Sans compter que les frais de voyage ne sont qu’une part des trop importants couts scolaires. Le gouvernement a récemment posé un geste fort, en prévoyant qu’en première et deuxième primaire les fournitures seront gratuites à partir de la rentrée 2023. Mais les autres années ne sont pas concernées actuellement, et d’autres frais, parfois iniques, se surajoutent : frais de garderie le matin et l’après-midi, cout du repas de midi, frais de garderie au temps de midi, frais informatiques en secondaire… Le chemin vers la gratuité scolaire, dans lequel se sont engagés la Belgique3, les acteurs de l’école au travers du Pacte, et le gouvernement FWB dans sa déclaration politique, est encore long, alors qu’il est urgent pour un nombre grandissant de familles vivant la pauvreté ou l’appauvrissement que cette gratuité soit effective au plus vite. Rappelons que le financement de la gratuité est un investissement, qui rapportera au bien-être des familles concernées comme à la société dans un futur proche et à long terme.

Beaucoup d’écoles tentent d’organiser des séjours porteurs de sens, inscrits dans un projet pédagogique enrichissant pour l’ensemble des élèves. Les ingéniosités ne manquent pas, entre recherche de lieux et d’activités épanouissantes en Belgique, et caisses de solidarités scolaires, mais dépendent souvent de bonnes volontés locales et d’initiatives individuelles. Malheureusement, l’absence de cadre légal conduit d’autres écoles à des abus dramatiques pour les familles qui doivent les supporter. Et il est particulièrement difficile en tant que parent de faire état de ses difficultés financières, car il sait tous les risques que cela comporte pour son enfant. C’est lui qui risque d’être identifié au sein de l’école comme le pauvre qui fait appel à la charité.

Acteurs de l’école et associations réunis au sein de la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire, nous nous réjouissons de la volonté d’avancer sur ce plafonnement et appelons le gouvernement à être attentif aux balises suivantes :

  • Des plafonds qui permettent à la fois une accessibilité à toutes les familles et l’organisation de voyages pédagogiques de qualité. Si les voyages forment la jeunesse, il faut que toute la jeunesse puisse en bénéficier.
  • La fixation d’un plafond doit pouvoir concrètement diminuer le prix des voyages et réduire les inégalités entre élèves et écoles. Si l’objectif principal est d’éviter les pratiques abusives, il existe un risque, si un plafond trop élevé est fixé, que certaines écoles tendent à s’aligner sur cette norme élevée. Un plafond qui ne serait pas éloigné du prix moyen que paient actuellement les parents sur la scolarité primaire et secondaire, soit 350 € pour les voyages organisés sur toutes les années de primaire, 550 € pour les années de secondaire, permettrait de garantir des voyages scolaires à visée pédagogique de qualité accessibles, sans pour autant générer une pression à la hausse des couts demandés aux parents.
  • Tant que la gratuité totale n’est pas assurée, il faut veiller à ce que les coûts financiers demandés aux parents par l’école ne puissent en aucun cas aggraver la situation financière des familles qui sont déjà en difficulté. Un tel plafond de 350 euros/550 euros resterait élevé pour les familles vivant la pauvreté, mais aussi de plus en plus pour la classe moyenne inférieure qui vit un appauvrissement accéléré et radical actuellement. Sans aide extérieure prévue par décret et par rapport à laquelle une information claire est donnée aux parents, les familles vivant la pauvreté et celles s’appauvrissant fortement actuellement ne seront pas en mesure de faire face à ces frais.
  • Les voyages les plus onéreux prennent généralement cours en fin de cycle primaire et en secondaire. Un plafond qui ne concernerait que les premières années de primaire manquerait largement sa cible. Il faut fixer d’ores et déjà pour la rentrée 2023 des plafonds pour l’ensemble des années de primaire et secondaire – une mesure non coutante –, applicables à la génération des élèves qui arrivent en première et deuxième année primaire et secondaire.
  • Il faut éviter que les écoles puissent reporter sur plusieurs années le cout maximal qu’elles auraient pu demander les années précédentes. Un parent ne pourrait ainsi pas être amené en cinquième ou sixième primaire à payer en une fois des montants faramineux, parce qu’on aurait « reporté » à la fin du parcours scolaire les couts de voyages scolaires non organisés toutes les années précédentes. En Belgique en 2022, 22,3 % des familles n’arrivent pas à faire face à des dépenses imprévues4.

Nous, acteurs de l’éducation, porterons ces balises dans les différents lieux où ces discussions ont cours et appelons chacune et chacun à s’en saisir. C’est à notre sens nécessaire pour cheminer vers ce triple objectif d’améliorer les projets pédagogiques organisés pour les élèves, éviter les situations abusives, et garantir que chaque élève quelle que soit son origine puisse accéder à une école épanouissante et à toutes les opportunités qu’elle propose, porteuse de sens et d’inclusion sociale.

La Plateforme de lutte contre l’échec scolaire est un rassemblement d’associations, organisations syndicales, et collectifs oeuvrant ensemble vers une école plus inclusive, travaillant à réduire les inégalités scolaires et à combattre la relégation.


Membres de la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire :

  • CSC Enseignement
  • CGSP Enseignement
  • SEL-SETCA
  • APED – Appel pour une école démocratique
  • ATD Quart-Monde Jeunesse
  • CGé – ChanGements pour l’égalité – mouvement sociopédagogique
  • Coalition des parents de milieux populaires et des organisations qui les soutiennent pour changer l’école
  • FAPEO – Fédération des associations de parents de l’enseignement officiel
  • Infor-Jeunes Laeken
  • Ligue des droits de l’enfant
  • Ligue des familles
  • Lire-et-Ecrire
  • MOC – Mouvement ouvrier chrétien
  • RWLP – Réseau wallon de lutte contre la pauvreté
    Autres cosignataires de cet appel :
  • Le Forum – Bruxelles contre les inégalités
  • Fédération Infor-Jeunes Wallonie-Bruxelles
  • CEF – Comité des élèves francophones
  • Fédération des CPAS

1 Statistiques EU-SILC. Cette donnée est l’un des éléments qui caractérisent l’état de déprivation matérielle et sociale. https://www.iweps.be/indicateur-statistique/taux-de-privation-materielle-sociale/
2 Institut bruxellois de statistique et d’analyse. https://ibsa.brussels/le-saviez-vous/30-des-menages-bruxellois-ont-eu-des-difficultes-a-boucler-leur-budget-en-2021
3 La Belgique a notamment ratifié la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, dont l’article 28 qui engage à la gratuité de l’enseignement primaire comme secondaire.

4 Statistiques EU-SILC. Cette donnée est l’un des éléments qui caractérisent l’état de déprivation matérielle et sociale. https://ec.europa.eu/eurostat/databrowser/view/ilc_mdes04/default/table?lang=fr

Colloque : Comment rendre l’école inclusive ?

Colloque : Comment rendre l’école inclusive ?

