Les refus de remboursement de la logopédie

Les refus de remboursement de la logopédie

Conformément à l’article 7 de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, la Belgique s’est engagée en 2009 à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les enfants en situation de handicap jouissent de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales, sur la base de l’égalité avec les autres enfants. Dans toutes les mesures concernant les enfants en situation de handicap, l’intérêt supérieur de l’enfant est une considération à prendre en compte en priorité.

Conformément à l’article 25 de la même Convention, la Belgique reconnaît le droit des personnes en situation de handicap de jouir du meilleur état de santé possible sans discrimination fondée sur le handicap et s’est engagée à prendre toutes les mesures appropriées pour que les personnes en situation de handicap aient accès à des soins de santé gratuits ou abordables, de la même gamme, qualité et niveau que toute autre personne. Ces services de santé doivent être proposés au plus près de la communauté, y compris dans les zones rurales.

En 2021, la Chambre des représentants a décidé d’introduire un nouvel article 22 dans la Constitution belge, qui protège le droit à l’inclusion des personnes en situation de handicap. La Belgique a ainsi inscrit dans sa Constitution l’un des principes essentiels de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Depuis 2002, la Belgique dispose d’un droit des patients qui est actuellement en cours de révision. Cette loi définit la relation entre le patient et le prestataire de soins et vise à améliorer la qualité des services de santé. En vertu de cette loi, les patients ont le droit de choisir librement leur praticien.

Certes, la lecture de ces textes légaux donne de l‘espoir. En réalité sur le terrain, la situation est beaucoup moins agréable pour de nombreuses personnes en situation de handicap. Un point important dans ce contexte, c’est l’accès à la logopédie pour enfants ayant une déficience intellectuelle. Depuis des années, malgré objection massive (Unia, inclusion asbl, Délégué des droits de l’enfant, Gamp, UPLF), rien ne bouge en ce qui concerne le remboursement des frais de logopédie pour eux.

Partant du principe que ces enfants ont besoin d’un traitement pluridisciplinaire, où différents thérapeutes travaillent main dans la main, ils ne reçoivent gratuitement la logopédie que dans un centre de réadaptation ambulatoire (CRA) ou dans l’enseignement spécialisé, et non chez un(e) logopède indépendant(e). Il ne faut certainement pas diaboliser par principe une approche pluridisciplinaire, mais malheureusement, les réalités du terrain sont telles que le refus rigide de rembourser les frais de traitement en cabinet privé entraîne souvent des inconvénients considérables et prive de nombreux enfants de possibilités de soutien. C’est grave car sans logopédie, ces enfants ne peuvent pas développer leurs capacités de communication et de langage, et la communication et le langage sont la clé de la participation à la vie de notre société et d’une autonomie maximale. Les personnes qui ne peuvent pas communiquer courent en outre un risque élevé de développer des problèmes de comportement, voire des problèmes importants de santé mentale. D’un point de vue purement financier : les coûts d’une intervention précoce du langage chez les enfants avec déficience intellectuelle compensent largement tous les coûts consécutifs au refus de cette promotion.

 

Voici brièvement esquissées quelques-unes des difficultés rencontrées sur le terrain (la liste complète des obstacles est encore bien plus longue !) :

– Les CRA sont répartis de manière très inégale sur le territoire belge. Globalement il y en a beaucoup plus en Flandre qu’en Belgique francophone, et il y a des régions où il n’y a pas un seul CRA. De plus, les CRA sont spécialisés dans des troubles spécifiques, ce qui signifie que tous les CRA ne sont pas ouverts à toutes les pathologies. Conséquence : celui qui vit dans le mauvais coin doit faire des trajets énormes. Comment cela s’accorde-t-il avec les articles 7 et 25 de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées ?

– Et même ceux qui n’ont pas besoin de parcourir des dizaines de kilomètres pour atteindre le CRA le plus proche pourraient – pour simplifier la logistique familiale – trouver un(e) logopèd(e) indépendant(e) encore plus proche ou plus facile à atteindre. D’autant plus qu’il existe des enfants qui, malgré un syndrome génétique et des besoins de soutien multiples, n’ont effectivement besoin, à un moment donné, que de la logopédie et non d’un soutien interdisciplinaire complet impliquant d’autres thérapeutes. Pourquoi alors entreprendre le long trajet jusqu’au CRA et y bloquer une place de traitement qu’un autre enfant attend peut-être désespérément, si seule une thérapie monodisciplinaire est nécessaire ? Comment cela s’accorde-t-il avec le droit au libre choix du praticien comme ancrée dans le droit des patients ?

– Les enfants qui présentent une déficience intellectuelle dans le cadre d’un syndrome génétique ont souvent besoin d‘un traitement logopédique pour différents troubles (alimentation, communication, langage…) – mais chaque CRA ne dispose pas de tous les spécialistes correspondants, car chaque logopède n‘est pas formé à traiter tout type de trouble. Où ces enfants peuvent-ils trouver les thérapeutes supplémentaires dont ils ont besoin ?

– De nombreux CRA ont de longues listes d’attente. Si un jeune enfant a besoin d’un soutien précoce, un temps précieux est perdu pendant l’attente d’une place en CRA. En plus, l’école spécialisée commence au plus tôt à l’âge de deux ans et demi, alors que l’intervention précoce, par exemple pour initier la communication, doit commencer bien plus tôt. En quoi cela est-il compatible avec l’article 25 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées ?

– Toutes les écoles spécialisées n’emploient pas de logopèdes. Par conséquent, tous les enfants ayant besoin d’un soutien n‘y reçoivent pas de logopédie. Lorsque les logopèdes travaillent dans l’enseignement spécialisé, ils n’ont souvent pas la capacité de fournir une aide individuelle d’une ampleur et d’une fréquence appropriées. Aucune thérapie n’a lieu pendant les longues périodes de vacances scolaires. Si l’école spécialisée ne peut pas offrir un soutien suffisant, l’enfant n’a quand même pas droit au remboursement des frais pour un traitement compensatoire ou complémentaire. Est-ce conforme aux engagements pris par la Belgique lors de sa ratification de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées ?

