Le commerce est appelé équitable
lorsqu’il ne lèse personne, producteur, acheteur, vendeur, client et environnement.
Il s’agit d’un échange économique qui respecte les intérêts des producteurs
mais également de tous les acteurs de la chaine et l’avenir de leurs enfants. Les
organisations du commerce équitable, regroupées internationalement au sein de
FINE[1]
ont adopté une définition commune du commerce équitable en 2001 : « Le Commerce Equitable est un partenariat
commercial, fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont
l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial.
Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions
commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs
marginalisés, tout particulièrement au Sud. »
Le principe fondateur du commerce
équitable est donc de donner la garantie aux petits producteurs de
commercialiser leurs produits à des prix qui leur permettent de couvrir les
coûts de production en encourageant le développement durable aussi bien sur un
plan social qu’environnemental. De cette manière, ils sont également à l’abri
des soubresauts du marché et connaissent une certaine stabilité des prix, ainsi
que des conditions avantageuses de paiement. Il n’est pas rare non plus de
profiter de préfinancement, afin d’éviter à ces producteurs/artisans de brader le
prix de leurs produits ou de les obliger à recourir à un prêt bancaire à un
taux très élevé.
Le commerce équitable combat le travail des enfants
Un des objectif du commerce
équitable est de permettre aux familles d’avoir des revenus suffisants pour vivre
sans être contraintes de faire travailler leurs enfants, mais également en leur
permettant d’avoir accès à l’enseignement. Ces familles reçoivent un prix
minium qui leur est garanti (elles reçoivent même des primes de développement)
et peuvent engager une main d’œuvre adulte pour les aider à la production. Les
primes de développement versées aux coopératives leur permettent de financer
des projets sociaux (création d’écoles, de dispensaires, …)
Les organisations qui importent
les produits équitables se sont engagées à soutenir les coopératives du Sud à
lutter de manière efficace et durable contre les pires formes de travail des
enfants. En Afrique de l’Ouest,
particulièrement dans le secteur du cacao où les pires (formes) de travail des enfants sévissent de manière
extrêmement préoccupante, ces partenaires de commerce équitable redoublent d’efforts
pour les combattre en s’attaquant aux principales causes du problème :
l’extrême pauvreté, l’inexistence
d’opportunités économiques et le manque d’éducation.[2].
Le mouvement Fairtrade/Max
Havelaar interdit catégoriquement le
travail des enfants dans ses cahiers des charges. Il met également en place des
programmes de prévention sur le terrain, en partenariat avec des ONG
spécialisées. L’objectif : garantir le respect des droits des enfants et leur
vie au sein d’environnements sûrs et protecteurs[3].
Pour Artisans du Monde, « au -delà du
refus du travail
des enfants expressément
stipulé dans ses
textes, les organisations
partenaires du commerce équitable s’attaquent directement à la
principale cause du travail des enfants c’est-à-dire la pauvreté. Le commerce
équitable repose sur une relation de partenariat stable, négociée et durable
avec des organisations
de producteurs et productrices.
Ces organisations jouent
un rôle important dans la détermination des
programmes de lutte contre ces pratiques. En plus d’un contrôle, les
organisations développent avec les producteurs et productrices des activités de
sensibilisation, de formations et d’accès à l’éducation. [4]»
Le label Ecocert Fair Trade garantit
de bonnes conditions de travail pour l’agriculteur et comprend également une
série de critères écologiques. Il offre également un soutien financier à
l’agriculteur et sa communauté, permettant aux familles de scolariser leurs
enfants.
Oxfam a une approche sans doute
plus pragmatique, le monde ne s’étant pas fait en un jour : Face au travail des enfants, le dialogue et
le respect s’imposent entre les organisations du commerce équitable et leurs
partenaires. Dans un environnement historique, socio-économique et culturel
différent, le travail des enfants, en effet, est souvent perçu comme un
excellent moyen pour les sortir de la précarité et de l’exclusion. Rien
d’étonnant donc à ce que certains de nos produits soient le fruit du travail
des enfants. Tout est par contre mis en oeuvre pour aider nos partenaires à
lutter de manière efficace et durable contre les pires formes de travail qui
portent directement préjudice au développement de l’enfant.[5]
Le commerce équitable soutient les familles et la planète
Les
acheteurs s’engagent à payer un prix équitable aux producteurs, afin de leur
permettre de vivre décemment.
L’objectif du commerce équitable
est d’assurer une rémunération des producteurs qui soit juste et décente
indépendamment de leur statut : producteurs indépendants ou travailleurs
salariés. En plus de couvrir les coûts de production, et d’assurer une
rémunération couvrant les besoins fondamentaux des producteurs et des travailleurs
ainsi que de leurs familles, le prix d’achat permet l’amélioration de leurs
niveaux de vie, de scolariser leurs enfants, de dégager une marge pour les
investissements nécessaires tels que les outils de production et contribue à la
satisfaction des besoins collectifs : éducation, santé, infrastructures,
renforcement des organisations de producteurs…
De
leur côté, les producteurs s’engagent également
Le commerce équitable se destine
à des petits producteurs ou artisans défavorisés ; désireux de faire tourner
leur entreprise autrement, ils ont mis en place des organisations
(coopératives, associations villageoises…) et souhaitent contribuer ainsi au
développement économique et social de leurs membres et de leur communauté.
Le commerce équitable peut également
se mettre en place dans des entreprises où les travailleurs sont organisés
collectivement et où l’employeur est prêt à leur transmettre les revenus
supplémentaires générés par le commerce équitable.
Les organisations de producteurs
et les producteurs employeurs respectent les principes du droit national et
local[6].
Des programmes d’actions précis ont été mis en place par les organisations de
producteurs et les producteurs employeurs : les produits doivent être conçus et
élaborés selon des processus respectueux de la santé des populations et de
l’environnement. Peu de pollution se dégage du commerce équitable. Oxfam nous
informe : « Le transport n’occupe
qu’une faible part dans le bilan Carbonne d’un produit. La plupart des produits
équitables arrivent d’ailleurs par bateau, un mode de transport à faible
émission de gaz à effet de serre. » C’est un mode de production respectueux de l’environnement : au niveau
agricole, la plupart des produits équitables sont issus d’une agriculture
paysanne à petite échelle et diversifiée. Il s’agit le plus souvent de cultures
traditionnelles favorables à la biodiversité, comme le riz violet de Thaïlande,
la quinoa rouge de Bolivie, et faiblement mécanisée. De plus, les critères des
labels équitables encouragent des méthodes de production durables : absence
d’OGM, réduction des pesticides, lutte intégrée, réduction des consommations en
eau, etc… Les produits issus de l’artisanat ont un impact sur l’environnement
moins lourd que les produits industriels, en particulier ceux qui valorisent
les ressources naturelles locales ou le recyclage de produits. Chez nous, il
n’y a pas d’équivalent local pour les produits tropicaux de consommation
courante. Comme par exemple le café, le thé, le cacao, les bananes…
Nous pouvons changer nos critères d’achats
Acheter
des produits du commerce équitable…
Ils ne sont pas nécessairement
plus chers. Oxfam nuance cette idée reçue. D’après une étude comparative
réalisée en 2011, un peu plus de trois produits équitables Oxfam sur quatre se retrouvent
dans la moyenne des prix du marché conventionnel. C’est un circuit court, avec
un seul intermédiaire entre consommateurs et producteurs. Combiner salaire
décent et bien-être de nos producteurs-partenaires avec la qualité des produits
constitue notre priorité.
…
Mais aussi, penser au futur de nos enfants
Changer nos modes d’achats et
préserver LEUR planète
Dans certains domaines
d’achats, comme la mode ou le textile, le critère déterminant pour les
acheteurs est le prix. Depuis les années 60, le consommateur occidental
n’achète plus dans l’idée d’utiliser jusqu’à l’usure, mais veut être en phase avec les canons de la mode[7].
Ensuite, les soldes sont le moment de l’année où les commerçants font les plus
gros chiffres d’affaire. Un consommateur sur trois réserve les deux tiers de
son budget textile aux soldes[8].
Pour les commerçants, ces périodes sont devenues les plus importantes de leur
année. Croire qu’ils vendent sans plus faire de bénéfice, uniquement pour
écouler leurs stocks, est utopique. Au mieux vendent-ils à un prix un peu plus
proche de leur prix d’achat, lui-même influencé par le trop faible prix de la
main d’œuvre offerte aux travailleurs des entreprises textiles des pays où les
usines ont été délocalisées.
Manger
équitable, mais aussi bio ou Local pour mieux consommer
Une grande quantité de nourriture
est achetée chaque jour. Fruits et légumes frais, poisson, viande, pâtes,
boissons, yaourt, surgelés, conserves… En moyenne quelques 18 kg d’aliments par
semaine et par ménage vident le porte-monnaie.
Nous devons apprendre à nous
poser les bonnes questions pour devenir de véritables consommateurs. Un exemple
simple, nous consommons quasi chaque jour des fruits et des légumes. Mais pour
autant, qui s’interroge de manger des fraises et des cerises à noël, d’avoir
dans son assiette des pommes de terre du Pérou, des haricots du Kenya et
d’avoir des kiwis toute l’année? Si cela n’est pas néfaste pour la santé,
peut-on en dire autant en ce qui concerne l’environnement ?
Nos habitudes alimentaires
provoquent un impact sur la planète. Manger en octobre une poire issue d’un
verger flamand ou se régaler de framboises importées de Grèce en février, n’est
pas équivalent sur le plan environnemental et l’avenir de nos enfants. Le
parallèle existe entre une salade produite en pleine terre ou une salade élevée
sous serre chauffée…
Etre un consommateur responsable,
c’est s’interroger sur ses achats au quotidien en termes écologiques mais
surtout humains. Il s’agit de concilier qualité, responsabilité et respect de l’environnement
mais également des humains les plus fragiles qui vivent sur la même planète que
nous.
