L’EVRAS est un Droit de l’Enfant

Introduction

La Ligue des Droits de l’Enfant a à cœur de porter le combat pour l’égalité absolue entre les filles et les garçons, mais également de porter la lutte contre le sexisme, l’homophobie et la transphobie. Il est donc indispensable, pour nous, que l’Ecole éduque les élèves dès le plus jeune âge au respect de toutes les différences de genres.

Il y a quelques mois, des groupuscules identitaires, religieux intégristes islamistes et catholicistes, et des influenceurs complotistes anti-féministes, anti-IVG, antisémites et homophobes ont lancé nombre de Fake news sur l’EVRAS (l’Education à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle), visant à discréditer ces quatre malheureuses petites heures d’animation données sur l’ensemble des treize années d’enseignement obligatoire. Celles-ci ne seront obligatoires seulement qu’en sixième primaire et en quatrième secondaire ce qui, disons-le tout de suite, est beaucoup trop peu.

Faire peur aux autres parents, parce qu’on a peur soi-même, tel est le combat que portent ces détracteurs. Mentir à tout crin pour tenter de faire adhérer d’autres citoyens à leur cause. Prétendre indûment défendre les Droits de l’Enfant quand, précisément, l’EVRAS EST un Droit de l’Enfant.

Qui sont ces opposants ? Le journal de RésistanceS[1] nous explique que « Plus de 90 % portaient un dress code islamique. Avec eux, quelques « gilets jaunes » et des antivax. Mais également deux dirigeants d’extrême droite et d’autres militants nationalistes. ». D’une part, des islamistes d’extrême droite (salafistes, frères musulmans, Diyanet, …) qui veulent installer la Charia en Europe et, donc, imposer la soumission aux femmes européennes (et le voile par la même occasion). D’autre part, des européens d’extrême droite qui sont prêts à s’allier à tout et n’importe qui, même à leurs pires ennemis, pour garantir que l’éducation sexuelle de leurs enfants soit la même que celle qu’ils ont reçue – pour peu qu’ils en aient reçu une – c’est à dire machiste, sexiste et homophobe. Pour eux, les femmes ne sont pas et ne peuvent pas devenir les égales des hommes ! Le culte de la « famille traditionnelle » est tenace dans les milieux d’extrême droite.

Quel est ce Droit à l’EVRAS ? Comprendre les enjeux pour porter le combat.

Le 18 décembre 1979 les Nations Unies ont adopté la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes[2]. Cette Convention impose aux Etats de « modifier les schémas et modèles de comportement socio-culturel de l’homme et de la femme en vue de parvenir à l’élimination des préjugés et des pratiques coutumières, ou de tout autre type, qui sont fondés sur l’idée de l’infériorité ou de la supériorité de l’un ou l’autre sexe ou d’un rôle stéréotypé des hommes et des femmes ».

Les « préjugés » et les « pratiques coutumières » sont précisément celles que soutiennent, consciemment ou non, les adversaires de l’EVRAS en manifestant contre celle-ci. L’éducation des jeunes à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle a pour objectif de modifier ces schémas. Malheureusement, il est illusoire de croire que quatre heures d’EVRAS sur treize années éliminera toutes les formes de discriminations basées sur le genre et/ou les préférences sexuelles.

Le Droit des enfants à recevoir une éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle est donc un devoir pour les états signataires de cette Convention.

Le Comité des Droits de l’Enfant, quant à lui, s’est penché sur la question et a précisé en 2016 que L’adolescence peut être synonyme d’exposition à tout un ensemble de risques, que l’environnement
numérique renforce ou accentue, parmi lesquels (…), les violences et la maltraitance, l’exploitation sexuelle ou économique (…)[3] 
. Le Comité des Droits de l’Enfant a émis des recommandations aux gouvernements au sujets des jeunes à risques, à commencer par les filles qui sont victimes de discriminations, d’inégalités et de stéréotypes qui aboutissent à des violations de leurs droits, parmi lesquelles les mariages d’enfants, les mariages forcés, les grossesses précoces, les mutilations génitales féminines, les violences physiques, psychologiques et sexuelles (…).


Certains garçons doivent également être protégés. Les conceptions traditionnelles de la virilité et les
normes relatives au genre qui sont associées à la violence et à la domination peuvent mettre en péril
les droits des garçons
. Les adolescents handicapés sont exposés de manière disproportionnée au risque de subir des violences physiques et sexuelles et d’être victimes de mariages d’enfants ou de mariages forcés. Enfin, les adolescents homosexuels, bisexuels, transgenres et intersexués sont, dans des cas extrêmes, victimes d’agressions sexuelles ou de viols, voire d’homicides.


Le Comité des droits de l’enfant conclut en disant « Il conviendrait d’inclure dans les programmes
scolaires obligatoires et de rendre accessible aux adolescents non scolarisés une éducation à la
santé sexuelle et procréative qui soit inclusive, complète et adaptée à l’âge des adolescents, fondée sur des faits scientifiquement établis et sur les normes relatives aux droits de l’homme et qui ait été élaborée avec le concours d’adolescents (…)
». En cela, la Fédération Wallonie-Bruxelles en respecte pleinement les directives.

L’EVRAS est une obligation pour toutes les écoles depuis 2012. Il a alors été introduit dans l’article 8 du Décret Missions qui depuis précise que « pour remplir les missions prioritaires (…), les PO doivent veiller à ce que chaque établissement éduque (…) au respect de la personnalité et des convictions de chacun, au devoir de proscrire la violence tant morale que physique, à la vie relationnelle, affective et sexuelle et mette en place des pratiques démocratiques de citoyenneté responsable au sein de l’école[4] ». Les écoles doivent d’ailleurs rendre des comptes et expliquer ce qu’elles ont fait en matière d’EVRAS. Il ne s’agit donc pas pour elles de se contenter de faire venir des spécialistes de l’EVRAS pour faire cette éducation, mais que chaque Pouvoir Organisateur doit mettre en place ces recommandations au quotidien, dans toutes les classes. Dès lors, tous les professionnels de l’Ecole sont concernés, d’autant que des discriminations basées sur le genre peuvent se produire à chaque instant de l’année. A commencer par l’école et son règlement des études concernant l’accoutrement des élèves.

L’EVRAS est trop peu donné. Quels en sont les conséquences ?

Pourquoi cette haine subite de l’EVRAS ?Il y a probablement autant de raisons qu’il n’y a d’adversaires de l’EVRAS. Le discours des anti-EVRAS suinte la haine, le racisme, l’IVG-isme, le sexisme et toutes les phobies qui ont trait à la sexualité. Sans compter les haines raciales qui coulent également des harangues de ces groupes. Il est évident que les cours d’EVRAS auront comme effet de déconstruire ces discours. En fait, c’est bien de cela qu’ils ont peur. Peur que leurs propres enfants rejettent leurs idées et les haines qu’elles transportent, pour choisir en toute indépendance la vie qu’ils vont mener.

Aujourd’hui, il est possible de quantifier ce que le manque d’Evras apporte, à notre société et à la vie des enfants et des futurs citoyennes et citoyens qu’ils vont devenir.

L’homophobie et la transphobie

Les membres de ces groupes d’extrême-droite sont clairement LGBTQIA+-phobes. Or, il est de notoriété publique – et ces groupes le savent parfaitement – qu’en Belgique, la discrimination basée sur l’orientation sexuelle est interdite par la loi antidiscrimination. Lors de la manifestions fasciste à Bruxelles, le 17 septembre 2023, la Rainbow House a été nommément attaquée par ces groupuscules fascistes. « Plusieurs pancartes visant les personnes transgenres (considérées comme « anormales ») des drag-queens, et défendant « un papa et une maman = des enfants » ont également été brandies parmi les manifestants. Le « Lobby LGBT » a été pointé du doigt pour avoir acquis « des droits qui n’ont ni queue ni tête »[5].