Les inscriptions sont clôturées le 22 novembre à 20 heures

Journée « boîte à outils »

Avec le soutien de la Cocof et de WBE

L’école inclusive, ce ne sont pas que des textes de loi ou des réglementations. Pour être mise en œuvre, il faut des personnes. Ce sont les élèves, ce sont les enseignants, ce sont ces nouvelles institutions que sont les Pôles territoriaux, ce sont aussi les CPMS et les associations en lien avec l’Ecole et, enfin, ce sont les parents. Mais le concept d’ « Ecole inclusive » paraît encore flou à de nombreux professionnels, tous horizons confondus. Comment se mettre sur le chemin de l’inclusion ? Ce colloque propose de rappeler brièvement le cadre légal et surtout de le mettre en regard avec le quotidien des professionnels de l’Ecole. Que mettre en place pour devenir inclusif. Des pratiques probantes que l’on peut réaliser dans les écoles vous seront présentées. Chacun.e aura la possibilité de la/les expérimenter sur son/ses terrain.s par la suite. Nous proposerons ensuite, un second colloque en avril 2023, afin d’approfondir la manière de rendre l’Ecole plus inclusive et, si possible, de partager des expériences.

Ce colloque est ouvert à tout le monde, professionnels de l’éducation, associatifs, familles, militant.e.s, politiques, etc.

La classe et/ou l’école inclusive concerne tou.te.s les élèves avec leurs diversités, qu’elles soient intellectuelles, physiques, culturelles, sociales, de genre, de langue, d’orientation sexuelle, … . Par la bienveillance éducative, elle tient compte des besoins de chacun.e (accessibilité, différenciation, aménagements universels, …) et s’articule autour d’une pédagogie active et coopérative, et vise les objectifs les plus ambitieux en fonction des capacités de tou.te.s les élèves, qui restent ensemble tout au long de la scolarité.

Ce colloque est un pari. Les classes/écoles qui veulent se lancer sur le chemin de l’inclusion se retrouvent souvent sans outil, sans beaucoup d’aides. En mutualisant nos expériences et en créant des réseaux participatifs, le chemin vers l’inclusion n’en sera que plus plane et plus riche, du simple fait qu’on ne marchera plus tout seul.

Se lancer sur le chemin de l’inclusion, c’est s’engager dans un long voyage. L’important est de se mettre en chemin, avec la volonté d’aller le plus loin possible. L’inclusion c’est un rêve. Le rêve d’une école meilleure, plus efficace, plus efficiente, plus adéquate, plus pertinente, plus congruente avec sa communauté. Le rêve d’une école qui s’adapte à tous les élèves sans en oublier aucun.e en chemin. L’inclusion c’est surtout l’horizon vers lequel nous devons viser. L’important est d’être sur le chemin et de pouvoir porter de plus en plus d’élèves vers ce soleil qui pointe lentement et qui, plus on avance, monte irrésistiblement pour éclairer toutes celles et tous ceux que nous accompagnons sur le chemin.

On ne peut être inclusif si l’on ne met pas en place les outils indispensables à l’accompagnement de tou.te.s les élèves. A commencer par une pédagogie active et coopérative. C’est celle-ci qui guidera les pratiques adaptées que l’on doit mettre en place pour permettre à chacun.e de progresser sans perdre pied. Aussi, ce colloque veut donner des outils à celles et ceux qui désirent se lancer sur le chemin de l’inclusion.

PROGRAMME

8h30 : Accueil

09h00 : Introduction

Jean-Pierre Coenen, Président de la Ligue des Droits de l’Enfant

09h20 : Pourquoi les écoles doivent-elles devenir inclusive ? Rappel du Droit

UNIA – Carole Van Basselaere, conseillère juridique au service Handicap/Convention

09h45 : Forum 

1. Parole aux acteurs : Que manque-t-il aux écoles pour être inclusives ?

Des personnes du « Mouvement Personnes D’abord »

Thomas Dabeux de l’ASBL Inclusion

10h20 : Méthodes et stratégies éducatives à utiliser en Ecole inclusive

Echange de bonnes pratiques expérimentées. Présentations faites par des enseignant.e.s ayant une expérience dans le domaine abordé

2. Comment mettre en place une pédagogie active

Présentation d’une expérience dans le fondamental et d’une expérience en secondaire

L’Ecole fondamentale du Tivoli

Michèle Masil, directrice

L’école secondaire Jules Vernes

Ariane Merland, directrice

11h00-11h25 : Pause

11H30- 12h30 : Forum (suite)

Le Tutorat

Jean-Pierre Coenen, instituteur

L’évaluation non compétitive : Le portfolio

Nicolas Paillé et Magali Cerfont (instituteur/trice primaire)

et Jeanne Delhausse (pour le 5-8), Ecole Clair-Vivre

Le co-enseignement

Alizée Lemoine, Ecole fondamentale Singelijn

12h35 – 13h20 : Walking Dîner

13h30 – 14h : Forum suite

Les Aménagements universels et raisonnables indispensables

Sarah Wilem (Pôle territorial WBE Namur), Audrey Van Michel, dit Valet (PT WBE Huy-Waremme) et Jérémy Krol (PT WBE WAPI B)

14h00 – 14h45 : Débat (QR)

Animateur : Dominique Paquot, directeur de l’école Singelijn

Les participants peuvent questionner les professionnels qui ont fait les présentations du matin et de l’après-midi

14h45 : Table-ronde : La formation des enseignants (initiale et continue)

Animateur : Yves Robaey, orthopédagogue

Comment forme-t-on les professionnels aux pratiques expérimentées ?

Les 30 minutes de Table-ronde seront suivies de 30 minutes de débat avec la salle

15h45 Conclusion et synthèse

Jean-Pierre Coenen, Ligue des Droits de l’Enfant

16h15 Fin de la journée

Renseignements pratiques

Quand ?

Le vendredi 25 novembre 2022 (journée boîte à outils)

Une seconde journée sera organisée en avril 2023 (journée participative – date à préciser)

Où ?

Athénée Royal Da Vinci , 5 rue Chomé Wynz à Anderlecht

Privilégier les transports en commun, le parking étant payant dans la commune

Inscriptions AU PLUS TARD POUR LE 22 NOVEMBRE

Envoyer un mail à l’adresse suivante (remplacer ‘at’ par @, sans espaces) :

formations ‘at’ liguedroitsenfant.be

ou par téléphone au 0477 545 907 (de 9h30 à 18h)

Participation aux frais : 30 €/personne

22,50 € pour les étudiant.e.s et les parents d’enfants à besoins spécifiques

Pause, repas et documents compris

A verser sur le compte BE76 9795 8553 0195 de la Ligue des Droits de l’Enfant

avec mention « colloque 25 novembre 2022 + Nom.s et prénom.s du/des participant.e.s »

La/les inscriptions seront confirmées par mail une fois la participation aux frais perçue.

Attention : le nombre de places est limité.

Ecole inclusive : Accueillir un élève avec une dysphasie

Ecole inclusive : Accueillir un élève avec une dysphasie

1.   Comment permettre à un élève avec une dysphasie d’être inclus dans son école ?

1.1.      Pourquoi parler de dysphasie ?

Parmi les parents, mais aussi les professionnels qui nous ont rejoints sur le combat pour une Ecole inclusive, plusieurs d’entre eux se battent pour que leur enfant soit accompagné à l’école en tenant compte de leur spécificité très particulière, qui est la dysphasie. Les enseignant.e.s ne sont pas formé.e.s à ce trouble qui, dans le milieu scolaire, peut être très handicapant. Nous vous proposons de vous pencher avec nous sur cette réalité. En effet, il n’y a pas qu’à l’école qu’elle se rencontre. Dans le milieu extrascolaire, il en va de même. Certains enfants qui fréquentent une école de devoirs, une maison de quartier, un club de sport, une académie, … sont porteurs de ce trouble. Il vaut mieux le connaître afin de ne pas discriminer un.e enfant, sans même s’en rendre compte. L’Ecole inclusive est un Droit de tous ces enfants.

