« L’aide au travail personnel de l’élève doit nous aider à (re)faire vraiment de la classe“un lieu où les élèves travaillent”… Sinon quelle dérision cela serait que de vouloir les aider à quelque chose que l’on n’a pas déjà engagé avec eux ! »
Philippe Meirieu, 2006.
INTRODUCTION
La première chose que les élèves apprennent quand ils entrent à l’école (parfois même en maternelle), c’est qu’après l’école, c’est encore l’école. Si la première est inscrite dans le temps, la seconde ne l’est pas et peut investir les dernières heures de la journée d’un enfant, que ce soit déjà en primaire, mais tout au long de la scolarité. Au point qu’une fois devenu adulte, le parent va trouver normal que son enfant soit investi de travail supplémentaire après une journée déjà bien chargée, qui l’a fatigué à l’extrême. Non content de cela, si le maître ne donne pas assez de devoirs à faire à la maison, il s’insurgera, en réclamera et si ses désirs d’adulte gâté ne sont pas rencontrés, conclura et fera savoir à qui veut l’entendre sur le trottoir de l’école que tel professeur est incompétent.
Les devoirs sont une prescription de l’école que doit
porter l’élève entre deux ou trois sphères différentes : l’école, la
famille et parfois l’aide aux devoirs. Cette triple localité du travail
scolaire explique aussi pourquoi le travail des élèves en dehors du temps
scolaire reste un domaine peu connu, notamment par tous les intervenants
scolaires. C’est cette méconnaissance, voire ce refus de savoir, qui fonde le
discours professoral sur le manque de travail supposé des élèves et la
démission des familles.
La question des
devoirs remonte à un temps que les moins de 150 ans ne peuvent pas connaître.
Capolarello et Wunsche[1]
ont analysé la revue « l’Educateur » et recherché les articles qui
traitent des travaux à domicile. Ils ont pu constater que ceux-ci font objet de
débats depuis 1865 et en ont relevé plus de 70 entre 1865 et 1900. Il s’agit
donc bien d’une controverse qui alimente l’école et les familles depuis très
longtemps, et qui n’a visiblement toujours pas été tranchée.
La société et la famille
ont beaucoup changé ces dernières décennies. La maman a fort heureusement
acquis son indépendance. Elle n’est plus cantonnée à la gestion du ménage et travaille
en journée. Dans de nombreuses maisons, le parent qui reste assume seul le
quotidien et donc les charges de la famille.
Les recours aux
services de garde après la classe ont augmenté de manière importante ces
dernières décennies et les difficultés pour aider les devoirs des enfants à
domicile se sont accrues dans le même ordre. C’est d’autant plus prégnant quand
l’enfant a des difficultés d’apprentissage et lorsque les parents ne parlent
pas la langue de scolarisation ou lorsque la culture scolaire leur est
étrangère.
Les devoirs deviennent alors sources de stress. Les tensions familiales qu’ils génèrent engendrent de forts ressentiments par rapport à l’école, et impactent la persévérance des enfants et des familles face à la masse de devoirs qui leur est imposée. Tous les élèves ne sont pas égaux face aux travaux à domicile, mais les professeurs se soucient très peu des conditions dans lesquelles se passent les devoirs de leurs élèves les plus fragiles.
Pourtant, de manière
générale, la plupart des parents, tous milieux sociaux confondus, tiennent aux
devoirs, même si leurs effets sur la réussite des élèves sont loin d’avoir été
démontrés. En outre, il arrive, à ces mêmes parents, de poser de gros problèmes
à leurs enfants, notamment pour l’acquisition de bonnes méthodes de travail. Les
travaux à domicile permettent aux familles de suivre la scolarité de leur
enfant. Cette participation, en établissant un lien régulier entre famille et
école, est un facteur important dans la réussite de leur progéniture.
Les études scientifiques ne montrent pas d’effets des devoirs sur les
résultats scolaires tant en primaire qu’en début de secondaire. Par ailleurs,
l’idée que se font les professeurs et les parents que les devoirs
renforceraient le sens de l’effort et la discipline personnelle n’a pas été
validée par les recherches, peu nombreuses sur ce point, il est vrai.