En conclusion
Tout est dans tout. Nos modes de
consommation influent sur le destin des autres êtres humains. En termes de
pollution, bien évidemment, mais aussi et surtout en termes de respect des
Droits fondamentaux de tous les êtres humains, en commençant pas celui des
enfants. Même si, à des milliers de kilomètres, nous n’avons pas la possibilité
de supprimer leur exploitation d’un coup de baguette magique, nous avons un
tout petit pouvoir. Lutter à notre échelle, jour après jour, en faisant le
choix de produits équitables qui nous garantissent de lutter contre le travail
des enfants, soit en l’interdisant, soit en donnant progressivement aux
familles les moyens de scolariser leurs enfants. Et le commerce équitable est
une bonne alternative, pas nécessairement plus chère.
Mais il est également d’autres
pistes à explorer. Changer nos modes de consommation. Un vêtement ne doit pas
suivre la mode. Il doit nous représenter, nous tels que nous sommes, loin du
« faire comme tout le monde »,
loin de la mode. Cela aussi, c’est important car nous avons la missions
d’éduquer nos enfants à être eux-mêmes et non ce que la mode et la publicité
veulent qu’ils soient. Alors, commençons par leur montrer l’exemple.
Eduquons-les à refuser toute forme de publicité aliénante et à se construire en
fonction de leur seule personnalité.
Et puis, le commerce équitable,
ce n’est pas qu’avec les pays du Sud. C’est aussi avec les artisans de chez
nous et leurs familles. Revenons à nos essentiels. En achetant, par exemple,
chez des agriculteurs et maraîchers bios, chez des ébénistes, des bouchers,
boulangers, céramistes, etc., nous créons de l’emploi local. Nombre de familles
sont précarisées. Chaque fois qu’un emploi moins qualifié – mais décemment payé
– est créé, cela assure aussi l’avenir de nos propres enfants. Cela participe
de l’effet « boule de neige ». Ici aussi, des familles qui sortent de
la pauvreté seront mieux à même de soutenir la scolarité de leurs enfants, leur
éducation et leur qualité de vie.
[1] FINE
est le réseau informel des 4 fédérations internationales du commerce équitable.
[2]
Oxfam 2010, l’exploitation des enfants n’est pas une fatalité
[3]
Frairtrade, Max Havlange France, La lutte contre le travail des enfants, une
priorité du mouvement Fairtrade/Max Havelaar, https://maxhavelaarfrance.org/le-commerce-equitable/nos-champs-dactions/lutter-contre-le-travail-des-enfants/
[4]
Artisans du Monde, Travail des enfants et commerce équitable, Fiche
d’information « Travail des enfants et commerce équitable » Campagne de
mobilisation « D’autres horizons sont possibles » octobre-novembre 2019
[6]
Respect des conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT)
suivantes :
Liberté d’association et de négociation collective :
Convention N°87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical
(1948) et convention N°98 sur le droit d’organisation et de négociation
collective (1949)
Elimination de toute forme de travail forcé ou
obligatoire ; Convention N°29 sur le travail forcé (1930) et convention N°105
sur l’abolition du travail forcé (1957)
Abolition effective du travail des enfants :
convention N° 138 sur l’âge minimum (1973) et convention N°182 sur les pires
formes de travail des enfants (1999)
L’élimination de la discrimination en matière d’emploi
et de profession ; Convention N°100 sur l’égalité de rémunération (1951) et
convention N°111 concernant la discrimination (emploi et profession) (1958)
[7]
Lucile Bernadac-Coudert, Eline Nicolas, Comment lutter contre le travail des
enfants chez ses sous-traitants ?
Cette analyse traite d’enfants
orientés vers l’enseignement spécialisé sans que ceux-ci n’aient, à la base, le
moindre handicap physique ou intellectuel. Leurs difficultés sont
essentiellement sociales : enfants vivant soit en milieux de grande
pauvreté ou de quartiers populaires, soit ne possédant pas la langue de
l’école, ou ayant besoin de plus de temps pour apprendre, ou pour de multiples
autres raisons qui touchent essentiellement à leur statut social. Nous n’aborderons pas dans ce dossier les
orientations d’enfants avec handicap ou difficultés spécifiques des
apprentissages.
Qu’entend-on par « orientations abusives » ?
Abus : mauvais emploi, usage excessif ou injuste de quelque chose[1]
En Fédération Wallonie-Bruxelles, l’Ecole oriente inadéquatement de nombreux enfants issus de milieux socialement défavorisés vers l’enseignement spécialisé. Ces enfants ne présentent absolument aucun handicap, simplement des difficultés scolaires. Cette orientation détermine l’avenir de ces enfants qui, pour la plupart, n’auront jamais leur C.E.B.[2]et se retrouveront à terme, sans plus pouvoir faire le moindre choix, vers l’enseignement professionnel ordinaire ou… spécialisé. Il s’agit d’abus de la part des écoles orientantes, c’est la raison pour laquelle nous parlons d’orientations abusives.
Il s’agit d’un « mauvais emploi » de l’enseignement spécialisé qui est destiné aux enfants et aux adolescents qui, sur la base d’un examen multidisciplinaire, (…) doivent bénéficier d’un enseignement adapté en raison de leurs besoins spécifiques et de leurs possibilités pédagogiques[3]. Or, ces enfants n’ont ni besoins spécifiques (aucun examen multidisciplinaire ne leur a détecté le moindre handicap) et leurs possibilités pédagogiques ne sont pas moins bonnes que celles des autres élèves de l’enseignement ordinaire.
L’école ordinaire, si elle le voulait, a tout-à-fait les moyens de suivre ces enfants et de les mener au bout d’un cursus de transition de 12 ans, sans passer par la case échec. Mais l’école a des principes : elle ne permet l’accès aux savoirs qu’aux enfants « bien nés » sans trop de difficultés d’apprentissages. Quant aux autres, ceux qui freinent les apprentissages, qui proviennent de milieux socialement moins aisés et dont le soutien pédagogique important risquerait d’entraîner un « nivellement par le bas[4] », ils sont progressivement éliminés. L’orientation vers l’enseignement spécialisé est la première marche.
Trop peu d’écoles forment leur corps professoral à enseigner aux élèves de milieux populaires. L’article 15 du Décret Missions[5] impose pourtant de différencier les apprentissages en fonction des besoins des élèves. Mais il est vrai que toutes les écoles n’ont pas encore eu le temps de se familiariser avec le Décret Missions. Il ne date que de 1997.
La gestion des
difficultés d’apprentissages est la base du métier d’enseignant
Aujourd’hui, dans nos classes,
nous avons des élèves qui ont des profils d’apprentissages forcément
différents. Certains possèdent mal la langue de l’enseignement. D’autres ont
des difficultés en mathématique, en seconde langue, dans les relations avec les
autres, etc. On pourrait, bien entendu, estimer qu’il s’agit d’une dégradation
des conditions d’enseignement, ce qui serait tout le contraire de la réalité.
De telles conditions se sont retrouvées de tous temps dans nos écoles. On le
retrouvait autrefois dans les villages et dans les villes ou les enfants de
paysans et d’ouvriers peu lettrés ne connaissaient que le wallon ou le patois bruxellois
et avaient les mêmes difficultés d’apprentissage que les élèves des milieux
socio-économiques d’aujourd’hui. Ensuite, cela a été les immigrations diverses,
européennes dans un premier temps, pour finir avec aujourd’hui des familles
d’Afrique du Nord de deuxième ou troisième génération, ainsi que des immigrants
de l’Est qui se retrouvent avec les mêmes difficultés. Bref, rien de bien neuf
sous le soleil de nos classes.
Enseigner est un art ! C’est être capable de transmettre des connaissances, savoirs, savoir-faire, savoir-être, à tous ses élèves, sans la moindre exception. Malheureusement, on ne naît pas enseignant. La formation initiale ne nous a pas formés, au départ, à la détection et à la remédiation des difficultés d’apprentissages, pas plus que nous n’avons été formés à enseigner à un public précarisé, qui ne connaît ni les codes, ni le langage spécifique de l’école. Certains professionnels se forment continuellement ou s’auto-forment de manière à trouver des outils qui vont permettre à tous les élèves d’y arriver. Les pédagogies actives, par exemple, sont, entre autres, une source inépuisable de pistes. Mais pour cela, il faut changer de paradigme et oser s’élancer dans une autre manière de faire école, loin du frontal[6]et d’aller vers un véritable enseignement. Malheureusement, tous les professionnels de l’école ne se forment pas en ce sens et, dès lors, se retrouvent démunis face à ces difficultés. Une des dernières solutions qu’ils trouvent est l’orientation vers l’enseignement spécialisé, avec tout ce que cela importe d’abus pour les élèves en matière de destruction de l’image de soi, de générations condamnées[7], de sentiments d’injustice, de déni de l’être humain et d’avenir définitivement bouché, voire de révoltes sociales.
En mettant en compétition,
depuis des années, les réseaux d’enseignement et les écoles, une certaine
idéologie élitiste scolaire a réussi à… construire toujours et toujours plus de
barreaux aux murs des écoles afin que tous n’y entrent pas ou alors qu’ils ne
puissent y rester « trop longtemps ». Comment peut-on demander à des
profs mal formés de porter sur leurs épaules l’orientation d’un seul être
humain ? Comment peut-on leur demander de décider si tel élève aura droit
d’avoir une vie épanouissante ou, au contraire, une vie peu valorisante ?
Comment peut-on encore orienter ou pratiquer le redoublement aujourd’hui ?
Ce sont des pratiques d’un autre âge, des pratiques discriminantes et
inhumaines. Et surtout, des pratiques inefficaces. Sauf pour former les
esclaves de demain.
La pauvreté
n’est pas un handicap
Depuis plus de 20 ans, on
remarque une orientation des élèves d’origine socio-économique ayant de grosses
difficultés d’apprentissages vers l’enseignement spécialisé, alors que celui-ci
ne leur est pas destiné, et que ceux-ci n’ont absolument aucun handicap. Leur
nombre est passé de 8 448 élèves en 1989-1990 à 13 370 durant l’année scolaire
2017-2018, soit une augmentation de 58,2 % en 20 ans.
