Oct 15, 2021 | Discrimination - Violence, Ecole - Education - Inclusion, Environnement - Santé - Alimentation, LGBTQI+ - Egalité de genre, Participation - Liberté - Expression
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Vous êtes heurté.e par les dénis de droits que vivent certains enfants ?
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Vous êtes inquièt.e pour son avenir, pour sa santé future et celle de ses futurs enfants ?
Le sort des enfants LGBTQI+ ou demandeurs d’asile vous interpelle ?
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Les inégalités de genre vous choquent ?
(suite…)
Sep 6, 2021 | Environnement - Santé - Alimentation
Les polluants chimiques environnementaux
Le point de non-retour est probablement dépassé. Notre planète est inondée de polluants chimiques qui vont empoisonner les générations futures durant des milliers d’années, fabriqués en masse et répandus à travers toute la planète pour le seul bénéfice d’une petite poignée de générations d’actionnaires et de militants de la mondialisation. En moins d’un siècle, les (ir)responsables d’entreprises et leurs actionnaires, mais aussi les (ir)responsables politiques qui les soutiennent contre l’intérêt supérieur de l’Humanité et des générations futures, auront réussi à rendre la vie sur Terre plus dangereuse qu’elle ne l’a jamais été.
Les enfants d’aujourd’hui, ont toutes les malchances de vivre une vie sinon plus courte, en tous cas de moindre qualité que celle de leurs parents et grands-parents. Lors de leur naissance, les bébés ont des centaines de produits chimiques dans le sang de leurs cordons ombilicaux[1]. « Nous savons que ces produits passent la barrière placentaire et se retrouvent dans le liquide amniotique. Les enfants sont donc contaminés pendant tout le début de leur vie intra-utérine. La période de développement dans le ventre de la mère est très importante parce que c’est là où le cerveau se forme, c’est là où tous les organes se forment et se mettent en place. Beaucoup de maladies que l’on va avoir, que l’on soit adolescent, adulte ou vieux, ont pour origine cette vie fœtale qui détermine toute notre santé d’adulte.[2] »
Un grand nombre de ces polluants chimiques sont des composés persistants qui, aujourd’hui, se retrouvent partout dans l’environnement et sur l’ensemble de la planète. Ils ont conquis tous les écosystèmes et tous les organismes vivants qui les peuplent. La plupart sont des POP (polluants organiques persistants) dont la durée de vie est extrêmement longue et dont certaines ont la propriété de pouvoir se déplacer sur de longues distances. L’une des propriétés importantes des POP est leur semi-volatilité. Cette propriété leur confère un degré de mobilité suffisant leur permettant d’atteindre des concentrations relativement grandes dans l’atmosphère et d’être transportés sur de longues distances[3]. Elles se diffusent par le ruissellement, depuis les lieux les plus reculés que sont les nappes aquifères, jusqu’aux mers et océans. De plus, lorsqu’ils sont appliqués sur des cultures, 75% de ces produits s’échappent dans l’atmosphère et ont ainsi la possibilité de passer d’un continent à l’autre, voire à faire plusieurs fois le tour de la terre, portés par les courants-jets polaires ou subtropicaux (aussi appelés « jet stream »)[4]. Une fois posées, ils se mêlent à la poussière. Lorsque le soleil revient, emportés par le vent, ils refont le tour de la Terre pour polluer un environnement qui ne l’aurait pas été suffisamment.
Ces substances se retrouvent donc inévitablement dans l’air que nous respirons, dans les aliments que nous mangeons, dans l’eau que nous buvons, dans les boissons sucrées qui mettent en danger la santé de nos enfants, dans le sol de nos potagers. Bref, partout où l’air passe, on retrouve des polluants chimiques environnementaux que cette industrie chimique cherche tant à nous faire ingérer à son seul profit.
Une des caractéristiques des POP est qu’ils sont bioaccumulables, autrement dit, il s’accumulent dans notre corps sans pouvoir être éliminés. Ils sont lipophiles, c’est-à-dire qu’ils se dissolvent de préférence dans les graisses et dans les lipides, plutôt que dans l’eau. Les lipides servent à la fois au stockage de notre énergie, mais ils constituent aussi notre masse graisseuse, et sont les constituants majeurs de nos membranes cellulaires (dont les cellules de notre peau) ainsi que des cellules de notre système nerveux. En résumé, une fois stockés, ces polluants organiques persistants, ne nous quittent plus. Notre corps ne produit pas d’enzymes capables de casser leur structure moléculaire et donc de nous permettre de les métaboliser et de les éliminer. Pire, ils se transmettent de la mère à l’enfant durant la vie ultra-utérine et, ensuite, par le lait maternel. C’est probablement tout l’avenir de l’humanité qui est menacé, puisque ces polluants persistants continueront à être transmis de génération en génération pendant sans doute des centaines, voire des milliers d’années.
Les conséquences sur la biodiversité des contaminations par les produits chimiques sont étudiées depuis plus d’un demi-siècle. Dans son ouvrage Silent spring[5](Le printemps silencieux), Rachel Carson a démontré que les organochlorés (dont fait partie le DDT[6], insecticide largement utilisé depuis la fin de la seconde guerre mondiale contre les insectes : fourmis, moustiques et même dans les shampoings anti-poux) ont eu des conséquences importantes sur la faune. Les oiseaux du lac Clear en Californie ont été retrouvés morts suite à trois applications de DDD (un cousin du DDT) pulvérisé pour éradiquer des moustiques un peu trop résistants. Les concentrations de DDD dans le corps des volatiles atteignaient 1600 mg/kg, ce qui représentait des doses mortelles. Pour tuer un moustique l’industrie privilégie toujours la bombe chimique à des systèmes écologiques, quels que soient les risques pour d’autres espèces, qu’elles soient animales ou humaines.
Le fait que ces substances soient lipophiles fait qu’une fois pulvérisées, elles pénètrent le sol sans s’y dégrader et sont consommés par des insectes et des vers de terre, premiers maillons de la chaîne alimentaire. Ceux-ci sont ensuite mangés par de petits oiseaux dont les prédateurs sont les oiseaux de proie, ou par les humains, lorsqu’ils mangent un poulet qui s’est régalé de vers de terre.
Les petits oiseaux peuvent en mourir (la dose létale pour un rouge-gorge est de 11 vers de terre contaminés seulement), mais les effets des perturbateurs endocriniens que sont le DDT et ses cousins ont d’autres conséquences. Les oiseaux ne peuvent plus se reproduire et leurs espèces déclinent rapidement.
Pour les super-prédateurs et donc aussi pour l’Homo Sapiens les effets ne sont pas que mortels. Depuis les années 60 la recherche a démontré les conséquences de ces produits sur la faune sauvage et aquatique. En tant que super-prédateur, l’Homo sapiens est pleinement concerné par les résultats de ces recherches.
Dans les années 60, les visons du Michigan sont devenus stériles car on les avait nourris avec des poissons fortement contaminés par les PCB[7]. Les PCB sont des POP surtout présents dans les produits d’origine animale : viandes, poissons, œufs, produits laitiers. Ils sont classés par le CIRC[8] comme « cancérogènes certains » pour l’Homme[9]. Depuis les années 60, de nombreuses études ont démontré les effets des perturbateurs endocriniens sur la reproduction des animaux. Théo Colborn[10]a collationné une foule d’exemples allant des goélands d’Ontario qui désertaient leurs nids, où 80 % des oisillons étaient morts ou malformés suite à un traitement massif de la zone au DDT, jusqu’aux ourses polaires dont le nombre de femelles gestantes avait diminué de moitié (leur graisse contenant de fortes concentrations de PCB), en passant par les alligators du lac Apopka, situé à 400 m d’une usine de pesticides en Floride, qui étaient devenus incapables de se reproduire car la taille de leur pénis était trop petite[11].