L’Ecole attend des enfants qu’ils s’investissent pendant des heures en
classe puis, qu’une fois fatigués, ils prolongent leur journée par des travaux
supplémentaires au sein de la sphère familiale. Toutefois, cette attente ne devrait
concerner que les élèves de secondaire, les devoirs étant interdits depuis 2001
en Communauté française de Belgique, et les travaux à domicile fortement
régulés. Mais les limites de cette interdiction pour l’école primaire montrent
à quel point les professeurs sont réticents à l’appliquer et à respecter les
droits de leurs élèves. Malgré la loi, des devoirs continuent à être donnés aux
enfants d’école primaire.
L’école n’est pas un ascenseur social et ne l’a
jamais été, loin s’en faut. Sans doute l’a-t-elle été un jour dans les abbayes
pour quelques clercs ou enfants illégitimes d’un seigneur local, mais depuis la
création de l’école, celle-ci a toujours différencié les élèves sur base de
leurs origines sociales. Les familles l’ont bien compris et le « travail hors la classe pour
l’école », comme les chercheurs appellent prosaïquement les « devoirs
et leçons », est un enjeu important. Tous les parents, quel que soit leur
milieu social ont pris conscience de la relation de plus en plus forte entre
niveau de diplôme et chances d’échapper à la misère.
Les devoirs sont souvent le seul lien qu’elles
ont avec l’école. Dès lors, elles l’investissent dans l’espoir d’aider leurs
enfants à mieux réussir leurs études. A l’heure où un certificat de fin de
secondaire ne signifie plus rien sur le marché de l’emploi, ou même un
baccalauréat et un master ne garantissent plus un emploi à vie, la bataille
pour l’avenir de la progéniture commence parfois avant l’école maternelle, par
les premiers stages de langue, la psychomotricité ou l’hypothérapie.
Si la pratique des devoirs perdure, c’est sans
doute parce qu’elle est considérée par les professeurs et les familles comme un
compromis social. Interdits à l’école primaire en France depuis 1956 et en
Belgique depuis 2001, cette pratique « désirée
et rejetée, nécessaire et inutile, efficace et inefficace, sécurisant et source
de tension[2]», est toujours passée outre son interdiction.
Ce compromis social entre l’école et les familles, apparaîtrait comme le
moins mauvais possible[3]
mais serait plus important que le compromis cognitif[4],
tant pour certains professeurs que par la majorité des familles qui les
plébiscite. Même pour les familles dont les enfants en sont les premières
victimes[5]. En
effet, les devoirs structurent l’emploi du temps des élèves après l’école. C’est
le moment où l’autorité parentale peut enfin s’exercer en lien avec les loisirs
autorisés ou non, en fonction de l’avancée des devoirs.
Seule une réflexion globale menée au sein de chaque école qui donne
encore des devoirs permettra de changer les pratiques, tant en primaire qu’au
secondaire. Il est important de questionner la pertinence des devoirs, leur
type, et les conditions de réalisation de ceux-ci pour chaque enfant et chaque
famille. De même que de s’interroger sur d’autres manières de proposer des
renforcements aux élèves. Enfin, comment aider les familles qui n’ont pas les
codes de l’école et quels soutiens les professeurs peuvent-ils leur offrir (en
dehors de l’externalisation des apprentissages vers l’extrascolaire). Il est important que si le choix des
professeurs est de se décharger d’une partie de leur mission sur les familles, chaque
élève doit pouvoir tirer pleinement profit de chacun de ces apprentissages et
que ceux-ci ne soient plus discriminants et vecteurs d’échecs scolaires.
DE QUOI PARLE-T-ON ?
On parle ici du travail explicitement demandé par l’école, c’est-à-dire des « leçons » et des « devoirs » donnés par les maîtres, pendant l’année scolaire ou les vacances. Nous ne parlerons pas du travail « en plus » délibérément choisi par les élèves, ou imposé par leurs parents, en lien direct ou non avec les exigences scolaires, notamment les « cours particuliers ».