Rappelons-leur – et nous en sommes fiers – que la Ligue des Droits de l’Enfant a été la première association « généraliste » à devenir membre de la Rainbowhouse. Précisément, au nom des Droits de l’Enfant. Toute association défenderesse des Droits fondamentaux se doit de porter le combat contre l’homophobie et la transphobie.  Pourquoi donc ? Parce qu’être né LGBTQIA+, ce n’est pas un choix. Personne ne choisit de naître fille, garçon ou se sentant concerné par une des lettres de l’acronyme LGBTQIA+. Par contre, c’est un Droit. Actuellement, ce droit est bafoué par trop de jeunes qui n’ont jamais été formés au respect de toutes les différences.

Unia ne constate pas d’augmentation du nombre de signalements liés à l’orientation sexuelle, mais les actes de haine contre les personnes LGBT sont devenus largement plus violents. Sur 54 dossiers clôturés en 2022, près de la moitié (44%) concernaient de la violence physique. Selon Patrick Charlier, co-directeur d’Unia, « Il y a une sorte de réaction plus viscérale qu’intellectuelle lorsque les personnes sont confrontées à l’homosexualité : lorsque des hommes se donnent la main, des femmes s’embrassent… Les agresseurs se sentent insécurisés parce que cela perturbe les représentations genrées que l’on a acquis globalement dans la société et ils réagissent par la violence parce qu’ils ne le supportent pas. ».

Selon une étude française, les agresseurs homophobes sont des hommes jeunes de 18 à 30 ans, qui agissent en bande[6]. Dans la majorité des cas, il s’agit d’un homme (78%) de moins de 30 ans (75%), qui sévit sous l’influence d’un groupe (61%), même si peu de victimes rapportent avoir été agressées par plusieurs personnes en même temps (21%). Ces jeunes sortent de l’enseignement obligatoire ou supérieur et sont au début de leur vie d’adulte. Ils n’ont très probablement pas été éduqués, ou peu été éduqués durant leur cursus au respect de toutes les différences qu’apporte l’EVRAS.

Le manque de formation EVRAS va beaucoup plus loin. Il concerne toutes les filles, les femmes, mais aussi des garçons, des hommes.

L’anti-féminisme

Trop souvent, l’éducation familiale fait une différence entre les hommes et les femmes, entre les filles et les garçons. Les stéréotypes de genres sont trop présents : réflexions en apparence banale, jouets genrés, « pour filles » ou « pour garçons », parents qui reproduisent les rôles traditionnels, demandant aux filles de coopérer, alors qu’ils encouragent les garçons à performer. Sournoisement, les stéréotypes sexuels s’immiscent au sein des familles. Hypersexualisation, banalisation de la violence, sexisme, phallocratie font leur bout de chemin dans la tête des enfants dès leur plus jeune âge.

La violence faite aux femmes est trop peu prise en compte. En septembre 2023, Stop Féminicide[7] avait déjà recensé 21 féminicides. Et c’est un chiffre a minima. Les scènes de violences sont quotidiennes ; chaque année, plus de 45 000 dossiers de violences faites aux femmes sont enregistrés par les parquets[8].

Les couples ne sont pas épargnés par la violence sexuelle. Selon Amnesty, en 2010, l’Institut pour l’Égalité des Femmes et des Hommes estimait qu’une femme sur sept avait été confrontée à au moins un acte de violence commis par son (ex-) partenaire au cours des douze mois précédents. Une femme sur cinq a déjà subi un viol. Chez les jeunes, cela monte même à une personne sur quatre.

En outre, 23% des femmes ont subi des relations sexuelles forcées par leur (ex-) partenaire et 48% des victimes d’agression sexuelle l’ont été pour la première fois avant leurs 19 ans.

Une étude de l’ONG Plan International[9] révèle l’ampleur du harcèlement sexuel dans les villes. Selon celle-ci, peu importe l’âge ou l’identité de genre, le harcèlement sexuel concerne tout le monde : 91 % des filles et 28 % des garçons interrogés en ont déjà subi. Une fille sur trois a subi des attouchements non consentis. Plus de 29 % des signalements concernent la rue, 16 % les lieux de loisirs, et 14 % les transports publics. Plus alarmant : plus d’un signalement sur dix concerne le chemin de l’école.

Pire encore, le manque de formation EVRAS pendant la scolarité fait qu’un homme sur deux estime qu’une victime peut être en partie responsable de son agression. Près de 20% des jeunes pensent qu’ils ne peuvent pas être accusé de viol au sein du couple. Un jeune sur trois estime que si une personne ne dit pas explicitement « NON », cela ne peut pas être un viol.

Ces violences concernent aussi les hommes. L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes estimait en 2017 que si 33,7% des femmes ont subi des violences conjugales, il en allait de même pour 14,9% des hommes.

L’éducation familiale n’est pas gage de qualité

La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes de 1979 impose également aux Etats de faire en sorte que « l’éducation familiale contribue à faire bien comprendre que la maternité est une fonction sociale et à faire reconnaître la responsabilité commune de l’homme et de la femme dans le soin d’élever leurs enfants et d’assurer leur développement, étant entendu que l’intérêt des enfants est la condition primordiale dans tous les cas. »

Or, même s’il n’y a pas d’étude démontrant la qualité ou non de l’éducation sexuelle dans les familles, notre société ne peut pas se reposer uniquement sur l’éducation familiale. S’il en est de grande qualité, il arrive trop souvent qu’il n’y ait pas d’éducation familiale, ou – pire encore – elle soit erronée et n’obtienne comme résultat, tous milieux sociaux confondus, qu’à rendre les filles soumises à leur futur mari et à faire des petits garçons, de « grands machos ». Encore faut-il que les filles aient la possibilité de choisir leur futur compagnon ou leur future compagne, ce qui n’est jamais garanti.

Même s’il n’y a aucun recensement, les mariages forcés existent[10]. Le phénomène concerne probablement des cas « invisibles », c’est-à-dire cachés dans les familles qui, par définition, ne se déclarent pas, ou auxquels les services sociaux n’ont pas accès comme chez les Pakistanais, les Afghans, les Albanais ou les Roms. La réalité démographique bruxelloise explique que les cas recensés concernent essentiellement les populations issues de l’immigration turque et marocaine qui représentent les groupes les plus importants.

On sait trop que l’homophobie, la transphobie, les discriminations vécues par les femmes viennent trop souvent d’une éducation parentale déficiente. Dans certaines familles où les différences de genres sont exacerbées, les haines sont transmises aux enfants, qui les intègrent, puis les reproduisent par mimétisme. Selon La Ligue des Droits de l’Enfant, c’est à la société d’éduquer ! Son outil principal est l’Ecole, mais aussi toutes les institutions et associations subsidiées, comme l’Accueil Temps Libre, les écoles de devoirs, les plaines de vacances, etc. Or, ces lieux qui accueillent les enfants et les jeunes n’éduquent que trop peu au respect des différences de genres.

Comment agir ? Outiller les enfants pour se défendre de situations incestueuses

L’inceste, ce mot banni au sein de trop de familles, est malheureusement une réalité dans notre société. Les chiffres sont effrayants et font froid dans le dos. La Belgique n’ayant pas de recensement, il faut se tourner vers la France ou le mouvement anti-inceste est plus avancé. L’association Face à l’Inceste[11] dénombre 6,7 millions de personnes qui en ont été ou en sont victimes, soit 10% de la population française.