Le rapport Environnement et Santé de l’Agence européenne de l’environnement[12] de 2006 souligne « de nombreuses espèces se situent au sommet de la chaîne alimentaire tout comme des consommateurs humains et sont souvent exposés à des contaminants environnementaux de même type via leur alimentation quotidienne. De nombreuses fonctions physiologiques fondamentales chez les animaux et les humains sont similaires. Si une substance chimique, à une certaine concentration produit certains effets chez les animaux sauvages, cela peut être pris comme une indication d’effets transposables à l’humain. Une substance neurotoxique pour les oiseaux aura vraisemblablement les mêmes effets chez les humains et une substance aux effets oestrogéniques sur des poissons agira à l’identique chez les humains. »
Concernant précisément ces derniers, on constate une transformation sexuelle des poissons de rivière, notamment d’individus mâles devenus femelles. C’est la conclusion d’une étude britannique[13] qui précise que « La diminution du nombre de spermatozoïdes et de la fertilité observée chez l’homme comme les anomalies sexuelles constatées chez les poissons sont les conséquences plus que probables d’une exposition aux perturbateurs endocriniens. Ces substances peuvent être des hormones, des composées mimant leur action ou bien des molécules s’opposant à l’action hormonale. » Et d’établir une liste de suspects possibles : « Beaucoup de produits chimiques d’usage courant sont des anti-androgènes. Il y a des médicaments prescrits contre le cancer de la prostate, des fongicides, des antibactériens, des parabens », énumère Susan Joubling, Principale auteure de l’étude britannique. Elle rappelle que « ces deux derniers groupes chimiques sont omniprésents dans notre vie quotidienne : dans la nourriture, dans certains savons, des détergents, des dentifrices, des désinfectants et des cosmétiques. Il est vraisemblable que les antiandrogènes soient présents dans les rivières sous forme d’un cocktail de ces molécules, avec peut-être d’autres que nous ne connaissons pas encore. La priorité est d’identifier les coupables. »
La convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, qui vise à interdire le DDT ainsi que d’autres polluants organiques persistants, ratifiée le 22 mai 2001 et effective depuis le 17 mai 2004, a est signée par 158 pays. Il aura fallu 50 ans, après que ses effets néfastes pour la nature et pour les humains soient connus, pour que le DDT soit interdit dans la plupart des pays. Le DDT continue cependant à être utilisé dans certains pays tropicaux pour lutter contre le paludisme et le typhus.
Le DDT, de par sa dangerosité a été inscrit sur la « liste des 12 salopards ». Il s’agit de polluants organiques persistants qui s’accumulent dans l’environnement ainsi que dans la chaine alimentaire.
Le 22 mai 2001, la Convention de Stockholm qui bannissait 12 substances de la surface de la planète a été votée. Les 12 salopards (POP) comprennent huit pesticides, dont le DDT, deux produits industriels (le PCB et l’hexachlorobenzène, qui est aussi un pesticide) et deux sous-produits indésirables de la combustion et de la transformation industrielle, les dioxines et les furanes. En 2009, 9 nouvelles substances chimiques ont été ajoutées dont quatre retardateurs de flammes.
Ces 12 polluants chimiques ont prouvé leur toxicité sur la faune, la flore et les organismes humains, de même que leur persistance et haut degré de bioaccumulation dans l’environnement. Les caractéristiques qu’ont les polluants organiques persistants en font des bombes à retardement pour toute la biodiversité et tous les organismes vivants.
Par exemple, le chlordécone qui est un composé synthétique chloré, utilisé dans la fabrication de produits phytosanitaires. Très persistant dans l’environnement, il est classé potentiellement cancérigène pour l’espèce humaine et très toxique pour la diversité aquatique. Largement utilisé de 1972 à 1993 pour sauver la monoculture de la banane aux Antilles menacée par les charançons (alors que sa toxicité est connue depuis les années 60), cet insecticide a contaminé les neuf dixièmes des populations de Martinique et de Guadeloupe[14] et empoisonné le sol, les rivières et la mer pour des siècles. 13 000 personnes[15] absorbent quotidiennement une quantité de chlordécone dépassant la valeur toxicologique de référence : 0,5 µg/kg/j, en mangeant des légumes qu’ils cultivent dans leur jardin. Cette pollution, cet empoisonnement va reposer sur plus d’une centaine de générations successives futures, la demi-vie[16] du chlordécone dans le sol étant de six siècles.
Décidément, il y a des criminels en liberté !
Douze « salopards », à la liste desquels se sont ajoutés seulement neuf autres. Cela pèse peu à côté des 100 000 substances chimiques qui sont diffusées quotidiennement dans notre environnement ou notre système métabolique. Celles-ci ont été mises sur le marché sans que les industriels et les politiques ne se soient inquiétés de leurs effets à court et long terme sur l’être humain et l’environnement.
En Europe, ce n’est qu’à partir de 1981 que toute nouvelle substance doit être préalablement évaluée concernant son cycle de vie et ses effets sur les cellules vivantes. Les substances existantes n’étaient pas soumises aux mêmes exigences en matière d’informations que les substances nouvelles. Il en résulte un déficit général des connaissances disponibles sur les propriétés de ces substances dites existantes alors qu’elles représentent plus de 99 % du volume total de l’ensemble des substances sur le marché. Par ailleurs, il n’était pas demandé aux utilisateurs en aval de transmettre des informations sur leurs utilisations. Par conséquent, il y a également un manque de données sur les expositions[17].
La règlementation REACH[18] est un règlement européen[19] entré en vigueur en 2007 pour sécuriser la fabrication et l’utilisation des substances chimiques dans l’industrie européenne. L’objectif était de mieux protéger la santé humaine ainsi que l’environnement contre les risques liés aux substances chimiques, tout en « favorisant la compétitivité de l’industrie chimique de l’Union Européenne ». Après six années d’une longue bataille, les lobbies de l’industrie chimique qui représentent une portion infinitésimale de la population européenne sont parvenus à vider le règlement de sa substance afin d’assurer les bénéfices de leurs richissimes actionnaires, au détriment de la santé de 499,8 millions d’individus.
Dans le texte original, deux éléments primaient : l’obligation pour les industriels d’évaluer les substances chimiques présentes dans leurs produits, si la quantité dépasse une tonne par an. Et l’inversion de la charge de la preuve : ce ne serait plus aux autorités publiques de prouver qu’un produit est dangereux, mais aux industriels de montrer pourquoi leur produit n’est pas nocif[20]. Les défenseurs de l’écologie ont utilisé tous les moyens pour faire valoir leurs idées mais n’avaient pas le même poids que les lobbies industriels « La bataille était inégale. « Nous avons réussi à sauvegarder le principe de substitution : si un produit moins nocif que celui qu’ils emploient existe, les industriels ont obligation de l’utiliser, rappelle-t-on chez Greenpeace, mais la procédure d’enregistrement des produits chimiques est trop lente et trop bureaucratique. Les premiers listings ne devraient sortir qu’en 2010.[21]«
En attendant, les dysfonctionnements du système de la reproduction, les cancers ou les troubles du comportement explosent. 30 ans après la déclaration de Wingspread[22] ou est né le concept de perturbateurs endocriniens, rien ou si peu a été fait pour protéger les enfants et leurs futurs descendants. Ce texte fort balisait déjà les dangers qui menacent l’Humanité du fait des polluants chimiques environnementaux. Il était précurseur. Malheureusement, la plupart de nos représentants politiques des 30 dernières années ne l’ont jamais lu :
DECLARATION DE WINGSPREAD
Altérations du développement sexuel induites par les produits chimiques :
le sort commun des animaux et des hommes
« De nombreux composés libérés dans l’environnement par les activités humaines sont capables de dérégler le système endocrinien des animaux, y compris l’homme. Les conséquences de tels dérèglements peuvent être graves, en raison du rôle de premier plan que les hormones jouent dans le développement de l’organisme. (…) » Les signataires déclarent que :
- Nous savons avec certitude que :
Un grand nombre de produits chimiques de synthèse libérés dans la nature, ainsi que quelques composés naturels, sont capables de dérégler le système endocrinien des animaux, y compris l’homme (…).
De nombreuses populations d’animaux sauvages sont d’ores et déjà affectées par ces composés (…).
Les effets varient selon les espèces et les composés. Toutefois, on peut faire quatre remarques :
a. les composés concernés peuvent avoir des effets très différents sur l’embryon et sur l’adulte ;
b. les effets se manifestent surtout sur la génération suivante, et non chez les parents exposés ;
c. la période d’exposition au cours du développement de l’organisme est cruciale, déterminant l’ampleur et la nature des effets ;
d. la période d’exposition la plus critique correspond à la vie embryonnaire, mais les effets peuvent ne pas se manifester avant l’âge adulte.