L’enseignement de type 8[8] qui est le plus sollicité a vu sa population augmenter de 50,3% (+ 2 432 élèves). Dans l’enseignement de type 3, l’augmentation a été de 49,1 % (+ 675 élèves) et dans l’enseignement de type 1, après avoir explosé au début de ce siècle, depuis 2012, elle est en léger recul pour se situer à 4061 élèves (+80,8 %). Ces élèves qui, pour l’immense majorité d’entre eux n’ont aucune déficience, représentent à eux seuls un tiers de l’ensemble des élèves de l’enseignement spécialisé (35,3 %)[9].
L’enseignement de type 1 est sensé scolariser des enfants ayant une déficience mentale légère. Dans les faits, de nombreux enfants issus de milieux précarisé et n’ayant aucune déficience intellectuelle s’y retrouvent scolarisés, suite à une orientation abusive.L’enseignement de type 3 est sensé scolariser des enfants ayant un trouble du comportement. Mais nombreux sont les élèves un peu trop turbulents ou ayant des troubles envahissants du développement qui s’y trouvent orientés. L’enseignement de type 8 est sensé scolariser les enfants ayant des troubles instrumentaux[10]. En réalité, l’immense majorité des élèves scolarisés en type 8 n’a aucun trouble instrumental, mais vivent dans des quartiers populaires et/ou dans des familles socialement défavorisées. Les professeurs de l’école ordinaire ne se sont pas tous formés à accueillir des enfants vivant dans des familles dont l’école a décroché.
La démographie a bon dos
On pourrait imaginer que cette
augmentation est due à une démographie galopante en Belgique. Si, en effet, l’augmentation
de la population se confirme, l’évolution des orientations vers les types 1, 3
et 8 de l’enseignement spécialisé, et spécialement d’élèves ne possédant pas
nécessairement la langue de l’enseignement et certainement pas ses codes ne
peut pas être corrélée. En effet, dans le graphique ci-dessous, on constatera
aisément que l’augmentation des orientations est nettement supérieure à
l’augmentation de la population de notre pays.
En tenant compte de la
démographie et donc de l’augmentation de la population de notre pays, la
progression du type 8 est encore de 31,4 % (+ 1 737 élèves). Celle du type 1
qui continue de baisser, est cependant encore de 58, 3 % (+ 1 496 élèves),
tandis que l’augmentation du nombre d’élèves inscrits dans le type 3, est de
30,6 % (+ 480 élèves). Soit 3 713 élèves de plus que ne le justifiait
l’augmentation de la démographie, orientés vers l’enseignement spécialisé.
Autrement dit, l’augmentation
de la population ne peut justifier qu’une augmentation de 1 209 élèves entre 1989
et 2017, sur la progression des 4 922 élèves supplémentaires.
On peut donc en conclure que,
pour de nombreuses écoles ordinaires, l’orientation vers l’enseignement
spécialisé est considéré – et de plus en plus – comme l’ultime remédiation. Cet
enseignement, trop mal connu des professeurs de l’ordinaire est donc vu comme
la solution miracle qu’ils n’ont pas su, pu ou voulu mettre en place eux-mêmes.
Mais pour les miracles, ce n’est pas le bon chemin à prendre et ce, même pour l’enseignement confessionnel. Malgré leur immense bonne volonté, les enseignants de l’enseignement spécialisé ne savent pas faire de miracles, d’autant plus que les élèves qu’ils récupèrent sont cassés et laminés par un enseignement ordinaire trop souvent incapable de remplir ses missions vis-à-vis des plus fragiles et de celles et ceux qui ont le plus besoin d’aides, de soutien, de différenciation, de pratiques adaptées aux milieux socialement défavorisés et, surtout de bienveillance.
Rappelons que l’enseignement
spécialisé « est destiné aux enfants et aux adolescents qui, sur la base
d’un examen multidisciplinaire, (…) doivent bénéficier d’un enseignement adapté
en raison de leurs besoins spécifiques et de leurs possibilités pédagogiques.
Ils sont désignés par l’expression « enfants et adolescents à besoins
spécifiques ». Il est organisé sur la base de la nature et de l’importance
des besoins éducatifs et des possibilités psychopédagogiques des élèves et
assure le développement de leurs aptitudes intellectuelles, psychomotrices,
affectives et sociales tout en les préparant, selon les cas :
à l’intégration dans un milieu
de vie ou de travail adapté;
à l’exercice de métiers ou de
professions compatibles avec leur handicap qui rend possible leur intégration
dans un milieu de vie et de travail ordinaire;
à la poursuite des études
jusqu’au terme de l’enseignement secondaire supérieur tout en offrant des
possibilités de vie active.
Le type 1 est
destiné aux élèves qui ne peuvent être compris parmi ceux qui présentent un
retard pédagogique et pour lesquels l’examen pluridisciplinaire, (…) conclut à un retard et/ou à un (des) trouble(s)
léger(s) du développement intellectuel. Leurs possibilités sont telles
qu’ils peuvent acquérir des connaissances scolaires élémentaires, une habileté
et une formation professionnelle qui permettent de prévoir leur intégration
dans un milieu socioprofessionnel ordinaire.
Le type
3 est destiné
aux élèves pour
lesquels l’examen pluridisciplinaire, visé
à l’article 12,
§ 1er, 1°,
conclut à la
présence de troubles
structurels et/ou fonctionnels
de l’aspect relationnel
et affectivo-dynamique de
la personnalité, d’une
gravité telle qu’ils
exigent le recours
à des méthodes
éducatives, rééducatives et
psychothérapeutiques spécifiques.
Le type 8 est destiné aux élèves pour lesquels l’examen pluridisciplinaire visé à l’article a conclu à des troubles des apprentissages. Ceux-ci peuvent se traduire par des difficultés dans le développement du langage ou de la parole et/ou dans l’apprentissage de la lecture, de l’écriture ou du calcul, sans qu’il y ait retard mental ou déficit majeur sur le plan physique, comportemental ou sensoriel. Ils doivent être considérés comme des troubles complexes aux origines multifactorielles[11] ».
Ces trois types d’enseignement
spécialisé ne sont pas destinés à recevoir des élèves ayant des difficultés
d’apprentissage, et dont le seul « handicap » est exclusivement
« social », issus de familles fragilisées sur le plan socioéconomique
et culturel. Les
parcours des élèves sont fortement influencés par deux variables : le genre et
l’indice socio-économique du quartier de résidence.
La place de ceux-ci est dans
l’enseignement ordinaire, avec les élèves qui ont plus de facilités, et ils
doivent y être maintenus, sans que le moindre redoublement et la moindre
orientation ne soit mise en place. C’est leur droit le plus fondamental !
L’enseignement spécialisé ne peut pas remplir pas sa mission
L’enseignement de type 8 n’accueille
les élèves que jusqu’à la fin du primaire. Ce sont, pour la plupart, des élèves
qui, on l’a dit, ont des difficultés d’apprentissage mais n’ont aucune
déficience intellectuelle. Ils sont donc tout-à-fait à même d’acquérir les
apprentissages, pour autant qu’on mette en place les pratiques pédagogiques
dont ils ont besoin.
Mais la doxa[12] scolaire est solide et la croyance infondée que l’enseignement spécialisé va venir en aide à ces élèves est tenace. Que ce soit dans les écoles ordinaires mais également parmi les personnels des CPMS qui sont chargés de procéder à l’examen multidisciplinaire d’orientation. Dès lors, la pression est mise sur les familles concernées afin qu’elles acceptent l’orientation (quand on leur dit qu’elles sont en droit de refuser, ce qui selon les retours que nous recevons de ces familles, est rarement le cas – ou alors cela n’a pas été clair pour elles).
La chose est enjolivée. Mais
c’est fait par des gens qui ne connaissent pas l’enseignement spécialisé et ses
réalités. On fait miroiter des « petites classes », un transport
scolaire gratuit, un encadrement supplémentaire (logopèdes, …). Et pour les
rassurer il est ajouté que l’enseignement spécialisé permet d’acquérir le
Certificat d’Etudes de Base et de retourner dans l’enseignement ordinaire plus
tard, une fois les difficultés résolues. La plupart du temps, c’est à ces
conditions-là que les familles acceptent.
Mais soyons clairs : ces
professionnels ne cherchent nullement à berner les parents, même si l’idée de
se débarrasser d’un élève en grandes difficultés motive leur démarche. Le
problème c’est qu’ils ne connaissent pas les réalités du Spécialisé. Ils ne
connaissent pas les résultats que ces élèves obtiendront au C.E.B.
Malheureusement, on est loin
de la coupe aux lèvres. Les chiffres sont dramatiquement différents.
Ainsi, pour le seul type 8 :
seulement
une petite centaine d’élèves retourne en enseignement primaire ordinaire chaque
année (soit moins de 1 %) :
seulement
une centaine d’élèves de 6e année obtient son C.E.B. et peut accéder
en 1A de l’enseignement secondaire ordinaire, soit une moyenne de 8 %. (0,7 %
pour les enfants de Type 1 et 4 % pour les élèves de type 3)
Le reste est dirigé, en partie vers la 1B[13] de l’enseignement secondaire ordinaire, ou continuera dans l’enseignement spécialisé.
Si, « en 2013-2014, l’entrée dans le type 8 avait plutôt tendance à diminuer au fil du parcours dans l’enseignement ordinaire. En 2018-2019, la provenance des élèves qui entrent dans le type 8 est moins linéaire. En effet, en 6 ans, on note qu’ils sont proportionnellement moins nombreux à venir d’une première primaire et plus nombreux à provenir d’une troisième, d’une quatrième ou d’une cinquième primaire[14] ».
Si une centaine d’élèves seulement réussissent leur C.E.B.
c’est parce que l’enseignement de type 8 ne vise pas les compétence à atteindre
en fin de 6e année, mais plus souvent un niveau de 4e
primaire. Tout au plus, tentent-ils de différencier les apprentissages en
fonction des difficultés des élèves.