En Belgique, SOS Inceste a reçu en 2019 plus de 1.200 appels[12], soit trois à quatre par jour en moyenne. Avec le confinement, ce nombre a explosé. On estime aujourd’hui que deux à quatre élèves par classe sont concernés. Seulement 10% des victimes portent plainte. Malheureusement, en Belgique, 70% de ces plaintes sont classées sans suite.

C’est très difficile de dénoncer un parent ou un ami de la famille incestueux. Les enfants n’ont pas les clefs en main pour dénoncer, pour se défendre et se libérer de l’emprise de leur.s abuseur.s. Comme, simplement, savoir que ce qui se passe est interdit, que ce n’est pas simplement de la tendresse et encore moins de l’amour. Pour une victime, dénoncer un inceste c’est briser le silence au risque de bouleverser complètement sa famille ou une famille proche. Les victimes se réfugient alors dans l’amnésie. Cela leur permet de survivre, même en restant au contact de leur agresseur.

Chaque école, chaque classe est concernée

Nous l’avons vu, deux à quatre élèves sont concernés dans CHAQUE classe. Depuis la maternelle, jusqu’à la fin de l’enseignement obligatoire. Si la famille ne protège pas l’enfant, seule l’Ecole peut lui apporter les clefs pour comprendre ce qui se passe, pour réaliser qu’il est victime et non complice et, enfin, pour lui donner les outils et la force pour dénoncer, le cas échéant, la situation qu’il vit. L’Ecole, c’est le lieu où se donne l’EVRAS. Les Centres de planning familiaux, les CPMS, mais surtout les instituteurs et les professeurs toutes branches confondues, ont l’obligation décrétale[13], mais surtout morale, de former leurs élèves à une vie relationnelle de qualité. Mais également à une vie affective et, quand cela se présente, sexuelle.

Tous les Pouvoirs Organisateurs, de toutes les écoles, se doivent de mettre en place un plan EVRAS, si possible avec l’aide des Plannings familiaux et des CPMS. Il ne s’agit pas de créer un cours spécifique teljour et telle heure par semaine, mais de former, tout au long des cursus, chaque future citoyenne et futur citoyen, afin qu’elle ou il soit capable d’avoir des relations sociales de qualité, des relations affectives respectueuses de l’autre et qui respectent toutes les différences de genres. Tout en l’outillant pour pouvoir se défendre, et en la ou le formant à lutter contre l’anti-féminisme, l’homophobie et la transphobie, ainsi que toutes les phobies raciales.


[1] https://resistances-infos.blogspot.com/2023/09/salafistes-musulmans-et-cathos-dextreme.html

[2] https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/convention-elimination-all-forms-discrimination-against-women, consultée le 26 septembre 2023.

[3] https://digitallibrary.un.org/record/855544/files/CRC_C_GC_20-FR.pdf

[4] Décret Missions, Article 8, 9°, http://www.enseignement.be/index.php?page=23827&do_id=401

[5] LE SOIR, Publié le 18/09/2023 à 00:00, par Fanny Declercq

[6] https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/05/13/homophobie-les-agressions-sont-le-plus-souvent-le-fait-d-hommes-en-groupe_5461217_3224.html

[7] http://stopfeminicide.blogspot.com/

[8] https://www.amnesty.be/campagne/droits-femmes/les-violences-conjugales/article/chiffres-violence-conjugale

[9] https://www.planinternational.be/sites/default/files/booklet_safercities_fr_2021.pdf

[10] https://igvm-iefh.belgium.be/sites/default/files/downloads/Mariages%20forces.pdf

[11] https://facealinceste.fr/

[12] https://moustique.lalibre.be/actu/2021/02/15/linceste-une-si-discrete-horreur-187993

[13] Cf Décret Missions

De l’espoir à la désillusion face à un tronc commun qui s’effrite

De l’espoir à la désillusion face à un tronc commun qui s’effrite

La Ministre Glatigny détricote l’espoir d’une Ecole de la réussite de tous

Alors que le monde de l’enseignement se mobilise massivement ce 26 novembre face à diverses mesures d’économie budgétaires sur l’éducation, la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire relaie ses inquiétudes face à diverses mesures prises ou envisagées qui douchent l’espoir d’un enseignement enfin réellement au service de l’égalité entre élèves et de la lutte contre l’échec scolaire. Exclusions de jeunes « en retard » de l’école sans leur en donner le choix ni garantir l’accompagnement, maintien du caractère certificatif du CEB et augmentation du seuil de réussite à 60%, renforcement de mesures de sélection durant le parcours des élèves, fragilisation du tronc commun : plus que jamais, le politique semble vouloir conjuguer éduquer avec reléguer.

Il y a 10 ans déjà : la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire appelait à la fin de l’école de la relégation

Dans la perspective des élections de 2014, face au terrible constat que notre enseignement en FWB était à la fois le champion du redoublement, de relégation et des systèmes éducatifs de l’OCDE qui produisent le plus d’inégalités scolaires, la Plateforme de lutte contre l’échec scolaire, soutenue par de nombreuses associations de la société civile, ainsi que par le Délégué Général aux Droits de l’Enfant et des académiques, appelait les femmes les hommes politiques à affirmer leur volonté d’évaluer à 360° la situation de l’enseignement en FWB avec toutes ses composantes, en vue d’une refondation de l’École : objectivation des données, identification des freins aux changements, débats pluriels sans tabous pour une évolution globale, concertée et planifiée du système éducatif dans l’objectif de passer d’une école de la relégation et de l’échec massifs à une école de la réussite pour tous.

La suite, on la connait. Les Ministres Milquet puis Schyns (CDH) ont ouvert le grand chantier qui a abouti à l’élaboration de deux rapports fondamentaux : un état des lieux, sans concessions, partagé par l’ensemble des acteurs de l’école mis au travail durant deux années, et une vision d’une école du XXIe siècle. Une feuille de route qui se déroulait sur plusieurs législatures, l’avis numéro 3 du Pacte pour un enseignement d’excellence, a été adoptée par le gouvernement pour reformer notre système éducatif en profondeur. Le projet phare, qui sous-tendait toutes les autres réformes s’y articulant : l’instauration d’un nouveau tronc commun polytechnique jusqu’à l’âge de 15 ans dans le but de fournir à tous les élèves le même socle de base de connaissances et compétences – ce qui impliquait la suppression du caractère certificatif de l’épreuve du CEB.

Après plusieurs entorses, le détricotage

Une sérieuse entorse à ce principe avait déjà été actée sous les précédentes législatures, en ne supprimant pas le caractère certificatif de l’épreuve du CEB. Concrètement, cela signifie que pour poursuivre son parcours dans le tronc commun, il faut obtenir un diplôme. Mais pourquoi maintenir un couperet au milieu d’un parcours qui se veut continu et commun à tous les élèves, alors que le concept même de tronc commun implique de progresser ensemble tout au long de celui-ci, et qu’il y a de toute façon des évaluations qui permettent à l’enseignant de vérifier la progression de l’élève et d’adapter son soutien pédagogique pour permettre l’acquisition de la matière.

La brèche était laissée ouverte, Valérie Glatigny, nouvelle Ministre de l’Education, s’y est engouffrée. Les mesures qui vont être votées au Parlement cette semaine, et de nombreuses autres qui figurent dans l’accord de gouvernement, préfigurent le retour de la vision d’une école sélective, où la réussite n’est pas un objectif pour tous et où on estime que les élèves trop en retard ou en difficultés doivent être parqués, qui dans le spécialisé[1], qui dans une 1re différenciée, qui dans l’enseignement qualifiant… voire même pour les plus en retard, exclus de l’enseignement.

