Comme vous le voyez, elle est porteuse de trisomie21 mais, malgré son handicap, elle était scolarisée dans l’enseignement ordinaire depuis qu’elle a deux ans et demi. J’ai eu la chance de trouver des professeurs et une équipe éducative qui étaient partie prenante pour ce projet pédagogique.
Quand elle a commencé l’école, elle n’était pas propre, elle mettait encore tout à la bouche, la colle comme la peinture. Elle ne parlait pas et marchait à peine mais ça n’a pas rebuté ces institutrices merveilleuses qui étaient prêtes à s’investir. Mais, comme c’est souvent le cas, il n’y a pas d’aide extérieure. En tant que parent, j’estime aussi que je ne peux pas exiger d’un professeur qu’il s’occupe de ses 20 élèves et de nos petits bouts spéciaux : Ysaline est très gentille mais il fallait sans cesse la surveiller. Aussi j’ai demandé l’autorisation de l’accompagner, autorisation qui m’a été gentiment accordée après la signature des décharges, bien évidemment.
Au fur et à mesure qu’elle grandissait, son comportement a changé et j’ai pris mes distances avec elle. Quand nous avions la chance d’avoir une stagiaire, automatiquement je me retirais de la classe. Je la laissais seule avec les professeurs et la stagiaire. Pourquoi ? Parce qu’il est évident, pour moi, que les apprentissages sont importants, mais son autonomie aussi. Lors des sorties, je m’occupais souvent des autres enfants et je laissais Ysaline avec son institutrice. En regardant Ysaline avancer, nous avons remarqué qu’il lui fallait être avec des enfants plus grands qu’elle, parce qu’elle les regardait faire et puis, tout d’un coup, elle essayait de les imiter. C’est pourquoi elle est passée de classe, au fur et à mesure, sans en avoir les compétences. Les compétences, elle les acquérait à force de regarder les autres.
Ysaline a évidemment doublé sa 3ème maternelle. L’année passée, elle avait 6 ans ; elle allait deux heures en 1ère année et le reste en maternelle parce que sa faculté de concentration n’était pas encore assez importante. Malgré une année « chouette », je ne voyais plus assez de progression. J’envisageais de la mettre dans l’enseignement spécial mais vers le mois de mai, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir des signes de lecture : elle reconnaissait le « a », le « i ». Nous avons fait un bilan avec son institutrice de 1ère primaire : elle était tout à fait partante pour essayer une nouvelle année parce qu’Ysaline progressait de nouveau.
Je croyais que la rentrée se ferait agréablement quand j’ai appris, fin juin, qu’Ysaline n’était plus désirée et, encore moins, ma présence ! L’Echevine de l’Education ne nous permettait pas de continuer le projet mis en place. Depuis l’arrivée d’Ysaline, des élections communales avaient eu lieu et on avait changé de majorité politique à la commune !
Mais le 16 juin, il est impossible de visiter les classes, ce sont les examens et la fin de l’école. En septembre, il est trop tard pour parler d’un projet éducatif, trop tard pour faire des demandes d’aides. Quand vous allez les visiter, les écoles vous promettent de vous rappeler et vous attendez toujours. Personne n’ose vous dire que la « trisomie 21 » dérange encore au 21ème siècle ! Alors, vous vous rendez compte qu’une intégration ne se passe pas seulement avec les autres élèves, mais aussi avec les professeurs et les parents d’élèves qui ont appris à ne plus avoir peur de ce nom « trisomie ». Cinq ans d’intégration ! Tout ce temps passé n’était pas en vain ! Ysaline était intégrée, pas juste « tolérée ». Ce n’était pas le petit pion qu’on a accepté dans la classe et qu’on laisse dans un coin. Elle avait de réelles amies : elle était invitée aux anniversaires ; elle participait vraiment à la vie de sa classe!
Ce projet d’intégration n’était pas une lubie de maman qui ne veut pas accepter le handicap de son enfant, mais bien un partenariat entre l’équipe éducative, les professeurs, les directions, sa logopède et le centre PMS. A force d’observation et de travail, ils voulaient tous aider cette enfant à avancer dans les meilleures conditions, pour elle-même.
Quand on parle d’intégration avec les gens, on dirait qu’il n’y a que les génies trisomiques qui ont le droit d’être intégrés : s’ils en ont les capacités, on les tolère. Mais, Mesdames, Messieurs, avec l’intégration de nos enfants, on n’attend pas qu’ils aient le niveau des autres : on sait qu’ils ne l’auront jamais ! Nous savons qu’ils pensent moins vite que les autres ; nous savons qu’ils ont une capacité moindre que les autres d’apprendre !! Mais on réclame, pour eux, le droit de vivre au milieu des autres pour avoir une vie comme les autres, une vie la plus ordinaire possible !
Bien sûr, je suis allée visiter des écoles spéciales, mais je n’ai pas été enthousiasmée par ce que j’y ai vu. Je n’ai pas eu l’impression d’être entendue, non plus… Mais surtout, c’était si loin du projet en place… Nous avons pris alors la lourde décision de la scolariser à la maison, non pas que je veuille garder mon petit bout avec moi : c’est bien plus facile de la déposer le matin à l’école que de chercher, le soir, des méthodes qui lui conviennent, que d’essayer de porter les 2 casquettes, celle d’institutrice et celle de maman ! Mais, de notre point de vue, c’est la meilleure option pour l’intégrer et la stimuler le plus possible.
Mon but est son autonomie mais, à cause de la bêtise humaine, cela semble un peu compromis. Nous avons bon espoir pour ses apprentissages ! Le calcul reste encore abstrait mais elle commence à lire toutes ses voyelles. Elle connaît 3 consonnes et on commence le syllabique. Elle commence aussi à apprendre de petites poésies. Nous ne savons pas jusqu’ou elle ira, nous ne connaissons pas ses possibilités mais nous l’accompagnerons aussi loin qu’elle nous le permettra, puisque, maintenant, elle n’a plus que ses parents, ses frères et sœurs, à regarder pour avancer.
Quand le matin, je dépose son frère à l’école, Ysaline ne comprend pas pourquoi, elle, elle doit rester dans la voiture et rentrer avec moi, pourquoi elle ne peut rester avec ses copines, pourquoi elle n’a pas le droit, elle, d’y aller !!! Que répondre aux enfants de l’école qui me réclament Ysaline ? C’est inutile de leur faire comprendre la bêtise humaine ! On doit juste apprendre à vivre avec cela !
Mesdames, Messieurs, quand une intégration est réussie, c’est criminel de l’arrêter, juste parce que la « couleur » de la commune a changé ! Non seulement pour nos enfants qui eux en ont besoin mais aussi pour les autres qui apprennent le respect et la tolérance ! Et cette intégration était réussie !!! La loi dit que l’enfant handicapé a le droit d’être intégré mais on ne nous en donne pas les moyens. La loi dit aussi que l’aide doit être extérieure à la famille. Voilà pourquoi, en s’abritant derrière cette loi, on m’interdit, après 5 ans, d’accompagner ma fille en classe.
Dans chaque intégration, il faut faire passer les besoins de l’enfant avant tout. Il faut surtout un peu de bonne volonté – je dis bien un peu – car il faut rarement faire de grands aménagements mais le vouloir juste un petit peu. Quand on le veut, les choses se mettent en place d’elles-mêmes mais quand on ne le veut pas, il y aura toujours une loi, un décret derrière lesquels vous pourrez vous réfugier. Mais avec un peu de bonne volonté, nous gagnerons tous, un peu plus d’humanité.
Pascale Biot, psychologue
Juin 2008, je reçois l’appel de la maman d’Ysaline, ce n’est pas possible ! C’est inimaginable ! Cette maman me raconte, avec force et calme en même temps, l’histoire d’Ysaline. Des multiples questions me viennent en tête… La classe suit-elle vraiment Ysaline ? N’existe-t-il pas des difficultés de gestion de la situation de handicap ? La relation mère-fille n’est elle pas trop forte ? Que dire face à l’idée de faire l’école à la maison ? Quid de la socialisation ?