Lors des précédentes années, nous avions abordé d’autres « dys ». La dernière concernait la dyspraxie. La demande qui a été faite par les membres de la Plate-forme pour une Ecole inclusive a été de n’oublier aucun « dys », même les plus rares. L’analyse suivante a déjà été décidée. Elle concernera un trouble moins connu, les déficiences mnésiques.

1.2.      Comprendre la dysphasie ?

La dysphasie se situe au niveau du langage oral. C’est un trouble « structurel » sévère, spécifique et durable de l’apprentissage et du développement du langage oral. Il entraîne un déficit sévère et malheureusement durable de la production de la parole, donc du langage, mais également de la compréhension. La dysphasie peut se présenter sous différentes formes plus ou moins sévères.

Environ sept pourcents des enfants de 3 ans et demi présentent un trouble du langage oral, mais la majorité se corrige avant l’âge de 6 ans. Un pourcent des enfants gardent des troubles importants du langage oral. On considère alors que le trouble est durable.

La différence entre retard et trouble du langage oral est synthétisé dans le tableau suivant[1] :

Retard de langageDysphasie·s
Décalage chronologique des acquisitions langagièresTrouble primaire et durable
Simplifications de parole : parapluie = papuiDéviances phonologiques : cancagne ou panpagne pour campagne
Compréhension normaleCompréhension difficile
Lexique réduit (peu de vocabulaire)Troubles de l’évocation : cherche ses mots, forme des périphrases (p.ex. : dire en beaucoup de mots ce que l’on peut dire en peu de mots)
Syntaxe maladroite (manière incorrecte de combiner les mots pour former des phrases ou des énoncés dans une langue)Dyssyntaxie[2] (substitution de mots) / agrammatisme[3] (« style télégraphique », ou omission de mots)
Intonation normaleDysprosodie (dysfonctionnement de la communication)
Atteinte Homogène Phonologie/lexique/syntaxeEcarts de performance
Peu de conscience du troubleConscience aigüe du trouble
Amélioration avant 6 ansDéficit durable

Il ne s’agit pas d’un simple retard de l’apprentissage du langage. Ces enfants ne sont pas malentendants et n’ont aucun retard mental, ni d’autisme. On ne peut donc pas expliquer une dysphasie par d’autres troubles, une malformation des organes phonatoires, pas plus que par un désordre affectif grave. Ce handicap est lié à un dysfonctionnement des structures cérébrales qui sont activées afin de traiter l’information langagière.

Ce trouble est encore peu connu pour deux raisons. D’une part, pendant longtemps les études au sujet des problèmes de communication des enfants étaient davantage tournées vers la surdité et les séquelles des lésions cérébrales. D’autre part,  il est  difficile  d’initier  l’idée  qu’un  enfant  qui n’a  ni  déficit  particulier  ni  réticence  à  interagir  avec  son  entourage  puisse  être soumis  à  un empêchement durable de communiquer[4]. Ce n’est que depuis les années 70 que des recherches en phonologie du langage et en linguistique ont été menées. Plus récemment les neurosciences s’y sont à leur tour intéressées. 

On ne connaît pas les raisons qui font qu’un enfant ait une dysphasie. Celle-ci est un trouble dont l’origine reste incertaine. Il y aurait plusieurs causes qui se combinent. Actuellement deux hypothèses sont évoquées, soit une cause génétique, soit une cause neurobiologique (fonctionnement cérébral).

Il y a plusieurs formes de dysphasies, puisque tant la compréhension que l’expression ainsi que tous les niveaux linguistiques (enchainement des sons, lexique, syntaxe, discours) peuvent être touchés à des degrés divers. On devrait donc parler des dysphasies.

En général, on parle de deux grandes catégories de dysphasies :

  • Les dysphasies réceptives, ou par « agnosie verbale » : l’enfant ne reconnaît pas les sons du langage, ne parle pas ou peu, a un vocabulaire pauvre, se replie sur soi par peur de communiquer, etc. ;
  • les dysphasies expressives (discours incompréhensible, difficultés à trouver ses mot, discours inadapté au contexte, difficultés dans l’apprentissage de l’écrit, troubles de la compréhension des langages écrit ou oral, etc.

A celles-ci, on peut ajouter les dysphasies mixtes qui sont à la fois des dysfonctionnements de l’expression et de la réception du langage.

On a vu qu’à l’école, cela représente un élève sur cent. Les conséquences sont importantes sur l’adaptation sociale et affective de l’enfant et sur la qualité de ses apprentissages scolaires. A l’âge adulte, c’est au niveau de l’insertion professionnelle que la dysphasie mettra le travailleur en situation de handicap.

Pourtant ce sont des enfants intelligents, curieux, gentils et calmes. S’ils perdent parfois leur sang-froid, c’est dû à la frustration de ne pas être compris. Ils ont le désir de communiquer mais n’y arrivent pas. Cela n’empêche pas qu’ils puissent avoir une vraie motivation d’apprendre, surtout les tâches qui ne requièrent pas le langage. Enfin, ils ont un sens de l’observation pointu.

Malheureusement pour lui, l’enfant avec une dysphasie voit souvent sa pathologie accompagnée par d’autres troubles qui handicapent sa scolarité comme la dyslexie et tous les troubles de la lecture, la dysorthographie, une difficulté à se repérer dans l’espace et dans le temps (dysphasie visuo-spatiale), un trouble de l’abstraction, voire problèmes de comportement en rapport avec ses troubles de la compréhension et d’adaptation à une situation nouvelle.

2.    Comment peut-on reconnaître une dysphasie chez un élève ?

Les enseignants et les accompagnants ne peuvent qu’élaborer des suppositions face aux difficultés langagières d’un élève. Le diagnostic doit être réalisé par une équipe de professionnels et ne peut être clairement posé qu’à partir de 5 ans.

En cas de signaux d’alerte avant cet âge, les enseignants de maternelle peuvent suggérer aux parents de consulter leur médecin traitant, suite aux constations qu’ils ont faites. Ce dernier orientera logiquement les parents vers un centre spécialisé. Il doit être établi par une équipe pluridisciplinaire (neuropédiatre ou pédopsychiatre, psychologue, orthophoniste, psychomotricien, …) qui établiront chacun un bilan. L’orthophoniste va analyser et évaluer la communication de l’enfant aussi bien au niveau de la qualité que de la quantité. D’autres tests sont également effectués afin d’écarter tout autre pathologie (neurologique, psychologique ou sensorielle) ainsi qu’un bilan psychométrique[5]. Ensuite une rééducation sera proposée. Il s’agit d’une rééducation orthophonique qui a pour objectif de permettre à l’enfant de vivre avec son handicap et de pouvoir suivre une scolarité plus apaisée, en fonction de la sévérité de sa dysphasie. Cette rééducation sera intensive et sur le long terme.

3.   Signes qui doivent alerter

Il y a des signes qui doivent alerter les intervenants scolaires et extrascolaires.  Au plus tôt les troubles sont dépistés, au plus tôt pourra commencer la prise en charge du jeune patient. Il est donc important de ne pas banaliser les signes qui peuvent faire penser à un retard de langage chez le petit enfant et de consulter.