[1] Capolarello, Wunsche, 1999, Le pour et le
contre. Une analyse historique de articles consacrés aux devoirs à domicile
dans l’Educateur 1865 – 1992, Université de Genève, Mémoire de Licence
[2] Favre B., Steffen N., 1988, « Tant qu’il y aura
des devoirs… », Service de la recherche pédagogique, cahier n°25 – 1988
[3] Kus Stéphane & Martin-Dametto Sylvie
(2015). Quelles collaborations locales pour améliorer l’accompagnement à la
scolarité. Rapport du Centre Alain-Savary. Lyon : ENS de Lyon, Institut
français de l’Éducation.
[4] Caillet Valérie & Sembel Nicolas (2009).
Points de vue et pratiques des partenaires du travail hors la classe. In
Patrick Rayou (dir.), Faire ses devoirs : enjeux cognitifs et sociaux d’une
pratique ordinaire. Rennes : Presses universitaires de Rennes, p. 33- 70.
[5] Bonasio Rémi & Veyrunes Philippe (2016).
Activité collective et apprentissages dans la pratique des devoirs. Education & formation, n° 304-01, p. 73-86.
04 avril 2019 à la Ligue des Familles Le colloque que nous vous proposons se place dans la perspective du Pacte pour un Enseignement d’excellence se traduisant par des orientations politiques et organisationnelles qui vont toucher tous les partenaires de cette école, jusqu’en 2030 et sans doute au-delà !
La Plateforme de lutte contre l’échec scolaire et les associations constitutives vous invitent à un colloque :
« Une école ambitieuse pour tous ! En construction ? ».
Il y a 5 ans, elles lançaient un appel à refondation. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis. Le Pacte poursuit sa route… Des mesures sont en train d’être prises Où en sont-ils sur les questions essentielles pour nous ?
A 4 semaines des élections, elles veulent débattre avec vous sur • La Gratuité ; • Les Concurrences ; • La relation avec les parents ; • Le Tronc commun.
Le colloque aura lieu le samedi 4 mai 2019 à la ligue des familles, Avenue Emile de Beco 109, 1050 Bruxelles.
HORAIRE 9 heures : Accueil 9 h 30 : Introduction 9 h 45 Travaux de groupes la gratuité – les concurrences – la relation avec les parents – le tronc commun 11h 30 : Pause 11 h 45 : mise en commun et conclusions. 12 h 30 : débats sous forme conviviale
Inscription : Ligue des Droits de l’Enfant info@liguedroitsenfant.be
PAF : 10 euros à verser au compte : BE76 9795 8553 0195 de la Ligue des Droits de l’Enfant avec en communication : «inscription colloque 4 mai + votre(vos) nom(s)» + votre ordre de préférence des ateliers.
Le 21 novembre, nous appelions toutes les écoles de
la Fédération Wallonie-Bruxelles à s’impliquer plus activement dans l’accueil
des jeunes et des familles LGBT et à combattre l’homophobie à la fois par
l’éducation, l’accueil de tous les jeunes et de toutes les familles, quelles
que soient leurs identités de genres et leurs orientations sexuelles et en luttant
contre toutes les discriminations. Autrement dit, à devenir des « Ecoles Pour Tou·te·s ».
Malgré la bienveillance des adultes, l’école est trop souvent un lieu de souffrance pour les jeunes LGBTQI+, mais pas que pour eux/elles. Les LGBT-phobies touchent également des jeunes qui sortent des stéréotypes de genre, que ce soit par leur habillement, leur manière d’être, ou parce qu’ils.elles sont timides, qu’ils.elles n’ont pas de relation amoureuse connue, ou parce que la « rumeur » les a catalogué·e·s. Il en va de même pour les enfants vivant dans les familles homoparentales ou ayant un parent homosexuel.
Les LGBT-Phobies contribuent à une ambiance
d’hostilité et de stigmatisation. Cela va des agressions verbales à la violence
physique, en passant par le harcèlement. Sur la scolarité, les conséquences de
l’homophobie sont importantes. Elles se traduisent par de la démotivation
scolaire, de l’absentéisme et du décrochage scolaire. Enfin, la sur-suicidalité
des jeunes LGBT est une conséquence directe de l’homophobie. Celle-ci est un
facteur de risque du comportement suicidaire. Ces risques sont de 2 à 4 fois
supérieurs pour les filles, et de 5 à 10 fois pour les garçons. Selon le
Rapport Teychenné (France), on peut considérer, qu’en moyenne, deux élèves par
classe sont ou seront concerné·e·s par les LGBT-phobies pendant leur scolarité,
tous niveaux confondus, depuis les classes maternelles à l’enseignement
supérieur.