– Et que font les familles qui choisissent de ne pas recourir à l’enseignement spécialisé mais de prôner pour l’enseignement inclusive, donc la scolarisation en enseignement ordinaire ? Là il n’y a pas d’offre thérapeutique, et pourtant les enfants concernés n’ont pas droit au remboursement des frais de traitement en cabinet privé. Cela rend le choix de parcours en enseignement ordinaire tout simplement impossible pour de nombreuses familles.

 

Comment cela est-il compatible avec l’article 22 de la Constitution belge, sans oublier la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées ?

Pour que les enfants ayant une déficience intellectuelle ne continuent pas à être discriminés en ce qui concerne leur accès à la logopédie, il faut un système plus flexible et modulaire, et il faut certainement plus de CRA pour chaque type de handicap, surtout dans les régions qui n’en ont pas bénéficié jusqu’à présent. Là où une famille ne peut pas se rendre au CRA ou où une logopède indépendante est plus facilement accessible, il doit être possible d’obtenir le remboursement des frais de l’intervention en cabinet privé. Il en va de même lorsqu’un enfant est scolarisé dans une école spécialisée, mais que l’offre de thérapie logopédique y est inexistante ou insuffisante. Et même pendant les longues périodes de vacances scolaires, le traitement en dehors de l’école dans un cabinet indépendant doit être remboursé. Si un enfant a besoin d’un soutien logopédique au-delà de ce que peut offrir le CRA le plus proche, la thérapie supplémentaire en cabinet libéral doit être payée par la mutuelle. Et enfin, il est urgent de réviser la convention de l’INAMI, qui précise pour quels troubles la logopédie est pris en charge. Jusqu’à présent, pour ne donner que deux exemples, il n’y a pas de prise en charge des coûts pour le développement de formes alternatives de communication si l’enfant est non-verbal, ou pour le traitement des troubles de l’alimentation qui surviennent souvent chez les enfants atteints de syndromes génétiques.

Outre le fait que la situation actuelle ne correspond ni à la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, ni à l’article 22 de la Constitution belge, ni au droit des patients, les enfants atteints de déficience intellectuelle sont limités dans les possibilités de développement de langage, et donc – selon le philosophe Ludwig Wittgenstein qui a dit « Les limites de ma langue sont des limites de mon monde » – leur monde est également soumis à des limites plus strictes que ce ne serait le cas avec un soutien adéquat.

 

L’école inclusive doit accueillir TOUS les enfants

L’école inclusive doit accueillir TOUS les enfants

Introduction

L’enseignement « spécial », devenu par la suite l’enseignement « spécialisé », date de 1970. Cela fait aujourd’hui pas mal d’années que les enfants [U1] avec handicap y sont accueillis, loin des autres enfants et souvent loin de leur milieu de vie habituel. Parfois au bout de longs trajets, des heures durant, en bus scolaire, dans des lieux qui leur sont adaptés, mais qui sont aussi et surtout ségrégués. En fait, c’est notre système scolaire qui en fait des lieux ségrégués, en ayant deux types d’enseignements. D’une part des écoles « ordinaires », pour les enfants qui sont dans la « norme », et d’autre part un enseignement « spécialisé » pour les enfants qui sont « hors normes ».

Dans celui-ci, on y est entre enfants « handicapés », cachés aux yeux de tous et oubliés de tous les bien-mal-pensants pour qui l’Ecole avec un « E » majuscule, la grande, la noble « Ecole » n’est destinée qu’à ceux qui peuvent prétendre d’un quotient intellectuel moyen à supérieur.  Cette Ecole qui croit que tout le monde doit apprendre la même chose en même temps et qui ne réussit que très peu ses missions.

La question n’est certainement pas de nous positionner contre l’enseignement spécialisé mais de rappeler que la place des enfants ayant un handicap n’est pas dans un enseignement spécialisé, mais dans l’école ordinaire spécialisée : l’école du quartier, l’école du village avec les enfants « ordinaires » qui partagent le même lieu de vie. Ce Droit fondamental est défini par la Convention ONU de 2006 qui précise que les enfants porteurs d’un handicap doivent « avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif[U2] , de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire également inclusifNDLR[1] »

Analyse : Comment comprendre ce grand retour en arrière ?

Depuis 2004, l’intégration dans l’enseignement ordinaire d’enfants relevant de l’enseignement spécialisé a été mise en place. Si, initialement, ce sont les handicaps physiques qui étaient privilégiés, depuis 2009 et grâce à ratification par notre pays de la Convention ONU sur les droits des Personnes handicapées, ce sont tous les enfants, quels que soient leurs handicaps – et donc également ceux qui ont une déficience intellectuelle – qui pouvaient bénéficier d’un processus d’intégration dans l’enseignement ordinaire. Malheureusement, l’intégration temporaire totale qui permettait aux enfants ayant un handicap intellectuel ou comportemental, avec l’aide du spécialisé, coûtait trop cher à la Fédération Wallonie Bruxelles. Comme à chaque fois ce sont les plus fragiles qui en paient les conséquences. Ils doivent maintenant passer au moins un an en spécialisé pour pouvoir espérer que l’école spécialisée estime qu’ils ont la compétence pour être orientés vers l’ordinaire dans une école qui veut bien d’eux.