Mais il n’est pas question ici de leur jeter la pierre. Les
élèves qui leur sont confiés arrivent le plus souvent chez eux en cours de
scolarité primaire. 11 % des élèves seulement passent dans le type 8 au sortir
de l’école maternelle. Les autres sont orientés après avoir fait un parcours
d’une à quelques années dans l’enseignement ordinaire où ils n’ont connu
qu’échecs sur échecs. Il est dès lors impossible pour ces enseignants d’à la
fois tenter de reconstruire l’enfant, de lui redonner confiance dans ses
(immenses) possibilités, de récupérer le retard accumulé et en plus de lui
transmettre toutes les connaissances nécessaires pour avoir son Certificat
d’Etudes de Base. En 2, 3 ou 4 années, il est impossible à tout pédagogue de
transmettre les savoirs de 6 années complètes, à des enfants cassés et laminés
par l’école.
Toute orientation abusive « handicape » un enfant
Un pourcentage infime de ces élèves[15], seulement, avait au départ, un handicap physique ou mental en arrivant dans les types 1, 3 et 8 de l’enseignement spécialisé. Nous avons vu que le Type 8 ne pouvait qu’orienter encore 39 % des élèves dans le secondaire spécialisé (40% en 2018-2019[16]). Les Types 1 et 3 font mieux encore en orientant respectivement 79 et 72 % de leurs élèves vers le secondaire spécialisé[17].
Comme on le voit, un nombre
important d’élèves, qui n’avaient rien à y faire, ne sortent pas de
l’enseignement spécialisé. Ils y restent et n’auront plus aucun espoir de le
quitter. Leur avenir est écrit, ils seront à terme, avec un peu de chance, qualifiés
avec un diplôme de l’ « enseignement qualifiant spécialisé », un
enseignement de qualité mais qui n’est pas considéré par les professionnels
comme du même niveau que le qualifiant ordinaire. Et, même si leurs diplômes
seront équivalents, ces élèves seront considérés par leurs employeurs comme sous-qualifiés
et, forcément, sous-payés.
En quittant l’école primaire spécialisée et en étant inscrits en enseignement secondaire spécialisé, ces élèves qui n’avaient aucune déficience intellectuelle ou physique sont devenus, tout simplement… « handicapés » ! De quoi ? Personne ne sait, mais ce sera leur réalité[18].
Les diagrammes suivants nous montrent la Répartition par type des élèves sortis de l’enseignement primaire spécialisé en 2004-2005 et inscrits en 2005-2006 dans l’enseignement secondaire spécialisé[19]. Le constat est sans appel. La majorité d’entre eux va être inscrite dans un type d’enseignement destiné à des enfants porteurs de handicaps mentaux ou comportementaux.
La
ségrégation de genre est importante
Dans l’enseignement spécialisé, la proportion de filles et de garçons est inéquitable. Les garçons sont beaucoup plus nombreux. Tous les élèves n’ont donc pas des chances égales de réintégrer l’enseignement ordinaire. Alors que les filles et les garçons ne sont pas du tout répartis de façon égale dans l’enseignement spécialisé de type 8 (avec seulement 37.2% de filles et 62.8% de garçons), le pourcentage de garçons et de filles qui réintègrent l’enseignement primaire ordinaire est équivalent, ce qui signifie donc que les filles ont plus de chance de réintégrer l’enseignement primaire ordinaire, et plus encore pour l’enseignement secondaire ordinaire[20].
En 2018-2019, les filles représentaient 35,4 % des élèves de l’enseignement spécialisé, tandis que les garçons étaient 64,6 %. L’écart continue à se creuser.
Comment entre-t-on dans l’enseignement spécialisé ?
Conditions d’orientation de
l’enseignement ordinaire, vers l’enseignement spécialisé :
Pour
inscrire un enfant dans les types 1, 2, 3, 4 ou 8, il est nécessaire que le PMS
(ou un service d’orientation scolaire et professionnelle) établisse un rapport
motivant une telle orientation. Pour le type 5, ce rapport doit être établi par
un pédiatre. Pour les types 6 et 7, ce sont respectivement un spécialiste en
ophtalmologie ou en oto-rhino-laryngologie qui doivent établir le rapport.
Les
parents doivent marquer leur accord à cette inscription, tout comme ils peuvent
s’y opposer. Malheureusement, la plupart du temps, ceux-ci ne sont pas à même
de comprendre les tenants et aboutissants d’une telle orientation :
Entre 1 % et 8 % des élèves, selon les types, on
la chance d’obtenir le CEB ;
Entre 39 et 79 %, selon les types, seront
dirigés vers l’enseignement secondaire spécialisé ;
Pour ainsi dire aucun ne pourra suivre un
enseignement général de transition jusqu’au bout ;
Une partie finira en E.T.A. (Entreprise de
travail adaptée), alors qu’ils n’ont pas de handicap ;
La majorité décrochera ou obtiendra un diplôme
peu reconnu par les professionnels.
Il y a donc lieu de refuser toute orientation vers l’enseignement spécialisé si l’enfant n’est pas à « besoins particuliers », autrement dit, porteur de handicap supposé ou reconnu. Et encore… les écoles doivent devenir inclusives (voir nos nombreux posts sur le sujet[21])
Comment sortir son enfant de l’enseignement spécialisé ?
Conditions
de réorientation de l’enseignement spécialisé vers l’enseignement
ordinaire :
Toute demande de réorientation vers l’enseignement ordinaire doit être faite sur base d’un avis motivé non contraignant du Conseil de classe et du CPMS. En cas d’orientation vers l’enseignement secondaire, l’élève doit également obtenir l’avis favorable du conseil d’admission de l’école d’accueil. L’avis des parents n’est que consultatif. Ils n’ont donc pas la possibilité d’imposer la réintégration dans l’enseignement ordinaire[22].
Quelles alternatives à l’orientation vers l’enseignement spécialisé
Seul un enseignement pleinement
inclusif permettra aux écoles d’accueillir tous les élèves sans les envoyer
dans l’enseignement spécialisé. Aussi,
Les établissements scolaires doivent former
leurs enseignants :
à la mise en place de pédagogies actives ;
à la mise en place de tous les aménagements « raisonnables » (on dira « nécessaires » à l’accueil de toutes les différences d’apprentissage, ainsi qu’à tous les handicaps) dans toutes les classes, de tous les niveaux et à les rendre structurels, de manière à ne plus devoir les réinstaller année après année, en fonction des besoins. Ils doivent bénéficier à tous les élèves en fonction de leur besoins momentanés ou sur le long, voire le très long terme ;
à la remédiation immédiate ;
au tutorat,
à la détection des difficultés d’apprentissage et à leur remédiation,
à la gestion de classes hétérogènes,
à la différenciation,
aux différentes cultures et aux milieux socioculturels différents[23] ;
à la didactique ;
au travail en équipe (car cela ne peut se faire seul dans sa classe) ;
à accueillir toutes les différences et à en faire des richesses pédagogiques ;
…
Encourager les établissements scolaires à créer des classes inclusives selon le modèle des classes-Tremblay. Celles-ci intègrent 6 élèves à difficultés d’apprentissage et bénéficient d’un second enseignant à temps plein. En effet, chaque enfant intégré « rapporte » 4 heures « enseignant spécialisé », soit 24 heures semaine, ce qui correspond à l’horaire d’un second enseignant. Malheureusement, à l’heure où nous rédigeons ce dossier, nous ne savons pas ce qu’il adviendra de l’intégration scolaire, dans le cadre des Pôles territoriaux. Depuis 2009, les élèves présentant des difficultés d’apprentissages pouvaient bénéficier d’un soutien de l’enseignement spécialisé, tout en restant dans leur école ordinaire. Pour permettre ce maintien, la ou le titulaire de la classe recevait le soutien d’un enseignant de l’enseignement spécialisé afin de lui apprendre à aider l’enfant en difficulté scolaire. C’est le Décret Intégration de 2009 qui définit cette mise en place. Le Pacte pour un enseignement d’excellence voit le maintien dans l’ordinaire au travers d’ « aménagements raisonnables », ce dont les élèves de milieux populaires n’auront pas droit, n’étant pas à besoins spécifiques. Il faudra donc aider les professeurs à mettre en place des pédagogies adaptées à ces enfants…. probablement sans aide extérieure. A suivre….
Dans TOUS LES CAS, il faut favoriser la mise en place de ce processus d’intégration de l’élève, afin de lui permettre de rester dans son école ordinaire, au sein de ses relations sociales, et éviter ainsi qu’il soit scolarisé dans une école qui n’est pas la sienne, située dans un autre quartier et qui, de toute manière, n’est pas à même de lui apporter les savoirs auxquels il a droit.
[2]
C.E.B. = Certificat d’études de base. Premier diplôme, délivré à la fin de la
sixième primaire.
[3] Décret
organisant l’enseignement spécialisé du 3 mars 2004
[4] Expression inconnue en pédagogie. Aucune
école ne nivelle par le bas.
[5] Décret
définissant les missions prioritaires de l’enseignement fondamental et de
l’enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre
en Communauté française de Belgique (24/07/1997).
[6]
La dispense de cours « frontaux » n’est pas enseigner, mais seulement
débiter des « matières » aux rares élèves qui ont l’envie ou la
capacité de suivre. Ils s’éloignent de toute forme de pédagogie et leur
résultat en est l’échec d’élèves qui pourraient parfaitement réussir dans un
système à pédagogie active qui prend soin de tous.
[7]
Selon l’OCDE, il faut 5 générations
pour sortir de la pauvreté. Orienter ces enfants vers l’enseignement spécialisé
est, de facto, les condamner à la pauvreté et donc condamner leurs futurs
enfants, petits-enfants… jusqu’au moins la 5e génération.