Le projet de décret-programme actuellement à l’examen du Parlement prévoit que les élèves majeurs de 3e et 4e secondaire qui n’auraient pas été régulièrement inscrits seront exclus de l’enseignement obligatoire. Les élèves qui ont déjà un CESS, pareil : il leur sera impossible de s’inscrire pour une spécialisation en 7e technique de qualification ou professionnelle et ils seront dirigés vers la promotion sociale et le travail. Et le futur est pavé des mêmes « bonnes » intentions : nouvelle épreuve externe « CLE » qui compterait pour le bulletin en 3e primaire, élévation du niveau de réussite des épreuves externes à 60%, maintien (jusque quand ?) du premier degré différencié pour y reléguer ceux qui échouent au CEB, renforcement/concentration des activités orientantes en 3e secondaire mettant ainsi à mal le tronc commun, etc.

Concrètement, cela signifie, pour les élèves concernés, la rupture de l’esprit du tronc commun : les élèves n’ayant pas le CEB seront à nouveau séparés des autres à l’entrée dans le secondaire, en dépit du cadre légal repris dans le Code de l’enseignement. Le maintien de la première différenciée, même de manière transitoire, organise structurellement la ségrégation scolaire en créant des groupes permanents homogènes ! Exit la mixité sociale et l’égalité des chances.

Le contrat social scolaire doit être retrouvé

Les craintes pour l’emploi et le statut des enseignants, le définancement de l’enseignement officiel ne sont pas les seules mesures qui inquiètent les acteurs de l’éducation. La mise en place du tronc commun, qui faisait l’objet d’un accord unanime de tous les acteurs de l’école, est en danger. La réforme globale concertée se vide peu à peu de sa substance. Les conséquences de ce recul impacteront évidement les publics les plus fragiles. Est-ce acceptable ?

La Plateforme de lutte contre l’échec scolaire rassemble des acteurs associatifs et syndicaux du monde de l’école et autour du monde de l’école dans l’objectif d’une transformation du système scolaire lui permettant réellement et concrètement de jouer son rôle de service public : celui de l’accès égal de chaque élève aux conditions de sa réussite et son épanouissement, dans le refus de toute production d’inégalités scolaires.


[1] Ce qui est contraire aux objectifs portés par les Conventions des Droits de l’Enfant et des Droits des Personnes handicapées.

L’école inclusive doit accueillir TOUS les enfants

L’école inclusive doit accueillir TOUS les enfants

Introduction

L’enseignement « spécial », devenu par la suite l’enseignement « spécialisé », date de 1970. Cela fait aujourd’hui pas mal d’années que les enfants [U1] avec handicap y sont accueillis, loin des autres enfants et souvent loin de leur milieu de vie habituel. Parfois au bout de longs trajets, des heures durant, en bus scolaire, dans des lieux qui leur sont adaptés, mais qui sont aussi et surtout ségrégués. En fait, c’est notre système scolaire qui en fait des lieux ségrégués, en ayant deux types d’enseignements. D’une part des écoles « ordinaires », pour les enfants qui sont dans la « norme », et d’autre part un enseignement « spécialisé » pour les enfants qui sont « hors normes ».

Dans celui-ci, on y est entre enfants « handicapés », cachés aux yeux de tous et oubliés de tous les bien-mal-pensants pour qui l’Ecole avec un « E » majuscule, la grande, la noble « Ecole » n’est destinée qu’à ceux qui peuvent prétendre d’un quotient intellectuel moyen à supérieur.  Cette Ecole qui croit que tout le monde doit apprendre la même chose en même temps et qui ne réussit que très peu ses missions.

La question n’est certainement pas de nous positionner contre l’enseignement spécialisé mais de rappeler que la place des enfants ayant un handicap n’est pas dans un enseignement spécialisé, mais dans l’école ordinaire spécialisée : l’école du quartier, l’école du village avec les enfants « ordinaires » qui partagent le même lieu de vie. Ce Droit fondamental est défini par la Convention ONU de 2006 qui précise que les enfants porteurs d’un handicap doivent « avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif[U2] , de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire également inclusifNDLR[1] »

Analyse : Comment comprendre ce grand retour en arrière ?

Depuis 2004, l’intégration dans l’enseignement ordinaire d’enfants relevant de l’enseignement spécialisé a été mise en place. Si, initialement, ce sont les handicaps physiques qui étaient privilégiés, depuis 2009 et grâce à ratification par notre pays de la Convention ONU sur les droits des Personnes handicapées, ce sont tous les enfants, quels que soient leurs handicaps – et donc également ceux qui ont une déficience intellectuelle – qui pouvaient bénéficier d’un processus d’intégration dans l’enseignement ordinaire. Malheureusement, l’intégration temporaire totale qui permettait aux enfants ayant un handicap intellectuel ou comportemental, avec l’aide du spécialisé, coûtait trop cher à la Fédération Wallonie Bruxelles. Comme à chaque fois ce sont les plus fragiles qui en paient les conséquences. Ils doivent maintenant passer au moins un an en spécialisé pour pouvoir espérer que l’école spécialisée estime qu’ils ont la compétence pour être orientés vers l’ordinaire dans une école qui veut bien d’eux.

Cela a été un grand retour en arrière, complètement incompréhensible pour les familles. Si l’intégration d’enfants avec un handicap progresse un tout petit peu en FWB, ce surtout les handicaps « nobles » qui bénéficient de ces processus. Les enfants atteints de déficiences[U3]  visuelles ou auditives sont respectivement 33,8 % et 31,1 % à être intégrés dans l’enseignement ordinaire. Mais ce sont les enfants issus du Type 2, c’est-à-dire ceux qui ont une déficience intellectuelle modérée à sévère, qui ferment le peloton. Ils sont un tout petit 2 pourcents à se trouver intégrés dans une école ordinaire. Cela fait de notre système scolaire un système maltraitant.

44 % des enfants issus de l’enseignement spécialisé de type 8 qui n’ont aucun handicap mais principalement un « handicap social » (issus de milieux « populaires ») et qui ne devraient de ce fait pas être dans l’enseignement spécialisé bénéficient de l’intégration. Il est inconcevable que ces enfants sans le moindre handicap ne soient pas scolarisés en enseignement ordinaire. Là encore, il s’agit de discrimination.

Comme vous le voyez et principalement pour les enfants avec une déficience intellectuelle, ce droit est largement bafoué. Les bien-mal-pesants de l’Ecole continuent à leur interdire l’accès à l’enseignement ordinaire. Pire, la Fédération Wallonie-Bruxelles, dans son Pacte pour un enseignement d’excellence, ne consacre que 4[JPC4]  malheureuses pages à un enseignement inclusif, ce qui démontre qu’elle n’a pas une vision claire de ce qu’est l’école inclusive. De plus, celle-ci réserve l’enseignement inclusif  aux enfants de milieux populaires injustement orientés vers les Types 1, 3 et 8.

Pourtant, la Belgique et chacune de ses composantes se sont engagées dans l’idée de construire une école véritablement inclusive. Pour les familles, c’est un chemin de croix ! Un vrai parcours du combattant. Il ne leur suffit pas de trouver une école qui accepte leur enfant – ce qui est déjà extrêmement compliqué – mais il faut il n’aura plus droit au soutien pendant 4 heures d’un enseignant du spécialisé. Il recevra bien l’aide du Pôle territorial pour la mise en place d’aménagements raisonnables, mais c’est insuffisant pour aider les enseignants qui ne connaissent pas le handicap intellectuel.