Cette problématique est présente dans toutes les écoles, sans la moindre exception (même… et surtout dans celles où on veut se voiler la face). Aussi, nous vous invitons à participer à une réflexion le mercredi 8 mai prochain, de 13h30 à 16h30, 18-20 rue de Stalingrad à 1000 Bruxelles. Lors de deux tables-rondes, nous donnerons la parole à des jeunes, des familles, des associations au sujet de leur vécu scolaire, mais également à des écoles qui mettent des projets en place pour favoriser l’accueil des personnes LGBTQI+ et luttent contre l’homophobie et les transphobies.
Le mercredi 8 mai 2019 de 13h30 à 16h30.
Programme du colloque : 13.00 – 13.30 : Accueil avec sandwich et boisson. 13.45 : Introduction : Jean-Pierre Coenen, Président de la Ligue des Droits de l’Enfant. 14.00 : Table-ronde 1 : Témoignages de jeunes et de familles qui ont souffert et/ou rencontré de bonnes pratiques durant leur parcours scolaire. Ils·elles nous feront part de leur vécu, que ce soit de manière positive ou négative, de ce qu’ils·elles auraient souhaité qu’on fasse pour eux.elles ou leurs enfants. 14.40 : Débat avec le public 15.00 : Table-ronde 2 : Nous donnerons parole à des directions, des enseignant·e·s, des associations qui font de la formation et luttent contre les LGBTQI-phobies dans leurs/les écoles, Il·elles nous feront part de ce qui marche, des freins et des réactions positives qu’elles·ils ont rencontrés, de leur vision de l’école LGBTQI+-inclusive. 15.40 : Débat avec le public . 16.00 : Conclusion : Jean-Pierre Coenen, Président de la Ligue des Droits de l’Enfant. 16.15 : Verre de l’amitié et discussions informelles avec les intervenant·e·s. Lieu : Bruxelles Laïque, avenue de Stalingrad, 18/20 – 1000 Bruxelles
Inscription souhaitée : Si vous êtes intéressé·e à participer à ce forum, nous vous invitons à vous inscrire par mail à info@liguedroitsenfant.be Vous pouvez également nous soutenir et vous inscrire en versant 10€ au compte : BE76 9795 8553 0195 de la Ligue des Droits de l’Enfant avec en communication : «inscription colloque 8 mai + votre(vos) nom(s)».
Programme du colloque : 13.00 – 13.30 : Accueil avec sandwich et boisson. 13.45 : Introduction : Jean-Pierre Coenen, Président de la Ligue des Droits de l’Enfant. 14.00 : Table-ronde 1 : Témoignages de jeunes et de familles qui ont souffert et/ou rencontré de bonnes pratiques durant leur parcours scolaire. Ils·elles nous feront part de leur vécu, que ce soit de manière positive ou négative, de ce qu’ils·elles auraient souhaité qu’on fasse pour eux.elles ou leurs enfants. 14.40 : Débat avec le public 15.00 : Table-ronde 2 : Nous donnerons parole à des directions, des enseignant·e·s, des associations qui font de la formation et luttent contre les LGBTQI-phobies dans leurs/les écoles, Il·elles nous feront part de ce qui marche, des freins et des réactions positives qu’elles·ils ont rencontrés, de leur vision de l’école LGBTQI+-inclusive. 15.40 : Débat avec le public . 16.00 : Conclusion : Jean-Pierre Coenen, Président de la Ligue des Droits de l’Enfant. 16.15 : Verre de l’amitié et discussions informelles avec les intervenant·e·s. Lieu : Bruxelles Laïque, avenue de Stalingrad, 18/20 – 1000 Bruxelles
Inscription souhaitée : Si vous êtes intéressé·e à participer à ce forum, nous vous invitons à vous inscrire par mail à info@liguedroitsenfant.be Vous pouvez également nous soutenir et vous inscrire en versant 10€ au compte : BE76 9795 8553 0195 de la Ligue des Droits de l’Enfant avec en communication : «inscription colloque 8 mai + votre(vos) nom(s)».