Puis, j’ai discuté avec la maman d’Ysalyne, à plusieurs reprises. Elle répondait elle-même à mes questions (sans les avoir posées). Oui, la situation avait bien été analysée. 0ui, elle avait pensé à l’enseignement spécialisé mais n’avait pas trouvé ce qu’elle cherchait : on lui a conseillé de laisser Ysaline aller à son rythme ; elle n’avait trouvé ni objectifs ni espace d’écoute. Oui, elle avait cherché la collaboration d’un service d’accompagnement mais elle ne s’est pas sentie entendue dans ses recherches et attentes. Bien sûr, elle avait pensé à la socialisation de sa fille, mais, avec une fratrie de 8 enfants, Ysaline s’y retrouve et a sa place. De plus, elle garde des contacts avec sa classe. Oui, elle avait pensé à sa relation avec sa fille. Elle souhaite que sa fille puisse évoluer à son rythme, mais avec des apprentissages cognitifs, aussi loin qu’elle le pourra. Ysaline a besoin d’être tirée vers le haut et sa maman veut pouvoir lui offrir cela. Je me suis posée la question de savoir si l’école et les parents des enfants de la classe étaient aussi partants que ça… Ysaline continue à être invitée : on lui propose de rejoindre les « copains » comme dit Ysaline, dès que possible. En écrivant ces lignes, je me dis : « Que de questions pour revenir à des conclusions qui étaient justes ! La bêtise humaine, le choix politique empêchent une petite fille d’aller à l’école de son choix !
Face aux constats de la maman d’Ysaline, nous pouvons nous demander pourquoi l’intégration s’est arrêtée sans aucune préparation ? Sans tenir compte de l’évolution d’Ysaline ? Sans tenir compte des désirs des partenaires de terrain (L’ancienne institutrice d’Ysaline se tient au courant de l’évolution de son élève et Ysaline en est fière) ? Pourquoi se base-t-on sur les compétences pédagogiques de l’enfant alors que nous savons très bien qu’elle progresse, mais par rapport à elle-même. Elle ne répondra jamais aux socles de compétences mais un enfant est-il à l’école juste pour le pédagogique ? N’y-a-t-il pas des compétences sociales que l’enfant acquiert à l’école ? La maman d’Ysaline le dit clairement : si sa fille peut se débrouiller, trouver sa place dans le groupe, elle aura acquis quelque chose de bien précieux. Pourquoi n’a-t-on pas tenu compte de cet aspect, des compétences sociales et d’autonomie de l’enfant ? Elle avait encore des choses à vivre dans cette situation.
La maman d’Ysaline a proposé son aide, faute de moyens offerts à sa fille, là où la famille vit. C’est vrai que des services d’accompagnement, des services d’aide à l’intégration existent et font souvent de l’excellent travail. Le souci est qu’il n’y en a pas partout (les parents d’Ysaline ont été loin de chez eux) et que certains de ces services sont jeunes : ils doivent encore mûrir et acquérir de l’expérience. Il n’est pas rare d’entendre des parents nous dire qu’on leur a proposé ce que l’enfant connaît depuis bien longtemps.
La situation d’Ysaline souligne bien des aspects de la dynamique qu’est l’intégration scolaire. Les revendications que nous avons en matière d’intégration scolaire touchent la formation des enseignants : le fait d’aller chercher l’information à partir d’une situation vécue, l’approche du partenariat. Ces revendications concernent aussi la volonté de l’école et de son équipe pédagogique : l’idée d’un projet clair, inscrit et revu avec l’équipe qui entoure l’enfant. Le manque d’information en matière de maladie ou de handicap est également relevé : il y a un besoin important de sensibilisation, d’informations accessibles pour chacun.
En revenant à Ysaline, nous pouvons nous dire que, même si les choses ont évolué, même si pour elle des éléments « revendiqués » étaient mis en place – telle l’information, l’aide en classe, le partenariat-, il reste des a-prioris, des craintes, des représentations qui ne tiennent pas compte de l’identité de l’enfant qui vit la situation. Nous pensons à la formation des enseignants mais ne devons-nous pas aussi penser à celle des politiques ?
Pourquoi faire une étude en organisant un colloque sur les exclusions ?
Ceux qui connaissent la Ligue et qui nous soutiennent depuis pas mal d’années savent que nous sommes plutôt actifs dans « l’accueil de tous à l’Ecole ». Maintenant, on utilise plutôt le terme d’« inclusion » : l’inclusion représente un phénomène plus abouti que l’intégration puisqu’il prend le jeune dans toutes ses composantes et veille aussi à son bien-être. Inclure qui ? Inclure tout simplement, des exclus. Il nous paraît important de se rendre compte que ceux qu’on inclut vivent des exclusions AVANT d’être inclus. C’est absolument indispensable de les entendre pour percevoir combien l’inclusion est importante.
Quelles exclusions aborder ?
Nous avons travaillé de façon à déterminer les exclusions auxquelles les enfants et les jeunes étaient le plus souvent confrontés. Sur base d’une liste que nous avons établie ensemble, nous avons recherché des associations. En effet, la Ligue est une association de « seconde ligne » : nous avons très peu de contact avec les familles et les jeunes. Quand même, nous sommes interpellés régulièrement. Dans nos plateformes, nous en rencontrons parfois pour tout ce qui concerne l’intégration scolaire. Mais nous ne sommes pas en contact direct avec les souffrances des familles et des jeunes.
Nous avons recherché des associations de première ligne. A la Ligue, nous avons l’habitude de rencontrer des associations de première ligne, des services qui sont sur le terrain, qui connaissent bien les problématiques et les familles. Nous avons trouvé plusieurs associations qui étaient tout de suite prêtes à participer. On pensait que cela serait facile. Cela n’a pas été le cas. Les difficultés que nous avons rencontrées, c’est de trouver des jeunes qui sont prêts à parler. Les jeunes vivent des situations qui sont parfois extrêmement lourdes et ils ne sont pas prêts à en parler. D’ailleurs, à qui en parleraient-ils ? Bien sûr, il y a ces associations de première ligne qui sont là mais qui reçoivent assez peu de jeunes par rapport au nombre important de ceux qui sont touchés par les exclusions. Un jeune ne sait pas où aller… S’il ne peut pas en parler dans sa famille, le seul lieu social où il se trouve, c’est l’école. Mais, à l’école, à qui peut-il parler ? Son enseignant, s’il a une grande confiance en lui ? Mais, pour cela, il faut franchir un grand pas pour parler de choses tellement personnelles qu’on ne le fait pas ! Donc, ça a été difficile : des associations qui étaient motivées et prêtes à participer ont dû se désister. Il y en a même une qui s’est désistée il y deux jours en disant : « Désolés ! Nous n’avons trouvé personne. Nous avons cherché mais nous ne sommes pas arrivés à trouver un jeune qui soit d’accord de s’exprimer. » Pour nous, c’est vraiment très interpellant. Nous sommes dans une société qui a intégré l’idée de « droits des jeunes ». Et pourtant, après 19 ans, les jeunes n’ont pas des lieux de parole. Ce colloque n’est qu’un début pour nous. Il va falloir trouver les moyens avec nos collègues des associations, de donner la parole à tous ces jeunes.
Chaque jeune dont nous allons lire le témoignage est encadré par une association de terrain qui a travaillé avec lui. Ces associations viennent de tous les milieux. Il y a des associations de toutes tendances et des services de terrain qui dépendent des communes. Nous ne les avons pas sélectionnées sur base de critère politique : nous travaillons avec tout le monde sans exclusive…
Nous avons sélectionné les 8 thématiques qui semblent les plus fréquentes. On lira d’abord le témoignage du jeune puis l’association présentera la thématique de manière plus générale, sa façon d’aborder la problématique et ses propositions de solution.
Certains jeunes ne vont pas s’exprimer ; ils seront remplacés par d’autres, tellement la prise de parole est difficile. Certains jeunes ont refusé de s’exprimer ; d’autres n’étaient pas d’accord de lire leur texte. Donc, d’autres jeunes prendront la parole à la place de ceux qui ont une souffrance telle qu’ils ne peuvent l’exprimer.
Vers une école inclusive pour les élèves à besoins spécifiques – Professeur émérite Ghislain Magerotte – UMons
Les années 60 : naissance et développement de l’enseignement spécial
Si les enfants ayant des déficiences sensorielles ou mentales ont été « éduqués » dès le 19ème siècle par quelques pionniers de l’éducation (comme Itard, Seguin, Bourneville, Valentin Haüy, L’Abbé de l’Epée) et par des associations caritatives, plusieurs écoles s’ouvrent aussi en Belgique (l’IRHOV à Liège en 1819 et l’IRSA à Bruxelles en 1835). Au début du XXème siècle, en 1905, une école s’ouvre à Bruxelles pour les enfants « irréguliers » (qui à l’époque n’étaient pas scolarisés) grâce au travail de Decroly.Cependant, il a fallu attendre la fin des années 50 et les années 60 pour assister à un développement considérable de l’enseignement spécial accessible à ces enfants.
Ce développement est le résultat de la conjonction de trois facteurs : d’une part, les pressions exercées par des associations de parents d’enfants handicapés, notamment d’enfants handicapés physiques et mentaux, qui réclamaient une scolarisation, sans être contraintes de recourir à un « placement en internat » ; d’autre part, la richesse croissante des « golden sixties » favorisant la mise en place d’un système social plus généreux ; et enfin la croissance de la population scolaire permettant à l’enseignement ordinaire de se séparer – sans risque pour lui – de quelques élèves orientés vers l’enseignement spécial.