Cela a été un grand retour en arrière, complètement incompréhensible pour les familles. Si l’intégration d’enfants avec un handicap progresse un tout petit peu en FWB, ce surtout les handicaps « nobles » qui bénéficient de ces processus. Les enfants atteints de déficiences[U3]  visuelles ou auditives sont respectivement 33,8 % et 31,1 % à être intégrés dans l’enseignement ordinaire. Mais ce sont les enfants issus du Type 2, c’est-à-dire ceux qui ont une déficience intellectuelle modérée à sévère, qui ferment le peloton. Ils sont un tout petit 2 pourcents à se trouver intégrés dans une école ordinaire. Cela fait de notre système scolaire un système maltraitant.

44 % des enfants issus de l’enseignement spécialisé de type 8 qui n’ont aucun handicap mais principalement un « handicap social » (issus de milieux « populaires ») et qui ne devraient de ce fait pas être dans l’enseignement spécialisé bénéficient de l’intégration. Il est inconcevable que ces enfants sans le moindre handicap ne soient pas scolarisés en enseignement ordinaire. Là encore, il s’agit de discrimination.

Comme vous le voyez et principalement pour les enfants avec une déficience intellectuelle, ce droit est largement bafoué. Les bien-mal-pesants de l’Ecole continuent à leur interdire l’accès à l’enseignement ordinaire. Pire, la Fédération Wallonie-Bruxelles, dans son Pacte pour un enseignement d’excellence, ne consacre que 4[JPC4]  malheureuses pages à un enseignement inclusif, ce qui démontre qu’elle n’a pas une vision claire de ce qu’est l’école inclusive. De plus, celle-ci réserve l’enseignement inclusif  aux enfants de milieux populaires injustement orientés vers les Types 1, 3 et 8.

Pourtant, la Belgique et chacune de ses composantes se sont engagées dans l’idée de construire une école véritablement inclusive. Pour les familles, c’est un chemin de croix ! Un vrai parcours du combattant. Il ne leur suffit pas de trouver une école qui accepte leur enfant – ce qui est déjà extrêmement compliqué – mais il faut il n’aura plus droit au soutien pendant 4 heures d’un enseignant du spécialisé. Il recevra bien l’aide du Pôle territorial pour la mise en place d’aménagements raisonnables, mais c’est insuffisant pour aider les enseignants qui ne connaissent pas le handicap intellectuel.

Le Droit de l’enfant est bafoué par la Fédération Wallonie Bruxelles. Mais ce ne sont « que » des enfants handicapés et par malchance pour eux, ils ont un « mauvais » « handicap » pour l’école. Car, pour l’Ecole, il y a de « bons » et de « mauvais » handicaps. Il y a ceux qui ont un handicap « noble », qui ont toutes leurs fonctions cognitives et puis les autres, ceux qui ont un « handicap mental ». Celui qui empêche d’apprendre comme les autres… Comme si – et c’est ce que l’on pense encore trop souvent dans les écoles – tous les enfants apprenaient de la même façon. L’Ecole est faite de traditions, de croyances archaïques, de fantasmes, de lubies et de peurs ; pas de désirs de progrès, de rêves, et d’espoirs. C’est le malheur de ces enfants.

Mais… va-t-on nous demander… ces enfants ont-ils leur place en enseignement ordinaire, puisqu’ils ne savent pas apprendre comme les autres ? La réponse est dans le Droit ! Tout comme le droit à l’information est garanti à tous les citoyens, ces enfants sont des êtres tout ce qu’il y a de plus humains et bénéficient de droits, eux aussi. Et ces droits doivent être respectés !

La question n’est plus de se demander si ces enfants, puisqu’ils ne savent pas marcher, entendre, voir ou penser comme tout le monde, ont droit à une place pleine et entière dans la société, ni s’il faut les cacher au fond d’écoles et, par la suite au fond d’institutions spécialisées, derrière des murs, toute leur vie. La question est de savoir si nous voulons construire une société qui doit permettre à chacun de s’y intégrer et d’y trouver une place de citoyenne ou de citoyen actif et pleinement reconnu comme tel !

Si la réponse est « Oui » – et dans une société démocratique elle ne peut être que « Oui » – alors il n’y a qu’une étape scolaire possible : celle qui apprend au vivre ensemble, à vivre avec les différences que nous avons toutes et tous : c’est l’école inclusive. Un lieu où l’enfant ayant une déficience pourra apprendre à vivre avec les autres et où ceux-ci pourront à leur tour apprendre à vivre avec toutes les différences. Dans l’espoir que, plus tard et ensemble, ils contribuent à la construction d’une société réellement inclusive.  

Un combat pour des citoyen.ne.s à l’esprit critique

Le Pacte ne l’a pas compris. Si la mise en place d’un tronc commun est incontournable pour lutter contre l’échec scolaire, il est insuffisant. Seul un enseignement réellement inclusif peut permettre à chaque enfant, quelles que soient ses difficultés scolaires, sociales, physiques, intellectuelles, … d’acquérir les savoirs que ses capacités lui permettent d’acquérir. Et même, de se sublimer !

Nous voulons une Ecole inclusive. C’est un Droit fondamental de l’enfant handicapé ! Et c’est un droit des autres enfants aussi d’apprendre à vivre avec la différence. La Belgique s’y est engagée, la FWB aussi. Cette dernière se doit de la mettre en place. Nous exigeons donc le respect de cet engagement, à commencer par faire respecter par tous les intervenants l’obligation de respecter ce droit, et donc, de ne plus avoir la possibilité de refuser l’intégration d’un enfant quels que soient son handicap. Le Décret intégration permet trop facilement aux acteurs institutionnels de refuser l’intégration d’un enfant sur base de son handicap. Il s’agit d’une discrimination inacceptable et ce, même s’il existe un enseignement spécialisé. Séparer des enfants sur base de leurs différences physiques ou intellectuelles est, tout simplement, de la discrimination et doit être interdit dans les textes et poursuivi en justice ! Il en va de même pour les parents. Par méconnaissance de l’intégration ou souci de surprotection, des familles refusent des projets d’intégration proposés par des CPMS[U5]  ou des écoles et qui vont pourtant dans l’intérêt des enfants.