1 : pour les élèves présentant un
retard mental léger
2 : pour les élèves présentant un
retard mental modéré ou sévère
3 : pour les élèves présentant des
troubles du comportement et/ou de la personnalité
4 : pour les élèves présentant un
handicap physique
5 : pour les élèves hospitalisés
(maladies ou convalescences)
6 : pour les élèves malvoyants et
non-voyants
7 : pour les élèves sourds,
malentendants ou dysphasiques graves
8 : pour les élèves présentant des
troubles instrumentaux (perception, motricité, langage, mémoire) et des
troubles d’apprentissage
[9] L’enseignement spécialisé comptait 37 843 élèves en 2017-2018
[10] Par exemple un retard du langage, des troubles isolés de l’articulation ou des troubles complexes du langage oral, des troubles lexicographiques, une dyscalculie ; des troubles du raisonnement, un bégaiement, un mutisme sélectif ; une hyperkinésie, une instabilité psychomotrice ; un retard psychomoteur ou d’autres troubles psychomoteurs ; des tics isolés ; la maladie de Gilles de la Tourette ; une intrication de troubles psychomoteurs et du langage, etc. La liste est longue…
[11] Décret organisant l’enseignement spécialisé du 3 mars 2004
[12] Larousse.fr : Ensemble des opinions communes aux membres d’une société et qui sont relatives à un comportement social. Ensemble des croyances et des idées non objectives.
[13] 1 B = 1ère différenciée, destinée à accueillir les élèves qui n’ont pas leur CEB et à le leur faire acquérir. La 1ère D, à son tour, ne sera pas capable d’assumer sa mission vis-à-vis de ces élèves. Notre enseignement n’est pas fait pour les élèves ayant des difficultés d’apprentissage (et donc n’est pas capable d’enseigner). Elle les rejettera par la suite en les orientant vers l’enseignement professionnalisant.
[15] Nous parlons uniquement des élèves qui ont été orientés pour des raisons socio-économiques et culturelles. Il y a un faible pourcentage d’élèves possédant de véritables handicaps instrumentaux, physiques ou mentaux. Nous ne parlons pas d’eux dans cet article.
[17] Les derniers indicateurs de l’enseignement taisent ces chiffres, se centrant exclusivement sur le type 8. Comme quoi, il y a encore du boulot pour informer le citoyen… Mais fondamentalement, extrêmement peu de choses ont changé.
[18] Récoutez Thomas Gunzig « Les gogol sont de sortie » https://www.facebook.com/LaPremiereRTBF/videos/la-plume-de-thomas-gunzig/1003456693483325/
Le monde actuel est basé sur
l’inégalité. De par notre système économique, une petite partie de l’humanité
détient la grande majorité des richesses, et maintient l’état de faiblesse des
plus pauvres, en accroissant les différences : toujours plus riches d’un
côté, toujours plus pauvres de l’autre.
Les grands groupes du commerce
mondial évoluent dans un système privilégiant la recherche de profits
immédiats, dans le seul but de satisfaire leurs actionnaires. On ne compte plus
les effets pervers de ce système de recherche du profit, encouragé par
l’absence de régulation internationale. Les prix de production sont abaissés
grâce aux pressions exercées sur les populations les plus fragiles.
Quelle raison justifie le fait
qu’une relation commerciale favorise l’exploitation de populations, et
notamment des enfants ? Pourquoi risque-t-on la vie ou la santé d’autrui,
ainsi que la destruction de l’environnement tout en ayant conscience de ce que
cela induit pour les générations futures?
Pour commencer un peu d’histoire de Belgique
Au cours du XIXe siècle, notre pays a encouragé le travail des enfants. Les salaires y étaient tellement bas que les familles devaient envoyer leurs enfants travailler. Il a fallu attendre 1813 pour qu’il soit défendu de « laisser descendre ou travailler dans les mines et minières les enfants en dessous de dix ans ».
Pourtant, le nombre d’enfants mis
au travail est important. Ils sont soumis aux mêmes horaires que les adultes.
En 1846, le recensement de l’industrie dénombre, sur un total de 314.842
ouvriers, 66.385 qui ont moins de 16
ans. Toutefois ces chiffres ne reprennent pas la multitude d’enfants
travaillant à domicile ou dans l’agriculture. On les trouve dans tous les secteurs d’activités
(verreries, charbonnages, textile, métallurgie, travail à domicile,
domesticité…) travaillant aux mêmes horaires que les adultes et souvent admis
au travail dès l’âge de six ans .
Pendant des décennies, les
tenants du libéralisme économique et leurs très riches amis industriels
repousseront toute idée de réforme du travail des enfants sous prétexte que ce
« serait ruineux pour l’industrie, attentatoire aux droits du père de famille,
plus intéressé à la conservation de son enfant, plus apte à juger de ses forces
que quiconque ». Il est vrai que le «
large » salaire versé aux pères de famille ne leur laissait pas vraiment le
choix.
Enfin, la loi du 31 décembre 1889
interdit le travail des enfants de moins de 12 ans et limite le travail des
jeunes de 12 à 16 ans (21 ans pour les filles) à 12 heures par jour. S’il reste
des dérogations pour le travail de nuit, c’est un premier pas. Malheureusement,
elle se limite aux travaux dangereux (manufactures, carrières, charbonnages, …)
et épargne les autres secteurs. Cela aura pour conséquence de déplacer le
travail des enfants vers ces secteurs non protégés.
Vingt-quatre ans plus tard, 19
mai 1914, la loi sur l’instruction gratuite et obligatoire pour tout enfant âgé
de 6 à 14 ans est promulguée. Le travail de ces enfants est interdit mais reste
largement contourné, notamment dans le secteur agricole ou la main d’œuvre
enfantine est une aide précieuse. La fixation des grandes vacances en juillet
et en août n’avait pas que le but de permettre aux classes aisées de la société
de partir en villégiature, mais c’était également lié au travail rural : « Les
enfants de paysans étaient appelés aux travaux dans les champs lors des
récoltes et il n’était pas question d’aller à l’école à cette période. Ils y
allaient plutôt en hiver »
Afin de contrer l’augmentation du
chômage qui sévissait dans les années 30, un arrêté royal
« permet un prolongement partiel de l’instruction
obligatoire. Ainsi dans les régions industrielles, les jeunes de 14 à 16 ans
qui ont interrompu leurs études et n’ont pas trouvé d’emploi doivent suivre un
enseignement du jour à temps plein. ». Mais ce ne sera que dans les années 70 que
l’on prolongera l’obligation scolaire jusque 18 ans.
La législation actuelle interdit
le travail des enfants de moins de 15 ans et l’obligation scolaire démarre à 5
ans et prend fin au 30 juin de l’année calendrier au cours de laquelle le jeune
atteint l’âge de 18 ans . A partir de 15 ans, les étudiants peuvent conclure un
contrat d’occupation étudiant.
Pour les mineurs de moins de 15
ans, il existe certaines exceptions à l’interdiction générale de travail. Il
s’agit exclusivement d’ activités qui rentrent dans le cadre de l’éducation ou
de la formation des enfants et exceptionnellement, des activités pour
lesquelles une dérogation est accordée (métiers du spectacle, de la musique, de
la publicités, de la mode, …).
Mais nous ne devons pas rêver. Le
travail des enfants a encore de beaux jours devant lui dans notre pays. On voit
régulièrement des enfants aider leurs parents dans les entreprises familiales,
pendant les congés ou les WE. En mai 2019
une pizzeria voit débarquer en plein service (20h55), un petit peloton composé
de l’Inspection sociale, de l’Onem, du Service public de Wallonie et de
policiers fédéraux. Il est constaté que deux enfants sont au travail. L’une
(appelons-la Greta) est debout, près du lave-vaisselle, une serviette à la
main. Elle a 12 ans. Sa sœur (appelons-la Martine), 15 ans, note les commandes
téléphoniques derrière le comptoir. Leurs parents sont présents: ils sont les
gérants de la SPRL qui exploite la pizzeria, et y travaillent[1].
La traite des enfants en vue
d’exploitation sexuelle existe dans notre pays. On n’en connaît pas le nombre.
Un des
phénomènes de plus
en plus répandu
de traite des
enfants à des
fins sexuelles – plus particulièrement d’adolescentes -, est celui des «
loverboys » ou proxénètes d’ados[2]. Il s’agit, ni plus ni moins, de « trafiquants d’êtres humains qui
rendent les adolescents
dépendants afin de
les exploiter ensuite
dans la prostitution –
ils utilisent pour
ce faire le
mensonge, la contrainte,
la violence physique
et psychologique ou abusent
de la vulnérabilité
de leurs victimes[3]
»
Enfin, dans certaines familles
les filles sont tenues d’aider au ménage, à la cuisine, sans le moindre repos,
alors que leurs frères en sont dispensés. Ce travail-là n’est ni comptabilisé,
ni sanctionné car il est tenu secret.
Et, dans le monde ?
Le travail des enfants diminue mais y mettre fin reste un défi
considérable
Selon
l’Organisation internationale du Travail (OIT) le terme «travail des enfants» est souvent défini comme un travail qui
prive les enfants de leur enfance, de leur potentiel et de leur dignité, et qui
nuit à leur développement physique et mental. Il s’agit d’un travail qui:
est mentalement, physiquement, socialement ou
moralement dangereux et nocif pour les enfants; et/ou
interfère avec leur scolarité en les privant de la
possibilité d’aller à l’école; les oblige à quitter l’école prématurément; ou
les oblige à essayer de combiner la fréquentation scolaire avec un travail
excessivement long et lourd[4].
En anglais, on utilise deux
expressions pour désigner le travail des enfants : child labour qui correspond à la définition ci-dessus et child work qui désigne les formes non
nuisibles pour l’enfant. Si la plupart des pays condamnent les pires formes de
travail des enfants, certains considèrent qu’il faut reconnaître l’enfant comme un acteur économique à part entière[5].
Ils se basent sur l’article 3 de la Convention internationale des Droits de
l’Enfant qui précise que Dans toutes les
décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions
publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités
administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant
doit être une considération primordiale[6].
Ils défendent le libre droit au travail des enfants et militent pour que ce
dernier soit mieux encadré. En effet, dans certains pays le travail est une
nécessité pour survivre et donc pouvoir se développer.
Entre l’estimation du travail des
enfants faite par l’OIT en 2000 et celle de 2016, le nombre d’enfants astreints
au travail des enfants est passé de 246 millions à 152 millions et celui des
enfants dans les travaux dangereux de 171 millions à 73 millions[7].