Dans notre pays, cette évolution a été couronnée par le vote la loi du 6 juillet 1970 sur l’enseignement spécial, loi-cadre devant assurer, grâce aux arrêtés d’application de 1978, la mise en place d’un enseignement autonome pour les élèves « aptes à suivre un enseignement mais inaptes à le suivre dans une école ordinaire ».
Ce développement a eu plusieurs conséquences favorables pour ces élèves. D’une part, il a permis au système scolaire, via l’organisation de huit types d’enseignement, d’accueillir durant l’âge scolaire (2 ans et demi jusque 21 ans) davantage d’élèves qui, antérieurement, étaient exclus de l’école. De plus, cet enseignement a également accueilli, via l’organisation de l’enseignement de type 2, des élèves ayant un retard intellectuel important, soit une déficience modérée ou sévère. En 1970, ces enfants et adolescents handicapés sont dès lors devenus par cette loi des « écoliers » et des « étudiants ».
De plus, elle a permis dans les années qui ont suivi d’accueillir bon an mal an quelque 3,5 % de la population scolaire, répartis en huit types d’enseignement, quatre formes d’enseignement secondaire ainsi que trois niveaux d’enseignement (maternel, primaire et secondaire).
D’autre part, la création d’écoles a permis aux familles de maintenir davantage les relations familiales avec leur enfant, et ce grâce à l’organisation d’un transport scolaire vers l’école spéciale et ainsi, d’éviter ou de retarder le placement en internat.
Enfin, le regroupement au sein de cet enseignement spécial d’élèves handicapés ainsi que le développement parallèle de l’Action sociale aux personnes handicapées – via la loi de 1963 créant le Fonds National de Reclassement Social des Handicapés chargé de promouvoir l’emploi de ces personnes adultes, et l’arrêté 81 de 1967 favorisant le développement de services pour enfants et adultes handicapés – a donné à cette partie importante de la population belge une « existence sociale » et l’a fait entrer dans notre système social.
Cette évolution des lois a permis notamment de créer des catégories de professionnels spécialisés en ce domaine, et donc de contribuer à une mise en place, lente et encore imparfaite, d’une formation spécialisée et d’une recherche universitaire. C’est en effet, à partir des années 80 et 90, qu’on a assisté à un développement considérable des pédagogies adaptées à ces élèves et étudiants.
La deuxième vie de l’enseignement spécialisé : l’intégration scolaire
La loi sur l’enseignement spécial de 1970 a d’abord entraîné la suppression des « classes spéciales annexées » aux établissements d’enseignement ordinaire. Elle a donc favorisé le développement d’un enseignement spécial « autonome », distinct donc de l’enseignement ordinaire, obéissant donc à une réglementation propre – tout en permettant à des enfants handicapés d’être scolarisés dans l’enseignement maternel et primaire ordinaire, grâce à la générosité et au dynamisme de certains directeurs et enseignants et à la demande de parents, dans le cadre de ce qu’on a appelé une « intégration sauvage ». D’ailleurs, dès le départ, l’arrêté d’organisation de l’enseignement spécial prévoyait des possibilités d’intégration sur une base individuelle. Ces possibilités se sont développées ensuite, concernant surtout les élèves relevant des types 4, 6 et 7, en 1995.
La loi a subi elle aussi plusieurs modifications, notamment une modification de la loi de 1970 qui devient la « loi sur l’enseignement spécial et intégré » (1986), puis le « décret sur l’enseignement spécialisé » en 2004. Ce décret a progressivement pris plusieurs dispositions concernant la scolarisation et l’intégration scolaire. Les dispositions les plus importantes concernent les types d’intégration (permanente totale et permanente partielle, temporaire totale et temporaire partielle) et l’accès à l’intégration des élèves de tous les types d’enseignement. L’aspect essentiel a consisté dans une collaboration importante entre l’enseignement spécialisé et l’enseignement ordinaire, via le suivi des enfants bénéficiant d’une intégration individuelle par des professionnels de l’enseignement spécialisé durant un certain nombre d’heures par semaine. Deux aspects particulièrement problématiques consistent, d’une part, dans la mise en place d’un processus d’intégration relativement lourd impliquant un respect contraignant de dates et le subventionnement des écoles ordinaires seulement après une année d’intégration réussie. D’autre part, depuis une quinzaine d’années, des classes spécialisées sont accueillies dans des écoles ordinaires, dans le cadre de l’intégration permanente partielle, les élèves suivant certaines activités dans les classes ordinaires. Ce système connaît un développement récent.
De plus, selon ce décret, la participation de l’élève/étudiant et de ses parents au Plan Individuel d’Apprentissage (PIA) et au Plan Individuel de Transition (PIT) est devenue obligatoire et on a assisté aussi au développement de pédagogies adaptées (concernant le polyhandicap, l’autisme, l’aphasie et la dysphasie, le handicap physique lourd mais pouvant accéder aux apprentissages scolaires). Depuis 2013, d’autres dispositions récentes ont également été prises, concernant l’accueil dans des « Structure Scolaire d’Aide à la Socialisation ou à la resocialisation (SSAS) » au sein des écoles fondamentales spécialisées. De plus, afin de répondre à des situations locales de déficit d’enseignement spécialisé, des élèves peuvent être accueillis, par dérogation annuelle, dans une école d’enseignement fondamental ou secondaire spécialisé qui assure ainsi un autre type d’enseignement spécialisé que celui ou ceux qu’elle organise.
Vers une école inclusive : la « troisième vie » de l’enseignement spécialisé !
Ces dernières années, des questionnements importants se sont accentués concernant l’enseignement spécialisé. Deux facteurs en particulier jouent un grand rôle. D’une part, sous l’influence des recherches en pédagogie qui se sont développées à partir des années 70, mais aussi des tendances internationales, le mouvement en faveur d’une autre organisation de l’école s’est accentué, en particulier suite aux déclarations et prises de position internationales concernant l’accueil des enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux dans le système scolaire ordinaire (Déclaration de Salamanque, 1994) et en particulier suite à la Convention des droits des personnes handicapées (2006, et ratifiée par la Belgique en 2009) qui se prononce dans son article 24 en faveur d’une école inclusive.
De plus, on a assisté en Fédération Wallonie-Bruxelles au lancement d’une réflexion systémique sur tout le système d’enseignement, y compris de l’enseignement spécialisé, grâce au Pacte pour un Enseignement d’Excellence. Ce Pacte est encore en voie de finalisation et plusieurs points sont essentiels pour l’avenir de l’enseignement spécialisé. Les documents actuels, et notamment l’avis n° 3, évoquent à plusieurs reprises l’engagement vers une « école inclusive », sans toutefois la définir. Brièvement, une école inclusive est une école qui vise à ce que les élèves en situation de handicap apprennent à vivre au sein d’une « école pour tous » et ainsi à participer à la vie de la cité. Pour ce faire, des changements s’imposent à tous les acteurs. Les responsables des écoles mettront en place une disponibilité de tous les membres des équipes éducatives à une démarche inclusive, avec le soutien des équipes spécialisées. Ils veilleront en particulier à une organisation de la vie de la classe pour que chaque élève apprenne, via notamment une démarche de co-enseignement. Une attention particulière sera accordée aux aménagements raisonnables permettant à chacun de tirer profit des multiples possibilités d’apprentissage qu’offre cette école inclusive. De plus, la collaboration de tous (professionnels, parents, élève) sera renforcée dans une perspective d’individualisation via le PIA et le PIT. L’école doit aussi organiser la vie des élèves, sur plusieurs plans : d’abord via la mise en place organisée par l’enseignant du tutorat (tant sur le plan social que des apprentissages) entre élèves et ensuite de stratégies facilitant particulièrement les périodes de « temps libre » (cour de récréation, salle à manger-réfectoire, …). Il importera aussi de développer l’utilisation des TIC et des outils numériques afin de diminuer certains obstacles à l’apprentissage de ces élèves.Enfin, une école inclusive prône une organisation systémique à trois niveaux : soutien à l’apprentissage pour tous les élèves, prévention et interventions précises pour les élèves en difficultés et enfin Interventions personnalisées pour chaque élève ne répondant pas aux deux démarches précédentes.
De plus, on a assisté ces dernières années à une croissance de la population scolaire de l’enseignement spécialisé, particulièrement depuis l’année 2005-2006, ce qui conduit le pouvoir politique à tenter de diminuer le nombre d’élèves dans l’enseignement spécialisé via un décret relatif à la promotion des aménagements raisonnables dans l’enseignement ordinaire, à partir de l’année 2019. Ce mouvement concerne particulièrement l’enseignement de type 8.