Par ailleurs, le Pacte a prévu que les Pôles territoriaux mutualisent les moyens consacrés à l’accompagnement des enfants en intégration, mais cela ne concernera que les enfants orientés en fonction d’un « handicap physique ». Le Pacte ne tient pas compte des enfants porteurs de handicaps intellectuels ou comportementaux. Nous condamnons cette discrimination et attendons de la CF/FWB qu’elle corrige le tir afin d’amener progressivement l’enseignement spécialisé à évoluer dans sa conception, dans ses prérogatives, dans son rôle, au service des besoins éducatifs de l’enfant. Toutes les ressources qu’il contient doivent être mises au service de tous les élèves ! ». Autrement dit, pour aller rapidement vers un système scolaire inclusif.


[1] Voir texte anglais : Persons with disabilities can access an inclusive, quality and free primary education and secondary education on an equal basis with others in the communities in which they live


 [U1]« Porteurs » : c’est lourd; je préfère un terme plus neutre : ayant un handicap…

 [U2]Je préfèrerais que les mots soulignés soient en gras – sans soulignement ; ce qui est plus clair !

 [U3]On est atteint d’une maladie, … mais pas du handicap !!!!

 [JPC4]Je suis d’accord que ce n’est pas qu’un nombre de pages, mais nous avons affaire à la presse qui ne connaît pas le fond du problème. 4 pages sur 300, c’est aussi une manière de leur faire comprendre que la FDW n’a pas de vision claire de ce qu’est une école inclusive.

 [U5]Même remarque à propos des CPMS !

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – Maltraitance institutionnelle dans les transports scolaires

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – Maltraitance institutionnelle dans les transports scolaires

Nous souhaitons revenir sur une problématique qui est trop marginalement répercutée dans la presse et sur les réseaux sociaux, mais que nous pensons important de relancer largement – si possible – dans le domaine public. Il n’y a que de cette manière que nous parviendrons à mettre fin à la maltraitance institutionnelle dont sont victimes certains enfants porteurs de handicaps physiques et/ou mentaux en Région wallonne et à Bruxelles.

Actuellement, les enfants porteurs de handicaps sont scolarisés au sein d’établissements spécialisés. Ces établissements, que ce soit au niveau primaire ou secondaire, ne sont pas légion et, souvent, ces enfants doivent faire des dizaines de kilomètres pour intégrer l’école la plus proche de leur domicile.

Afin de garantir l’obligation scolaire, les Régions organisent un système de bus gratuits qui conduisent les enfants depuis leurs domiciles vers leurs établissements scolaires et les en ramènent sitôt les cours terminés. Pour ce faire, la Région wallonne met en place, quotidiennement, entre 700 et 800 circuits différents (pour l’enseignement spécialisé et l’enseignement ordinaire) qui sont effectués, la plupart du temps, par des transporteurs indépendants.

Unia, la Ligue des Familles et le Délégué général aux Droits de l’enfant organisaient un après-midi d’échanges consacrés au transport scolaire des enfants de l’enseignement spécialisé. Leurs constats rejoignaient ceux que la Ligue des Droits de l’Enfant dressait déjà en 2004. Quatorze ans après avoir dénoncé la discrimination que vivaient les enfants handicapés – donc les plus vulnérables – contraints à fréquenter une école loin de leur domicile en passant des heures dans un bus scolaire, rien n’avait fondamentalement changé ! Il s’agit encore et toujours d’une maltraitance institutionnelle gravissime.

Si pour la majorité de ces enfants (71%) ces trajets en bus sont parfaitement vivables, pour un certain nombre d’entre eux (29%), la durée des déplacements peut aller jusqu’à représenter trois à cinq heures par jour. Autrement dit, certains enfants passent quotidiennement plus de temps dans le car qu’ils n’en ont pour eux, à la maison (hors période de sommeil).

Lorsqu’un enfant est contraint de passer plus de deux heures chaque jour (et jusqu’à six heures), sans bouger, sans pouvoir aller aux toilettes, sans boire ni manger, par tous les temps – en été dans une chaleur étouffante et en hiver dans le froid (lorsque le chauffage du bus est en panne et ne fonctionne que pour le chauffeur), qu’il en perd le sommeil et n’est plus en état de suivre les cours, que son handicap s’en trouve aggravé, etc., nous estimons qu’il s’agit clairement de maltraitance grave. N’oublions pas qu’il s’agit d’enfants ayant un handicap qui les pénalise déjà lourdement.

Les familles attendent – et ce ne serait que justice – que dans la recherche de solutions, l’on donne priorité à l’humain, quelle qu’en soit l’impact budgétaire inévitable. Quant à nous, il nous semble impensable que l’on ne puisse solutionner, le plus rapidement possible, cette maltraitance institutionnelle grave. Cela va faire 21 ans que nous dénonçons cette situation dramatique et rien n’a encore évolué. Est-ce parce que « ce ne sont que » des enfants handicapés ? La société accepterait-elle longtemps que l’on traite ainsi les élèves favorisés de nos écoles élitistes ? Il est temps que l’on considère, enfin, l’enfant handicapé comme un citoyen à part entière.

La vie à bord d’un bus

La vie à bord d’un bus se résume à… pas de vie du tout. Tout enseignant qui est parti une fois au moins en voyage scolaire connaît les règles de vie dans un bus : on ne peut pas se lever, il faut s’attacher, on ne peut ni boire ni manger, ne pas faire de bruit qui pourrait déranger le/la conducteur/trice et l’accès aux toilettes est interdit… car il n’y a pas de toilettes dans la plupart des bus scolaires. Quant à s’occuper, ce n’est pas un problème : les enfants peuvent lire et écouter de la musique. Mais les enfants de maternelle comme ceux qui ont une déficience intellectuelle ne savent ni lire, ni utiliser un GSM. Ils ont juste le droit de s’embêter.