Les études en laboratoire confirment les développements sexuels anormaux observés dans la nature et permettent de comprendre les mécanismes biologiques mis en jeu.
Les humains sont également affectés par ces composés. Le distilbène, un médicament de synthèse, et beaucoup de composés cités en note ont des effets oestrogéniques. Les femmes dont les mères ont ingéré du distilbène sont particulièrement touchées par le cancer du vagin, par diverses malformations de l’appareil reproducteur, par des grossesses anormales et des modifications de la réponse immunitaire. Les hommes et les femmes exposés pendant leur vie prénatale présentent des anomalies congénitales de l’appareil reproducteur et une baisse de fertilité. Les effets observés chez les victimes du distilbène sont semblables à ce que l’on observe chez les animaux contaminés, dans la nature et en laboratoire. Cela suggère que les humains partagent les mêmes risques
2. Nous estimons extrêmement probable que :
Certaines anomalies du développement constatées aujourd’hui chez les humains concernent des enfants adultes de personnes ayant été exposées à des perturbateurs hormonaux présents dans notre environnement (…).
À moins que la contamination de l’environnement par les perturbateurs hormonaux soit rapidement contrôlée et réduite, des dysfonctionnements généralisés à l’échelle de la population sont possibles (…).
- Les modèles actuels prévoient que :
Les mécanismes d’action de ces composés sont variables, mais d’une manière générale :
a. ils imitent les hormones naturelles en se liant à leurs récepteurs ;
b. ils inhibent les hormones en les empêchant de se lier à leurs récepteurs ;
c. ils réagissent directement ou indirectement avec les hormones elles-mêmes,
d. soit en perturbant leur synthèse,
e. soit en modifiant le nombre de récepteurs dans les organes.
Les hormones mâles et femelles peuvent altérer le développement cérébral (…).
Toute perturbation du système endocrinien d’un organisme en formation peut altérer son développement : ces effets sont habituellement irréversibles (…).
Les effets constatés sur la reproduction des animaux sauvages devraient préoccuper les humains qui exploitent les mêmes sources de nourriture, le poisson contaminé par exemple. Le poisson est une source majeure de contamination chez les oiseaux. Les mécanismes de dérèglement hormonal par les organochlorés chez les oiseaux sont les mieux connus à ce jour. Ils nous aident à comprendre comment l’homme pourrait partager le sort des animaux, car le développement du système endocrinien des oiseaux est très semblable à celui des mammifères. (…)
Texte complet et la liste des signataires à lire sur le site du Sénat français, repris en référence.
Prochain dossier de la série « Alertez les parents, sauvons les enfants »
2. Les perturbateurs endocriniens.
[1] Noemie Naguet de Saint-Vulfran, France Culture 26/10/2018 – Le sang des bébés est pollué : les dangers de l’effet cocktail.
[2] Barbara Demeneix, biologiste et professeure de physiologie au Muséum National d’Histoire Naturelle, dans l’article repris ci-dessus.
[3] L. Ritter, K.R. Solomon, J. Forget et M. Stemeroff et C. O’Leary, LES POLLUANTS ORGANIQUES PERSISTANTS, Rapport d’évaluation DDT-aldrine-dieldrine-endrine-chlordane, Heptachlore-hexachlorobenzène, Mirex-toxaphène, Biphényles polychlorés, Dioxines et furanes
[4] Les courants-jets polaires sont situés entre 7 et 12 km de hauteur, tandis que les courants-jets tropicaux sont situés entre 10 et 16 km au-dessus du niveau des mers. La vitesse de ces vents varie se situe généralement au-dessus de 92 km/h mais elle peut atteindre près de 400 km/h.
[5] (CBS 1963): Columbia Broadcasting System, C.B.S. Reports: The Silent Spring of Rachel Carson, April 3,
1963, In: Lerner KL, and Lerner BW (eds), Environmental issues: essential primary sources, Detroit:
Thomson Gale 2006.
[6] Dichlorodiphényltrichloroéthane synthétisé en 1874. Insecticide ménager et agricole le plus utilisé à partir de la Seconde Guerre mondiale.
[7] PCB = Polychlorobiphényles.
[8] Centre international de recherche sur le cancer
[9] https://www.cancer-environnement.fr/90-Polychlorobiphenyles-PCB.ce.aspx
[10] T. Colborn, D. Dumanoski, J.P. Myers, L’homme en voie de disparition ?, Mens, Editions Terre Vivante, 1997
[11] Cité par Anne-Corine Zimmer, 2009 – Polluants chimiques, enfants en danger, Les Editions de l’Atelier.
[12] European Environment Agency, « Environment and Health », EEA report, N°10/2005, cité par Anne-Corine Zimmer, Ibid.
[13] Publié le 20 janvier 2009 – De nouveaux suspects dans la « féminisation » des poissons – citant l’étude mise en ligne le 7 janvier 2009 sur le site de la revue Environmental Health Pespectives.
[14]France info, 01/03/2021 – Scandale du chlordécone : on vous explique pourquoi la Martinique et la Guadeloupe se mobilisent contre « l’impunité » https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/pesticides/scandale-du-chlordecone-on-vous-explique-pourquoi-la-martinique-et-la-guadeloupe-se-mobilisent-contre-l-impunite_4315511.html
[15] ASEF (Association Santé Environnement France), 15 février 2018 – Les Polluants Organiques Persistants – la synthèse de l’ASEF, disponible sur www.asef-asso.fr/
[16] Une demi-vie désigne le temps nécessaire à une substance contenue dans un environnement pour qu’elle soit diminuée de la moitié de sa valeur initiale. Une molécule perd ses effets après cinq à sept demi-vies. Dans le cas du chlordécone, cela reviendrait à ne plus influencer l’environnement dans une fourchette située entre 3000 et 4200 ans.
[17] https://www.prc.cnrs.fr/reach/fr/substances.html
[18] Acronyme, en anglais, d’Enregistrement, évaluation et autorisation des substances chimiques.
[19] règlement n°1907/2006
[20] Adeline Haverland et Thomas Bronnec, L’Express 06/06/2009 – Comment les lobbys ont façonné la directive REACH
[21] Adeline Haverland et Thomas Bronnec, L’Express 06/06/2009, ibid.
[22] A lire sur https://www.senat.fr/rap/r10-765/r10-76514.html
Août 31, 2021 | Ecole - Education - Inclusion, Environnement - Santé - Alimentation
Ecole post-COVID et santé mentale des élèves
Une pandémie qui a surpris l’école
Venant de Wuhan en Chine, le virus de la COVID-19 s’est rapidement disséminé à travers le monde créant une pandémie inattendue, à mach 0,85 (la vitesse des avions de ligne, soit environ 920 km/h). Au 14 mars 2020, on répertorie plus de 147 000 cas cumulés (dont 72 500 guéris et 5 500 décédés). Plus de 150 pays sont affectés. L’OMS déclare que « l’Europe est l’épicentre de la pandémie[1] »
Le 12 mars 2020 au soir, les gouvernements belges (mais aussi français) annoncent leur décision de fermer les écoles dès le 16 mars afin limiter la transmission du virus, et de protéger les enfants. Chacun pensait qu’elles rouvriraient après les vacances de Pâques, mais on sait ce qu’il en a été : confinement, puis reprise « à la carte » en juin 2020, refermeture des écoles secondaires lors de la deuxième vague le 28 octobre 2020, prolongation du congé de Toussaint, apprentissage à distance, puis en hybridation toujours à la carte. Certaines écoles alternant la présence des élèves par demi-classes un jour sur deux, d’autres une semaine sur deux.
La fermeture de l’école a impacté la santé mentale des élèves
Comme le rappelle l’OMS[2], la santé mentale est une composante essentielle de la santé. C’est un état de bien-être qui permet à un être humain de se réaliser, de surmonter les tensions normales de la vie, d’accomplir un travail productif – et donc aussi des apprentissages scolaires – et de contribuer à la vie de sa communauté. Elle définit la santé comme suit : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».
La santé et le bien-être mental sont indissociables. Ils permettent à une personne de penser, d’agir, de ressentir, d’échanger avec les autres et de profiter de l’existence. Durant le confinement, puis par la suite avec les mesures restrictives et les gestes barrières[3] imposés, de nombreuses personnes, adultes et enfants ont vu leur santé mentale décliner. Cela a été une période difficile pour la plupart d’entre nous, à des degrés divers qui dépendaient de la situation personnelle de chacun.