Ensuite, le Pacte envisage la constitution de pôles territoriaux qui, dans son projet d’avis n° 3, « assureront la mutualisation par bassins géographiques des moyens dédiés à l’accompagnement des élèves en intégration permanente totale dans l’enseignement ordinaire. » Son rôle et sa mission sera « de garantir la qualité de l’encadrement et de l’accompagnement que les établissements du pôle territorial pourront proposer pour tenir compte des besoins spécifiques des élèves ». Il est également prévu « la possibilité de créer, sur une base volontaire, de tels pôles en inter-réseaux, en particulier dans les zones dans lesquelles le nombre d’élèves concernés et, par voie de conséquence, les moyens alloués n’atteignent pas le niveau critique minimum ».
D’autre part, si l’école inclusive accueille des élèves avec des besoins spécifiques, elle accueillera aussi, en fonction des années et de sa situation géographique dans la cité, des élèves différents, notamment des élèves issus de milieux défavorisés.
Si l’on se place dans l’optique d’une école inclusive, réclamée à plusieurs reprises dans le projet d’avis, le pôle territorial regrouperait tous les personnels des écoles spécialisées d’un territoire déterminé (en fonction de la population, des moyens de transport public, de l’attraction de certaines villes…) en vue de mettre à disposition de toutes les écoles ordinaires d’un bassin géographique déterminé ce personnel spécialisé ; ces écoles spécialisées deviendraient un « centre de ressources spécialisées » (terme à la mode, mais approprié !). Il est à remarquer que le décret de 2004, revu en 2013, prévoit d’ailleurs l’existence de « zones », essentiellement au niveau de la gestion de l’enseignement spécialisé et de ses personnels ainsi que les entités géographiques qui les composent.
De plus, cela permettrait de revoir le fonctionnement du transport scolaire vers des écoles plus proches du domicile de l’enfant, prônant davantage l’utilisation, accompagnée notamment au début, des transports en commun et évitant de faire perdre progressivement à l’élève ayant des besoins spécifiques ses relations dans son quartier. Cette évolution faciliterait la proximité géographique des élèves de leur école.
D’autre part, la formation initiale des enseignants (et de tous les professionnels d’ailleurs, formés dans les hautes écoles) devrait comprendre tout au long de leur cursus (c’est-à-dire dès la première année) une formation à « la pédagogie différenciée » (y compris la pédagogie adaptée aux élèves/étudiants à besoins spécifiques). Une spécialisation devrait être envisagée en fin de formation.
Quant au tronc commun au niveau du secondaire, il s’agit d’une initiative intéressante, avec une évaluation formative tout au long de la vie scolaire et une seule évaluation certificative en fin de cycle.
Est-ce la mort de l’enseignement spécialisé ? Non, bien sûr ! Les équipes qui maîtrisent cette pédagogie différenciée en feront bénéficier tous les élèves, y compris ceux à besoins spécifiques sans les séparer six heures par jour et durant de longues années, de leurs camarades. En d’autres mots, les équipes spécialisées seront inclues dans une école inclusive, ce qui constitue la façon d’assurer la « troisième vie » de l’enseignement spécialisé, au service du « vivre ensemble » de tous les élèves et étudiants.
Si le redoublement a encore de beaux jours devant lui en Fédération Wallonie-Bruxelles ou en France, et si celui-ci nous classera encore longtemps parmi les systèmes scolaires les plus inefficaces, c’est parce qu’il est utile. Il remplit une fonction sociale. D’abord, au bénéfice des classes sociales favorisées, en éjectant les enfants des « autres » et préservant les « bonnes écoles » et les diplômes aux enfants des plus riches. Il suffit de voir le Mouvement Réformateur (parti libéral belge francophone) se cabrer contre tout ce qui risquerait de rendre l’école un tout petit peu plus égalitaire : Décret inscription, Tronc commun, Pacte pour une enseignement d’excellence, … Le parti des riches défendra toujours une société inéquitable, pour le seul profit de ses électeurs.
Ensuite, il permet
aux écoles de se positionner dans le quasi-marché scolaire. Pour attirer les
enfants des riches, il faut montrer qu’on éjecte les enfants des pauvres.
L’échec scolaire et donc le redoublement ou l’orientation est l’outil de
prédilection de ces « écoles ».
Ensuite, il permet aux professeurs de se protéger, de ne pas perdre la face et ne pas voir que la science remet en question leurs pratiques, qui durent parfois depuis de nombreuses années, hypothéquant l’avenir de dizaines d’élèves qui ne le méritent en rien. Ils peuvent donc se réfugier derrière le constat que l’élève redoublant est un peu meilleur durant son année de redoublement. Leur jugement (à très court terme) les rassure sur leur « efficacité pédagogique » qui apparaît alors comme un mélange de bon sens et d’observation qui est très différent de l’approche des chercheurs et des humanistes sur la question.
Enfin, et on l’a
vu, le redoublement participe de la gestion de la classe. Ils pourront gérer
l’héréogénéité à leur propre profit et à celui de leur établissement scolaire,
pourront régler l’ordre de la classe en sanctionnant les élèves dont les
comportements ne leur conviennent pas et qu’importe si cela « fiche leur
vie en l’air ». Cette idéologie garantit leur autonomie professionnelle (« Je suis intouchable dans ma classe,
je fais ce que je veux et personne n’a rien à me dire, surtout ces chercheurs,
ces défenseurs des droits humains, ces parents et ces élèves »).
Le redoublement est
avant tout un choix. De nombreux systèmes scolaires l’utilisent au
compte-gouttes, uniquement quand il on peut espérer qu’il soit efficace (longue
absence pour cause de maladie, par exemple). C’est un choix politique !
Mais c’est aussi le choix personnel de chaque professionnel de l’école.
« Suis-je un dieu qui peut décider de l’avenir d’enfants et de jeunes et
donc ne transmettre les savoirs qu’à celles et ceux qui me semblent les plus
dignes, ou ma mission est-elle de transmettre des savoirs à toutes et à tous
sans la moindre exception et ce, quelles que soient les difficultés
d’apprentissages rencontrées par ces élèves ? »
Le redoublement est un choix politique
Le choix d’avoir un
système scolaire efficace ou non est un choix politique. Le Pacte pour un
enseignement d’excellence est une timide réponse que les acteurs politiques et
le monde de l’école apporte à cette question pourtant fondamentale. On
remarquera que cette « timide » réponse soulève déjà bien des boucliers
du côté des tenants des inégalités scolaires et sociales : professeurs,
famille socialement favorisées et un parti politique : le Mouvement
réformateur qui nous a montré, au Gouvernement fédéral, durant les années
2014-2019, à quel point il ne roulait que pour les nantis.
C’est un choix
politique car de l’efficacité de notre système scolaire dépend l’avenir de tous
les enfants et donc aussi de la pyramide sociale. Faut-il encore des esclaves
aux plus nantis (aujourd’hui, l’esclavage se situe dans les emplois les moins
valorisants : ceux qui apportent le courrier, qui réparent leurs gros
véhicules, qui leur découpent le steak ou servent et tiennent la caisse dans
leurs magasins). On peut d’ailleurs se demander pourquoi des enfants
d’universitaires ne pourraient pas passer leur vie à tenir la caisse d’une
grande surface. Ils le font quand même, comme jobistes, pour se faire un peu
d’argent pendant leurs études, prenant ainsi des emplois aux chômeurs. Une
société équilibrée permettrait précisément d’inverser les rôles entre les
classes sociales et partager pour les uns les diplômes et emplois valorisants
et pour les autres, les sous-emplois et l’absence de diplômes.
Le Pacte vise un enseignement de haut niveau et la lutte
contre le redoublement y contribue indéniablement. Le Groupe Central considère
que la lutte contre le l’échec et le redoublement constitue un objectif
essentiel du Pacte qui ne peut être atteint que par le biais d’une approche
holistique et multidimensionnelle[1]. Dès lors, le Pacte s’est fixé comme objectif la réduction de 50% du redoublement d’ici 2030 tout en augmentant les
résultats moyens des élèves dans les savoirs de base.
La réduction de 50
% en 2030, soit chaque année 5 % pendant 10 ans. A terme, il restera quand même
30 000 élèves qui seront victimes de pratiques inefficaces ou efficaces
pour un temps seulement. Ou comment maintenir malgré tout les inégalités
sociales pour faire plaisir aux réseaux[2] ?