Télécharger ici l’article en entier.

 

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – L’exclusion liée à un transport scolaire indécent

Mme Alexander nous livre son témoignage :

Merci, de nous donner la parole aujourd’hui, à la suite d’un courrier que j’ai envoyé au Ministre du Logement, des Transports et du Développement Territorial.

Je suis la maman de Cannelle Alexander. Je suis invitée à m’exprimer sur un problème récurrent : le transport scolaire. Cannelle ne parle pas : sa maladie l’en empêche. Aussi je m’exprime pour elle, ainsi que pour les autres enfants, dans la même situation qu’elle.

Avant de développer mon intervention, je tiens à vous rappeler que le transport scolaire dans l’enseignement spécialisé est un droit acquis depuis 1974, en raison de la distance plus importante à parcourir pour les enfants handicapés.

Comment cela fonctionne-t-il ? Le MET (Ministère de l’Equipement et des Transports) délègue au TEC (Transport en Commun) le soin d’organiser les transports et, pour cela, le TEC fait appel à des sociétés privées. Mais les conditions de transport sont loin d’être idéales ! Pour beaucoup d’enfants, le temps de transport est incroyablement trop long. A titre d’exemple, Cannelle aurait 5 heures de car par jour pour aller à l’école, distante de 40 km de la maison. Quel parent accepterait que son enfant, valide, fasse autant d’heures de bus tous les jours ?

Par ailleurs, quand votre enfant monte en voiture, l’attachez-vous ? Sachez que, dans les bus du TEC, les enfants ne le sont pas toujours : tous les véhicules ne sont pas équipés de ceinture et, donc, ne respectent pas les mesures de sécurité en vigueur dans notre pays, mesures qui sont plus que nécessaires pour des enfants qui ne sont pas autonomes. Imaginez un enfant autiste, avec des troubles du comportement. Cet enfant doit être drogué pour qu’il reste calme durant ces interminables heures de bus. Je vous invite à visiter la page qui parle du transport scolaire sur le site de la Ligue des Droits de l’Enfant et qui reprend l’ensemble des dysfonctionnements dont je parle.

Maintenant, je souhaite vous lire le courrier que j’ai envoyé au Ministre, ainsi qu’à tous les responsables du transport. Je vais demander à mon mari de vous distribuer un petit fascicule dans lequel j’ai repris la lettre, ainsi qu’un document joint en annexe :

Monsieur le Ministre,

Je vous adresse ce courrier, suite au premier passage d’un bus de transport scolaire, ce lundi 3 novembre.

Bonne nouvelle a-priori puisque nous l’attendions depuis le 1er septembre. Quel sens de l’humour a le TEC puisqu’on m’annonçait : « Nous passerons chercher Cannelle à 6 h 35 ! » C’est une bonne blague, me dis-je, au vu de ses problèmes de santé. Non, ce n’est pas une blague !

Vous excuserez d’avance le ton quelque peu déconcertant de ce courrier. Mais, après quelques années de grande galère avec le transport scolaire et, n’ayant plus rien à perdre puisque, quoi qu’on fasse, on est toujours perdant avec vous, autant me libérer un peu.

Je parlais donc de problème de santé. Il apparaît en effet que vos services soient plus à même qu’un médecin pour juger de la nécessité ou non d’un transport scolaire individuel ou en groupe restreint afin d’en diminuer le temps (voir les certificats médicaux remis en début de chaque année scolaire). Je me permettrai donc de vous joindre en annexe, la dernière radio de ma fille. On pourrait croire que cela fait partie du secret professionnel, auquel tout patient a droit mais, dans notre cas, un transport décent me semble un droit plus important. Voilà à quoi ressemble un enfant handicapé (pas tous, mais la mienne, oui) vue de l’intérieur ! Un enfant handicapé, c’est un peu plus qu’un peu de bave qui dégouline, des cris effrayants, un air débile.

Un enfant handicapé, ma fille en l’occurrence, souffre de problèmes orthopédiques et d’une lourde scoliose – d’une énorme, gigantesque, extraordinaire scoliose – qui lui cause quelques souffrances.
Cannelle aura 15 ans bientôt, elle pèse 19 kg et elle mesure 135 cm. Sa colonne vertébrale fait les « montagnes russes ». Elle ne sait pas s’asseoir seule ; elle ne sait pas marcher ; elle ne sait pas parler pour me dire : « Maman, j’ai mal, atrocement mal dans ce p… de bus. Aide-moi ! »

Il n’est vraisemblablement pas permis ni au MET, ni dans ces messieurs-dames politiques – ministres de tous genres et de tous bords -, qu’il y ait un enfant handicapé, sinon on aurait revu la situation depuis longtemps et on aurait trouvé l’argent ou, au moins, une façon plus intelligente de le gérer. Donc, airs compatissants et mines de circonstances en notre présence. Mais, c’est bien connu, « Loin des yeux, loin du coeur ».

Pour conclure, je me demande si la mettre dans un bus à 6 h 35 pour commencer l’école à 9 h, sans oublier le retour, serait bien raisonnable, sauf … si je veux la tuer. Et, dans ce cas, merci le transport scolaire ou « comment se débarrasser de sa fille handicapée, un peu gênante et encombrante, en quelques semaines » … sans risque d’être inquiété par la justice, puisque voilà comment contourner le meurtre par négligence ou encore, la non-assistance à personne en danger… Merci encore le transport scolaire…

Je vous remercie d’avoir lu ce courrier jusqu’au bout et vous prie de recevoir, Monsieur le Ministre, mes meilleures salutations.

En lisant ceci, vous aurez compris que 5 h de route pour aller à l’école, c’est vraiment beaucoup !

A ce jour, mon courrier est resté sans nouvelles. Après cette lecture, moi, je me demande si le transport de bestiaux n’est pas plus réglementé dans notre pays car, très vite, Gaïa monterait au créneau, avec la couverture médiatique que l’on connaît, et les soutiens de toutes parts. Pour nos enfants, qui crie au scandale ?