Si, au début du confinement, les élèves ont eu l’impression d’être en vacances, bien vite ils ont réalisé que c’était tout sauf des vacances. Ils ont commencé à s’ennuyer de leurs amis et amies, ont montré des signes de tristesse, ont ressenti une immense solitude. Selon les écoles, ils ont reçu ou non des activités à réaliser (les nouveaux apprentissages étaient bannis) qui ont permis de maintenir le lien avec leur.s professeur.s. Ensuite, l’apprentissage en distanciel a été une nouvelle épreuve. Beaucoup ont été démotivés face à l’utilisation de la technologie ou, tout simplement, n’avaient pas les outils pour suivre les apprentissages en ligne. Les relations parents-enfants, parents-ados n’ont pas toujours été faciles. Le fait que les premiers devaient parfois travailler à la maison, tout en s’occupant du ménage et de leurs enfants a souvent entraîné un burnout parental.
Selon une étude des mutualités libres[4], les jeunes de 15 à 25 ans ont consommé plus d’antidépresseurs à la fin de l’année 2020. Les admissions dans les hôpitaux psychiatriques et les services psychiatriques des hôpitaux généraux, ont diminué. Les hôpitaux se limitant aux soins COVID-19, les prises en charges pour raisons de santé mentale ont été retardées, tant chez les jeunes que dans la population générale. Le gouvernement ayant autorisé les consultations par téléphone, la mutualité a constaté une augmentation significative chez les 15-25 ans, du fait que ces jeunes ont été fortement impactés par les mesures contraignantes suite à la pandémie. Cependant, de nombreux problèmes de santé mentale n’ont pas été traités ou fait l’objet de diagnostics en raison de la pandémie.
En ce qui concerne les troubles de l’anxiété et les symptômes dépressifs, les adolescentes (36%) semblent plus fragilisées que leurs camarades masculins (19%), en raison du manque d’interactions sociales, essentielles à la construction de leur identité à ce moment de leur vie[5].
Durant la crise sanitaire, les études sur la santé mentale se sont multipliées et affinées. « Du point de vue de la santé mentale, les jeunes sont la tranche d’âge la plus touchée par la crise sanitaire. La santé mentale des personnes plus âgées dépend énormément du contexte. Chez les jeunes, la situation est très différente : on a l’impression qu’il y a un effet général qui touche l’ensemble de la jeunesse, peu importe le contexte », explique Olivier Luminet, professeur de psychologie de la santé à l’UCLouvain et membre du groupe d’experts « psychologie et corona », cité par l’Echo[6]. Et de préciser que l’étude menée sur les étudiants du supérieur en avril 2020 faisait état de 35% d’étudiants en état de dépression et/ou d’anxiété, et qu’un an plus tard, ce chiffre était monté à 55% !
Toujours dans l’article de l’Echo, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik exprime ses inquiétudes en affirmant « Les enfants pourront rattraper leur retard, pas les adolescents (…). Certains adolescents vont décrocher pour toute la vie ».
Il est donc essentiel que les souffrances subies par cette catégorie d’âge soient particulièrement prises en compte par le milieu éducatif et que l’on change enfin tant la manière d’enseigner, que d’évaluer et de certifier. Trop d’élèves et d’étudiants sont fragilisés. Pour certains sans doute à vie. Ce seront, évidemment, des proies faciles pour les indécrottables adeptes de l’échec scolaire.
L’école a peu tenu compte de l’état psychique des élèves, fragilisé par la pandémie
L’année scolaire 2020-2021 s’est terminée de manière disparate. Après que le monde associatif ait appelé les responsables politiques et les pouvoirs organisateurs à aménager la fin de l’année sans faire d’examens, afin de prioriser les apprentissages qui n’ont pas été compris ou vus durant l’hybridation (ce qui a été traduit dans une circulaire ministérielle), les écoles ont réagi de manière dispersée. Le réseau Wallonie-Bruxelles Enseignement a appelé ses écoles à respecter l’esprit de la circulaire, ce que beaucoup d’entre elles ont fait, mais dans les autres réseaux, aucun appel de ce genre n’a été lancé, le SEcrétariat Général de l’Enseignement Catholique (SEGEC) rappelant même que les écoles avaient une totale liberté pédagogique. Cela n’a, évidemment, pas incité les écoles les moins respectueuses des élèves à tenir compte de la circulaire et donc des Droits fondamentaux de ces derniers.
Dès lors, on s’est retrouvé avec des écoles qui respectaient les Droits de leurs élèves, tandis que d’autres ont mis en place une session d’examens. Les premières ont donné cours en évaluant formativement. Les secondes ont maintenu leur tri habituel entre ceux qui avaient la chance d’être bien équipés sur le plan informatique, recevant un soutien de leurs parents, ayant un domicile confortable et calme, et nés dans un milieu favorisé et, de l’autre côté, ceux que la société a défavorisés à la naissance n’ayant pas l’environnement favorable des premiers. Ces derniers ont été abandonnés par leurs professeurs, ont décroché et se sont retrouvés orientés ou obligés de redoubler.
Ces écoles sélectives n’ont en rien tenu compte de la situation mentale des élèves ni du fait que L’enseignement hybride a été inefficace et n’a pas permis à une majorité d’élèves d’acquérir les apprentissages. De plus, nombre de professeurs ont été incapables (ce qui n’est nullement leur faute) de donner efficacement cours par visioconférence. Comme leurs élèves, ils n’ont pas été formés pour cela.
Les apprentissages n’ont donc été assimilés qu’en partie, voire pas du tout. On se retrouve donc au début d’une nouvelle année scolaire avec des élèves qui sont en retard dans leurs apprentissages et qui, pour certains sont – et resteront – en décrochage complet, voire ont conservé des « troubles mentaux » hérités de la pandémie.
Il n’est un secret pour aucun professionnel de l’école que la crise du COVID-19 a eu un effet significatif sur la santé mentale des jeunes (OCDE 12 mai 2021[I]). De tous les jeunes ! Certains s’en sont tirés mieux que les autres (voir ci-dessus) alors que les plus fragiles n’ont pas été épargnés. Pire, leurs souffrances n’ont même pas été prises en compte par l’établissement scolaire qui a pour vocation de les instruire.
L’OCDE[II] précise que « La prévalence des symptômes anxieux et dépressifs a augmenté de manière spectaculaire chez les jeunes et reste plus élevée qu’avant la crise et que celle observée dans d’autres classes d’âge, en dépit de la réouverture partielle de l’économie. » Il est donc clair, pour tous les intervenants scolaires que de nombreux élèves resteront avec des séquelles de la crise des mois encore, voire des années durant. Il est donc impérieux de prendre ces données en compte et d’adapter tant les cursus que les méthodes pédagogiques à cette situation. Il faut donc réinventer l’Ecole et cette crise sanitaire nous donne l’occasion de le faire, sans attendre les résultats du trop petit « Pacte pour un Enseignement d’Excellence ».
Inquiétudes sur la santé mentale des jeunes
Nombreuses sont les familles à être inquiètes sur la manière dont l’école soutiendra leur enfant. De nombreux élèves, aussi, ne retournent pas à l’école la fleur au fusil. Il y a tant de craintes… D’abord la crainte de ne pas avoir les connaissances suffisantes, ensuite la crainte de ne plus être capable d’apprendre, tant ils sont perturbés par ce qu’ils ont vécu durant un an et demi.
La santé mentale des jeunes s’est sensiblement détériorée durant la pandémie. Et ce, dans tous les pays. Toujours selon l’OCDE, les problèmes de santé mentale chez les 15-24 ans ont été multipliés par deux, voire plus. En mars 2021, les jeunes étaient 30 à 80 % plus susceptibles de faire état de symptômes dépressifs ou anxieux que les adultes en Belgique, aux Etats-Unis et en France.
La quarantaine et l’isolement, tout comme les règles sanitaires strictes telles que celles qui concernaient – et concernent encore – la distanciation sociale, ont eu des effets extrêmement négatifs sur les enfants et sur les jeunes. Certains ont des symptômes de tests post-traumatiques, sont dans la confusion ou entretiennent une colère interne par rapport à tout ce qu’ils ont dû vivre – ou plutôt – tout ce qui les a empêchés de vivre. Ces effets peuvent être de longue durée et durer des mois, voire des années après la pandémie (Brooks et coll., 2020[III]).