3.1.1.    Chez le nourrisson

  • Il est silencieux (pas ou peu de babillements) ;
  • Il ne réagit pas à la voix et aux bruits ;
  • Les sons qu’il émet ne sont pas mélodieux ;

3.1.2.    Avant 3 ans

Une dysphasie ne se détecte pas en fonction du langage mais par rapport en fonction des facultés qu’a l’enfant de communiquer.

  • Il ne semble pas comprendre ce qu’on lui dit ou comprend mieux lorsqu’on lui fait des gestes ;
  • Il a le regard évitant (peu d’intérêt pour les autres) et est passif ;
  • Il répète systématiquement tout ce qu’on lui dit (écholalie) ;
  • Il est mutique (ne parle pas ou très peu) et communique par gestes ;
  • Il utilise un langage pauvre, uniquement des mots et non des phrases complètes (faim, soif, banane, …) ;
  • Il pose peu ou ne pose pas de questions ;
  • Il a des difficultés à se rappeler des comptines, des chansons, malgré une mémoire efficace (troubles mnésiques) ;
  • Il comprend bien, mais on ne le comprend pas ou on le comprend mal, ses phrases ne sont pas distinctes (il n’est compris que de son entourage) ;

3.1.3.    Après 3 ans

Les symptômes s’aggravent. Les parents qui mettaient le retard de langage sur un retard de développement peuvent maintenant difficilement les ignorer.

  • Le langage reste pauvre. Il s’exprime mal, voire pas du tout. Ses phrases sont courtes et mal structurées ;
  • Il ne comprend toujours pas ce qu’on lui demande, les consignes qu’on lui explique, fussent-elles simples ;
  • Son vocabulaire est très restreint, il utilise de courtes phrases mal construites avec peu de verbes et de pronoms ;
  • A l’école maternelle, il n’est pas attiré par le travail de la conscience phonologique (comptines, jeux de vire-langues, …) et a des difficultés à exprimer les notions d’espace et de temps ;

3.1.4.    A l’entrée à l’école primaire (première année ou CP),

Les symptômes sont plus difficiles à déceler. C’est surtout leurs impacts sur la vie sociale et scolaire de l’enfant qui sont perçus. Il y a une grande différence entre ses compétences intellectuelles et son expression orale.

  • Il a du mal à utiliser les pronoms personnels à bon escient ;
  • Il a du mal à parler distinctement et se révèle incapable de séparer les syllabes (conscience phonémique défaillante) ;
  • Il a du mal à utiliser des termes qui semblent plutôt génériques (ex : « insecte » est le terme générique de « papillon », « abeille », « mouche », « moustique », « sauterelle », … ;
  • Il prononce des phrases qui semblent incohérentes, avec des verbes non conjugués, des mots placés là aux mauvais endroits (ex : « veux manger pas »), etc.
  • Il confond les mots phonétiquement proches  (ex : loi, noix, roi, bois, soie, poids, …);
  • Il n’utilise que rarement les connecteurs logiques (car, comme, malgré, afin que, donc, d’abord, en deuxième lieu, puis, enfin …) ;

En cas de doute, en parler avec les parents et le CPMS[6] en Belgique, ou le RASED[7] en France

4.   Comment aider l’enfant à l’école et dans l’accueil extrascolaire ?

Il faut rapidement mettre des aménagements en place. D’abord, en veillant à comprendre ce qu’est la dysphasie. Celle-ci ne résulte pas d’un problème psychologique, physique ou intellectuel, pas plus que comportemental. Il s’agit d’un handicap et l’enfant n’est pour rien dans les difficultés qu’il présente au quotidien. Il ne faut en aucune manière le dévaloriser en lui rappelant ses difficultés, mais au contraire constamment l’encourager et le valoriser aux yeux de ses pairs.

L’enfant avec une dysphasie éprouve non seulement des difficultés à s’exprimer, mais il peut avoir également du mal à comprendre ce qu’on lui explique ou qu’on lui demande de vive voix. Il est donc indispensable d’adapter les méthodes pédagogiques à son trouble (et aux autres troubles présents dans la classe telles les dyslexies, dysorthographies, dyscalculies, dyspraxies, troubles de l’attention, du comportement, etc.) et donc de viser à devenir une classe (et une école) pleinement inclusive.

Une école inclusive met tout en place pour être un environnement propice aux apprentissages pour tous les élèves à besoins spécifiques. Un enfant avec un « dys » n’aime fort logiquement pas l’école. Il faut donc que la classe et l’école soient des environnements non stressants et qu’elles soient le seul lieu des apprentissages scolaires. Il y a donc lieu de bannir autant que faire se peut leçons et devoirs à faire à la maison.

Avoir des élèves avec des « dys » dans sa classe est une véritable chance. Cela donne du sens au métier d’un enseignant et cela lui permet de mettre en place des pratiques pédagogiques auxquelles il n’aurait jamais pensé (qui ne sont pas dans la culture de l’établissement scolaire) et qui vont lui être d’une aide certaine pour transmettre les savoirs à tous les élèves, même ceux qui n’ont pas de troubles spécifiques des apprentissages mais qui ont besoin de plus d’explications, de plus de temps, de plus d’aides. Les aménagements raisonnables doivent être introduits dans le but de devenir structurels et bénéficier à tous, quelles que soient leurs difficultés et leurs facilités. Ainsi, progressivement d’année en année, la classe (ou l’école) devient inclusive, et prête à accueillir de nouveaux élèves avec leurs spécificités.

Les collègues de l’école doivent connaître l’enfant, ses difficultés et la manière de l’aborder (professeurs de gymnastique, de cours confessionnels, de langue, de citoyenneté, ou autres). Ils doivent connaître et respecter les aménagements mis en place pour cet enfant. En cas de remplacement, un dossier reprenant toutes les informations le concernant, ainsi que la manière de l’aborder et de le soutenir dans ses apprentissages et la liste des aménagements raisonnables mis en place doit être à disposition du remplaçant. Un enfant avec une dysphasie est déstabilisé face à une situation nouvelle. Il y a  donc lieu de le rassurer au mieux. Il en va de même lors de changements de classes, avec le nouvel enseignant. L’idéal est de garder sa classe au moins deux ans d’affilée (que ce soit en primaire ou en secondaire), afin de minimiser le nombre d’enseignants et de pratiques différentes auxquels l’enfant sera confronté dans sa scolarité.

Il est également important de collaborer étroitement avec les parents et les intervenants qui pratiquent la rééducation afin de les informer des progrès réalisés, mais également d’obtenir des conseils de personnes compétentes en matière de dysphasie. La question de l’usage de l’informatique est à poser en fonction des difficultés de l’enfant.

Enfin, il est important de collaborer avec les autres élèves de la classe en expliquant clairement et régulièrement ce qu’est la dysphasie et les conséquences qu’elle a sur les apprentissages. Ils seront ses partenaires durant sa scolarité (amis, tuteurs, …). Il est important de veiller à ce que l’enfant avec une dysphasie soit parfaitement intégré et ne subisse ni moquerie, ni stigmatisation qui ne pourraient que le détruire plus encore.