Mon souhait aujourd’hui, c’est simplement de vous interpeller pour que vous preniez conscience de cette situation qui est intolérable pour la maman que je suis. Sachez que nos
enfants handicapés sont des enfants avant tout et pourraient être les vôtres. La voix de ces enfants n’est pas entendue. Aussi, aujourd’hui, je parle en leur nom, au nom de toutes les souffrances qu’ils endurent par une politique qui fait fi de tout cela.

Mesdames, Messieurs, je vous remercie de m’avoir écoutée mais, plus encore, de m’entendre.

Mr Coenen, Ligue des Droits de l’Enfant

Merci, Mme Alexander.

Au nom de la Ligue des Droits de l’Enfant, je vais maintenant exposer nos revendications en matière de transport scolaire.

Les transports scolaires concernent environ 15 000 enfants en Communauté Française (Région de Bruxelles-Capitale et Région wallonne). Pour plus de 90 % d’entre eux, cela se passe sans problèmes. Malheureusement, pour 9 % des enfants, la durée des trajets est une réelle souffrance, jusqu’à cinq heures par jour (et parfois au-delà). Cela génère des horaires trop lourds. Certains enfants quittent leur domicile avant 6h30 pour le retrouver 12 heures plus tard. Il leur reste deux bonnes heures pour faire leurs devoirs, souper, se détendre, … Tôt levés, tôt couchés. Peu de vie de famille.

Il s’agit clairement, pour certains enfants (ceux qui sont plus d’une heure par trajet dans le bus) d’une situation inhumaine, voire carrément dégradante. Le terme de maltraitance que nous utilisons depuis 2006 n’est nullement usurpé. En effet, cette situation génère une véritable souffrance, tant au niveau psychologique que physique, selon les déficiences des enfants.

La Ligue rappelle ses revendications dans l’intérêt supérieur des enfants concernés

Nous demandons qu’une règle soit établie en direction des TECs organisateurs des tournées, afin que celles-ci aient une durée maximale pour chaque enfant. Nous estimons que 60 minutes est un maximum au-delà duquel ce n’est plus rendre service à l’enfant. Dans les cas exceptionnels, on pourrait (si le handicap de l’enfant le permet) monter à 90 minutes maximum. Mais cela devrait rester des exceptions et ne pas durer plus d’une année dans la scolarité d’un enfant. Pour rappel, les normes de l’AWIPH sont de deux heures maximums aller ET retour !!!

Favoriser, pour les enfants ayant les horaires les plus lourds, l’utilisation de véhicules de catégorie 3 (8 places + chauffeurs) tels que ceux utilisés par les ASBL qui organisent les transports scolaires.

De même, nous demandons que les bus soumissionnés par les TECs auprès des firmes de car, aient un confort minimal véritable, permettant aux enfants de passer ce temps dans les meilleures conditions qui soient. Au niveau sécurité, ils doivent être équipés de sièges individuels, d’appuie-têtes et de ceintures de sécurité.

Nous demandons également que les convoyeuses soient correctement formées aux handicaps et à ce qui doit être mis en oeuvre pour leur favoriser la période passée dans le bus, ainsi qu’à la gestion d’un groupe d’enfants dans un espace clos. De même une équipe suffisante de convoyeuses doit être mis en place pour pallier les absences.

Nous demandons que tout transport scolaire d’enfant soit établi en concertation avec la famille ou l’institution en charge de l’enfant, ainsi qu’avec l’institution scolaire. Chacune de ces parties ayant son mot à dire et pouvant exiger un meilleur service. La seule gestion actuelle par les TECs ayant montré ses limites et son unique souci financier, au mépris total de la problématique des enfants.

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – L’exclusion des enfants sans papier

Témoignage de Mullem

 Je m’appelle Mullem. J’ai 15 ans. Et je viens du Liban. Je pense que vous connaissez bien la situation au Liban.

 Je suis arrivé en Belgique, parce que j’étais en danger. Il y avait la guerre et j’étais menacé par l’ex-mari de ma mère. Je suis arrivé en Belgique. J’ai été envoyé dans un centre, près d’Anvers, à Linkeroever. La vie au centre était difficile : il y avait 350 personnes de différentes nationalités et ils étaient tous des étrangers pour moi. J’étais habitué à une vie normale au Liban, avec ma famille.

 Plus tard, nous avons reçu une lettre de Caritas, annonçant que nous allions vivre dans une maison à Ypres. Dans cette maison, je me sentais plus à l’aise. Je suis allé à l’école et j’ai appris le « dialecte local ». J’ai beaucoup d’amis à Ypres maintenant et j’aimerais bien y rester. Mais, parfois, des personnes ne sont pas gentilles envers moi comme, par exemple, un professeur à l’école. Il m’a dit qu’il me mettrait dans une enveloppe et qu’il me renverrait dans mon pays d’origine. Je pense que cet homme n’avait vraiment aucun respect pour moi.

 Quand j’aurai 16 ans, j’aimerais bien travailler comme jobiste étudiant. Mais je sais que ce ne sera pas possible. Après mes études, j’aimerais bien devenir ingénieur ou dentiste. Mais ce ne sera possible que si j’ai des papiers. Merci pour votre écoute et votre invitation.

 Anne Dussart, Caritas International

 Rechercher un enfant sans papiers, ça n’a pas été simple, non plus, dans notre association. On aurait bien voulu trouver un enfant qui vit en région francophone. Malheureusement, c’est un enfant néerlandophone. On aurait pu faire écrire un témoignage et le lire. Mais je crois qu’il est important d’avoir un visage devant soi. Un « sans-papiers », c’est un enfant, ce sont des parents, c’est toute une famille. C’est la raison pour laquelle on a demandé à Mullem de venir témoigner et de dire qui il est. Mullem se sent bien. C’est la raison pour laquelle on a pu trouver un enfant. Mais, à Caritas, nous sommes confrontés à beaucoup d’enfants qui n’auraient jamais voulu témoigner. Toute sa famille est ici. On les remercie de venir de si loin, tous ensemble, pour soutenir Mullem parce que être sans-papiers, ça fait peur.