Principaux facteurs de stress des élèves
La fermeture des établissements scolaires, puis l’hybridation, ont affaibli leurs facteurs de protection. Dans un établissement scolaire, chaque élève a ses habitudes quotidiennes rythmées par l’horaire de la classe et celui de l’école. Leur fermeture a brisé ces habitudes qui permettent de structurer le temps et ainsi de ne pas angoisser sur l’avenir immédiat. De même, le sentiment d’appartenance à un groupe et les interactions sociales ont été brisés et ces liens sont essentiels à la construction de l’individu. Les réseaux sociaux (qui sont loin d’être si sociaux que cela) n’ont pas remplacé la cour de récréation, les moments de temps libre et de convivialité, tout comme les heures de sport ou la garderie du matin, du midi ou du soir.
La quarantaine a généré un stress intense : crainte de l’infection de soi ou de ses proches, apprentissages de gestes barrières parfois incompréhensibles, de lavage des mains quarante fois par jour, un enfermement parfois dans des conditions apocalyptiques (appartement exigu, sans terrasse, plusieurs enfants par chambre, pas de matériel informatique, connexion Wifi défaillante, etc.) et donc la frustration d’être enfermé sans plus pouvoir revoir sa famille, ses amis, aller dans un commerce, …
Ne fréquentant plus l’école et confrontés aux actes d’une vie quotidienne routinière, l’ennui a été dur à supporter. Si ce dernier a des bienfaits lorsqu’il ne dure pas trop longtemps (il permet la créativité, l’altruisme, libère l‘esprit, …), le confinement du COVID a ralenti le temps quotidien. Les jeunes n’ont plus trouvé de sens à leurs journées, à leurs semaines, à leur vie… Or, l’on sait que la propension à l’ennui est positivement corrélée au niveau de symptômes dépressifs et anxieux[IV] [V]. Certains élèves sont plus touchés par l’ennui. Par exemple, les élèves avec un TDAH ont un niveau d’ennui plus élevé[VI].
La peur de manquer de provisions, de voir ses parents manquer de revenus, certains étant au chômage du fait que leur entreprise ait fermé ou que leur emploi ne peut plus s’exercer. Enfin, le manque d’informations a particulièrement touché les jeunes dans les familles les moins informées.
En résumé, les facteurs de stress dus à la pandémie les plus courants (p. ex. Arim et coll., 2020[VII]; Brooks et coll., 2020[VIII]; Holmes et coll., 2020; Kaddatz, 2020[IX]; Taylor et coll., 2020[X]; Nations Unies, 2020, 13 mai[XI]; Vigo et coll., 2020[XII]) chez les jeunes ont été :
- Les conséquences non seulement sociales, mais également économiques ;
- La solitude, la perte des liens sociaux, mais aussi parfois le deuil compliqué par les mesures restrictives ;
- La peur de la stigmatisation si par hasard un membre de la famille devait être contaminé ;
- La diminution des moyens financiers de la famille, la peur de ne plus pouvoir accéder aux besoins fondamentaux ;
- Les tensions – et parfois les violences – familiales dues au confinement dans un lieu trop exigu ou du fait de devoir toujours être ensemble ;
- L’impossibilité (ou la peur) d’avoir accès à la santé. Les médecins généralistes, tout comme les hôpitaux ont perdu de vue certains patients (donc aussi des enfants et des jeunes) ayant des pathologies graves ;
- La durée de la pandémie qui a engendré une incertitude sur l’avenir et donc un stress intense ;
- Le manque d’informations précises ou le trop-plein d’informations non vérifiées. Les médias sociaux laissaient transiter à la fois les informations mais également les désinformations ;
- Les effets neurologiques potentiels de la COVID-19 elle-même.
Les jeunes issus de milieux populaires ont été particulièrement touchés par la fermeture des établissements scolaires
Chaque année, les vacances d’été sont les plus longues périodes d’interruption de l’école. Avec la pandémie, cette période a été multipliée par trois. Or, l’on sait que des vacances d’été ordinaires creusent les écarts en matière d’apprentissage et augmente l’isolement, la faim et les comportements sédentaires des populations les plus précarisées[XIII]. Ces facteurs sont déjà à risque de détérioration de la santé mentale, chaque année en été. Que dire alors de ces triples grandes vacances et de l’année scolaire suivante où ils n’ont été qu’à moitié à l’école.
L’enseignement en distanciel a montré de grandes disparités quant à l’accès à Internet (matériel, compétence pour l’utiliser, connexion Wifi, …) et la qualité de l’endroit pour étudier (chambre ou non, seul ou non, …). Aucune des conditions nécessaires à l’apprentissage en ligne n’était réunies.
De ce fait, les problèmes de santé mentale chez les jeunes qui en ont souffert n’ont pas pu être identifiés par le corps professoral qui est bien placé pour le faire, et donc n’ont pas été signalés aux services de santé scolaire. Ceux et celles qui bénéficiaient de leur soutien avant le confinement n’ont bien souvent pas pu continuer à en bénéficier. Les services de santé mentale ont été débordés et ne pouvaient plus prendre en charge des cas graves. De ce fait, les tentatives de suicide ont fortement augmenté.
Conclusion : l’école doit prendre ces données en compte
Il est urgent de protéger la santé mentale des élèves !
Il est fondamental que les écoles – ou à défaut chaque enseignant – adoptent une approche pédagogique plaçant la santé mentale au cœur de leurs pratiques quotidiennes.
Croire qu’une forme de retour à la normale va remettre les curseurs à zéro et que chaque élève perturbé par le stress vécu pendant la pandémie va se « retaper » subitement, serait prendre les vessies pour des lanternes. Les troubles psychiques, comme décrits ci-dessus, vont mettre au mieux des mois à s’apaiser, voire des années. Ces élèves sont des victimes et ils ne sont pas coupables des comportements qu’ils pourraient avoir tels qu’un rejet de l’école, des phobies, un décrochage constant, des formes de mutisme, de colère, etc.
Ces élèves sont le plus à risque de décrochage scolaire et de redoublement. Il faut donc tout mettre en place pour les accrocher et ne pas les laisser filer. Ils doivent dont être détectés et accompagnés jusqu’à la fin de leur scolarité. Les troubles qu’ils subissent les mettent en situation de handicap par rapport à l’école et les apprentissages qui y sont donnés. De ce fait, ce sont des élèves à besoins spécifiques. Même si un bilan n’a pas été effectué par un spécialiste (nombre d’élèves refuseront de se faire diagnostiquer), ils doivent pouvoir bénéficier d’aménagements raisonnables, en commençant par la bienveillance et la compréhension de ce qu’ils ont vécu[7]. Nous suggérons, notamment :
- D’être sensibles aux signes d’anxiété ou de difficultés de santé mentale et de travailler en lien avec les CPMS et les Centres PSE ;
- De porter une attention particulière aux élèves les plus vulnérables (élèves à besoins spécifiques, porteurs d’une déficience, qui étaient en situation d’échec, …) ;
- De communiquer avec les élèves selon les principes de bienveillance et d’interventions positives ;
- De mettre en place des activités avec tous les élèves en lien avec la bienveillance, l’empathie, la gestion des émotions,
- De maintenir une routine et des activités se rapprochant d’une situation normale (malgré le port obligatoire du masque en secondaire – essentiellement à Bruxelles).
Sur les pratiques pédagogiques, chaque école pourra interroger les pratiques de pédagogies actives et notamment sur la manière de permettre de donner du sens à la parole des élèves, via la pédagogie institutionnelle et, spécialement, les conseils de coopération (qui n’ont rien à voir avec les « conseils de classe »). Il est également possible de mettre de nombreuses choses en place indépendamment et en fonction des besoins de chaque étudiant comme, par exemple, aménager la passation des examens, mettre en place des évaluations non cotées c’est-à-dire des évaluations formatives, soulager les élèves de travaux extrascolaires qui seraient plutôt faits en classe avec l’aide du/des professeur/s et/ou de tuteurs. La différenciation pédagogique devrait être le maître-mot de tous les intervenants.