Supprimer le redoublement urbi et orbi, sans remédiation efficace donnée par de vrais enseignants, n’est pas la solution, même pour nous qui luttons contre les discriminations scolaires. Nous pensons, en effet, que la promotion automatique serait préférable, mais à la seule condition que tout soit mis en œuvre pour permettre à l’enfant d’acquérir les apprentissages de l’année de promotion tout en comblant le retard qu’il a pris l’année précédente. Bref, que tout soit mis en œuvre pour qu’il rattrape son retard – ainsi que les nouveaux apprentissages – en un an. Ce qui est tout à fait faisable (voir comment fonctionnent les systèmes scandinaves).
Dans le cas où une
équipe pédagogique (ou un·e enseignant·e) garantissait la mise en place de ce
dispositif durant l’année de promotion, on se demande pourquoi cela n’aurait
pas pu préalablement être mis en place l’année précédente. Nous aurions évité
le redoublement et la question de la
promotion vs le redoublement ne se poserait pas. Pour nous, lutter contre
le redoublement, c’est avant tout le rendre obsolète par la mise en place préventive
de pratiques pédagogiques adaptées aux difficultés des enfants.
Il y faut donc
faire reculer le redoublement par une meilleure organisation de l’école plutôt
que d’imposer son interdiction totale[3].
C’est préventivement que l’on se doit de mettre des pratiques pédagogiques
appropriées en place. Cela pourrait se faire en dehors du temps scolaire, mais
cela a moins de sens que pendant celui-ci. En effet, priver les élèves de
récréation, de temps de midi, d’après-cours alors que ce sont ses moments de
socialisation avec leurs pairs risque de s’avérer contre-productif, voire
stigmatisant. Pire encore, l’externalisation de la remédiation est à éviter car
seules les familles les plus aisées peuvent se payer des cours particuliers ou
de groupe en dehors du temps scolaire. L’école étant déjà discriminatoire
vis-à-vis des publics les moins favorisés (ou de la classe moyenne, qui vient
ensuite), l’externalisation est la pire des discriminations qui soit.
Une remédiation n’a
de sens que si elle se fait durant l’apprentissage. Cela ne veut pas dire
« durant LE cours ». En général, un apprentissage s’étale sur
plusieurs périodes de cours. C’est tout au long de celles-ci que doit se faire
la remédiation. Plusieurs dispositifs sont possibles, soit en faisant intervenir
un enseignant supplémentaire ou un stagiaire (ou un bénévole), soit en
individualisant certains apprentissages, soit en pratiquant le tutorat (mais ce
dernier dispositif doit être institutionnalisé dans la classe, voire dans
l’école. Il ne suffit pas de demander à un pair d’en aider un autre pour que ce
soit efficace. Etre tutrice ou tuteur, cela s’apprend). En résumé, les
conditions de la remédiation et son intensité sont prépondérants.
Le redoublement est aussi un choix éthique personnel
Selon que vous serez né de puissants ou de misérables,
les jugements des salles de cours vous rendront blanc ou noir[4].
Chaque professeur,
chaque être humain est responsable de ses choix éthiques. Soit le système
actuel, qui lui permet de décider en véritable dieu (presque[5])
tout puissant, l’arrange bien (il ou elle peut rester mal ou peu formé, ne doit
pas s’investir trop pendant la journée, ne doit pas faire d’efforts pour aider
des élèves en grosses difficultés, préserve une bonne image auprès de sa
direction souvent peu compétente et des parents élitistes au profit du
positionnement de l’école sur le quasi-marché scolaire, …), soit il ou elle
décide d’être citoyen et de ne plus marcher dans ce système. En fait il ou elle
décide de passer du statut de collaborateur d’un système discriminant à celui
de résistant. Bref, on peut toujours décider de passer de simple ‘prof ‘,
à enseignant. En effet, l’école est depuis des décennies en guerre contre les
élèves et leurs familles afin de soutenir un système social élitiste. Lutter
contre ce système ne peut se faire qu’en entrant en résistance.
L’abandon du
redoublement doit se faire en mettant des alternatives en place. On ne peut pas
continuer à devoir constater, en fin d’année, qu’un élève ne possède pas
certains savoirs et ne trouver comme seule solution que le redoublement. Comme
disaient Ariane Baye, Florent Chenu, Marcel Crahay, Dominique Lafontaine et
Christain Monseur[6] (voir
ci-dessus), le redoublement est du «
prêt-à-porter » là où il faudrait du « sur mesure » . Le redoublement n’est
JAMAIS l’échec de l’élève, mais du système et donc des gens qui le font
fonctionner. C’est clairement l’échec du professeur et non de l’élève.
Un élève qui a des
difficultés d’apprentissages doit être aidé au quotidien. Il faut donc mettre
en place des pratiques pédagogiques non frontales[7]
et pratiquer non plus l’évaluation-sanction (les points), mais une évaluation
formative qui permet la remédiation immédiate durant le cours. On ne passe,
évidemment, à la suite de la matière qu’après s’être assuré que TOUS les élèves
ont globalement compris l’apprentissage. L’évaluation « formative »,
devenant par définition quasi-automatiquement « sommative », une fois
que l’on s’est assuré que tous les élèves ont compris. Les périodes d’examens
(et forcément de révisions), de bilans et autres évaluations sanctions ne sont
plus utiles et peuvent être abandonnées, au bénéfice de l’augmentation des
périodes d’apprentissages.
Comme enseignants,
nous avons le souci de chacun de nos élèves. Leur réussite est incontournable à
nos yeux et nous sommes le seul élément qui ait un réel pouvoir sur cette
réussite. Un enseignant n’a recours au redoublement que dans des circonstances
exceptionnelles (imaginons un élève absent de très longue durée pour raison de
santé, par exemple). Préalablement, l’enseignant a mis en place des
interventions ciblées pour chaque enfant en fonction des sa/ses difficultés,
dès le plus jeune âge.
Afin de prévenir
l’échec scolaire, les enseignants mettent en place des dispositifs d’individualisation
dont l’objectif est de permettre à chaque élève de progresser selon son propre
rythme[8].
Il s’agit « soit […] de respecter
des objectifs pédagogiques communs à toute la cohorte mais avec des méthodes et
des parcours pédagogiques différenciés […] soit il s’agit de personnaliser à
la fois les parcours et les objectifs.[9] »
Pour rappel,
mais en principe, on ne vous apprend rien, et sans rentrer dans les détails,
cette thématique pouvant faire l’objet d’un prochain dossier, l’individualisation
peut être utilisée dans trois dimensions[10]
:
les situations d’apprentissage :
gestion individualisée des formations, mise en place de méthodes pédagogiques
différentes, …
les contenus : différenciation des
objectifs selon l’élève ou les attentes ;
les parcours : organisation de la
formation, modularisation, …
L’individualisation
peut être pratiquée de différentes façons, individuellement ou cumulées : tutorat,
aide personnalisée, groupes de niveaux, projets personnalisés, parcours
différenciés, …
Enfin, en ce qui
concerne les pratiques au sein de la classe pour lutter efficacement contre
l’échec scolaire, il est nécessaire de gérer les difficultés des élèves en
mettant en place des stratégies visant à soutenir l’acquisition
de compétences académiques et sociales tout en tenant compte des différences de
chacun (intervention précoce dans la scolarité, dès la maternelle, développement
de stratégies mnémotechniques, encouragement de l’enseignement direct, mise en
place d’évaluation formative et enfin, intervenir tôt dans la scolarité des
enfants, …)[11].
Evidemment, tout
cela nécessite une (auto)formation, l’achat de livres, leur lecture, les
tentatives de mise en place de pratiques pédagogiques nouvelles pour nous,
parfois des échecs, mais si tout cela est fatiguant par rapport à de
l’enseignement frontal, la motivation et le bien-être qui en découle sont
extrêmement motivants.
Il n’est pas
nécessaire de travailler en équipe pour être enseignant. Dans les écoles où
l’objectif est la sélection, c’est notre simple volonté qui fera de nous des
enseignants, c’est-à-dire des résistants, ou que nous resterons de simples donneurs de
leçons et continuerons à mettre des centaines d’élèves en souffrance par notre
simple incapacité à enseigner. Rester collabo ou devenir résistant est un choix
éthique.
Combien sommes-nous
à être formés à l’évaluation, à la remédiation, à la différenciation ? Fort
peu… Nos formations initiales ont été défaillantes à ce propos. Sans parler de
ceux qui, parmi-nous, ont été « jetés » devant une classe sans la moindre
formation initiale, comme si la possession d’une branche, d’un art, suffisait à
faire des enseignants. Combien d’entre-nous en ont souffert jusqu’à quitter cet
idéal qui les portait ? Combien font souffrir des innocents par pure ignorance
des choses de la pédagogie ? Si nous sommes incapables d’autocritique, nous ne
serons jamais des enseignants. Tout au plus des professeurs, donc de petits
donneurs de leçons. Pire peut-être, pour certains : des pervers !!! Car
savoir que l’on fait souffrir des jeunes et persévérer sciemment n’est autre
que de la perversion. Dès lors l’avenir des enfants d’aujourd’hui et de demain
sera bien sombre.