5.    Pour conclure

Quel que soit le trouble des apprentissages, il n’y a pas de remédiation « miracle ». On ne guérit pas d’un trouble DYS, mais on peut apprendre à développer des techniques de compensation qui deviendront parfois une seconde nature.

Au plus les aides sont adaptées, au mieux elles vont aider à compenser les fonctions déficientes et à améliorer les apprentissages. C’est ainsi que le jeune pourra développer tout son potentiel et ne plus (trop) se trouver en situation de handicap en classe.

Annexe

Aménagements dits « raisonnables »

Cette liste est loin d’être exhaustive et doit être analysée avec les spécialistes qui effectuent la rééducation de l’enfant.  Elle résulte de la pratique de parents qui ont demandé la mise en place d’aménagements « raisonnables » dans les classes de leurs enfants, ainsi que de professionnels suivant les enfants. 

1.    De manière générale

  • L’enfant doit avoir confiance en vous et être heureux d’être dans votre classe. Cela implique de ne pas le juger (mais le féliciter et minimiser ou limiter les échecs) et d’établir un cadre bienveillant, ne pas le placer dans des situations dévalorisantes ;
  • Un enfant avec une dysphasie ne comprend pas l’humour ;
  • Il faut accepter sa lenteur et ses difficultés, reformuler à l’oral chaque consigne et s’assurer qu’il a compris ;
  • Il faut placer l’enfant en situation de réussite, l’évaluer formativement (sans notes) et positivement (ne pas barrer les erreurs mais mettre un P aux bonnes réponses, lui permettre de se corriger), en évitant toute compétition entre élèves, alléger les questions, lui donner plus de temps, limiter les productions écrites et accepter un style télégraphique ;
  • Affichez l’horaire de la journée et prévenez les enfants de tout changement d’activité et permettez-leur de prendre une petite pause, utilisez le programme avec des pictogrammes, des couleurs, des formes ;
  • Donner un modèle de procédures pour les apprentissages que l’enfant suivra tout au long de l’année ;
  • Fixer un objectif à la fois ;
  • L’encourager à demander quand il n’a pas compris ;
  • Alléger les tâches à faire en fonction des l’énergie supplémentaire qu’il doit dépenser par rapport à ses camarades, mais être exigeant sur le résultat ;
  • Evitez les tâches secondaires ou prenez-les en charge (avec tutorat, par exemple) : copie, découpages, … ;
  • L’aider à prendre les bons outils scolaires et veiller à ce que chaque cahier ou livre soit recouvert d’une couleur différente ;
  • Utiliser un cahier de communication avec des bandes velcro pour les pictogrammes, utiliser des couleurs pour les matières à revoir ;
  • Apprenez-lui à se repérer sur un calendrier (donnez-lui la « charge » de barrer progressivement les jours de l’année, par exemple), à lire l’heure, puis les minutes, … ;
  • Utilisez un « vision timer » (une horloge de compte à rebours) pour qu’il sache le temps qui reste) ;
  • Faites-lui régulièrement réciter les jours de la semaine, les mois de l’année. Ecrire la date au tableau chaque jour, toujours au même endroit ;
  • Ne le changez pas de place (ou alors avec son accord) car cela peut le perturber (dysphasie visuo-spatiale) ;
  • Utilisez des codes couleurs ou une numérotation de manière à structurer l’écrit ;
  • Faire du lien entre les apprentissages, rappeler succinctement les connaissances déjà acquises précédemment qui sont en lien avec le nouvel apprentissage ;
  • Utiliser les arts plastiques et favoriser l’expression de ses émotions par des thèmes libres. La difficulté à s’exprimer amène des frustrations, voire de la colère. Les arts visuel, manuel, ou corporel peuvent constituer une soupape binefaisante.

2.    Lorsque vous vous exprimez

  • De quelqu’endroit de la classe vous vous trouvez, assurez-vous toujours qu’il vous regarde quand vous parlez. N’hésitez jamais à manipuler des objets, à faire des gestes, à mimer, à montrer des photos, des schémas, à écrire au tableau, utilisez des synonymes, des pictogrammes (Bliss[8], Pecs[9], Grach[10], …), etc. Cela l’aidera mais cela aidera également d’autres élèves ;
  • Encourager les habiletés d’écoute (ne pas jouer avec ses outils, s’asseoir confortablement, regarder l’adulte, …) ;
  • Contrôlez le niveau sonore de la classe (évitez les sources de distractions, objets sur le bureau pouvant servir de jouets,) et placez l’enfant avec une dysphasie à côté d’enfants calmes, capables de le stimuler, loin des fenêtres et de la porte qui sont des éléments distrayants ;
  • Parlez lentement et distinctement en essayant d‘articuler au mieux. Insistez sur ce qui est important. Reformulez de manière à ce qu’il puisse comprendre encore mieux ;
  • Utilisez des phrases simples avec des mots courants et ne donnez jamais plus d’une consigne à la fois et laissez le temps à l’enfant pour intégrer la consigne, utilisez le même style de consignes ;
  • Ne pas utiliser de mots isolés, plus difficiles à comprendre que placés dans des phrases ;
  • En cas de consignes complexes, les décomposer et les expliquer progressivement durant l’apprentissage ;
  • Uniquement s’il le peut, demandez à l’enfant d’expliquer dans ses mots à lui le message que vous avez voulu faire passer. Cependant, l’enfant avec une dysphasie aura toujours du mal à s’exprimer et ce n’est à faire que s’il en a la capacité ;
  • Vous renseigner sur les moyens utilisés par les parents et l’orthophoniste pour communiquer (langue des signes, Makaton[11], pictogramme, méthode Borel-Maisonny, lecture labiale, …) afin d’utiliser une méthode connue de l’enfant ;
  • Ne pas tout lui mâcher. Il doit pouvoir progressivement, en grandissant, penser par lui-même, se souvenir des procédures apprises, … ;

3.    Lorsque l’enfant doit s’exprimer

  • Susciter des situations où l’enfant aura envie ou besoin de s’exprimer (faire semblant d’oublier de lui donner une feuille, à dire merci, …) ;
  • Les enfants avec une dysphasie ont un stock lexical faible. Il faut accepter la méconnaissance du mot et lui apprendre le terme exact, sans le forcer à répéter (sauf s’il est volontaire) ;
  • L’aider à trouver ses mots en lui donnant des indices ou en amorçant les phrases. L’inciter à décrire le mot qu’il cherche, dire à quoi il sert ou ce qu’il représente à donner sa définition ;
  • Reformuler ses réponses avec bienveillance ;    
  • Si cela lui permet de mieux se faire comprendre, favoriser la communication gestuelle, les mimiques, … ;
  • L’inciter à décrire le mot qu’il cherche avec ses mots (à quoi ça sert, qu’est-ce que cela représente ? …). Ne pas le forcer à répéter le mot une fois trouvé ou donné ;
  • Privilégier le sens du contenu plutôt que la forme et laisser la parole spontanée et naturelle ;
  • Laisser aller l’enfant au bout de son propos sans l’interrompre afin de ne pas perturber sa pensée ;
  • Prévenir ses parents des prochains apprentissages afin qu’ils puissent faire des recherches avec lui à la maison ;
  • L’inciter progressivement à s’exprimer par des choses simples : dire bonjour/au-revoir, appeler par le prénom ou le titre (madame, monsieur, …), donner des réponses de plus en plus élaborées, refuser poliment, etc. ;