Références
[1] Le Figaro, Coronavirus : l’Europe est désormais à l’«épicentre» de la pandémie, affirme l’OMS, Publié le 13/03/2020
[2] OMS, 30 mars 2018, https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mental-health-strengthening-our-response
[3] Académie française, 7 mai 2020, Comment faire l’accord au pluriel d’un groupe composé de deux noms apposés ? Quand il y a identité entre les deux éléments, les deux prennent la marque du pluriel : on écrit ainsi des danseuses étoiles parce que ces danseuses sont des étoiles. Le contexte permet d’ailleurs bien souvent de dire simplement des étoiles. S’il n’y a pas identité, seul le premier élément prend la marque du pluriel, on écrit donc des films culte parce que ces films font l’objet d’un culte, mais n’en sont pas ; on ne dit jamais, parlant d’eux, des cultes. S’agissant de geste barrière, on peut considérer que ces gestes forment une barrière et préférer le singulier, mais dans la mesure où l’on peut aussi dire que ces gestes sont des barrières, l’accord au pluriel semble le meilleur choix, et le plus simple. On écrira donc des gestes barrières.
[4] Mutualités libres, 10/05/2021, Impact de la Covid-19 sur la santé mentale des jeunes, https://www.mloz.be/fr/covid-19-sante-mentale-jeunes
[5] RTBF TENDANCE avec AFP, 17 mars 2021, Santé mentale : les adolescents touchés de plein fouet par la pandémie du coronavirus.
[6] Cité dans l’ECHO, 10 avril 2021, Quel avenir pour la génération Covid ?
[7] Pour savoir comment réagir face à un élève susceptible de présenter des troubles de la santé mentale, il existe une brochure téléchargeable sur le site du l’équipe de Consultation et Liaison Intersectorielle du Réseau Hainuyer pour l’Épanouissement et la Santé mentale des Enfants, Adolescents et Usagers assimilés (RHESEAU), https://www.rheseau.be/wp-content/uploads/2020/10/4-Navigation-au-coeur.pdf
[I] Préserver la santé mentale des jeunes pendant la crise du COVID-19 https://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/preserver-la-sante-mentale-des-jeunes-pendant-la-crise-du-covid-19-dbcb04f5/
[II] Ibid
[III] Ibid.
[IV] Isacescu J., Struk A.A., Danckert J. Cognitive and affective predictors of boredom proneness. Cogn Emot. 2017;31(8):1741–1748.
[V] Sommers J., Vodanovich S.J. Boredom proneness: its relationship to psychological- and physical-health symptoms. J Clin Psychol. 2000;56(1):149–155
[VI] Carriere J.S.A., Cheyne J.A., Smilek D. Everyday attention lapses and memory failures: the affective consequences of mindlessness. Conscious Cogn. 2008;17(3):835–847
[VII] Arim, R., Findlay, L., & Kohen, D. (2020). Les répercussions de la COVID-19 sur la santé et lecomportement des jeunes : résultats de la Série d’enquêtes sur les perspectives canadiennes 1. Catalogue no. 45-28-0001. Ottawa, Ontario: Ministre de l’Industrie. https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/45-28-0001/2020001/article/00020-fra.htm
[VIII] Ibid.
[IX] Kaddatz, J. (2020, April 9). Les familles peinent à composer avec les conséquences financières de la pandémie de COVID-19..L’Institut Vanier de la famille. https://vanierinstitute.ca/families-struggle-to-cope-with-financial-impacts-of-the-covid-19-pandemic/
[X] Taylor S., Landry C., Paluszek M., Fergus T.A., McKay D., Asmundson G.J.G. (2020). Development and initial validation of the COVID Stress Scales. Journal of Anxiety Disorders,72. https://doi.org/10.1016/j.janxdis.2020.102232
[XI] Nations unies (13 mai 2020). Note de synthèse : La santé mentale dans le cadre de la lutte contre la COVID-19. https://www.un.org/sites/un2.un.org/files/un_policy_briefcovid_and_mental_health_final.pdf
[XII] Ibid.
[XIII] Morgan, K. et al. (2019), « Socio-Economic Inequalities in Adolescent Summer Holiday Experiences, and Mental Wellbeing on Return to School: Analysis of the School Health Research Network/Health Behaviour in School-Aged Children Survey in Wales », International Journal of Environmental Research and Public Health, vol. 16/7
Juin 22, 2021 | Ecole - Education - Inclusion, Environnement - Santé - Alimentation
Nous sommes réunis, ce 21 juin 21 devant la presse, pour remettre le bulletin de l’Ecole. Je parle de l’Ecole, avec un grand « E », càd notre système éducatif, mais cela concerne aussi nombre d’écoles avec un petit « e ». Elles se reconnaîtront car ce sont celles qui font le système scolaire – cette grande œuvre – et qui lui permette de fonctionner depuis des décennies.
D’aucuns vous diront que la reprise en présentiel le 10 mai dernier était une mauvaise chose. Pour ma part, je prétends l’inverse. D’accord, des associations de première ligne renchériront en disant qu’un nombre important d’enfants qu’ils soutiennent sont en grande difficulté face aux apprentissages, que le présentiel n’aurait pas comblé les lacunes de l’hybridation et que les écoles n’arrêtent pas de faire des interros au lieu de donner cours. Des familles appellent au secours parce que leurs enfants font des tentatives de suicide ou se scarifient car on leur annonce qu’ils redoubleront ou « ramasseront les poubelles toute leur vie » (sic). Bon, d’accord, mais rassurez-vous bonnes gens, les écoles – et, quand je parle des écoles, je parle des directions et des pouvoirs organisateurs – les écoles savent ce qui est bon pour leurs élèves. Elles savent ce qu’elles doivent faire !
Voilà, précisément, pourquoi je pense que la reprise en présentiel le 10 mai dernier était une excellente chose. Non seulement, cela a permis aux « bonnes » écoles de révéler leur face cachée, mais cela nous a surtout permis de voir à quel système scolaire nos élèves avaient réellement affaire.
La circulaire a demandé à toutes les écoles de tenir compte de la crise et des conditions impossibles auxquelles les élèves ont été confrontés, afin de ne pas leur faire perdre injustement une année scolaire. Si certaines écoles – et il y en a – ont joué le jeu dans l’intérêt de leurs élèves, nombre d’autres ne se sont pas seulement assises sur la circulaire, mais l’ont jetée à la poubelle.
Celles qui se croient « bonnes écoles », qui veulent défendre leur réputation ont, non seulement organisé des examens mais ont évalué leurs élèves de manière constante et les ont assommés de travaux, de devoirs et de leçons à la maison depuis la reprise en présentiel. Non seulement, l’école est redevenue une souffrance, mais elle s’impose aussi à la maison en bouffant le peu de temps libre qu’il reste à leurs élèves.
Nous savions que nous avions un des pires – sinon le pire – système scolaire de l’ensemble de l’OCDE. Cette reprise en présentiel a démontré que l’Ecole que l’on pensait inefficace, inégalitaire, discriminante, injuste et maltraitante, l’est bien plus encore qu’on ne le pensait. » L’Ecole a enfin montré ce qu’elle était réellement et profondément. En matière d’inégalités, de discriminations, on n’a jamais fait aussi bien. Nous battons tous les records précédents et cela, uniquement grâce aux « bonnes » écoles et à leurs pouvoirs organisateurs.
Ces « bonnes » écoles n’ont pas repris les cours pour combler les retards. Au contraire, elles ont fait des interros et des examens pour pouvoir reprendre leur petite sélection sociale comme au bon vieux temps d’avant Covid. Car en 2020, elles ont déjà dû relâcher leur petit jeu du redoublement. Deux années, c’est trop pour garder cette « bonne » réputation de préparer à l’université ou aux « hautes écoles ». On y met une pression insupportable sur les jeunes, sans la moindre pitié. On y menace leur réussite, on les y rabaisse. Mieux encore, ces « bonnes » écoles se tamponnent complètement de leurs enseignants au bord du burn-out, obligés de pratiquer cette sélection inique et profondément inhumaine.