Pouvons-nous accepter, en tant qu’enseignants et éducateurs qui avons fait le choix – souvent bien avant le début de nos études – de nous consacrer tout entier aux enfants et aux jeunes, comment pouvons-nous accepter d’être maltraitants ? Le contact avec un système scolaire défaillant nous a-t-il obscurci l’esprit au point de ne plus voir la simple réalité de ces jeunes ? Sommes-nous comme ces médecins pré-révolutionnaires[12] qui ont continué, des siècles durant, à pratiquer la saignée tout en voyant leurs malades en mourir ? Tout simplement parce que cela s’était toujours fait et qu’ils ne voyaient pas comment faire autrement ? Ou avons-nous encore un esprit critique de nos propres pratiques pédagogiques ? Sommes-nous les seuls détenteurs des Vérités de l’Ecole qui n’acceptent pas de remise en cause – et surtout de remises en cause personnelles – ou acceptons-nous de les partager – pardon, de les construire, avec nos élèves et leurs familles ?
[1] Pacte
pour un enseignement d’excellence, Projet d’Avis N° 3 du Groupe central, 2
décembre 2016
[2] Les réseaux
d’enseignement sont une des spécialités belges et une des raisons de
l’inefficacité de notre système d’enseignement. Ils regroupent les écoles en
fonction de leur idéologie (d’autres parleront de « philosophie »).
Ce regroupement rassemble des écoles qui se sont données des missions sociales
différents : écoles élitistes et écoles du dernier recours (proposant essentiellement
des formations professionnalisantes ou techniques). Si les premières ‘cassent’
de l’élève, cela doit être au profit des secondes. Chaque réseau se doit donc
de veiller à ce que chacune de ses écoles (elles adhèrent au réseau et paient
une cotisation) soit alimentée en élèves. Le non-redoublement ne fait pas
l’affaire de nombre d’entre elles. Les réseaux ont donc milité, au sein du
Pacte, contre les droits de l’enfant et dans le seul intérêt de leurs écoles
professionnelles ou techniques. Il nous semble que les Réseaux ont fait leur
temps et qu’il faut maintenant passer à autre chose.
[3] Cnesco
(Conseil national d’évaluation du système scolaire) – Lutter contre les
difficultés scolaires : le redoublement et ses alternatives ? – France 2015
[4] En paraphrasant Jean
de la Fontaine – Les animaux malades de la peste
[5] Des recours sont
toutefois possibles, mais peu arrivent à faire changer le jugement des salles
de cours.
[6] Baye
Ariane, Chenu Florent, Crahay Marcel, Lafontaine Dominique, Monseur Christian –
Le redoublement en Fédération Wallonie-Bruxelles 2014
[7] L’enseignement
« frontal » ex-cathedra, debout sur l’estrade face à une classe dont
les bancs sont rangés en rang d’oignons n’est pas de l’enseignement, mais au
mieux « de la leçon », au pire la mise des élèves en compétition en
vue d’une future sélection.
[8] Que
celles et ceux qui ne connaissent rien à la pédagogie ne montent pas sur leurs
grands chevaux. Cela ne veut pas dire que l’on va avoir 25 élèves qui
progressent à raison de 25 rythmes différents. En gros, on aura 2 à 3 rythmes
différents au sein d’une classe réellement hétérogène : ceux qui n’ont pas
besoin de l’enseignant·e car ils se débrouillent sans elle/lui, le gros de la
troupe qui a besoin d’être rassuré et quelques explications complémentaires et
enfin les enfants ‘dys’ ou avec déficiences intellectuelles (en enseignement
inclusif) qui forment le groupe qui demande le plus d’aide. Cette aide est
prioritairement apportée par l’enseignant·e, soutenu·e par le tutorat des
élèves les plus rapides de « comprenure » (belgicisme, qui veut
dire….qui ont vite compris).
[9] Nathalie Mons
(2008). Quelles relations existe-t-il entre école unique, enseignement
individualisé et performance des élèves ? In
Le Monde de l’éducation, Comment l’école peut-elle s’adapter à chaque élève
?
[10] Schryve,
B. (1991). Une grille de lecture pour l’individualisation. In L’année de la formation. Païdeia. Paris.
[11] Forness,
S., K. Kavale, I. Blum, et J. Lloyd (1997). Mega-analysis of meta-analyses :
what works in special education and related services. Teaching Exceptional Children
29, 469.
[12] Donc avant 1789…Il faudra que Georges Washington, premier président
de la république des États-Unis, meure en 1799 d’une saignée pour que cette
pratique cesse.
La comparaison des différents systèmes scolaires des pays de l’OCDE a montré une grande variété de pratiques visant à donner une seconde chance à l’élève en difficulté. Nombreux sont les pays pour lesquels les résultats de fin d’année sont décisifs pour le passage en classe supérieure[1] qui ont mis en place des dispositifs offrant une seconde chance. D’autres ont organisé la scolarité de manière à rendre moins naturel l’usage du redoublement[2].
Les examens de passage
Comme en Belgique,
la quasi-totalité des pays européens[3]
laisse la possibilité de passer des épreuves supplémentaires en fin d’année
scolaire ou en début d’année suivante. Cette pratique permet d’éviter de
nombreux redoublements. On peut craindre que de nombreux professeurs donnent
des « examens de passage » pour faire travailler des élèves faibles
pendant les vacances, sachant à l’avance qu’ils sont capables de réussir. On
peut se dire qu’ils l’auraient été tout autant avec des remédiations immédiates
efficaces.
Cependant, les
examens de passage ne permettent pas aux élèves en grande difficulté de se
rattraper. Dans ce cas, certains pays couplent les examens de passage avec des
cours d’été (summer schools).
Les summer schools
Les summer school ont été évaluées par de
nombreuses études. Quelle que soit la méthodologie employée, ces cours semblent
efficaces lorsqu’ils accueillent les enfants en difficulté d’apprentissage (par
exemple en lecture) dès le début du primaire. Lorsqu’elles sont précoces dans
la scolarité, elles semblent prévenir le développement d’inégalités scolaires
et permettent de limiter le redoublement.
La promotion sous certaines
conditions
Certains pays[4] proposent
aux élèves la promotion conditionnelle. Celle-ci permet à un élève de passer
dans la classe supérieure à la condition de suivre un programme précis de
rattrapage dans la ou les matières où les difficultés se sont révélées[5]. Cette
promotion sous condition permet aux élèves de combler leurs lacunes. Par
contre, pour les élèves en difficulté, elle n’offre pas de réelles possibilités
de rattrapage.
Ce dispositif n’est
efficace que si des enseignants mettent en place des remédiations de
qualité.
Des organisations de classe
moins propices au redoublement
Afin d’éviter les
redoublements, certains pays ont décidé d’agir en amont, notamment en changeant
l’organisation de leur système : organisation pluriannuelle des curricula,
tailles de classes réduites ou en faisant évoluer les enseignants avec leurs
élèves :
Les cycles
d’apprentissage : répartir le programme sur plusieurs années
Nous sommes
habitués à ce que notre système d’enseignement, comme d’autres en Europe, soit
organisé sur base annuelle. En fin d’année, les évaluations sanctionnent les
acquis des élèves et les conduisent à la promotion vers l’année suivant ou le
maintien dans l’année actuelle. Cette organisation amène des changements
d’enseignants et des modifications de la composition des classes. Ces deux
éléments peuvent avoir des conséquences sur les performances des élèves.
La répartition du
programme sur plusieurs années permet notamment aux élèves les plus jeunes (un
an de moins que leurs ainés) d’être évalués selon leur rythme d’apprentissage.
On sait que le rythme des apprentissages des élèves est intimement lié à leur
âge, en particulier lorsqu’ils sont jeunes. Dans des systèmes comme le nôtre,
les enfants nés en fin d’année se voient majoritairement proposer un
redoublement. Ce dispositif permet d’atténuer la sélection en fonction de l’âge
des élèves.
Une autre façon, plus pragmatique, de dissuader de faire redoubler les élèves serait de retirer des programmes les objectifs annuels.
2. Le looping ou quand l’enseignant suit ses élèves plusieurs années
Le « looping » consiste pour un
enseignant, de garder la même classe pendant plusieurs années (en Belgique
habituellement durant deux ans, mais les enseignants des classes uniques, dans
les villages, gardaient leur élèves durant 6 ou 7 ans – 3e
maternelle comprise)[6].
Cette pratique
paraît efficace pour une pédagogie intégrant les différences individuelles
d’apprentissage et de développement. En suivant les élèves plusieurs années de
suite, les enseignants peuvent « répondre aux besoins et comprendre les
forces de chaque élève.[7] »
Le
« looping » permet aux enseignants de gagner du temps (environ un
mois) dès la deuxième année en supprimant la période d’adaptation nécessaire à
tout changement de classe et d’enseignant[8].