4.    Lorsque l’enfant doit lire

  • Chaque fois que c’est possible, quand on l’interroge sur sa lecture, permettre à l’enfant de passer par le langage écrit ;
  • Si la lecture à haute voix devant la classe le gène, accepter la lecture à voix basse ;
  • Alterner la lecture avec l’enfant, chacun une phrase à tour de rôle ;
  • Expliquer le vocabulaire incompris et les expressions figurées (découvrir le pot aux roses, se jeter dans la gueule du loup, tomber dans les pommes, …)  ;
  • Relire le texte ensuite, afin qu’il ait un modèle correct ;
  • Répartir sur la journée la lecture par périodes courtes de 15 minutes maximum ;
  • Utiliser des couleurs ou des pictogrammes pour montrer le sens de la lecture, de gauche à droite (par exemple, feu vert à gauche et feu rouge à droite) ;
  • Laisser l’enfant choisir le thème des textes à lire. Il faut que ces thèmes lui soient connus. Lui fournir les textes à l’avance ; 
  • Privilégier un vocabulaire simple et connu de l’enfant, qui lui sera utile. Exercer régulièrement l’enfant à les lire. Augmenter progressivement le stock de mots ;
  • La poésie n’est pas évidente pour l’enfant. Il n’en comprend pas le sens et les tournures de phrases. Il faut donc la lui expliquer et, s’il en a la capacité, la lui faire apprendre une strophe à la fois. En tous cas, le sensibiliser à cet art et lui faire comprendre ce que sont des rimes ;
  • Utiliser une police d’écriture et une taille qui sont faciles à lire (voir le dossier sur la dyslexie) avec un interligne de 1,5 ;

5.    Lorsque l’enfant doit écrire

  • Ne pas différencier apprentissage de la lecture et de l’écriture qui doivent être simultanés ;
  • Proposer des textes à trous, questions à choix multiples, code couleurs (lui permettre de surligner les réponses et les questions dans deux couleurs différentes) ;
  • Limiter les dictées et privilégier les textes à trous. Complexifier progressivement la difficulté des phrases et des consignes ;
  • Utiliser des étiquettes de mots afin de pouvoir les classer en fonction de leur catégorie grammaticale (noms, verbes, adjectifs, articles, etc.). Prévoir des sous-catégories : noms propres et communs, de choses, d’animaux, de personnes, …) ;
  • Lui apprendre à structurer ses prises de notes ;
  • Limiter les lignes de copies et lui donner du temps ;
  • Lui conseiller de commencer par ce qui est le plus facile pour lui ;
  • En cas de longue copie, écrire dans son cahier à la place de l’enfant ;
  • Lui permettre d’écrire sur des feuilles à lignes largement espacées (au besoin en photocopier) ;
  • Lui fournir un cours photocopié, afin qu’il ne doive pas le recopier ;
  • Lui apprendre des stratégies de relecture en fonction de l’apprentissage (vérifier les terminaisons en conjugaison, les marques du pluriel, est-ce que tous les « blancs » sont complétés, …) ;   
  • Valoriser la créativité de ses rédactions plutôt que la forme ;

6.    Lorsque l’enfant doit mémoriser

  • Créer pour et, si possible, avec l’enfant des aide-mémoire très visuels, avec des couleurs, des schémas, des tableaux (abaques, conjugaisons, …), des listes thématiques  (vocabulaire, tables de multiplication, …) ;
  • Distribuer des photocopies claires et aérées, avec les codes couleurs utilisés en classe et des schémas qu’il connaît. Surligner les essentiels qu’il doit appendre (éviter la surcharge visuelle) ;

7.    Lorsqu’il fait d’autres apprentissages

7.1. En mathématique

  • La classification pose régulièrement des problèmes (ranger selon des formes, des poids, des tailles, des couleurs, …) ;
  • Choisir un code couleurs pour les abaques (une couleur par colonne), faire des paquets ;
  • Choisir des exercices ludiques pour les apprentissages qui le permettent (mesures, comptages, …) ;
  • La lecture des énoncés et le langage utilisé sont complexes pour lui. Il est donc nécessaire de simplifier le vocabulaire et d’expliquer les mots spécifiques à la mathématique (additionner, ôter, tous, …) tout en s’assurant qu’il a bien compris les notions ;
  • Toujours tenir compte de ses difficultés de langage. Ne pas lui demander de répondre par des phrases complètes mais se contenter de voir s’il a compris ;
  • Les tables de multiplications ne doivent pas être apprise par cœur. Lui donner une feuille les reprenant ;
  • Décomposez les informations lorsqu’il y en a plusieurs dans une phrase (utilisez des couleurs) ;
  • Il faut permettre à l’enfant de procéder par étapes tout en veillant à ce qu’il arrive chaque fois au bon résultat ;
  • Il doit pourvoir compter sur ses doigts et /ou utiliser la calculatrice ;
  • Lors de problèmes, les illustrer, faire des schémas pour permettre à l’enfant de comprendre mieux et organiser les étapes de la résolution ;
  • … ;

7.2. En histoire et géographie

  • Ne pas lui faire retenir de dates mais utiliser une frise historique (changer de couleur par période, ou par siècle) ;
  • Il en va de même pour les noms (de pays, de départements, de capitales, …). Confectionner pour lui des fiches qui seront ses aide-mémoire ;


[1] Etat d’AME numéro 21 «troubles spécifiques des apprentissages  http://ameds.free.fr

[2] Incapacité ou difficulté à utiliser correctement la syntaxe du langage. La dyssyntaxie se caractérise par des anomalies dans la construction de la phrase que l’on ne peut réduire à un défaut d’organisation syntaxique. Le sujet se trompe de syntaxe ou utilise les marques syntaxiques à la mauvaise place. http://definitions-de-psychologie.psyblogs.net/2017/

[3]  Manque de la capacité à construire correctement des phrases en utilisant les règles de grammaire ou les marques syntaxiques, ibid.

[4] Léa ESCOFFIER, 2017, La dysphasie, présentation d’un trouble peu connu, Faculté ALLSHS d’Aix-en-Provence

[5] Afin d’évaluer le fonctionnement intellectuel et le profil cognitif de l’enfant.

[6] Centre Psycho Médico Social

[7] Réseau d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté

[8] https://www.isaac-fr.org/outils/bliss/

[9] https://www.autismaide35.com/pictogrammes

[10] http://rnt.eklablog.com/pictos-grach-a108891218

[11] Le programme Makaton a été mis au point par Margaret Walker, orthophoniste britannique, pour répondre aux besoins d’un public d’enfants et d’adultes souffrant de troubles d’apprentissage et de la communication. Elle propose  une solution aux troubles du langage par la parole, les signes et les pictogrammes. https://www.makaton.fr/

L’école n’est pas faite pour les enfants ayant un handicap invisible

L’école n’est pas faite pour les enfants ayant un handicap invisible

L’école n’est pas faite pour les enfants de manière générale, et spécialement pour les enfants ayant un handicap invisible

Introduction

L’école inclusive a pour mission d’accueillir tous les élèves, quelles que soient leurs différences. Mais on peut très bien accueillir des élèves avec une différence significative sans s’en rendre compte. Lors de nos colloques des personnes de l’associatif (écoles de devoirs et associations en lien avec un handicap) nous interpellent régulièrement : « Il faudrait parler beaucoup plus des handicaps invisibles ». En effet, des élèves porteurs de handicaps ne sont pas pris en charge correctement dans nos écoles – ni au sein de l’extrascolaire – parce que les accueillants et enseignants ignorent tout simplement le.s handicap.s qu’ont certains enfants. Ces derniers, souvent, ne veulent pas en parler, par crainte de stigmatisation ou d’incompréhension.