Le Droit de l’enfant est bafoué par la Fédération Wallonie Bruxelles. Mais ce ne sont « que » des enfants handicapés et par malchance pour eux, ils ont un « mauvais » « handicap » pour l’école. Car, pour l’Ecole, il y a de « bons » et de « mauvais » handicaps. Il y a ceux qui ont un handicap « noble », qui ont toutes leurs fonctions cognitives et puis les autres, ceux qui ont un « handicap mental ». Celui qui empêche d’apprendre comme les autres… Comme si – et c’est ce que l’on pense encore trop souvent dans les écoles – tous les enfants apprenaient de la même façon. L’Ecole est faite de traditions, de croyances archaïques, de fantasmes, de lubies et de peurs ; pas de désirs de progrès, de rêves, et d’espoirs. C’est le malheur de ces enfants.

Mais… va-t-on nous demander… ces enfants ont-ils leur place en enseignement ordinaire, puisqu’ils ne savent pas apprendre comme les autres ? La réponse est dans le Droit ! Tout comme le droit à l’information est garanti à tous les citoyens, ces enfants sont des êtres tout ce qu’il y a de plus humains et bénéficient de droits, eux aussi. Et ces droits doivent être respectés !

La question n’est plus de se demander si ces enfants, puisqu’ils ne savent pas marcher, entendre, voir ou penser comme tout le monde, ont droit à une place pleine et entière dans la société, ni s’il faut les cacher au fond d’écoles et, par la suite au fond d’institutions spécialisées, derrière des murs, toute leur vie. La question est de savoir si nous voulons construire une société qui doit permettre à chacun de s’y intégrer et d’y trouver une place de citoyenne ou de citoyen actif et pleinement reconnu comme tel !

Si la réponse est « Oui » – et dans une société démocratique elle ne peut être que « Oui » – alors il n’y a qu’une étape scolaire possible : celle qui apprend au vivre ensemble, à vivre avec les différences que nous avons toutes et tous : c’est l’école inclusive. Un lieu où l’enfant ayant une déficience pourra apprendre à vivre avec les autres et où ceux-ci pourront à leur tour apprendre à vivre avec toutes les différences. Dans l’espoir que, plus tard et ensemble, ils contribuent à la construction d’une société réellement inclusive.  

Un combat pour des citoyen.ne.s à l’esprit critique

Le Pacte ne l’a pas compris. Si la mise en place d’un tronc commun est incontournable pour lutter contre l’échec scolaire, il est insuffisant. Seul un enseignement réellement inclusif peut permettre à chaque enfant, quelles que soient ses difficultés scolaires, sociales, physiques, intellectuelles, … d’acquérir les savoirs que ses capacités lui permettent d’acquérir. Et même, de se sublimer !

Nous voulons une Ecole inclusive. C’est un Droit fondamental de l’enfant handicapé ! Et c’est un droit des autres enfants aussi d’apprendre à vivre avec la différence. La Belgique s’y est engagée, la FWB aussi. Cette dernière se doit de la mettre en place. Nous exigeons donc le respect de cet engagement, à commencer par faire respecter par tous les intervenants l’obligation de respecter ce droit, et donc, de ne plus avoir la possibilité de refuser l’intégration d’un enfant quels que soient son handicap. Le Décret intégration permet trop facilement aux acteurs institutionnels de refuser l’intégration d’un enfant sur base de son handicap. Il s’agit d’une discrimination inacceptable et ce, même s’il existe un enseignement spécialisé. Séparer des enfants sur base de leurs différences physiques ou intellectuelles est, tout simplement, de la discrimination et doit être interdit dans les textes et poursuivi en justice ! Il en va de même pour les parents. Par méconnaissance de l’intégration ou souci de surprotection, des familles refusent des projets d’intégration proposés par des CPMS[U5]  ou des écoles et qui vont pourtant dans l’intérêt des enfants.

Par ailleurs, le Pacte a prévu que les Pôles territoriaux mutualisent les moyens consacrés à l’accompagnement des enfants en intégration, mais cela ne concernera que les enfants orientés en fonction d’un « handicap physique ». Le Pacte ne tient pas compte des enfants porteurs de handicaps intellectuels ou comportementaux. Nous condamnons cette discrimination et attendons de la CF/FWB qu’elle corrige le tir afin d’amener progressivement l’enseignement spécialisé à évoluer dans sa conception, dans ses prérogatives, dans son rôle, au service des besoins éducatifs de l’enfant. Toutes les ressources qu’il contient doivent être mises au service de tous les élèves ! ». Autrement dit, pour aller rapidement vers un système scolaire inclusif.


[1] Voir texte anglais : Persons with disabilities can access an inclusive, quality and free primary education and secondary education on an equal basis with others in the communities in which they live


 [U1]« Porteurs » : c’est lourd; je préfère un terme plus neutre : ayant un handicap…

 [U2]Je préfèrerais que les mots soulignés soient en gras – sans soulignement ; ce qui est plus clair !

 [U3]On est atteint d’une maladie, … mais pas du handicap !!!!

 [JPC4]Je suis d’accord que ce n’est pas qu’un nombre de pages, mais nous avons affaire à la presse qui ne connaît pas le fond du problème. 4 pages sur 300, c’est aussi une manière de leur faire comprendre que la FDW n’a pas de vision claire de ce qu’est une école inclusive.

 [U5]Même remarque à propos des CPMS !

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – L’exclusion liée à un transport scolaire indécent

Mme Alexander nous livre son témoignage

Merci, de nous donner la parole aujourd’hui, à la suite d’un courrier que j’ai envoyé au Ministre du Logement, des Transports et du Développement Territorial.

Je suis la maman de Cannelle Alexander. Je suis invitée à m’exprimer sur un problème récurrent : le transport scolaire. Cannelle ne parle pas : sa maladie l’en empêche. Aussi je m’exprime pour elle, ainsi que pour les autres enfants, dans la même situation qu’elle.

Avant de développer mon intervention, je tiens à vous rappeler que le transport scolaire dans l’enseignement spécialisé est un droit acquis depuis 1974, en raison de la distance plus importante à parcourir pour les enfants handicapés.

Comment cela fonctionne-t-il ? Le MET (Ministère de l’Equipement et des Transports) délègue au TEC (Transport en Commun) le soin d’organiser les transports et, pour cela, le TEC fait appel à des sociétés privées. Mais les conditions de transport sont loin d’être idéales ! Pour beaucoup d’enfants, le temps de transport est incroyablement trop long. A titre d’exemple, Cannelle aurait 5 heures de car par jour pour aller à l’école, distante de 40 km de la maison. Quel parent accepterait que son enfant, valide, fasse autant d’heures de bus tous les jours ?

Par ailleurs, quand votre enfant monte en voiture, l’attachez-vous ? Sachez que, dans les bus du TEC, les enfants ne le sont pas toujours : tous les véhicules ne sont pas équipés de ceinture et, donc, ne respectent pas les mesures de sécurité en vigueur dans notre pays, mesures qui sont plus que nécessaires pour des enfants qui ne sont pas autonomes. Imaginez un enfant autiste, avec des troubles du comportement. Cet enfant doit être drogué pour qu’il reste calme durant ces interminables heures de bus. Je vous invite à visiter la page qui parle du transport scolaire sur le site de la Ligue des Droits de l’Enfant et qui reprend l’ensemble des dysfonctionnements dont je parle.

Maintenant, je souhaite vous lire le courrier que j’ai envoyé au Ministre, ainsi qu’à tous les responsables du transport. Je vais demander à mon mari de vous distribuer un petit fascicule dans lequel j’ai repris la lettre, ainsi qu’un document joint en annexe.

Monsieur le Ministre,

Je vous adresse ce courrier, suite au premier passage d’un bus de transport scolaire, ce lundi 3 novembre.