Pour la majorité on les retrouve dans les pays du Tiers Monde, d’Asie,
d’Afrique ou d’Amérique du sud, mais aussi en Europe où près de 2 millions de
jeunes de 15 ans ou moins sont au travail chaque jour. Notamment au Royaume
Uni, en Allemagne, en Italie ! On estime que 40 millions d’enfants
travaillent en Inde, 5 millions aux Philippines…
Les garçons représentent 58 % des
enfants qui travaillent mais il est plus que probable que ces chiffres
sous-estiment le travail effectué par les filles car e dernier est moins
visible et sous-déclaré. (par exemple, le travail domestique chez des tiers,
les tâches domestiques chez elles, …)[8].
Les secteurs employant les jeunes sont très variés, mais les conditions de travail sont presque partout identiques.
Quelques exemples :
En Tanzanie, 80 % de la
population vit avec moins de 2 $ par jour. 70 % des enfants de 5 à 17 ans
travaillent. Ceux qui œuvrent dans les plantations connaissent une norme de 11
heures par jour. D’autres travaillent dans les mines ou se prostituent[9].
En Malaisie, des enfants, exposés
aux dangereux animaux de la jungle, sont forcés de travailler 17h par jour dans
des plantations de caoutchouc.
Un mineur de fond en Colombie,
âgé de 14 ans, passe la journée sous une profondeur moyenne de 100 mètres, dans
une atmosphère irrespirable.
En Thaïlande, certains petits
doigts passent plus de 15 heures assis par terre à écailler des crevettes.
En Inde, les enfants subissent
les vapeurs toxiques dans des fabriques de verre non aérées.
L’agriculture est le secteur qui
emploie le plus d’enfants. Ceux-ci sont non seulement sous-payés (voire non
payés, juste de la nourriture), mais injustement exploités ; par exemple à
travail égal, ils ne reçoivent que la moitié de la paie d’un adulte.
Dans le secteur textile, en Inde,
au Pakistan comme au Népal, les enfants sont utilisés parfois jusqu’à 20h par
jour, 7 jours par semaine dans des conditions inacceptables : ils sont
logés dans une pièce qui sert à dormir et à manger mais qui n’est pas
suffisamment aérée, et qui est souvent très empoussiérée. Ce manque de confort
élémentaire cause de graves problèmes respiratoires ainsi que des déformations
de la colonne vertébrale.
N’oublions pas l’Europe, car toutes les régions du monde sont touchées par ce fléau. Comme le rappelait Nils Muižnieks, ancien Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe en 2013, « Selon des recherches menées par l’ONU, en Géorgie, 29 % des enfants de 7 à 14 ans travaillent. En Albanie, cette proportion est de 19 %. Le Gouvernement de la Fédération de Russie estime que le nombre d’enfants au travail dans le pays pourrait atteindre 1 million. En Italie, une étude de juin 2013 indique que 5,2 % des mineurs de moins de 16 ans travaillent. Sur la plupart des autres pays, aucun chiffre n’est disponible. Nombre des enfants qui travaillent en Europe sont employés à des activités extrêmement dangereuses dans les secteurs de l’agriculture et du bâtiment, dans de petites fabriques ou dans la rue. Ce phénomène a été observé, par exemple, en Albanie, en Bulgarie, en Géorgie, en Moldova, au Monténégro, en Roumanie, en Serbie, en Turquie et en Ukraine.
Dans l’agriculture, les enfants peuvent être affectés à des tâches qui impliquent d’utiliser des machines et des outils potentiellement dangereux, de soulever de lourdes charges ou encore de répandre des pesticides nocifs. Travailler dans la rue expose les enfants aux abus et à l’exploitation. En Bulgarie, le travail des enfants est apparemment très courant dans l’industrie du tabac, où des enfants peuvent travailler jusqu’à 10 heures par jour. En Moldova, des contrats auraient été signés entre des directeurs d’établissement scolaire et des fermes ou des coopératives agricoles, en vertu desquels les élèves doivent participer aux travaux de récolte. Le travail des enfants risque aussi de se développer dans les pays durement frappés par des mesures d’austérité : Chypre, la Grèce, l’Italie et le Portugal. De nombreux enfants auraient également des horaires de travail très lourds au Royaume-Uni.Dans toute l’Europe, les enfants roms sont particulièrement menacés. Un autre groupe très vulnérable est celui des migrants non accompagnés de moins de 18 ans, originaires de pays en développement. »
Que peut faire le citoyen ?
Nous n’avons pas de leçons à
donner si nous laissons notre pays mais également des pays européens utiliser
de la main d’œuvre enfantine. Mais nous pouvons très certainement agir à notre
niveau, chacune et chacun, individuellement.
Sur le plan national, nous devons
dénoncer auprès des autorités compétentes (police, procureur du Roi, …) tout
travail des enfants, quel qu’en soit le lieu : familial, commercial,
agricole, …
Sur le plan international, chaque
consommateur occidental, adulte, adolescent, homme, femme ou enfant, manque
d’informations sur les conséquences de ses actes d’achat. Lorsque nous nous
procurons les aliments de première nécessité, se pose-t-on la question de
savoir par qui ont-ils été produits ?
Le commerce équitable peut-il
apporter une solution, peut-il éliminer le travail des enfants ? En tous
cas, il peut y participer. Rendez-vous dans notre dossier « Le commerce équitable, réponse pour une autre production ».
A suivre….
[1]
L’écho, 20 novembre 2019, Une amende de 3.600€ par mensualités, outre
l’indemnité de procédure de 1.440€. Cela représente combien de pizzas ?
[2]
Les « loverboys » sont
de jeunes hommes
qui utilisent la
séduction et la manipulation pour recruter leurs victimes,
CODE, 2017, Traite et exploitation sexuelle des enfants en Belgique : état de la situation et recommandations.
[3] Child
Focus (2016), « Chiffres et actus 2016 – Exploitation sexuelle des mineurs »
Pourquoi un
décret inscriptions en
Fédération Wallonie-Bruxelles ?
L’Ecole est un droit de tous les enfants et nul ne peut pratiquer de discrimination à leur encontre[1]. Ce principe élémentaire était bafoué par certaines[2]écoles au moment de l’inscription. En effet, ces écoles, parmi les plus demandées, pratiquaient allègrement la discrimination à l’inscription. Quoi de plus facile quand on a trop de demandes ? Elles triaient principalement leurs futurs élèves sur base de critères sociaux (les enfants issus de milieux moins favorisés étaient trop souvent refusés), mais également sur base de critères aléatoires (les résultats scolaires antérieurs) ou comportementaux (dossiers de l’élève à l’école primaire). D’autres encore acceptaient des inscriptions prématurées, parfois trois ans à l’avance, afin de réserver les places à leur public privilégié.
Le
Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, estimant à juste titre que ce
sont principalement les personnes les moins favorisées qui avaient des
difficultés à s’inscrire dans l’école de leur choix, a voulu promouvoir
davantage de mixité sociale dans les écoles qu’elle subsidiait et a tenu à
lutter contre cette forme de discrimination. En septembre 2007, le gouvernement de la Communauté
française fixe une date commune de début des inscriptions des élèves en
première secondaire. Les écoles devront dorénavant attendre le 30 novembre
avant d’inscrire de nouveaux élèves pour l’année scolaire suivante.
L’inscription
n’est, d’ailleurs, pas la seule illégalité pratiquée par les directions de
certaines écoles élitistes. D’autres dysfonctionnements ont entraîné
l’apparition d’une logique de marché scolaire dont les parents sont les
clients, et qui ont pour conséquence l’inefficacité de notre système scolaire pointé
par toutes les études internationales. Citons, par exemple, Le minerval ou les
frais à l’inscription ; la ségrégation durant la scolarité (de manière à
éliminer les moins « scolaires », de préférence s’ils sont issus de milieux
sociaux défavorisés et ce, via l’échec scolaire) ou le caractère homogène de
l’offre d’enseignement (peu de choix d’options ou choix d’options « fortes »
comme, par exemple le latin, car on sait que certains milieux sociaux ne
choisissent pas cette option), etc.
Il fallait
commencer à détricoter cet écheveau en commençant par un bout : le Politique a
choisi le moment de l’inscription dans l’enseignement secondaire[3].
Il est à porter au crédit de la Ministre Marie Arena d’avoir été la première à
oser s’en prendre à ce système. Elle l’a payé sur le plan politique.
Comme le
rappelle Benoît Galand[4]
(CGé, 2007), « on peut
s’interroger sur les effets en termes de cohésion sociale du degré de mixité
sociale que l’on rencontre dans les écoles d’un système scolaire (Meirieu &
Giraud, 1997). Quel message transmet-on aux jeunes en les scolarisant dans des
écoles où ils rencontrent une grande diversité sociale ou au contraire dans des
écoles très ségrégées socialement ? Comment cette mixité sociale affecte-t-elle
les représentations des différents groupes et rôles sociaux, les préjugés, les
perceptions de la justice sociale, … des élèves et des enseignants ? L’école
n’a-t-elle pas là un rôle à jouer ? Les enjeux de la mixité sociale ne sont
donc pas minces. D’autant que les effets en termes d’apprentissage sont
socialement déséquilibrés : ce sont généralement les élèves les moins bien
préparés à la scolarité (souvent ceux d’origine populaire) qui sont le plus
affectés par la qualité de l’enseignement qui leur est proposé. »
Pour rappel,
lors de son
adoption le décret
Inscriptions entendait répondre
plus particulièrement à trois objectifs[5] :
organiser
de manière pragmatique
et transparente le
processus d’inscription en vue de limiter
la tension entre
les places disponibles
dans certains établissements et l’importance de la demande les concernant
;
assurer à toutes les familles égalité d’accès à
l’ensemble des établissements scolaires et égalité de traitement dans le
processus d’inscription ;
promouvoir
la lutte contre
l’échec scolaire, améliorer
les performances de
chaque enfant, lutte contre
les mécanismes de
relégation en soutenant
la mixité sociale, culturelle et académique.