Les relations entre enseignant et élèves s’en trouvent facilitées, ce qui
réduit l’anxiété des élèves lors des phases de transition et améliore leur
sociabilité[9].
Dans certains pays,
on trouve des classes multi-âges[10]. Cette
pratique pédagogique est employée dans plusieurs pays pratiquant peu le
redoublement. Les recherches passées et actuelles ne permettent pas de se
positionner sur des bénéfices ou non de ce type de classes[11].
Le « looping » semble avoir des résultats positifs sur la réussite des élèves et, donc, permet de lutter contre le redoublement en agissant sur plusieurs éléments. D’abord, il y a moins d’élèves risquant de redoubler quand l’enseignant garde ses élèves plusieurs années que dans les autres classes. La seconde raison tient plus de la psychologie des enseignants. Ils ne souhaitent pas transmettre un élève en difficulté à un collègue, soit par empathie[12], soit par peur d’être jugé peu compétent par rapport aux élèves en difficulté[13].
3. Taille des classes et performance
En théorie, les classes
à effectifs réduits devraient permettre aux enseignants de modifier leurs
pratiques pédagogiques et de consacrer davantage de temps, d’attention à chaque
élève. L’enquête STAR (USA) a montré qu’une diminution de la taille des classes
avait des effets positifs sur les performances des élèves et en particulier sur
ceux issus des minorités ethniques ou de milieux sociaux défavorisés, aux
Etats- Unis. Ces effets sont de longue durée, puisqu’ils perdurent jusqu’à
l’entrée à l’université[14].
Par la suite, de nouvelles
études[15] ont
permis d’identifier les raisons de l’intérêt de la diminution des tailles de
classes :
permet d’améliorer – au moins à
court terme – les performances des élèves ;
ces effets sont beaucoup plus
forts chez les élèves présentant des difficultés scolaires, chez les élèves
issus de minorités ethniques ou de milieux sociaux défavorisés ;
les bénéfices de classes à
effectif réduit sont particulièrement élevés en primaire, voire dès la
maternelle, et beaucoup plus modestes plus tard dans la scolarité ;
cet effet est plus efficace pour
les élèves socialement défavorisés.
Dès lors, si une telle mesure est décidée, compte tenu de son coût élevé, elle doit débuter tôt dans la scolarité et se concentrer sur les élèves socialement défavorisés, de façon à maximiser son efficacité.
4.Les groupes de besoin
Lorsque la composition d’un groupe classe pose des difficultés aux professeurs pour gérer l’hétérogénéité des performances des élèves, les groupes de besoin peuvent être une alternative en respectant certaines conditions. La première étant que le temps passé en groupe de besoin soit nettement inférieur au temps passé en groupe classe. Il est indispensable que les élèves s’identifient comme appartenant à ce dernier. Ensuite, il est nécessaire de constituer les groupes de besoin sur base d’évaluations spécifiques (elle n’a pas compris les additions écrites) et non sur une aptitude générale (il est faible en math). Enfin, ces groupes doivent être flexibles et doivent s’adapter en permanence dans leur composition aux progrès des élèves.
Une combinaison des pratiques ci-dessus pourrait facilement être mise en place dans une école chez nous, au sein du futur tronc commun, dans le cadre d’une pédagogie active, par exemple.
5. La promotion automatique
Quelques pays pratiquent la promotion automatique (on ne redouble pas, le passage dans la classe supérieure est automatique). On connaît essentiellement deux modèles : le modèle scandinave et le modèle asiatique.
5.1. Le modèle scandinave ou l’éducation inclusive[16]
Les systèmes
éducatifs nordiques sont comparables au niveau primaire et servent trois
objectifs majeurs[17] :
l’équité, la participation et le bien-être social. Les systèmes scolaires
nordiques favorisent l’individualisation et la différenciation des
apprentissages. Lors des premières éditions des évaluations internationales
PISA 2000 et 2003, la Finlande s’est retrouvée au premier rang, en particulier
en mathématiques, et a suscité l’attention et la curiosité de la communauté
scientifique internationale.
En 1970, le système
finlandais a été réformé de fond en comble. Les enfants sont accueillis dès 4
ans dans une garderie organisée par la commune. A 6 ans, il peut entrer dans
une année pré-élémentaire (dite année 0). A 7 ans, commence l’enseignement
obligatoire. La durée de la scolarisation est de 6 ans pour l’école élémentaire
et de 3 ans pour le Collège.
Le redoublement est
interdit durant l’enseignement obligatoire. Plus exactement, la promotion y est
garantie par la loi[18]. Si
certains élèves sont autorisés à redoubler, c’est pour des causes
exceptionnelles. Il peut alors faire une dixième année avant d’entrer au Lycée.
Les enseignants gardent leurs élèves pendant 3 ou 4 ans, ce qui leur permet
d’adapter leur pédagogie au rythme de chaque enfant. Le taux d’encadrement est
élevé (la taille des classes varie de 12 à 25 élèves).
Les difficultés
d’apprentissage sont traitées dès le jardin d’enfant. Le moindre retard est
pris en compte et signalé aux parents, afin qu’ils puissent agir rapidement
éventuellement en contactant un spécialiste et mettre en place une rééducation[19]. Durant sa scolarité, l’élève en difficulté
recevra une aide spécialisée sous la forme d’un enseignant additionnel dans la
classe. En cas de difficultés persistantes, il recevra l’aide d’un enseignant spécialisé.
L’organisation de la scolarité permet à la Finlande d’éviter le redoublement. Les cursus sont organisés en modules qui peuvent être validés dans un intervalle de 2 à 4 ans. Chaque module dure 6 semaines. A la fin de ce module, les élèves sont évalués afin de le valider. En cas d’échec, l’élève poursuit sa scolarité mais doit s’inscrire à une session de rattrapage. L’emploi du temps des élèves est adaptable pour leur permettre d’organiser au mieux leur temps de travail. Les enseignants reçoivent une formation de niveau universitaire.
5.2. Les systèmes scolaires asiatiques
Si les systèmes
scolaires asiatiques pratiquent également la promotion automatique, celle-ci
est toute différente des modèles scandinaves. En Corée ou au Japon, par
exemple, les valeurs telles que le goût de l’effort, les savoirs, le
développement personnel ou l’apprentissage sont intégrés à la culture et au
mode de vie des habitants[20].
En Corée du Sud,
l’enseignement est basé sur la compétition. Après avoir terminé une journée
d’école chargée, la majorité des élèves ont recours à des cours du soir privés
(les hagwons), parfois dès la maternelle. Un élève de 15 ans travaille plus de
50 heures par semaine et ne dort en moyenne de 5h24 par nuit. Il a moins d’une
heure de temps libre par jour (PISA, 2009)
Si l’enseignement
sud-coréen est aussi performant c’est précisément parce que les institutions
privées remédient aux lacunes de l’enseignement officiel. Les enseignants y
sont de meilleure qualité (les salaires y sont supérieurs).
Au Japon, lorsqu’un
élève est en difficulté dans une matière, le professeur contacte les parents
afin qu’ils inscrivent leur enfant dans un cours privé (le juku). Là encore, ce
n’est pas l’école qui se charge des remédiations. Environ un quart des élèves
du primaire et plus de la moitié de ceux du secondaire suivent des cours dans
un juku[21].
On comprend que ce
type de pratiques enlève la charge de l’école et des professeurs de s’occuper
des difficultés d’apprentissage des élèves. La société japonaise étant fondée sur
la compétition, de nombreuses familles inscrivent leurs enfants à ces cours,
soit pour rattraper un retard, soit pour les plus performants pour préparer les
examens et concours. Les résultats sont assez logiquement là, les jukus ont des
effets positifs sur les résultats[22].
Ces systèmes sont,
fort heureusement, difficilement transposables dans nos pays.
[1] La programmation
annuelle n’a aucun sens dans un enseignement pleinement inclusif, les élèves
étant évalués en fin de parcours. Dans le cas contraire, les enfants avec
handicap seraient les premiers à être « orientés » et donc discriminés. Ce
serait de l’handiphobie. Au cours du parcours, les remédiations nécessaires
doivent être mises en place au quotidien, tandis qu’à la fin du parcours, les
certifications devraient être faites en fonction des apprentissages acquis.
[2] Cnesco
(Conseil national d’évaluation du système scolaire) – Lutter contre les
difficultés scolaires : le redoublement et ses alternatives ? – France 2015
[4] Allemagne,
Espagne, Autriche, Pologne et Liechtenstein
[5] La possibilité de
promotion conditionnelle est rarement mise en place dans les classes
diplômantes.