Dans les discussions qu’alimente le Pacte pour un enseignement d’excellence, il est rarement question d’école inclusive et du monde des écoliers en situation de handicap. Et pourtant, l’enseignement spécialisé concerne 5 % de la population scolaire.
Le Pacte pour un enseignement d’excellence entre dans sa dernière ligne droite : il doit prochainement être reconnu par toutes les forces politiques en Fédération Wallonie-Bruxelles et être appliqué durant les 10 prochaines années. Il a d’ailleurs déjà commencé à produire certains effets. Nous les retracerons dans cette carte blanche, mais dans une perspective d’un enseignement inclusif, sur base des documents en notre possession. Nous avons en effet ajouté cette dimension aux titres que vous lisez habituellement dans les journaux et qui ne parlent pas cette dimension « inclusive », trop peu développée dans le Pacte.
Le terme d’inclusion est apparu ces dernières années sous l’influence de travaux anglo-saxons et de documents internationaux, notamment la Déclaration de Salamanque portant sur l’accueil des élèves à Besoins Spécifiques dans l’enseignement ordinaire (1994) et la Convention des Droits des Personnes Handicapées (2006, approuvée par la Belgique 23/3/2009).
Plusieurs droits fondamentaux à l’inclusion
Qu’est-ce que ce droit à l’inclusion, selon l’article 24 de la Convention de l’ONU des droits des Personnes Handicapées ?
Nous ne reprenons ici qu’un extrait de cet article 24 consacré au droit à l’éducation. « Aux fins de l’exercice de ce droit, les États Parties veillent à ce que : a) Les personnes handicapées ne soient pas exclues, sur le fondement de leur handicap, du système d’enseignement général et à ce que les enfants handicapés ne soient pas exclus, sur le fondement de leur handicap, de l’enseignement primaire gratuit et obligatoire ou de l’enseignement secondaire ; b) Les personnes handicapées puissent, sur la base de l’égalité avec les autres, avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif, de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire ; c) Il soit procédé à des aménagements raisonnables en fonction des besoins de chacun ; d) Les personnes handicapées bénéficient, au sein du système d’enseignement général, de l’accompagnement nécessaire pour faciliter leur éducation effective ; e) Des mesures d’accompagnement individualisé efficaces soient prises dans des environnements qui optimisent le progrès scolaire et la socialisation, conformément à l’objectif de pleine intégration ».
L’inclusion est donc un droit, et c’est à l’école de devenir « inclusive » en accueillant tous les élèves, (y compris ceux à Besoins Spécifiques), qui habitent dans un environnement proche dans le cadre d’une collaboration soutenue entre les équipes (celles d’une école « ordinaire » et d’une école spécialisée, et des équipes de l’AViQ, l’Agence wallonne pour une vie de qualité, et de la Cocof). Sur le plan du droit, relevons que la Fédération reconnaît le statut d’élève de la plupart des élèves en situation de handicap.
Une mutualisation par bassins géographiques
Que prévoit le Pacte d’excellence concernant la mise en place de cette école inclusive ?
Une proposition importante figure dans ce Pacte. Il s’agit d’inscrire cette école inclusive dans la démarche des Pôles territoriaux qui « assureront la mutualisation par bassins géographiques des moyens dédiés à l’accompagnement des élèves en intégration permanente totale dans l’enseignement ordinaire ». Leur rôle sera de « garantir la qualité de l’encadrement et de l’accompagnement que les établissements du pôle territorial pourront proposer pour tenir compte des besoins spécifiques des élèves ». Il est même prévu de « créer, sur une base volontaire, de tels pôles en inter-réseaux, en particulier dans les zones dans lesquelles le nombre d’élèves concernés et, par voie de conséquence, les moyens alloués n’atteignent pas le niveau critique minimum ». De plus, cette école inclusive doit s’inscrire résolument dans la politique développée par le Pacte pour un enseignement d’excellence et d’abord dans les Plans de pilotage mis en place par les établissements dans une perspective de lutte contre le décrochage scolaire et l’école inclusive. Certains évoquent cependant que cette mutualisation ne concernerait que les élèves ayant une déficience intellectuelle légère, des troubles du comportement et des troubles d’apprentissage.
De « fausses » classes inclusives
La Fédération Wallonie-Bruxelles a déjà quelques réalisations à son actif.