Bonne nouvelle a-priori puisque nous l’attendions depuis le 1er septembre. Quel sens de l’humour a le TEC puisqu’on m’annonçait : « Nous passerons chercher Cannelle à 6 h 35 ! » C’est une bonne blague, me dis-je, au vu de ses problèmes de santé. Non, ce n’est pas une blague !

Vous excuserez d’avance le ton quelque peu déconcertant de ce courrier. Mais, après quelques années de grande galère avec le transport scolaire et, n’ayant plus rien à perdre puisque, quoi qu’on fasse, on est toujours perdant avec vous, autant me libérer un peu.

Je parlais donc de problème de santé. Il apparaît en effet que vos services soient plus à même qu’un médecin pour juger de la nécessité ou non d’un transport scolaire individuel ou en groupe restreint afin d’en diminuer le temps (voir les certificats médicaux remis en début de chaque année scolaire). Je me permettrai donc de vous joindre en annexe, la dernière radio de ma fille. On pourrait croire que cela fait partie du secret professionnel, auquel tout patient a droit mais, dans notre cas, un transport décent me semble un droit plus important. Voilà à quoi ressemble un enfant handicapé (pas tous, mais la mienne, oui) vue de l’intérieur ! Un enfant handicapé, c’est un peu plus qu’un peu de bave qui dégouline, des cris effrayants, un air débile.

Un enfant handicapé, ma fille en l’occurrence, souffre de problèmes orthopédiques et d’une lourde scoliose – d’une énorme, gigantesque, extraordinaire scoliose – qui lui cause quelques souffrances.

Cannelle aura 15 ans bientôt, elle pèse 19 kg et elle mesure 135 cm. Sa colonne vertébrale fait les « montagnes russes ». Elle ne sait pas s’asseoir seule ; elle ne sait pas marcher ; elle ne sait pas parler pour me dire : « Maman, j’ai mal, atrocement mal dans ce p… de bus. Aide-moi ! »

Il n’est vraisemblablement pas permis ni au MET, ni dans ces messieurs-dames politiques – ministres de tous genres et de tous bords -, qu’il y ait un enfant handicapé, sinon on aurait revu la situation depuis longtemps et on aurait trouvé l’argent ou, au moins, une façon plus intelligente de le gérer. Donc, airs compatissants et mines de circonstances en notre présence. Mais, c’est bien connu, « Loin des yeux, loin du cœur ».

Pour conclure, je me demande si la mettre dans un bus à 6 h 35 pour commencer l’école à 9 h, sans oublier le retour, serait bien raisonnable, sauf … si je veux la tuer. Et, dans ce cas, merci le transport scolaire ou « comment se débarrasser de sa fille handicapée, un peu gênante et encombrante, en quelques semaines » … sans risque d’être inquiété par la justice, puisque voilà comment contourner le meurtre par négligence ou encore, la non-assistance à personne en danger… Merci encore le transport scolaire

Je vous remercie d’avoir lu ce courrier jusqu’au bout et vous prie de recevoir, Monsieur le Ministre, mes meilleures salutations.

En lisant ceci, vous aurez compris que 5 h de route pour aller à l’école, c’est vraiment beaucoup !

A ce jour, mon courrier est resté sans nouvelles. Après cette lecture, moi, je me demande si le transport de bestiaux n’est pas plus réglementé dans notre pays car, très vite, Gaïa monterait au créneau, avec la couverture médiatique que l’on connaît, et les soutiens de toutes parts. Pour nos enfants, qui crie au scandale ?

Mon souhait aujourd’hui, c’est simplement de vous interpeller pour que vous preniez conscience de cette situation qui est intolérable pour la maman que je suis. Sachez que nos enfants handicapés sont des enfants avant tout et pourraient être les vôtres. La voix de ces enfants n’est pas entendue. Aussi, aujourd’hui, je parle en leur nom, au nom de toutes les souffrances qu’ils endurent par une politique qui fait fi de tout cela.

Mesdames, Messieurs, je vous remercie de m’avoir écoutée mais, plus encore, de m’entendre.

Mr Coenen, Ligue des Droits de l’Enfant

Merci, Mme Alexander.

Au nom de la Ligue des Droits de l’Enfant, je vais maintenant exposer nos revendications en matière de transport scolaire.

Les transports scolaires concernent environ 15 000 enfants en Communauté Française (Région de Bruxelles-Capitale et Région wallonne). Pour plus de 90 % d’entre eux, cela se passe sans problèmes. Malheureusement, pour 9 % des enfants, la durée des trajets est une réelle souffrance, jusqu’à cinq heures par jour (et parfois au-delà). Cela génère des horaires trop lourds. Certains enfants quittent leur domicile avant 6h30 pour le retrouver 12 heures plus tard. Il leur reste deux bonnes heures pour faire leurs devoirs, souper, se détendre, … Tôt levés, tôt couchés. Peu de vie de famille.

Il s’agit clairement, pour certains enfants (ceux qui sont plus d’une heure par trajet dans le bus) d’une situation inhumaine, voire carrément dégradante. Le terme de maltraitance que nous utilisons depuis 2006 n’est nullement usurpé. En effet, cette situation génère une véritable souffrance, tant au niveau psychologique que physique, selon les déficiences des enfants. Pour plus de détails, nous vous conseillons de relire notre dossier de presse de novembre 2006 http://www.ligue-enfants.be/?p=28

La Ligue rappelle ses revendications dans l’intérêt supérieur des enfants concernés

Nous demandons qu’une règle soit établie en direction des TECs organisateurs des tournées, afin que celles-ci aient une durée maximale pour chaque enfant. Nous estimons que 60 minutes est un maximum au-delà duquel ce n’est plus rendre service à l’enfant. Dans les cas exceptionnels, on pourrait (si le handicap de l’enfant le permet) monter à 90 minutes maximum. Mais cela devrait rester des exceptions et ne pas durer plus d’une année dans la scolarité d’un enfant. Pour rappel, les normes de l’AWIPH sont de deux heures maximum aller ET retour !!!


Favoriser, pour les enfants ayant les horaires les plus lourds, l’utilisation de véhicules de catégorie 3 (8 places + chauffeurs) tels que ceux utilisés par les ASBL qui organisent les transports scolaires.


De même, nous demandons que les bus soumissionnés par les TECs auprès des firmes de car, aient un confort minimal véritable, permettant aux enfants de passer ce temps dans les meilleures conditions qui soient. Au niveau sécurité, ils doivent être équipés de sièges individuels, d’appuie-têtes et de ceintures de sécurité.


Nous demandons également que les convoyeuses soient correctement formées aux handicaps et à ce qui doit être mis en œuvre pour leur favoriser la période passée dans le bus, ainsi qu’à la gestion d’un groupe d’enfants dans un espace clos. De même une équipe suffisante de convoyeuses doit être mis en place pour palier aux absences.


Nous demandons que tout transport scolaire d’enfant soit établi en concertation avec la famille ou l’institution en charge de l’enfant, ainsi qu’avec l’institution scolaire. Chacune de ces parties ayant son mot à dire et pouvant exiger un meilleur service. La seule gestion actuelle par les TECs ayant montré ses limites et son unique souci financier, au mépris total de la problématique des enfants.

La « troisième vie » de l’enseignement spécialisé

Vers une école inclusive pour les élèves à besoins spécifiques – Professeur émérite Ghislain Magerotte – UMons

Les années 60 : naissance et développement de l’enseignement spécial

Si les enfants ayant des déficiences sensorielles ou mentales ont été « éduqués » dès le 19ème siècle par quelques pionniers de l’éducation (comme Itard, Seguin, Bourneville, Valentin Haüy, L’Abbé de l’Epée) et par des associations caritatives, plusieurs écoles s’ouvrent aussi en Belgique (l’IRHOV à Liège en 1819 et l’IRSA à Bruxelles en 1835). Au début du XXème siècle, en 1905, une école s’ouvre à Bruxelles pour les enfants « irréguliers » (qui à l’époque n’étaient pas scolarisés) grâce au travail de Decroly.Cependant, il a fallu attendre la fin des années 50 et les années 60 pour assister à un développement considérable de l’enseignement spécial accessible à ces enfants.