Il faut savoir que 80 % des handicaps sont invisibles. La plupart arrivent au cours de la vie et ne sont pas toujours apparents. De ce fait, ils peuvent être mal compris. Les enseignants, ignorant les problèmes que cela pose aux élèves, se méprennent sur les capacités ou la volonté de l’élève et les risques d’échec sont fortement multipliés.  

Tous les enseignants n’ont pas fait une année d’orthopédagogie et il y a peu de chances pour qu’ils le fassent un jour. Il s’agit donc, non pas de les former aux handicaps invisibles, mais de leur donner l’information nécessaire à l’accueil et l’intégration des élèves à besoins spécifiques qu’ils ont en classe : maladies chroniques ou graves, handicaps, difficultés spécifiques d’apprentissage.

Le handicap invisible concerne-t-il beaucoup d’enfants ?

Il s’agit d’un problème important car, de ce fait, certains handicaps invisibles sont simplement niés. Des professeurs ne pensent pas à mettre en place des aménagements raisonnables. La déficience intellectuelle, les troubles comportementaux, les problèmes psychologiques ou psychiatriques, certains « dys » risquent d’être considérés, soit comme de la fainéantise, soit comme un défaut d’éducation. Les exemples ne manquent pas. Nous en recevons très régulièrement d’associations avec qui nous travaillons épisodiquement :

  • L’élève dyspraxique est un « cochon » qui ne sait pas (ou ne veut pas) écrire proprement ;
  • L’élève dyslexique risque de voir ses dictées ou rédactions commentées à haute voix devant toute la classe et ses points annoncés tout haut ;
  • L’enfant hyperactif est mal élevé et a des parents démissionnaires ;
  • L’élève ayant une déficience intellectuelle est « bête à bouffer du foin » ;
  • L’étudiante anorexique est responsable de son état car elle pourrait manger comme tout le monde ;
  • L’enfant phobique est un comédien ;
  • L’enfant avec un autisme (non détecté) est responsable s’il est rejeté par tout le monde, parce qu’ « il n’a qu’à faire comme tout le monde » ;

Il est évident que l’idée même que ces jeunes pourraient être en situation de handicap ne nous vient pas à naturellement à l’esprit. Il faut une solide formation ou une solide expérience pour pouvoir repérer ce que les principaux intéressés préfèrent taire, au risque de se voir stigmatisés. Et ce n’est pas avec trois journées annuelles de « conférences pédagogiques » qu’on va les sensibiliser à cela. D’autant plus qu’il n’y a pas que les enseignants qui pensent ainsi. Les directions d’écoles ne sont pas mieux formées et les CPMS ne sont pas d’un grand secours si personne ne les en informe ou ne demande leur aide. Ces élèves sont alors considérés comme autant d’éléments « perturbateurs » avec les conséquences que cela engendre.

Et c’est aussi valable pour d’autres différences, comme la précarité, le fait d’être né dans un milieu populaire, parlant une autre langue à la maison, d’être LGBTQI+, d’être gros·se, etc…

Comme s’y mettre ?

Commençons par adapter des locaux (et des écoles) afin de les rendre inclusifs

Si des efforts ont été faits pour rendre des classes et des bâtiments accessibles, il y a encore du travail pour permettre à tou·te·s les élèves d’y être en sécurité. Certains enfants malades ne sont pas pris en considération. Pensons spécifiquement aux enfants allergiques, asthmatiques ou ayant une mucoviscidose. S’il existe des craies sans poussière, toutes les écoles ne les utilisent pas. Il y a souvent des coins avec des tapis rarement aspirés, des tentures qui prennent la poussière et ne sont pour ainsi dire jamais lavées, des odeurs dangereuses pour la santé (feutres pour tableaux blancs contenant du toluène ou du xylène, hautement toxiques et très odorants), le nettoyage des classes se fait avec des produits industriels toxiques qui perdurent pendant plusieurs jours… jusqu’au nettoyage suivant.

Au niveau bruit, là encore il y a des choses à améliorer. Certains de ces bruits sont internes à la classe et sont réverbérés par les plafonds et murs. Côté fenêtre, il y a souvent une cour de récréation avec les bruits qui vont avec (récréation des autres sections, cours de gymnastique, …). Cela perturbe les enfants avec un TDA, hyperactifs, malentendants, stressés, ayant une déficience intellectuelle, qui ont besoin de calme, etc. Idem pour les réfectoires dont le nombre de décibels rivalise avec celui d’un avion au décollage, les salles de gymnastique qui réverbèrent les cris des jeunes sportifs. Si certains professeurs d’éducation physique se mettent des bouchons d’oreilles, ce n’est pas le cas des enfants.

Le casque anti-bruits peut être un emplâtre, mais difficile à porter en sport. Il faut surtout ne plus se contenter d’une jambe de bois. Cela nécessitera des investissements qui doivent être programmés sur quelques années.

Les cours de récréation doivent être apaisées. Trop souvent, elles sont monopolisées par les « footballeurs », ne laissant que les côtés aux autres élèves (qui doivent quand même essayer d’éviter les ballons dans la figure). Certains de ceux-ci n’y trouvent pas leur place à cause d’un handicap invisible. Ils auraient besoin de calme, d’endroits où pouvoir s’asseoir, s’isoler, jouer calmement, simplement parler, … Des initiatives ont vu le jour pour « dégenrer » les cours de récréation. C’est à encourager. Même si l’idée de départ est de permettre aux filles et aux garçons de profiter de l’intégralité de l’espace, cela bénéficiera inévitablement aussi aux enfants à besoins spécifiques. 

La pédagogie universelle (sans dire le mot)

Les profs n’aiment pas qu’on leur fasse la leçon et nombre d’entre eux attrapent des boutons quand ils entendent le mot « pédagogie ». Autant ne pas (trop) leur en parler. Ils pensent tous que ce qu’ils font est très bien et ceux qui les bassinent avec Freinet, Montessori ou les pédagogies coopératives (ne parlons même pas de l’Universelle) ne sont que des « pédagogistes ». Il vaut donc mieux ne pas les prendre de face, mais par la bande. On pourra parler de pédagogie quand ils seront dans la dynamique. En fait, elle sera incontournable. Une pédagogie active est un doit de l’élève.

Peu d’écoles ou de classes sont inclusives. Le message à faire passer est que ce n’est pas très compliqué de le devenir et que c’est bénéfique pour tout le monde, enseignant compris. Le monde ne s’étant pas fait en un jour, il faut encourager les classes et les écoles à le devenir progressivement en prenant appui sur les aménagements raisonnables qui sont obligatoires et en les rendant universels[1].

Chaque année, dans toutes les classes, il y a des élèves à besoins spécifiques. Si certains « dys » reviennent fréquemment, au fil des ans de nouvelles difficultés spécifiques des apprentissages se présentent.