N’attendons pas de miracles des conseils de classe. S’il est bien une institution « hors la loi », c’est le conseil de classe. Car le Droit fondamental est très clair « Nul ne peut être à la fois juge et partie ![1] ». Il s’agit d’un tribunal où chaque juge est partie prenante. Celui-ci a donné le cours et il décide de sanctionner celles et ceux à qui il a été incapable de transmettre tous les savoirs, ou parce qu’ils lui ont déplu à un moment ou un autre, ou enfin parce que leur tête, leur origine, leur prénom ne leur plaît pas. En fait personne ne sait pourquoi car c’est aussi le seul tribunal en Belgique où l’on juge un être humain sans que ce dernier (et/ou ses représentants légaux) ne puisse se défendre, ni être représenté et défendu. On est loin de tout système démocratique. Dans les régimes totalitaires on fait au moins des parodies de procès. Dans notre système scolaire non démocratique, on n’en prend pas la peine : on condamne sans la moindre forme de procès.
Mon commentaire sur le bulletin de l’école ne sera pas « Peut mieux faire ! », car il n’est pas possible de faire pire. D’ailleurs, à force de creuser, elle n’a toujours pas trouvé de pétrole. Nous avons une école qui est en échec scolaire depuis le début de la massification de l’enseignement il y a 76 ans et qui n’a toujours pas compris comment on faisait école.
C’est l’Ecole du non-droit, l’école de l’injustice, l’école de l’amplification des inégalités sociales. Les conseils de classe vont décider de l’avenir de jeunes sans même tenir compte de leur intérêt supérieur. Elle va empêcher certains de rester dans leur filière pour les diriger vers une filière professionnalisante dont ils ne veulent pas. Ce faisant, ils les condamnent à une chute inéluctable vers la pauvreté, en passant par le décrochage scolaire, la sortie sans diplôme, l’impossibilité de trouver un emploi de qualité. En condamnant ces élèves à la pauvreté, ces conseils de classe condamneront aussi leurs enfants, leurs petits-enfants, leurs arrières-petits-enfants, … qui, loin d’être nés, sont déjà pauvres.
L’OCDE nous a rappelé il n’y a pas longtemps qu’il faut 6 générations pour qu’une famille sorte de la pauvreté. C’est-à-dire 180 ans ! Sur une simple décision d’un « simple » conseil de classe, six générations sont inéluctablement condamnées, non plus à vivre, mais à se battre pour la survie.
La reprise en présentiel était une bonne chose. Elle nous permet de confirmer la conclusion que nous faisons chaque année : l’Ecole est un lieu où il ne faut surtout pas mettre d’élèves.
Jean-Pierre Coenen
Président de la Ligue des Droits de l’Enfant
Instituteur
[1] https://dictionnaire.notretemps.com/ : L’expression actuelle trouve sa source dans la formule latine « Aliquis non debet esse judex in propria causa, quia non potest esse judex et pars » qui se traduit par « personne ne doit être juge de sa propre cause, parce qu’on ne peut être à la fois juge et partie ». Bien connue des juristes, elle signifie qu’on ne peut pas rendre une décision juste lorsqu’on a un intérêt à la décision rendue.
Fév 6, 2021 | Environnement - Santé - Alimentation
Depuis des siècles, l’Homme a combattu les maladies infectieuses sous des formes diverses : exclusion des lépreux au Moyen-âge, chassés des villes ou placés dans des léproseries. On plaçait également en en quarantaine[1] les passagers qui venaient d’un port où régnait la peste. Ceux-ci étaient enfermés pendant 40 jours dans un lazaret[2].
Depuis des millénaires, les Hommes ont compris que certaines maladies, comme la peste, ne se contractaient jamais deux fois. Les personnes qui en avaient réchappé pouvaient s’approcher des malades sans crainte et les soigner.
A partir du XVIIIe siècle en Europe, pour les prémunir de la variole[3] (appelée aussi petite vérole), on mit des enfants sains en présence d’individus contagieux, afin qu’ils soient immunisés. Comme pour d’autres maladies, les sujets qui en avaient réchappé ne risquaient plus de récidives. On leur inoculait le pus d’une pustule fraîche par scarification[4]. C’était la variolisation naturelle, prélude à la variolisation artificielle. Cette première technique[5], qui n’était pas sans dangers, prétendait protéger les enfants d’une variole grave.
A la fin du XVIIIe siècle, Edward Jenner, médecin anglais qui pratiquait couramment l’inoculation de la variole découvrit que les vachères qui avaient été atteintes de vaccine (appelée aussi variole de la vache – Vacca) ne contractaient jamais la variole. La vaccine se manifestait sous la forme de pustules sur leurs mains. Le 14 mai 1796, Jenner transféra un peu de pus prélevé dans une de ces pustules au fils d’un de ses employé. James Phipps avait 8 ans et n’avait jamais contracté la variole.
L’enfant développa quelques symptômes peu graves (augmentation de quelques ganglions, un peu de fièvre, mal de tête, courbature et manque d’appétit. Il retrouva vite la santé. Jenner inocula ensuite la variole au jeune Phipps, puis, plus tard à la fermière. Dans les deux cas, la variolisation ne prit pas. Ils étaient immunisés. Ainsi la vaccine, maladie anodine des vaches, protégeait l’Homme contre une maladie mortelle, la variole.
Jenner publia un ouvrage à compte d’auteur, qui fut rapidement traduit dans plusieurs langues. La technique était complexe : on inoculait le pus prélevé sur le pis d’une vache à un premier individu. Ensuite, lorsque celui-ci voyait apparaître ses premières pustules, on en prélevait le pus qu’on transmettait à un second individu et ainsi de suite. C’est ainsi qu’est née la vaccination bras à bras. Evidemment, cela nécessitait d’avoir toujours un réservoir de pustules fraîches sous la main. On utilisa alors les enfants de orphelinats qu’on vaccinait par roulements, afin de garantir le stock de pustules[6]. En effet, la préservation de la vaccine in vitro présentait des difficultés techniques.
Les pays qui pratiquèrent la vaccination virent la mortalité pour cause de variole chuter de 10% à 1% en seulement quelques années. Pourtant, la vaccination de bras à bras n’était pas sans danger, entraînant d’autres contaminations comme la syphilis et les hépatites.
Certains pays pratiquaient des rappels systématiques à l’âge adulte, tandis que d’autres non. Dans ces derniers des épidémies réapparurent qui firent des centaines de milliers de morts[7].
La variole ne disparut de la plupart des régions du globe que dans les années 1950, mais ce n‘est qu’en 1980 que l’OMS déclara officiellement qu’elle était la première maladie à avoir été combattue par des actions concertées et ciblées à l’échelle mondiale[8].
Mais la vaccination de Jenner ne protégeait que contre la variole. Pour d’autres maladies graves, on continuait à pratiquer l’inoculation. Celle-ci avait de fâcheux inconvénients : un taux de mortalité conséquent et la contagiosité des patients traités durant les premiers temps.
C’est Pasteur qui, en 1879, découvrit le premier vaccin atténué artificiellement. Il ne s’agissait plus d’une souche proche de celle qui provoque la maladie, mais de virus de la même souche que la maladie, affaiblis.
Pasteur, qui travaillait alors sur le choléra des poules, retrouva de vieilles cultures de cette bactérie qu’il administra à ces poules. Celles-ci tombèrent malades mais n’en moururent pas. Même en les infectant avec des germes frais et virulents. Il comprit que le changement de virulence provenait de l’exposition de ces cultures à l’oxygène de l’air. Il énonça alors le principe de la vaccination comme étant « des virus affaiblis ayant le caractère de ne jamais tuer, de donner une maladie bénigne qui préserve de la maladie mortelle. »
Après s’être attelé à produire un vaccin atténué contre le charbon des moutons, Pasteur décida d’adapter la vaccination à l’Homme. Il fixa sa priorité sur une maladie qui touche à la fois l’Homme et les animaux : la rage. A partir de cerveaux d’animaux morts de la rage, il réussit à en cultiver des germes et à en atténuer la virulence. Après deux semaines, le virus n’était plus mortel pour les chiens.
C’est le 4 juillet 1884 que Pasteur l’administra avec succès sur un jeune berger mordu par un chien enragé, Joseph Meister. Mais ce ne sera qu’en 1931 que Joseph Lennox Pawan réussit à mettre en évidence le virus responsable de cette maladie.