 Les gens sans-papier vivent dans une anxiété constante d’expulsion : ils ne savent pas, quand ils se lèvent, ce qu’ils vont faire le soir, s’ils seront toujours en Belgique, s’ils vont se retrouver dans un centre fermé, si le lendemain, ils vont être dans un avion. Je crois que c’est très difficile à vivre. Même si Mullem se sent relativement bien, je crois que c’est ce qu’il vit au quotidien avec sa famille. 

  1. Qui sommes-nous?

 Caritas International est une ONG d’inspiration chrétienne, membre d’un des plus grands réseaux internationaux : Caritas Internationalis, comprenant 163 organisations présentes et actives dans environ 200 pays et régions.

 Caritas International est spécialisé en deux matières : le volet étranger (urgence, réhabilitation et développement) et le volet intérieur. Dans le cadre de ce colloque, seule la dimension intérieure sera développée. Nous venons en aide aux migrants nouvellement arrivés en Belgique et plaidons pour que chaque migrant soit traité dignement, quel que soit son statut. 

  1. Le volet « migration » de notre travail

 Caritas International organise l’accueil, le logement et l’accompagnement à petite échelle des demandeurs d’asile durant toute la durée de la procédure. Elle met à leur disposition 192 unités de logement dans toute la Belgique. Elle leur offre également un accompagnement professionnel dans le cadre d’une Convention conclue avec le Ministère de l’Intégration Sociale. Caritas International estime que l’autonomie et la vie de famille des personnes concernées doivent être garanties. Avoir un foyer constitue le premier pas vers l’autonomie, le renforcement de l’esprit d’initiative et l’intégration sociale.

 Les migrants en difficulté peuvent s’adresser au service social de Caritas International à Bruxelles. De plus en plus de personnes sans-papiers et de familles avec enfants viennent nous trouver pour demander des conseils. Des professionnels essaient de les aider via les moyens qui sont à leur disposition, ce qui est extrêmement difficile car ces personnes se trouvent dans une situation de détresse sans issue.

 En réponse aux demandes du service social de Caritas International, plusieurs projets sont développés.

 Depuis la fin des années 80, Caritas International est l’une des organisations qui visitent les personnes enfermées dans les centres 127 (Melsbroek) et 127 bis (Steenokkerzeel). Grâce à nos visites hebdomadaires, nous voulons briser l’isolement des personnes enfermées, assurer l’information du monde extérieur et, si nécessaire, intervenir comme médiateur entre les instances et les personnes concernées.

 Depuis 1984, Caritas International organise le retour accompagné en vue d’une réintégration durable dans le pays d’origine, ceci en partenariat avec l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM). Le service social de Caritas International encadre les migrants qui désirent rentrer volontairement dans leur pays d’origine et ce, pendant toute la durée de la procédure (projet REAB). Dans ce cadre, Caritas International fait appel à son réseau international afin de mieux préparer et informer les personnes qui souhaitent rentrer dans leur pays. Une fois rentrées, les partenaires locaux se chargent de l’accompagnement de ces personnes.

 Depuis 2005, Caritas International a engagé trois tuteurs professionnels. Chacun assume la tutelle de 25 mineurs étrangers non-accompagnés (Mena) en moyenne. 

  1. L’exclusion des enfants sans papiers

 Via les assistants sociaux et leur contact au quotidien avec les migrants, Caritas International dispose d’une expertise considérable en matière d’exclusion des enfants étrangers et des enfants sans papiers en particulier. Elle aimerait transmettre ici quelques problèmes liés à l’exclusion des enfants sans-papiers et des revendications à ce sujet.

 –  Les enfants sans-papiers subissent une grande pression psychologique sur plusieurs plans. Au niveau scolaire, les enfants se contraignent souvent à atteindre de bons résultats car pour eux, les résultats scolaires font preuve d’une bonne intégration, ce qui faciliterait la régularisation (ce qui n’est pas correct). L’enfant ne peut pas servir de traducteur, ce qui est souvent le cas vu que les parents ne connaissent pas la langue du pays. Parfois, les enfants doivent transmettre des informations qu’ils ne sont pas capables d’assumer à leur jeune âge. Les enfants sont victimes de la situation et doivent jouer le rôle d’adulte.

 –  Les enfants éprouvent une anxiété continue de se faire expulser. L’enfant ne peut pas envisager de plans pour le futur (projets d’études, de loisirs…). Un bon accompagnement ethno-psychologique (par le PMS) est nécessaire pour aider l’enfant à comprendre sa situation et à alléger ses tâches.

 – La procédure est souvent dure, longue et difficile à comprendre pour un enfant sans-papiers. Les interviews doivent être adaptées à l’âge et la maturité de l’enfant et doivent être données par du personnel qualifié et dans un environnement adéquat.

 – Les enfants se sentent souvent stigmatisés de façon relative par rapport à leurs compagnons.     N’ayant pas de papiers, ils n’ont pas l’autorisation de quitter le pays, même pas pour des activités scolaires. Les activités obligatoires, comme la natation, et les excursions scolaires en Belgique sont souvent trop chères pour les parents. L’Etat pourrait prendre en charge les frais scolaires de tous les enfants de milieux modestes. Les enfants ne peuvent pas souvent participer à des activités extrascolaires, ce qu’ils perçoivent comme une exclusion.

 – Les enfants sans-papiers ont droit à l’aide médicale d’urgence. Caritas International plaide pour un accès à tous les soins médicaux, qu’ils soient urgents ou non.