Il est
évident que l’objectif politique est noble, puisqu’il vise, à terme, une
société plus hétérogène et plus inclusive. Il ne peut qu’avoir le soutien de
tous les progressistes, même si l’objectif de mixité sociale est loin d’être
atteint. Si on veut arriver à une véritable mixité sociale cela imposera, qu’à
Bruxelles, le pourcentage d’enfants prioritaires issus de quartiers moins
favorisés, passe à 50 %[6].
Avec quels
objectifs pédagogiques ?
Le concept
de mixité sociale n’est pas en lui-même porteur en termes pédagogiques. Il est
plus parlant de parler de gestion de l’hétérogénéité
scolaire, càd du « Comment
faire face aux différents niveaux d’acquis présents au sein d’un groupe-classe?
[Rudy Wattiez, Cgé].
En effet,
sur le plan pédagogique, ce n’est pas de mixité sociale que l’on parle. Pour
faire progresser un groupe-classe, il est important d’hétérogénéiser le public,
plutôt que de tenter de l’homogénéiser. Au plus les différences
d’apprentissages sont grandes, au plus il est nécessaire de mettre des
pratiques pédagogiques adaptées en place. Pratiques pédagogiques qui vont
bénéficier à tous les élèves, quelles que soient leurs facilités ou difficultés
scolaires. L’hétérogénéité permet un véritable « nivellement » vers le haut,
tandis que l’homogénéité, recherchée actuellement par les redoublements et
orientations diverses, est un véritable nivellement catastrophique vers le bas[7] !
Les études
internationales ont démontré que, de tous les peuples de l’OCDE, les belges
étaient les plus inégalitaires ! Notre enseignement est l’un de ceux où
l’hétérogénéité sociale est la plus faible et, par corollaire, qui est l’un des
plus inefficaces. Le niveau des élèves dépendant de l’école qu’ils fréquentent.
Selon que
vous soyez puissant ou misérable…
… les jugements d’Ecole vous rendront brillant ou rempli
de désespoirs. En choisissant leur population scolaire, certaines écoles décidaient
également de l’avenir des élèves qu’elles rejettaient. En effet, l’école que
fréquente un enfant influence son niveau scolaire. Les élèves issus de milieux
moins favorisés, et se trouvant inscrit dans une école défavorisée, réussissent
moins bien que les enfants issus de milieux favorisés, scolarisés dans des
écoles favorisées.
Pourquoi ?
Parce
qu’on n’apprend pas tout seul ! L’effet des pairs (élèves du même âge) est
fondamental : on apprend moins vite dans un environnement où les acquis
scolaires sont faibles que dans un environnement où les acquis scolaires sont
élevés. Et cela, même si on a soi-même, des acquis scolaires faibles !
Cela
s’explique. Dans son étude, Benoît Galand[8]
relève trois raisons :
On apprend plus vite quand on est entouré d’élèves de
bon niveau scolaire. Le niveau scolaire étant en partie liée à l’origine
sociale, c’est dans les écoles « privilégiées » que l’on a le plus de chances de
fréquenter des élèves au niveau scolaire élevé ;
Les ressources financières et humaines des écoles sont
influencées par son public. Sur le plan financier, les familles favorisées
peuvent contribuer aisément à l’équipement et aux frais scolaires de leur enfant.
Sur le plan humain, les équipes pédagogiques (les enseignants) sont plus
expérimentées et moins soumises à des rotations du personnel dans les écoles
privilégiées. La qualité de l’enseignement varie donc, parfois, selon le public
de l’école ;
Selon le public de l’école, l’élève sera plus ou moins
exposé à la violence et à la (dé-) motivation scolaire. Le risque d’être
confronté à des violences verbales et/ou physiques est plus important dans les
écoles « défavorisées », contrairement aux écoles « favorisées » ou les élèves
ont une attitude plus positive vis-à-vis de leur scolarité. Ces élèves, en
outre, souhaitent suivre une scolarité plus longue et ont une ambition forte
pour leur avenir. Rassembler les publics les moins favorisés au sein des mêmes écoles,
ne fait qu’accroître les difficultés (scolaires et comportementales).
Le niveau de
mixité sociale des écoles a des conséquences sur le cursus scolaire des élèves
ainsi que sur le travail des équipes éducatives.
Et Benoît
Galand de conclure « Les faits rappelés ci-dessus montrent que la mixité
sociale apparaît comme un des éléments importants si l’on veut éviter de voir
se creuser les inégalités scolaires et de voir augmenter le nombre d’élèves
n’atteignant pas le niveau d’apprentissage attendu au terme de la scolarité
obligatoire. »
Les effets « école » sur les élèves
Selon qu’ils
sont intégrés dans une école favorisée ou non, les élèves ont une vision
différente de leur scolarité (C. Piquée et M. Duru-Bellat – 2000) :
Les élèves des classes les plus défavorisées portent
sur leur école des jugements moins favorables que les élèves des autres écoles
;
Certaines normes sociales sont moins intégrées par les
enfants de milieux défavorisés (confusion des normes scolaires) ;
Dans les classes primaires défavorisées, l0 % des
élèves envisagent un métier d’ouvrier;
Les élèves favorisés ont des ambitions moins élevées
lorsqu’ils fréquentent des classes défavorisées ;
Il n’y a pas de différences d’attitudes selon que les
enfants sont scolarisés dans des classes favorisées ou défavorisées ;
les élèves ont de meilleures ambitions lorsqu’ils sont
scolarisés dans une école favorisée ;
Dans les classes favorisées, les élèves modestes
n’envisagent jamais un métier ouvrier ;
Les élèves ont l’impression que le climat est meilleur
dans les écoles favorisées.
Il va donc de
l’intérêt de tous les enfants issus de milieux défavorisés d’être intégrés au
sein d’un établissement scolaire favorisé. 20 % des
places leur étaient réservées en priorité, mais dans
les faits, le nombre de familles qui choisissent de bénéficier de cet avantage
est faible. Il est dans l’intérêt de tous que ce pourcentage augmente.
Tous les élèves sont-ils faits
pour toutes les écoles ?
Absolument !
Croire ou faire croire que certains enfants ne seraient pas capables de suivre
un enseignement dans les écoles favorisées tient, ou de l’affabulation, ou de
l’incompétence ! En effet, tous les élèves sont doués pour l’étude. Croire que
certains élèves seraient des intellectuels tandis que d’autres seraient plutôt
artistes ou manuels est absolument faux (des gens « bien mal pensants » parlent
même d’ « intelligence de la main », une autre manière – ségrégationniste – de
désigner les enfants défavorisés). En fait, chacun de nous a, à la fois, de
grandes capacités intellectuelles et manuelles !
Cette idée
archaïque, qui date du début du XXe siècle est à ranger au musée de l’histoire
de la pédagogie. Jean Piaget a démontré, au début des années 60, que
l’intelligence se construit. Il a prouvé que TOUS les enfants devaient
reconstruire les idées, les concepts ou encore les théories qui paraissent
évidentes aux adultes. Bref, grâce à la théorie de PIAGET, on est convaincu
aujourd’hui que tout s’apprend ou mieux, que tout se construit . Ce qui
distingue les élèves c’est leur vitesse d’apprentissage. Bref, la qualité de
l’apprentissage réalisé n’a aucun rapport avec le temps mis pour y arriver.
Depuis plus de 50 ans, on peut affirmer que TOUS les élèves sont doués pour
l’étude (cela s’appelle le « postulat d’éducabilité »).
Il n’y a donc
pas d’école plus adaptée à un certain public scolaire qu’à un autre. Tous les
enfants, quelles que soient leurs origines, sont capables de suivre un
enseignement de qualité , quelle que soit l’école. Dès lors, il est fondamental que les familles les moins favorisées
inscrivent massivement leurs enfants dans les écoles favorisées, afin de leur
donner un maximum de chances d’atteindre un niveau scolaire de meilleure
qualité.
Malheureusement,
la commission de pilotage estime que la
part d’élèves issus d’écoles primaires à indice socioéconomique faible ne varie
pas vraiment dans les écoles. Elle n’augmente quasi pas dans les écoles où elle
est faible, ne diminue pas plus dans celle où elle est élevée. Bref, d’un point
de vue socioéconomique, la population des écoles a peu changé depuis la mise en
place du décret[9].
Les effets « école » sur les enseignants
Selon qu’ils
enseignent dans une école favorisée ou défavorisée, les enseignants ont une
vision différente de leur métier (C.Piquée et M. Duru-Bellat – 2000) :
Tous déclarent des priorités identiques (méthodes de
travail efficaces, apprendre à mobiliser et réutiliser des connaissances, …)
mais dans la pratique, les différences apparaissent ;
Les pronostics de réussite sont nettement plus forts
dans les classes favorisées ;
Dans les classes défavorisées, les enseignants
reconnaissent le plus souvent ne pas terminer le programme ;
Les problèmes de discipline sont plus fréquents dans
les classes défavorisées ;
L’exercice du métier est jugé plus agréable dans les
écoles favorisées que dans les écoles défavorisées.
L’objectif de
viser à une véritable mixité sociale et donc à une véritable hétérogénéité
pédagogique est également de l’intérêt de tout le corps enseignant.
Pourquoi se limiter à un Décret inscriptions seulement à l’entrée de
l’enseignement secondaire ?
Les pratique
« anciennes » des écoles secondaires sont encore de mise dans de
nombreuses écoles maternelles et primaires. De même, quand elles n’ont pu
entrer par la grande porte, les familles qui n’ont pas eu la chance d’obtenir
le précieux sésame reviennent deux ans plus tard, à l’entrée du second degré,
pour y inscrire leur enfant sans ne plus avoir besoin de respecter le décret
inscriptions. Cela encourage les écoles à « faire de la place », et
donc à orienter les élèves qui correspondent le moins à leurs critères
subjectifs vers les enseignements techniques ou professionnels en fin de
deuxième secondaire. Il s’agit bien de discrimination basées sur les
différences sociales. Cela n’est pas plus acceptable qu’en août 2006, quand
l’avant-projet du décret inscriptions a été soigné avec pour objectif de rendre
l’école socialement plus mixte. Il est donc important de réguler à tous les
niveaux et pendant toute la scolarité obligatoire.