D’une part, un Arrêté du Gouvernement de la Communauté française autorise la création de classes et d’implantations inclusives de l’enseignement spécialisé au sein d’établissements de l’enseignement ordinaire du 12-07-2017 (M.B. 31-08-2017) et reconnaît la création de huit classes et d’implantations d’enseignement spécialisé de type 2. Remarquons que ces classes sont appelées « inclusives » de manière erronée. Ce sont des classes spécialisées accueillies dans une école d’enseignement ordinaire. Par contre, une école inclusive est un lieu où l’on accueille tous les élèves quelles que soient leurs caractéristiques et où l’on tente de répondre aux besoins de tous par une organisation et une pédagogie adaptées. Ce terme d’intégration – utilisé depuis de longues années dans l’enseignement – signifie que l’élève à besoins spécifiques doit s’adapter au milieu, et ici à l’école, tandis qu’une école inclusive accueillera cet élève à besoins spécifiques. L’objectif de ces classes dites « inclusives » est-il une étape ou une préparation de l’école ordinaire accueillante vers le développement d’une école inclusive ?
« Besoins spécifiques » : le secteur spécialisé ignoré
D’autre part, un décret relatif à l’accueil, à l’accompagnement et au maintien dans l’enseignement ordinaire fondamental et secondaire des élèves présentant des besoins spécifiques du 07-12-2017 (M.B. 01-02-2018) vise surtout les élèves ayant des besoins spécifiques mais toujours élèves de l’enseignement ordinaire – et non les élèves de l’enseignement spécialisé ! Il concerne les élèves ayant « un trouble spécifique d’apprentissage, un trouble du comportement, un trouble de l’attention, avec ou sans hyperactivité, des caractéristiques permettant de les qualifier comme étant à haut potentiel, une maladie invalidante ou encore un handicap physique, mental, sensoriel ». Ce décret est intéressant pour les élèves actuellement dans l’enseignement ordinaire, avec l’objectif spécifique de diminuer la population scolaire de l’enseignement spécialisé afin de revenir à l’horizon 2030 au pourcentage d’élèves pris en charge par l’enseignement spécialisé en 2004.
Enfin, le ministère de l’éducation vient de mettre à disposition des équipes éducatives dix-neuf fiches-outils relatives à une typologie des aménagements raisonnables pour les élèves à besoins spécifiques en enseignement ordinaire « Mieux cheminer au sein des besoins spécifiques d’apprentissage | Aménagements raisonnables ». De plus, n’oublions pas d’associer trop vite déficience à un ou des aménagements particuliers, car tout élève est unique et doit être approché comme tel. Bel effort, donc mais qui demande aussi une concrétisation sur le terrain de l’école.
Quels défis encore à relever ?
Si ces progrès sont importants, d’autres défis sont à relever. Le décret relatif à l’accueil mentionné ci-dessus soulève beaucoup de questions. Quelles sont les prochaines étapes de la marche vers une école inclusive, avant 2030 ? Est-ce que les élèves « avec un handicap physique, mental ou sensoriel » devraient rester dans l’enseignement ordinaire et demander l’application des aménagements raisonnables ? Cela signifie-t-il aussi que les élèves de l’enseignement spécialisé et relevant actuellement des autres types d’enseignement en sont exclus ! Cela signifie-t-il enfin que le Pacte pour un enseignement d’excellence ne veut pas modifier fondamentalement tout le système scolaire et être aussi « inclusif » ?
De plus, quelles sont les stratégies pour bien identifier ces « besoins spécifiques » chez tous les élèves en situation de handicap, particulièrement chez les élèves ayant des handicaps importants ou issus de milieux défavorisés ? Que devient le « transport scolaire » si les écoles inclusives se multiplient ? Quelle sera la formation des enseignants et des autres professionnels ? Quels curriculums/programmes utilisés dans les écoles (normales) inclusives ?
L’école inclusive en est donc à ses débuts ! Encore faut-il une volonté politique claire pour la construction d’une telle école. Encore faut-il qu’elle soit « décrétée » pour qu’ensemble direction, équipes scolaires, parents, élèves (à besoins spécifiques et « ordinaires ») puissent la construire ! Et « Vivre ensemble », cela s’apprend d’abord à l’école de tous !