Ce développement est le résultat de la conjonction de trois facteurs : d’une part, les pressions exercées par des associations de parents d’enfants handicapés, notamment d’enfants handicapés physiques et mentaux, qui réclamaient une scolarisation, sans être contraintes de recourir à un « placement en internat » ; d’autre part, la richesse croissante des « golden sixties » favorisant la mise en place d’un système social plus généreux ; et enfin la croissance de la population scolaire permettant à l’enseignement ordinaire de se séparer – sans risque pour lui – de quelques élèves orientés vers l’enseignement spécial.

Dans notre pays, cette évolution a été couronnée par le vote la loi du 6 juillet 1970 sur l’enseignement spécial, loi-cadre devant assurer, grâce aux arrêtés d’application de 1978, la mise en place d’un enseignement autonome pour les élèves « aptes à suivre un enseignement mais inaptes à le suivre dans une école ordinaire ».

Ce développement a eu plusieurs conséquences favorables pour ces élèves. D’une part, il a permis au système scolaire, via l’organisation de huit types d’enseignement, d’accueillir durant l’âge scolaire (2 ans et demi jusque 21 ans) davantage d’élèves qui, antérieurement, étaient exclus de l’école. De plus, cet enseignement a également accueilli, via l’organisation de l’enseignement de type 2, des élèves ayant un retard intellectuel important, soit une déficience modérée ou sévère. En 1970, ces enfants et adolescents handicapés sont dès lors devenus par cette loi des « écoliers » et des « étudiants ».

De plus, elle a permis dans les années qui ont suivi d’accueillir bon an mal an quelque 3,5 % de la population scolaire, répartis en huit types d’enseignement, quatre formes d’enseignement secondaire ainsi que trois niveaux d’enseignement (maternel, primaire et secondaire).

D’autre part, la création d’écoles a permis aux familles de maintenir davantage les relations familiales avec leur enfant, et ce grâce à l’organisation d’un transport scolaire vers l’école spéciale et ainsi, d’éviter ou de retarder le placement en internat.

Enfin, le regroupement au sein de cet enseignement spécial d’élèves handicapés ainsi que le développement parallèle de l’Action sociale aux personnes handicapées – via la loi de 1963 créant le Fonds National de Reclassement Social des Handicapés chargé de promouvoir l’emploi de ces personnes adultes, et l’arrêté 81 de 1967 favorisant le développement de services pour enfants et adultes handicapés – a donné à cette partie importante de la population belge une « existence sociale » et l’a fait entrer dans notre système social.

Cette évolution des lois a permis notamment de créer des catégories de professionnels spécialisés en ce domaine, et donc de contribuer à une mise en place, lente et encore imparfaite, d’une formation spécialisée et d’une recherche universitaire. C’est en effet, à partir des années 80 et 90, qu’on a assisté à un développement considérable des pédagogies adaptées à ces élèves et étudiants.

La deuxième vie de l’enseignement spécialisé : l’intégration scolaire

La loi sur l’enseignement spécial de 1970 a d’abord entraîné la suppression des « classes spéciales annexées » aux établissements d’enseignement ordinaire. Elle a donc favorisé le développement d’un enseignement spécial « autonome », distinct donc de l’enseignement ordinaire, obéissant donc à une réglementation propre – tout en permettant à des enfants handicapés d’être scolarisés dans l’enseignement maternel et primaire ordinaire, grâce à la générosité et au dynamisme de certains directeurs et enseignants et à la demande de parents, dans le cadre de ce qu’on a appelé une « intégration sauvage ». D’ailleurs, dès le départ, l’arrêté d’organisation de l’enseignement spécial prévoyait des possibilités d’intégration sur une base individuelle. Ces possibilités se sont développées ensuite, concernant surtout les élèves relevant des types 4, 6 et 7, en 1995.

La loi a subi elle aussi plusieurs modifications, notamment une modification de la loi de 1970 qui devient la « loi sur l’enseignement spécial et intégré » (1986), puis le « décret sur l’enseignement spécialisé » en 2004. Ce décret a progressivement pris plusieurs dispositions concernant la scolarisation et l’intégration scolaire. Les dispositions les plus importantes concernent les types d’intégration (permanente totale et permanente partielle, temporaire totale et temporaire partielle) et l’accès à l’intégration des élèves de tous les types d’enseignement.  L’aspect essentiel a consisté dans une collaboration importante entre l’enseignement spécialisé et l’enseignement ordinaire, via le suivi des enfants bénéficiant d’une intégration individuelle par des professionnels de l’enseignement spécialisé durant un certain nombre d’heures par semaine. Deux aspects particulièrement problématiques consistent, d’une part, dans la mise en place d’un processus d’intégration relativement lourd impliquant un respect contraignant de dates et le subventionnement des écoles ordinaires seulement après une année d’intégration réussie. D’autre part, depuis une quinzaine d’années, des classes spécialisées sont accueillies dans des écoles ordinaires, dans le cadre de l’intégration permanente partielle, les élèves suivant certaines activités dans les classes ordinaires. Ce système connaît un développement récent.

De plus, selon ce décret, la participation de l’élève/étudiant et de ses parents au Plan Individuel d’Apprentissage (PIA) et au Plan Individuel de Transition (PIT) est devenue obligatoire et on a assisté aussi au développement de pédagogies adaptées (concernant le polyhandicap, l’autisme, l’aphasie et la dysphasie, le handicap physique lourd mais pouvant accéder aux apprentissages scolaires). Depuis 2013, d’autres dispositions récentes ont également été prises, concernant l’accueil dans des « Structure Scolaire d’Aide à la Socialisation ou à la resocialisation (SSAS) » au sein des écoles fondamentales spécialisées. De plus, afin de répondre à des situations locales de déficit d’enseignement spécialisé, des élèves peuvent être accueillis, par dérogation annuelle, dans une école d’enseignement fondamental ou secondaire spécialisé qui assure ainsi un autre type d’enseignement spécialisé que celui ou ceux qu’elle organise.

Vers une école inclusive : la « troisième vie » de l’enseignement spécialisé !

Ces dernières années, des questionnements importants se sont accentués concernant l’enseignement spécialisé. Deux facteurs en particulier jouent un grand rôle. D’une part, sous l’influence des recherches en pédagogie qui se sont développées à partir des années 70, mais aussi des tendances internationales, le mouvement en faveur d’une autre organisation de l’école s’est accentué, en particulier suite aux déclarations et prises de position internationales concernant l’accueil des enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux dans le système scolaire ordinaire (Déclaration de Salamanque, 1994) et en particulier suite à la Convention des droits des personnes handicapées (2006, et ratifiée par la Belgique en 2009) qui se prononce dans son article 24 en faveur d’une école inclusive.