En outre, il est évident que
l’arrive du Tronc commun jusque 15 ans va chambouler les objectifs du décret
inscriptions. Il s’agit, en quelques sortes d’allonger l’école fondamentale de
3 années. Aussi, le passage dans l’enseignement supérieur sera le second moment
où les familles devront chercher une nouvelle école. Il ne serait pas
acceptable que les pratiques anciennes reviennent et que le degré supérieur de
l’enseignement de transition puisse à nouveau choisir ses clients, délaissant
celles et ceux qui ne conviendraient pas à leurs critères de sélection.
Dès lors, rédiger un nouveau
décret inscription est une bonne chose mais si ce dernier se limite à l’entrée
dans le secondaire, il aura raté l’essentiel : rendre l’école plus
égalitaire.
[1] Voir Article
28 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant (ONU 1989)
[2] II s’agissait d’une minorité d’écoles. Il ne faut, en
aucune manière, jeter l’opprobre sur l’immense majorité des directions qui ne
pratiquaient nullement cette forme de discrimination. Malheureusement, c’est
par la faute de cette minorité, que des règles d’accueil de tous ont dû être
mises en place sous la forme d’un Décret.
[3] Nous noterons que les écoles fondamentales ont
toujours le loisir de pratiquer la discrimination des élèves à l’inscription.
Il est, aujourd’hui, impératif de penser rapidement à un futur décret inscription
à l’école primaire, afin de tenter d’atteindre l’équité et de lutter contre
l’injustice à tous les niveaux de l’enseignement obligatoire.
[4] Benoît Galand est docteur et professeur en sciences
de l’éducation l’Université catholique de Louvain.
[5]
Rapport 2014 de la Commission de pilotage relatif au Décret inscriptions
[7]
Nous ne parlons pas de
« nivellement PAR le bas », concept inconnu en pédagogie qui
consisterait, pour les plus nantis à refuser que l’école privilégie l’aide aux
plus faibles, afin de ne pas ralentir les apprentissages de leur propre
progéniture.
Je suis ami d’une famille comptant trois enfants, dont un garçon
avec une déficience intellectuelle. Cette famille été suivie par un service
d’aide précoce en vue de faciliter l’accueil de cet enfant
« spécial » dans sa famille, son quartier et sa commune. Elle a
commencé la scolarité de son fils, Jean, dans une école fondamentale qui se
veut « inclusive. Nous en avons parlé et, à l’heure où la FWB se lance dans
ce projet d’école inclusive, j’ai fait un rêve.
Jean part à l’école avec son frère et sa sœur, à pied,
parfois conduit par ses parents, quand il pleut ou qu’il y a du retard. Parfois,
il va avec un copain du voisinage, qu’il connaît depuis quelques années. D’autres
élèves y vont en utilisant un transport en commun, et quelques autres y vont en
transport scolaire, car ils habitent trop loin.
Il arrive à l’heure, accueilli à la grille par une
éducatrice-surveillante, et passe quelques minutes à la cour de récréation. Il
va retrouver ses copains ou il se débrouille seul.
Jean entre en classe avec les élèves de son âge
Il participe aux différents cours, en même temps que les
autres élèves, mais avec un soutien de son professeur spécialisé. A cette fin, il
consulte le programme de la matinée, qui est placé sur son banc et qui s’appuie,
notamment mais pas exclusivement, sur les objectifs qui sont dans son P.I.A.
Au début, il était soutenu
dans pratiquement toutes les matières, mais depuis, ce soutien est surtout prévu
pour les apprentissages qui sont nouveaux pour lui. Par contre, il se passe de
ce soutien pour les activités qu’il doit uniquement revoir. S’il a fini ses
tâches et qu’il lui reste du temps libre, il fait une activité qu’il aime bien et
qu’il réalise à sa place ou dans le coin prévu à cet effet. Il arrive en effet que
le professeur spécialisé le laisse travailler seul et s’occupe des autres
élèves, en collaboration avec le titulaire.
Il travaille aussi avec un copain de classe, qui s’est engagé
pour trois mois à devenir son « tuteur ». Il est sympa et travaille
avec lui, sous la supervision du professeur. Parfois, il peut être le tuteur
d’un élève qui a davantage de difficultés que lui dans certaines matières.
Et la matinée se passe ainsi : Jean regarde son horaire
de travail, qui alterne les activités d’apprentissage (avec son professeur
spécialisé et parfois son titulaire) et les activités de maîtrise et il lui
arrive de travailler seul ! Il fait la gym ainsi que quelques autres activités
non scolaires avec les autres élèves de la classe,
Vient la récréation et la pause de midi. Lors de la
récréation, il est accompagné par un copain, ou joue avec plusieurs copains, ou
il observe calmement les autres. La pause de midi a été compliquée pendant un
certain temps, à cause d’un certain désordre, d’un encadrement insuffisant et
peu formé à l’inclusion, mais après une mise au point de l’organisation et une
discussion avec le référent de l’inclusion, les groupes ont été plus paisibles.
Il prend actuellement ses tartines avec les autres élèves
L’après-midi, tous les élèves de sa classe font diverses
activités, tenant compte de leurs compétences, motivation et attentes. Cette
organisation s’inscrit dans le cadre du projet de l’équipe visant la mise en
place d’une école inclusive réservant le matin aux activités scolaires. Ensuite,
l’après-midi, chaque élève peut opter pour des activités diverses, au choix,
tenant compte de leurs spécificités, et ce durant un trimestre en principe. Ces
activités peuvent varier en fonction des trimestres et porter sur des activités
de rattrapage ou de perfectionnement dans les diverses matières, ou encore des
activités plus socio-culturelles (cinéma, théâtre, …) ou artistiques.
Comme Jean est reconnu comme ayant des « besoins
spécifiques » (mais qui n’en a pas ?), durant l’après-midi, il reçoit
des services de logopédie, de kiné ou d’ergo en cas de besoin, ou encore de
remédiation pédagogique. Parfois aussi un professionnel du Service d’Aide à l’Intégration
vient à l’école pour des activités particulières.
En fin d’après-midi, il retrouve les élèves de sa classe pour
s’assurer que tout est en ordre pour les jours suivants, se dire « au
revoir » et rentre chez lui.
Enfin, la vie d’un élève ne s’arrête pas à la grille de l’école. Aussi, Jean est invité à jouer par des copains de l’école, notamment lors des fêtes d’anniversaire, et il invite aussi des copains à venir jouer chez lui. De plus, il participe à toute activité comme un voyage ou une excursion scolaire adaptée aux besoins de chaque élève de la classe.
Et en tant que parents, qu’avez-vous fait durant ces années de scolarité ?
Nous avons sollicité le CPMS pour une évaluation de notre
enfant mais nous avons dû solliciter un autre service pour disposer d’une
orientation vers une école qui s’était engagée dans un processus d’inclusion. Sommes-nous
dans une situation unique ? Non, car il semble, suite à nos contacts avec
d’autres parents, que les CPMS ne conseillent pas l’intégration et/ou ont des
difficultés à trouver des écoles partenaires. Certains parents ne reçoivent d’ailleurs
pas le rapport écrit des évaluations réalisées avec leur enfant. De plus, un
CPMS assure la guidance des élèves mais nous n’avons pas été informés – comme
beaucoup de parents sans doute – du travail réalisé par ce centre avec notre
enfant. Ces activités doivent faire l’objet d’une refonte fondamentale dans la
cadre de la réforme systémique proposée par le Pacte pour un Enseignement d’Excellence.
Par contre, nous, les parents, avons été invités à participer
à l’élaboration du P.I.A. de notre enfant avant la réunion du Conseil de classe
pour exprimer nos attentes et celles de notre enfant, qui a des difficultés à
s’exprimer. Jean nous accompagne habituellement lors de cette réunion. Le
titulaire ou le professionnel spécialisé qui a la charge de coordonner le PIA nous
remet après la réunion, le P.I.A. de l’élève et il l’adapte au niveau de
compétence de l’enfant, avec des dessins et quelques mots. Nous sommes heureux
d’avoir aussi des suggestions concernant les stratégies utilisées en classe et
qui sont utiles pour assurer le suivi de notre enfant après la classe, le soir,
le week-end et durant les congés.
Quant aux évaluations de notre enfant, nous recevons régulièrement,
par trimestre, les évaluations non chiffrées, avec beaucoup de suggestions
positives. Il serait très intéressant de les recevoir plus régulièrement, d’autant
plus que les professionnels doivent en permanence adapter leur pédagogie aux besoins
de leurs élèves. Cela nous donnerait des idées … et démontrerait que l’équipe
de l’école est très attentive aux besoins de tous les élèves.
Décembre 2020, à l’occasion du 50ème anniversaire de la loi sur l’enseignement spécial de 1970
Ghislain Magerotte est membre de la Plate-forme pour une école inclusive de la Ligue des Droits de l’Enfant. Il est professeur émérite à la Faculté de Psychologie et des sciences de l’Education à l’Université de Mons (Mons, Belgique). Il est aussi président d’honneur de la Fondation d’utilité publique SUSA (Service Universitaire Spécialisé pour personnes avec Autisme). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages : Pratique de l’intervention individualisée tout au long de la vie (avec M. Deprez & N. Montreuil). 2ème édition. (2014). Bruxelles : De Boeck – Scolariser des élèves avec autisme et TED. Vers l’inclusion. (avec C. Philip & J.-L Adrien,. Eds) (2012). Paris : Dunod – L’intervention Comportementale Clinique. Se former à l’A.B.A. (avec E. Willaye, E.). (2010). Bruxelles : De Boeck-Université – Evaluation et intervention auprès des comportements-défis. Déficience intellectuelle et/ou autisme (avec E. Willaye) (2008). Bruxelles : De Boeck – Améliorer la qualité de vie des personnes autistes (avec Rogé, B., Barthélémy, C. (Eds). 2008. Paris : Dunod – Qualité de vie pour les personnes présentant un handicap. Perspectives Internationales. (avec D. Goode et R. Leblanc, Eds) (2000). Paris-Bruxelles : De Boeck et Larcier. Il a également publié des articles sur ces différentes problématiques.
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