Cette carte blanche, signée par des représentants de notre Plate-forme inclusion scolaire est parue dans LE SOIR en ligne, le 13 novembre 2018. Les signataires sont Ghislain Magerotte, professeur émérite (UMons); Annette Teutsch, maman d’une adolescente en inclusion scolaire; Jean-Pierre Coenen, Plateforme «Inclusion scolaire», président de la Ligue des Droits de l’Enfant.
La Ligue des Droits de l’Enfant lance un projet de lutte contre l’homophobie dont sont victimes les jeunes
à la fois dans nos écoles et au sein de notre société.
Nous appelons toutes les écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qu’elles soient maternelles, primaires ou secondaires,
à s’impliquer plus activement dans l’accueil des jeunes et des familles LGBTQI+ et à combattre l’homophobie à la fois
par l’éducation, l’accueil de tous les jeunes et de toutes les familles, quelles que soient leurs identités
de genres et leurs orientations sexuelles et en luttant contre toutes les discriminations.
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Pourquoi l’école ?
Pour deux raisons :
La première raison – et c’est un constat que la Ligue des Droits de l’Enfant a fait depuis plus de 15 ans (nous coordonnons aussi la plate-forme de lutte contre l’échec scolaire et la Plate-forme pour l’intégration scolaire) – s’il y a bien des lieux où il faudrait surtout ne pas mettre d’enfants et de jeunes, c’est dans les écoles. Ce sont des lieux de souffrance, que ce soit pour ces jeunes qui viennent de familles populaires, puis de classes moyennes, qui sont à tour de rôle mis en échec et victimes d’orientations, ou pour les enfants porteurs de handicap ou de maladies qui sont refusés dans les écoles. Et donc, à fortiori, pour les jeunes LGBTQI+ qui ne correspondent pas aux stéréotypes de la société scolaire bien-pensante.
L’école est trop souvent un lieu de souffrance pour les jeunes LGBTQI+, mais pas que pour eux/elles. Le nombre de jeunes victimes de LGBT-phobies dépasse largement le nombre de jeunes LGBTQI+. Elles touchent également – et sans doute en priorité – des jeunes qui sortent des stéréotypes de genre, que ce soit par leur habillement, leur manière d’être, ou parce qu’ils sont timides, qu’ils n’ont pas de relation amoureuse connue, ou parce que la « rumeur » les a catalogué·e·s. Il en va de même pour les enfants vivant dans les familles homoparentales ou ayant un parent homosexuel. Ce sont d’abord ces jeunes qui subissent les discriminations homophobes et le harcèlement. La grande majorité des jeunes LGBTQI+ choisissent, par instinct de survie, de cacher leur orientation sexuelle. Mais s’ils/elles ne sont pas toujours des victimes directes des discriminations homophobes, ils/elles en subissent le poids.
Les LGBT-Phobies contribuent à une ambiance d’hostilité et de stigmatisation. Cela va des agressions verbales à la violence physique, en passant par le harcèlement. A cela, il faut ajouter les discriminations cachées : dans les écoles, certains mots sont tabous. Parler d’homophobie et/ou d’homosexualité est censuré par crainte des réactions des élèves ou des familles. De même les insultes homophobes très courantes bénéficient d’une tolérance sociale et ne sont pas sanctionnées par la communauté éducative au contraire des insultes antisémites ou racistes. Enfin, la communauté éducative n’apporte que rarement un soutien aux jeunes LGBT qui sont perçus comme transgressifs des normes scolaires ou provocateurs/trices.
Les conséquences de cette souffrance sont importantes. Tant sur la sociabilité avec l’apparition de comportements de résilience tels que le repli sur soi, un risque majeur de comportements agressifs envers soi-même, de conduites à risques (alcool, drogues, rapports sexuels non protégés, etc.) mais aussi une perte d’estime de soi, de l’anxiété, de la honte, de la culpabilité, la crainte permanente d’être « démasqué·e » ou harcelé·e.
Sur la scolarité, les conséquences de l’homophobie sont également importantes. Elles se traduisent par de la démotivation scolaire, de l’absentéisme et du décrochage scolaire.