De plus, on a assisté en Fédération Wallonie-Bruxelles au lancement d’une réflexion systémique sur tout le système d’enseignement, y compris de l’enseignement spécialisé, grâce au Pacte pour un Enseignement d’Excellence. Ce Pacte est encore en voie de finalisation et plusieurs points sont essentiels pour l’avenir de l’enseignement spécialisé. Les documents actuels, et notamment l’avis n° 3, évoquent à plusieurs reprises l’engagement vers une « école inclusive », sans toutefois la définir. Brièvement, une école inclusive est une école qui vise à ce que les élèves en situation de handicap apprennent à vivre au sein d’une « école pour tous » et ainsi à participer à la vie de la cité.  Pour ce faire, des changements s’imposent à tous les acteurs. Les responsables des écoles mettront en place une disponibilité de tous les membres des équipes éducatives à une démarche inclusive, avec le soutien des équipes spécialisées. Ils veilleront en particulier à une organisation de la vie de la classe pour que chaque élève apprenne, via notamment une démarche de co-enseignement. Une attention particulière sera accordée aux aménagements raisonnables permettant à chacun de tirer profit des multiples possibilités d’apprentissage qu’offre cette école inclusive. De plus, la collaboration de tous (professionnels, parents, élève) sera renforcée dans une perspective d’individualisation via le PIA et le PIT. L’école doit aussi organiser la vie des élèves, sur plusieurs plans : d’abord via la mise en place organisée par l’enseignant du tutorat (tant sur le plan social que des apprentissages) entre élèves et ensuite de stratégies facilitant particulièrement les périodes de « temps libre » (cour de récréation, salle à manger-réfectoire, …). Il importera aussi de développer l’utilisation des TIC et des outils numériques afin de diminuer certains obstacles à l’apprentissage de ces élèves.Enfin, une école inclusive prône une organisation systémique à trois niveaux : soutien à l’apprentissage pour tous les élèves, prévention et interventions précises pour les élèves en difficultés et enfin Interventions personnalisées pour chaque élève ne répondant pas aux deux démarches précédentes.

De plus, on a assisté ces dernières années à une croissance de la population scolaire de l’enseignement spécialisé, particulièrement depuis l’année 2005-2006, ce qui conduit le pouvoir politique à tenter de diminuer le nombre d’élèves dans l’enseignement spécialisé via un décret relatif à la promotion des aménagements raisonnables dans l’enseignement ordinaire, à partir de l’année 2019. Ce mouvement concerne particulièrement l’enseignement de type 8.

Ensuite, le Pacte envisage la constitution de pôles territoriaux qui, dans son projet d’avis n° 3, « assureront la mutualisation par bassins géographiques des moyens dédiés à l’accompagnement des élèves en intégration permanente totale dans l’enseignement ordinaire. » Son rôle et sa mission sera « de garantir la qualité de l’encadrement et de l’accompagnement que les établissements du pôle territorial pourront proposer pour tenir compte des besoins spécifiques des élèves ». Il est également prévu « la possibilité de créer, sur une base volontaire, de tels pôles en inter-réseaux, en particulier dans les zones dans lesquelles le nombre d’élèves concernés et, par voie de conséquence, les moyens alloués n’atteignent pas le niveau critique minimum ».  

D’autre part, si l’école inclusive accueille des élèves avec des besoins spécifiques, elle accueillera aussi, en fonction des années et de sa situation géographique dans la cité, des élèves différents, notamment des élèves issus de milieux défavorisés. 

Si l’on se place dans l’optique d’une école inclusive, réclamée à plusieurs reprises dans le projet d’avis, le pôle territorial regrouperait tous les personnels des écoles spécialisées d’un territoire déterminé (en fonction de la population, des moyens de transport public, de l’attraction de certaines villes…) en vue de mettre à disposition de toutes les écoles ordinaires d’un bassin géographique déterminé ce personnel spécialisé ; ces écoles spécialisées deviendraient un « centre de ressources spécialisées » (terme à la mode, mais approprié !). Il est à remarquer que le décret de 2004, revu en 2013, prévoit d’ailleurs l’existence de « zones », essentiellement au niveau de la gestion de l’enseignement spécialisé et de ses personnels ainsi que les entités géographiques qui les composent.

De plus, cela permettrait de revoir le fonctionnement du transport scolaire vers des écoles plus proches du domicile de l’enfant, prônant davantage l’utilisation, accompagnée notamment au début, des transports en commun et évitant de faire perdre progressivement à l’élève ayant des besoins spécifiques ses relations dans son quartier. Cette évolution faciliterait la proximité géographique des élèves de leur école.

D’autre part, la formation initiale des enseignants (et de tous les professionnels d’ailleurs, formés dans les hautes écoles) devrait comprendre tout au long de leur cursus (c’est-à-dire dès la première année) une formation à « la pédagogie différenciée » (y compris la pédagogie adaptée aux élèves/étudiants à besoins spécifiques). Une spécialisation devrait être envisagée en fin de formation.

Quant au tronc commun au niveau du secondaire, il s’agit d’une initiative intéressante, avec une évaluation formative tout au long de la vie scolaire et une seule évaluation certificative en fin de cycle.

Est-ce la mort de l’enseignement spécialisé ? Non, bien sûr ! Les équipes qui maîtrisent cette pédagogie différenciée en feront bénéficier tous les élèves, y compris ceux à besoins spécifiques sans les séparer six heures par jour et durant de longues années, de leurs camarades. En d’autres mots, les équipes spécialisées seront inclues dans une école inclusive, ce qui constitue la façon d’assurer la « troisième vie » de l’enseignement spécialisé, au service du « vivre ensemble » de tous les élèves et étudiants.    

Ligne Ecoute Autisme

Ligne Ecoute Autisme

Ligne Ecoute Autisme (LEA) en Wallonie : un numéro d’appel gratuit, un site internet et bientôt une chatbox

Autisme en Wallonie : Besoin d’être écouté, à la recherche d’informations, de ressources ? Depuis le 2 mai 2024, vous pouvez appeler, de 9h à 16h du lundi au vendredi (sauf les jours fériés) LEA (Ligne Ecoute Autisme)

au 0800 13 904 (numéro gratuit).

Répondant à l’appel à projets de la Région Wallonne, le consortium composé de :

  • la Fondation SUSA (Service Universitaire Spécialisé pour personnes avec Autisme),
  • l’ASBL APEPA (Association de Parents pour l’Epanouissement de Personnes Avec Autisme),
  • l’ASBL Participate!

a créé LEA – ligne d’écoute – site internet de ressources (avec bientôt une chatbox). 

En première ligne, une équipe de 20 volontaires se relaie pour répondre aux appelants. La plupart de ces volontaires sont des professionnels, des femmes et des hommes qui ont tous une expérience en autisme. En avril, ils ont suivi une formation à l’écoute active, et comment trouver son chemin rapidement sur les sites web du consortium + celui du réseau CRAN (Centre de Ressources Autisme de Namur) et bien d’autres ressources fiables. 

Si la question est trop complexe, ils invitent l’appelant à adresser un mail @LEA. Deux coordinateurs LEA et l’APEPA répondront ou transmettront la demande au Comité de Ressources et de Réseau LEA, constitué d’une ASBL dans chaque province pour les informations plus locales et d’une dizaine d’experts en autisme, chacun dans son domaine tels l’enseignement, les pôles territoriaux, l’adolescence, le burn-out, l’EVRAS, l’aide juridique et bien plus. 

Il y a donc 3 niveaux de compétences, l’appelant aura toujours une réponse correcte, mais malheureusement pas toujours une solution dans l’immédiat, car il manque encore beaucoup de solutions et de services pour l’autisme, reconnu en 2004 comme handicap spécifique. 

Parmi l’équipe, il y a une vraie Léa, et il y a aussi Eleni, Mathilde, Nathalie, Doriane, Fatma, Sarah, Sophie, Julien, Charlie, Allan, etc., de jolis prénoms de volontaires motivés qui attendent vos appels, tous prêts à vous soutenir et vous informer.

Chaque écoutant sera bien là pour vous, appelez LEA.

lea-autisme.be

Ligue des Droits de l’Enfant – Mai 2024

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