 – Caritas International demande que la durée du séjour en Belgique soit prise en compte dans le processus décisionnel. Les enfants s’adaptent à un nouvel endroit, apprennent la langue et la culture et perdent souvent tout contact avec le pays d’origine. Caritas International demande le respect du temps maximal d’un an pour la durée de procédure de la demande d’asile. Elle demande également de statuer rapidement après une demande de régularisation.

 – En aucun cas, des enfants peuvent être enfermés. Plusieurs recherches démontrent qu’un enfermement engendre des conséquences négatives pour l’état psychosocial de l’enfant car ces centres ne sont pas adaptés à la vie de l’enfant. L’alternative à l’enfermement des enfants dans les centres fermés, proposée par la Ministre de la Politique de migration et d’asile Annemie Turtelboom, n’est valable que pour les nouveaux arrivés : les familles déjà présentes dans les centres fermés n’ont pas droit au déplacement. L’accueil alternatif ne prend pas en considération la totalité des enfants sans-papiers, mais n’est qu’offert aux familles expulsées en fin de procédure. En outre, ce qui se passera avec les enfants et leurs parents qui demandent l’asile à la frontière n’est pas clair. C’est également le cas pour les enfants enfermés dans le cadre du respect de l’accord Dublin (enfermés en attente d’une expulsion vers le pays européen où ils ont effectué leur première demande d’asile). Cette dernière catégorie d’enfants représente 50 à 70% des enfants dans les centres fermés.

 – En ce qui concerne les mineurs étrangers non-accompagnés, Caritas International demande un renforcement de la structure de la tutelle. Un mineur sans parents est toujours plus fragile qu’un jeune accompagné de sa famille. Tout en respectant le bon travail fourni par les tuteurs volontaires, nous plaidons pour un investissement supplémentaire de la part du gouvernement pour la professionnalisation des tuteurs et pour une reconnaissance des tuteurs travaillant comme employés dans une institution. Le travail en équipe aide le tuteur à trouver une solution personnalisée et durable pour les jeunes.

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – L’exclusion des enfants handicapés de l’assurance familiale

RECHERCHE : Les exclusions vécues par les enfants – L’exclusion des enfants handicapés de l’assurance familiale

Témoignage de Paul D.B., Papa d’Anaïs

Je voudrais d’abord remercier la Ligue de nous avoir écoutés. Cela nous a fait du bien parce que nous nous sentions seuls depuis de nombreuses années, face à notre fille, Anaïs, qui est reconnue comme handicapée. Son problème est un problème de violence. La violence est tout à fait inacceptable dans la société. Mais, si notre fille « dérange », elle n’est pas acceptée ni encadrée.

Anaïs a toujours eu des problèmes de comportement (violence), aussi bien à la maison qu’à l’école. A cause de cela, nous avons reçu six plaintes de la Communauté Française. Les cinq premières plaintes ont été rentrées au niveau de notre assurance familiale et la dernière a été prise en charge par le cabinet du Ministre de l’Enseignement.

Anaïs est l’aînée de 3 enfants. Elle a eu une scolarité normale jusqu’en 4ème primaire. Les problèmes de violence sur les professeurs ont débuté avec 2 plaintes. Après contact avec le PMS de Ath et orientation en Type 3 (troubles du comportement), elle a reçu de nombreuses aides psychologiques, mais une nouvelle plainte la conduit à un renvoi de l’école.

Ensuite, nous avons stoppé, de nous-mêmes, un court essai dans une autre école afin de chercher l’aide d’une institution. S’en sont ensuite suivi plusieurs intégrations scolaires, entrecoupées de placements en institution.

Deux ans plus tard, Anaïs est reconnue comme handicapée, avec une incapacité permanente de 66%. Il nous est précisé par différents accompagnants que si cela ne marche pas dans sa nouvelle école et qu’elle est renvoyée, il n’y a quasi plus d’école dans les environs de notre domicile. Notre fille devrait alors passer toutes ses journées en institution, avec une formation sur place ou par correspondance, ce qui serait vraiment dommage pour son intégration sociale et familiale.

Depuis un certain temps, notre courtier d’assurance nous prévenait que nous allions avoir des problèmes avec la compagnie qui possède tous nos contrats, dont la responsabilité civile familiale. Ce bureau a dont cherché une solution auprès de toutes les compagnies mais sans succès.

Il m’a donc donné carte blanche afin de trouver une solution par moi-même. J’ai contacté, par téléphone ou en personne, divers assurances ou courtiers, mais sans succès. L’exclusion définitive de notre assurance familiale a été effective deux ans plus tard.

La Communauté Française a décidé de suspendre les plaintes. Mais cela ne suffit pas aux assurances qui disent que ma fille pourrait faire des crises à l’extérieur et donc, serait un danger à ce moment-là.

Il faut savoir que jamais nous n’avons eu de plaintes concernant le comportement de notre fille à l’extérieur que ce soit dans les magasins, la ville de Péruwelz, le bus ou le train.

Par un heureux concours de circonstance, et à cause d’un conflit entre courtiers, une compagnie a malgré tout accepté de nous donner un contrat pour un an mais en précisant que, si une plainte était déposée, il y aurait suspension de celui-ci.

C’est injuste pour notre fille, notre famille et nous-mêmes qui faisons tout ce qui est possible pour l’aider et la soigner depuis de nombreuses années.

Notre famille, notamment les frères et soeurs ont déjà tant souffert des difficultés d’Anaïs. Il n’est pas nécessaire que toute la famille soit encore plus pénalisée : s’il n’y a pas d’assurance pour Anaïs, il n’y a d’assurance pour personne.
Il y a donc un vide juridique en la matière.

Pourquoi n’existe-t-il pas une assurance ou une caisse spéciale pour assurer les enfants handicapés violents et protéger ainsi la société et les familles ?