Enfin, la sur-suicidalité des jeunes LGBT est une conséquence directe de l’homophobie. Celle-ci est un facteur de risque du comportement suicidaire. Ces risques sont de 2 à 4 fois supérieurs pour les filles, et de 5 à 10 fois pour les garçons.
Selon le Rapport Teychenné[1] (France) On peut considérer, qu’en moyenne, deux élèves par classe sont ou seront concerné·e·s par les LGBT-phobies pendant leur scolarité.
Comme le souligne l’UNESCO[2], « le harcèlement homophobe est un problème éducatif qui doit être traité par le secteur de l’éducation ». Il a une incidence sur le droit à l’éducation et sur l’Éducation pour tous, parce qu’il est une forme de discrimination et d’exclusion et parce qu’il viole le principe selon lequel les écoles doivent être des lieux sûrs.
La deuxième raison est sociétale
Les LGBT-phobies sont en progression. Il n’est pas une semaine où les réseaux sociaux ne relaient des agressions homophobes. En avril dernier, des manifestants se sont réunis devant la Bourse pour marquer leur révolte suite à l’agression de deux hommes, quelques jours auparavant, qui se promenaient en rue, en se tenant par la main. Les jeunes LGBT et les familles homoparentales sont victimes de l’augmentation d’actes et de propos homophobes au sein de la société, et comme, on l’a dit, au sein des écoles.
La plupart des agressions homophobes sont le fait de jeunes gens. Ces jeunes ne sont pas sorti·e·s du système scolaire depuis des décennies, mais visiblement, et quel qu’ait été leur parcours, ils/elles n’ont pas reçu toute l’éducation nécessaire pour déconstruire leurs croyances ou l’éducation homophobe qu’ils/elles ont reçue, qu’elle soit familiale, sociale, culturelle ou philosophique. On ne nait pas homophobe, on le devient ! Seule l’école est en position de lutter contre les représentations homophobes auxquelles ces jeunes ont été confronté·e·s et qu’ils/elles ont intégrées.
Le rapport de SOS homophobie (France) de 2012 indique que la moitié des jeunes « affirme ne pas connaître de personnes homosexuelles (68% pour les garçons), et 58 % n’ont jamais abordé le sujet de l’homosexualité en famille (70% pour les garçons). Dans chaque cas, les réactions de rejet sont en proportion inversée : 36 % de réaction négatives à l’idée de rencontrer une personne homosexuelle pour les élèves qui n’en connaissent pas (contre 10% pour ceux qui en connaissent) et 30% de réactions hostiles (contre 8%) pour ceux qui n’en parlent jamais en famille. Si la moitié des jeunes garderaient leur amitié à leur(e) meilleur(e) ami(e) en découvrant son homosexualité (mais 38% chez les garçons), le taux tomberait à 38% pour ceux qui ne connaissent pas de personnes homosexuelles et s’élèverait à 68% pour ceux qui en connaissent. Méconnaissance, sexisme et peur des minorités, les ingrédients classiques de l’ostracisme sont sans là sans surprise ».
C’est parce que nous voulons une société inclusive, qui permette à tout être humain d’être pleinement intégré à la société, quelles que soient les différences sociales, physique, intellectuelles, de genre ou sexuelles, que nous voulons aussi une école inclusive, qui éduque les futur·e·s citoyen·ne·s à être les fondateurs et fondatrices de cette société inclusive, et pour participer activement à sa transformation vers plus de justice.
En luttant que l’homophobie, on lutte aussi contre tous les racismes et toutes les discriminations qui minent les relations sociales de notre société.
Une Ecole Pour Tou·te·s
Nous lançons donc cet appel aux écoles : L’homophobie est un problème éducatif. Il doit être traité par le système éducatif. Notre plate-forme lance un appel à toutes les écoles : « Devenez des Ecoles Pour Tou·te·s ».
Pour toute question : contact [arobase] liguedroitsenfant (point) be
[1] DISCRIMINATIONS LGBT – PHOBES À L’ÉCOLE ÉTAT DES LIEUX ET RECOMMANDATIONS. Rapport de Michel Teychenné à Monsieur le Ministre de l’éducation nationale, Juin 2013
[2] Réponses du secteur de l’éducation au harcèlement homophobe – Unesco 2013
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