L’idée est de pérenniser chaque aménagement raisonnable, tout en en faisant bénéficier tous les élèves. Donc en les rendant u-ni-ver-sels. La première année, il n’y aura que quelques aménagements à mettre en place, tout en sachant qu’ils profiteront aussi aux élèves des années suivantes, car ils doivent devenir structurels. L’année suivante, il suffira d’en ajouter quelques-uns en fonction des élèves présents. Et ainsi de suite, d’année en année jusqu’à ce que la classe et/ou l’école soient enfin sur le chemin de l’inclusion. Nous disons « sur le chemin », car l’inclusion n’est jamais terminée.

Cela a l’avantage de permettre aux enseignants à se former progressivement, en fonction des spécificités de leurs élèves du moment. De même, ils ne se sentiront pas surchargés par de nouvelles pratiques à acquérir. Enfin, ils pourront se rendre compte progressivement de l’intérêt de devenir inclusifs, tant sur le plan des apprentissages, que sur le fait que cela va faciliter leur métier et non le surcharger. Ils seront moins confrontés à l’échec.

Concrètement, comment peut-on devenir inclusif ?

LePacte pour un enseignement d’excellence pousse les écoles à devenir inclusives. Si toutes les écoles n’ont pas repris cet item dans leurs plans de pilotage. Elles peuvent toujours le rajouter. Les DCO (Délégués aux Contrats d’Objectifs) et les DZ (Directeurs/trices de zone) devraient avoir pour mission de pousser toutes les écoles à aller dans ce sens.

Les Pôles territoriaux sont un nouvel outil qui doit permettre aux écoles de devenir plus inclusives. Si, pour le moment, ils sont dans une phase transitoire, ils sont cependant opérationnels. Etant encore peu connus, ils sont trop peu sollicités. Raison de plus pour en profiter et faire appel à l’expertise de ces professionnels de l’inclusion pour qu’ils viennent conseiller les enseignants dans une école qui décide de devenir plus inclusive.

  1. Informer les enseignants, en prenant exemple sur le Livre Blanc[2]. Prévoir des brochures explicatives d’une pathologie, d’un handicap, d’un trouble spécifique des apprentissages, mais aussi de situations de vie difficiles à vivre pour les élèves (perte d’un proche, pauvreté, comment communiquer avec un parent illettré, sur la fracture numérique, élève maltraité, LGBTQI+, …)
    1. Expliquer de quoi il s’agit ;
    1. Quelles sont les conséquences sur la vie de l’élève ;
    1. Quelles sont les conséquences sur la scolarité de l’élève ;
    1. Que mettre en place (liste non exhaustive d’aménagements raisonnables) et avec qui (professionnel·le qui aide l’enfant ou la famille et qui doit participer à la réflexion sur les aménagements raisonnables nécessaires) ;
    1. Comment sensibiliser les pairs à la situation de handicap de leur camarade (outils existants, sites Internet) ;
    1. Une liste d’associations/structures de référence ou qui peuvent venir en aide ;
    1. Des témoignages d’enfants, de familles, d’enseignants, montrant que c’est possible et que cela marche.
  • Encourager à l’adaptation des bâtiments et cours de récréation à l’accueil de toutes les différences physiques et intellectuelles. Prévoir des lieux de repos et d’isolement si un·e élève en éprouve le besoin. Avoir des toilettes toujours propres (!!!) et accessibles, des éviers dans toutes les classes, des fontaines d’eau dans la cour, des bancs, des espaces de jeux calmes, …
  • Adapter les règlements d’ordre intérieur à l’aspect inclusif de l’école. Autoriser, par exemple, d’aller aux toilettes en fonction des besoins, à boire et manger même pendant les cours, à s’habiller en fonction de ses envies mais également de ses besoins, la possibilité de rester en classe aux récréations, prévoir qu’un·e élève pourrait arriver en retard en raison de son handicap invisible sans qu’iel soit sanctionné·e mais reçoive de l’aide pour rattraper son retard ou se mettre en ordre, …
  • Prendre connaissance du Mémorandum pour une Ecole inclusive[3] et en appliquer ce qui relève des missions et compétences de l’école.

C’est le premier pas qui coûte.

Se lancer dans une classe ou dans une école inclusive, c’est un changement de paradygme. C’est se rendre compte d’abord que tous les élèves sont différents, mais aussi qu’ils sont tous capables. Qu’il n’y a pas d’élèves qui ont l’intelligence de la main quand d’autres auraient celle du cerveau ou seraient doués pour les arts. C’est le postulat d’éducabilité[4]. Si on n’est pas convaincu de cela, alors il vaut mieux ne pas s’y mettre et rester dans ses croyances moyenâgeuses. Au moins les familles sauront à quoi s’attendre. A peu de choses, en somme.

Par contre, si on postule que c’est exact, que tout élève est bel et bien capable d’apprendre les matières enseignées par l’école, alors on peut commencer. Les aménagements raisonnables que l’on rend universels nous y aideront. Commençons par supprimer le superflu :  les devoirs et les examens (et autres interros). Les devoirs d’abord parce qu’il a été démontré par la recherche qu’ils sont au mieux inefficaces (ils ne font pas progresser les élèves), au pire contre-productifs (ils bouffent le temps libre aux élèves et leur retire ce droit élémentaire, déchirent les relations familiales et prennent du temps à l’enseignant qui doit les corriger et ne peut pas être disponible pour les élèves qui ont besoin d’aide).

Ensuite, les examens car eux, bouffent le temps d’enseignement auxquels ont droit les élèves. Cela peut aller jusqu’à 40 % de l’ensemble de l’année scolaire en primaire et jusque 60 % du temps en secondaire). Ensuite, il est impossible d’évaluer avec des points[5].

On a ainsi gagné du temps pour évaluer formativement (Article 15 du Décret Missions, 1997) et pour mettre des aménagements raisonnables à disposition de tous, dont le tutorat est, bien évidemment, la pierre angulaire. Cela soulage énormément les enseignants et est un bénéfice énorme pour ceux qui ont besoin d’un complément d’explications. On intègre alors des élèves avec des handicaps plus lourds, comme les déficiences intellectuelles, les élèves mutiques ou avec comportement difficile. Ce n’est plus un enseignant qui intègre, mais une classe d’enseignants. Et on adapte les apprentissages à ces élèves qui ne savent pas apprendre la même chose que les autres, mais qui savent apprendre quand même. Et bien plus qu’on ne pensait au départ.

La pédagogie se met alors lentement en place, selon le choix de l’école (Conception Universelle des Apprentissages, Pédagogie Freinet, Montessori, Pédagogie de la Coopération, Pédagogie par Projets, … etc.) et le niveau de connaissance de tous les élèves augmente, tout comme leur soif d’apprendre. Ils deviennent solidaires, donc citoyens. Savent vivre avec toutes les différences. Et une fois adultes, ils n’auront qu’un désir, celui de rendre la société plus juste. Et l’école aura, enfin, rempli sa mission.


 

[2] https://www.liguedroitsenfant.be/621/livre-blanc/

[3] Parution prévue le 2 décembre 2022. Note complétée 07/12/22 : https://www.liguedroitsenfant.be/7954/memorandum-pour-une-ecole-inclusive-4/

[4] https://www.liguedroitsenfant.be/2813/en-marche-vers-une-ecole-inclusive-le-principe-deducabilite/

[5] Lire : https://www.liguedroitsenfant.be/2838/etude-les-notes-a-lecole/

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