Au début du XXe siècle la lutte contre la tuberculose fit un bond en avant avec la mise au point de plusieurs vaccins contre le bacille de Koch[9], le « bovo vaccin » préparé en 1902 par Behring et le « Tauruman » préparé par Robert Koch. Ces deux vaccins ne prouvèrent pas leur efficacité sur le long terme. Ce ne sera qu’en 1921 que Calmette et Guérin parviendront à mettre au point un autre vaccin : le BCG[10]. A la fin d’essais cliniques entre 1924 et 1926, il avait montré une efficacité de 93% contre a tuberculose mortelle chez le jeune enfant[11]. C’est encore aujourd’hui le vaccin le plus administré au monde[12]. Mais il sera sans doute bientôt dépassé dans le cadre de la lutte contre le Coronavirus.
Les progrès de la vaccination continueront tout au long du XXe siècle. Le vaccin contre la diphtérie et le tétanos apparut dans les années 1920[13], comme celui contre typhoïde. Dans les années 1930, ce fut le vaccin contre la fièvre jaune. Dans les années 40, Jonas Salk met au point le premier vaccin contre la grippe afin de pouvoir vacciner le corps expéditionnaire américain en Europe. Vingt ans plus tard, le premier vaccin injectable contre la poliomyélite. Toujours dans les années 50-60, les vaccins à plusieurs valences (vaccins combinés) indiqués dans la prévention de pathologies conjointes comme la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, la poliomyélite, ainsi que des infections invasives à Haemophilus influenzae type b telles les méningites, les septicémies, les cellulites, les arthrites, les épiglottites, etc.
Après les années 1960 la mise au point de vaccins contre les pneumocoques, les méningocoques A et C ainsi que celui contre le papillomavirus humain (2006), se sont ajoutés à la longue liste.
Aujourd’hui, c’est le génie génétique qui s’appuient sur l’ADN recombinant[14]. On insère un gène d’un virus dans une cellule (de levure, d’animal…) pour produire un antigène. Ce procédé permet le développement du vaccin contre l’hépatite B, au début des années 80[15].
[1] Le premier Etat à imposer la quarantaine afin de protéger son commerce fut la république de Venise en 1423.
[2] Etablissement dont le nom vient de la parabole de Lazare, personnage d’un pauvre et d’un riche dans l’évangile selon Luc.
[3] Il est vraisemblable que la variole soit une zoonose (maladie infectieuse qui se transmet naturellement de l’animal à l’homme) probablement apparue en Afrique et en Chine environ dix mille ans avant JC.
[4] Wikipédia : La scarification est une pratique consistant à effectuer une incision superficielle de la peau humaine.
[5] Cette technique aux résultats aléatoires fut abandonnée après la découverte de la vaccination.
[6] MOULIN Anne-Marie. Aventure de la vaccination. La Flèche : Fayard, 1996 (Coll. Penser la médecine).
[7] En France, la reprise de l’épidémie fit près de 200 000 morts de 1870 à 1871, dont 23 000 soldats français contre moins de 500 côté allemand.
[8] OMS, Programme d’éradication de la variole (1966-1980), Mai 2010
[9] Du nom de l’allemand Robert Koch, qui l’a découvert en 1882.
[10] BCG = vaccin Bilié de Calmette et Guérin, du nom de ses inventeurs.
[11] Calmette A, Guérin C, Nègre L, Boquet A. Prémunition des nouveau-nés contre la tuberculose par le vaccin BCG (1921 à 1926). Ann Inst Pasteur 1926 ; 40 : 89–133.
[12]https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2016/07/medsci20163206p535/medsci20163206p535.html
[13] https://www.vaccination-info.be/histoire-de-la-vaccination/
[14] Futura Santé : L’ADN recombinant est le terme médical utilisé pour décrire l’épissage des gènes; consistant à prendre le gène d’un individu et à l’introduire dans le génome d’une autre personne.
[15] https://www.vaccination-info.be/histoire-de-la-vaccination/
Fév 6, 2021 | Environnement - Santé - Alimentation
Sur le plan scientifique, le vaccin est défini en ces termes :
Les vaccins pour usage humain sont des préparations contenant des antigènes[1] ayant la propriété de créer chez l’homme une immunité[2] active spécifique contre l’agent infectant ou la toxine, ou l’antigène élaboré par celui-ci. Les réponses immunitaires comprennent l’induction des mécanismes innés et adaptifs (cellulaires, humoraux) du système immunitaire. Il doit être démontré que les vaccins à usage humain possèdent une activité immunogène[3] et une innocuité[4] acceptables chez l’homme lorsqu’ils sont administrés selon le programme de vaccination préconisé.
Les vaccins pour usage humain peuvent être constitués par :
- des microorganismes entiers (bactéries, virus ou parasites), inactivés par des moyens physiques ou chimiques qui maintiennent des propriétés immunogènes[5] adéquates ;
- des microorganismes vivants entiers naturellement avirulents[6] ou qui ont été traités afin d’atténuer leur virulence tout en maintenant des propriétés immunogènes adéquates ;
- des antigènes extraits des microorganismes ou sécrétés par des microorganismes ou préparés par génie génétique ou synthèse chimique.
Les antigènes peuvent être utilisés dans leur état d’origine où ils peuvent être détoxifiés par des moyens physiques ou chimiques et peuvent être sous forme d’agrégats[7], de conjugats[8] ou de polymères[9] afin d’augmenter leur pouvoir immunogène.
Les vaccins peuvent contenir un adjuvant[10]. Si l’antigène est adsorbé sur un adjuvant minéral, le vaccin est appelé vaccin adsorbé[11].
Si cette définition scientifique est du chinois pour l’immense majorité d’entre nous, il est possible de trouver sur Internet des définitions plus compréhensibles, afin d’expliquer ce qu’est un vaccin à nos enfants, telle celle-ci : Un vaccin est un produit médical qu’on introduit dans le corps pour le protéger à l’avance d’une maladie. Il n’existe pas de vaccin universel. Chaque vaccin correspond à une maladie précise. Il s’agit en effet d’une forme atténuée de la bactérie ou du virus responsable de cette maladie. Selon les cas, le vaccin s’avale (anti-poliomyélite), est inoculé par piqûre (anti-dyphtérique) ou par une petite coupure sur la peau (anti-variolique).
Sans rendre malade, le vaccin provoque dans l’organisme (une réaction) la fabrication d’anticorps qui aideront par la suite à combattre la maladie. On appelle cette protection l’immunité. Selon les maladies, l’immunité est définitive ou temporaire (ce qui est le cas du tétanos, pour lequel il faut faire régulièrement des piqûres de rappel).
Pour la grippe, comme les virus ont des origines très diverses, on propose chaque année un nouveau vaccin, notamment pour les personnes fragiles pour lesquelles la maladie pourrait avoir de graves conséquences[12].
Le terme de « vaccination » a été introduit en 1800 par un chirurgien anglais, Richard Dunning dans son opuscule Some observations on vaccination[13].
[1] Futura-sciences, définitions : On appelle antigène toute substance étrangère à l’organisme capable de déclencher une réponse immunitaire visant à l’éliminer.
[2] Futura-sciences, définitions : L’immunité désigne la capacité de l’organisme à se défendre contre des substances étrangères, comme des agents infectieux. Elle se manifeste grâce à la réaction immunitaire.
[3] Universalis : qui produit l’immunité, faculté d’un organisme à ne pas devenir malade face à un agent pathogène (poison, toxine, microbe)
[4] Larousse : qui n’est pas toxique, nocif
[5] Larousse : Qui induit une réaction immunitaire.
[6] Larousse : Se dit d’un micro-organisme qui, chez un hôte ou dans un milieu donné, possède une faible capacité de multiplication.
[7] Larousse : Amas de cellules agrégées entre elles.
[8] Wiktionary : Conjugué immuno-enzymatique résultant d’un couplage chimique, par liaison covalente, entre un anticorps ou un fragment d’anticorps ayant conservé la capacité de reconnaître l’antigène choisi et une enzyme capable de libérer des ions ammonium ou autres produits réactionnels simples à partir de substrats bien tolérés chez les animaux supérieurs.
[9] Substance composée de molécules caractérisées par la répétition, un grand nombre de fois, d’un ou de plusieurs atomes ou groupes d’atomes.
[10] Larousse : Médicament ou traitement qui renforce ou complète les effets de la médication principale.
[11] Pharmacopée européenne, 7e édition, 2009. Monographie : Vaccins pour usage humain. 01/2009
[12] https://fr.vikidia.org/wiki/Vaccin
[13] R. DUNNING, Some observations on vaccination or the inoculated cowpox, March and Teape, Londres, 1800