[6] Cette pratique se
fait en Finlande, en Belgique et dans certains États étasuniens.
[7] Jimerson,
S. R., S. M. W. Pletcher, K. Graydon, B. L. Schnurr, A. B. Nickerson, et D. K.
Kundert (2006). Beyond grade retention and social promotion : promoting the
social and academic competence of students. Psychology in the Schools 43(1),
85–97.
[8] Burke, D. L. (1996).
Multi-year teacher/student relationships are a long-overdue arrangement. Phi Delta Kappan 77 et Black, S. (2000).
Together again. The American School Board
Journal 187.
[9] Checkley, K. (1995).
Multiyear education : reaping the benefits of looping.. ASCD Education Up-date
37.
[10] Ce
type d’organisation regroupe des élèves d’âges et de compétences différents
dans un même groupe classe, et vise notamment à intensifier les interactions
entre des élèves de maturités différentes, de permettre à chacun de progresser
à son rythme et d’apprendre des autres – May, D.C.and Kundert, D. et D. Brent
(1995). Does delayed entry reduce later grade retentions and use of special
education services ? Remedial and Special Education 16, 288294.
[11] Cnesco
(Conseil national d’évaluation du système scolaire) – Lutter contre les
difficultés scolaires : le redoublement et ses alternatives ? – France 2015
[12] Pini,
G. (1991). Effets et méfaits du discours pédagogique : echec scolaire et
redoublements vus par les enseignants. Éducation et Recherche 3, 255–272.
[13] Crahay,
M. (2007b). Peut-on lutter contre l’échec scolaire ? De Boeck.
[14] Krueger, A. et D. Whitmore (2000, April). The effect of attending a small class in the early grades on college-test taking and middle school test results : Evidence from project star. Working Paper 7656, National Bureau of Economic Research. http://www.nber.org/papers/w7656.
[15] Cités in Cnesco (Conseil
national d’évaluation du système scolaire) – Lutter contre les difficultés
scolaires : le redoublement et ses alternatives ? – France 2015
[16] L’éducation
inclusive est fondée sur le droit de tous à une éducation de qualité qui répond
aux besoins d’apprentissage essentiels et enrichit l’existence des apprenants.
Axée en particulier sur les groupes vulnérables et défavorisés, elle s’efforce de
développer pleinement le potentiel de chaque individu. Le but ultime de
l’éducation de qualité inclusive est d’en finir avec toute forme de
discrimination et de favoriser la cohésion sociale (UNESCO, 2014).
[17] Antikainen, A.
(2006, Juillet). In search of the nordic model in education. Scandinavian Journal
of Educational Research 50(3), 229–243.
[19] Robert, P. (2008).
La Finlande : Un modèle éducatif pour la France : Les secrets de la réussite.
ESF Edition.
[20] Charlot,
B. (2009, Décembre). Convergence internationale et diversification interne des
modèles scolaires. Revue Internationale d’Éducation de Sèvres 52, 123–127.
[21] Bray,
M. (1999). A l’ombre du système éducatif le développement des cours particuliers
: conséquences pour la planification de l’éducation. Principes de la
planification de l’éducation 61, UNESCO.
[22] Sawada,
T. et S. Kobayashi (1986). An analysis of the effect of arithmetic and
mathematics education at juku. Technical report, National Institute for
Educational Research.
Le redoublement est du « prêt-à-porter » là où il
faudrait du « sur mesure »[1]. Le redoublement n’est jamais que le résultat de l’échec d’un système,
d’une école (et donc des humains qui y travaillent) qui, pour des raisons
diverses et variées n’a pas voulu ou pas su transmettre les savoirs qu’il a
mission de transmettre, à tous les élèves. On sait la doxa[2]
qui règne dans les salles de profs : « On
ne peut pas faire réussir tout le monde », « Si un élève est en
échec, c’est parce qu’il n’a pas étudié », « Un prof qui fait réussir
tout le monde est laxiste », « Si tu n’as pas ta courbe de Gauss,
c’est que tu es mauvais professeur », etc[3].
Mais passons sur le refus de certaines « bonnes » écoles de faire réussir[4]
tout le monde, et voyons pourquoi ces professeurs n’ont « p)as pu »
transmettre ces savoirs.
Elles sont aussi diverses que variées. Commençons par la « culture scolaire » et donc les exigences de l’école par rapport à son corps professoral (« notre école prépare ses élèves à l’université, donc ne veut pas faire réussir tout le monde » ; « on passe de 5 à 4 classes entre la S2 et la S3 (NDLR entre 13 et 14 ans), il faut donc mettre 15 élèves en échec », …). En fonction de sa place sur le quasi-marché scolaire, l’école a des attentes différentes de la part de ses professeurs ou enseignants. Celle-ci exigera un taux d’échec correspondant à la place qu’elle veut occuper ou conserver. Une école à pédagogie active incitera ses enseignants à faire acquérir les savoirs par tous leurs élèves, tandis qu’une école élitiste[5] attendra de ses professeurs qu’ils « saquent dans le tas », en privilégiant les élèves – évidemment – les plus fragiles, ceux qu’elle ne veut pas (« dys », porteurs de handicaps, élèves socialement défavorisés, étrangers, etc.).
Ensuite, la formation initiale des « enseignants » qui, selon les cursus, va de « moyennement formé » à « pas formé du tout ». En Belgique, l’institutrice ou l’instituteur reçoit une formation en 3 ans[6] qui correspond grosso-modo à une demi-formation. Idem pour le régent (qui enseigne en début de secondaire = le collège en France), mais pour qui la partie « disciplinaire » prend plus de place au détriment de la partie pédagogique. Enfin, le/la licencié·e (qui enseigne au lycée) qui sort de l’université ne reçoit qu’une vague approche de ce qu’est enseigner, via l’agrégation. Celle-ci ne forme pas des enseignants mais se contente de faire croire à des universitaires qu’avec leur bagage disciplinaire et les quelques heures de cours et de stage qu’ils ont fait, ils savent enfin tout sur le métier d’enseignant. En effet, ils savent comment mettre un élève en échec, cela l’université le leur a bien appris[7].
Enseigner, c’est un
art, l’art de savoir pratiquer une pédagogie active qui permettra à tou·te·s
d’acquérir tous les savoirs. Lorsqu’un élève éprouve des difficultés à
comprendre une matière, il ne sert à rien de l’évaluer et de passer à
l’apprentissage suivant. Le cours n’a pas été correctement donné (trop peu de
différenciations, d’explications, d’échanges entre pairs, …) ce qui rend la
matière trop complexe pour lui ou pour elle. Ce serait le mettre en échec. Il
est indispensable, alors, de mettre en place une remédiation efficace, voire de
pratiquer la différenciation. La réponse doit être IMMEDIATE (c’est-à-dire
pendant le cours et non après). Dans le cas contraire, cela reviendrait à
mettre intentionnellement en place toute les conditions nécessaires pour le conduire
à l’échec.
Les psychologues
connaissent bien les dégâts provoqués par le redoublement chez les jeunes qui
en sont victimes. Nous utilisons intentionnellement le terme de « victime » et
non pas celui de « responsable ». On vient de le voir, le redoublement ne sert
strictement à rien. Il s’agit d’une décision émanant de l’école, de
l’enseignant ou du conseil de classe et donc d’un choix politique, stratégique
ou philosophique qui concerne le jeune et sur laquelle il n’a aucune emprise.
Cette décision profondément injuste – on vient de le voir – est prise la
plupart du temps sans débat contradictoire. Le jeune n’a pas le droit de
s’exprimer (encore l’aurait-il qu’il faudrait qu’il ait accès à des arguments
qui ne sont pas de son niveau) et – pire –
d’être défendu. Les personnes qui la prennent sont celles qui, le plus
souvent, sont responsables de cet échec (on a vu que la plupart du temps, les
professeurs évaluent dans le seul but d’hiérarchiser leur groupe classe et non
pour mesurer les acquis) avec pour seule rambarde un droit d’appel de trois
jours, pas toujours respecté, pour des familles qui la plupart du temps ne
possèdent pas les codes de l’école et ne reçoivent pas toujours l’explication
des raisons réelles de l’échec.
On l’a vu, faire
recommencer une année scolaire à un élève est inefficace. Au mieux, l’effet est
limité et à court terme. Cette pratique est, en outre, contre-productive. Les
conséquences du redoublement sont connues depuis des décennies. Plus l’élève
est jeune, plus le redoublement va le marquer psychiquement. Les effets sont
DEVASTATEURS : le redoublement opère un marquage social des élèves qui le
subissent : les mauvais élèves ! A partir de celui-ci se développe un processus
de stigmatisation. Ces élèves vont être affublés d’une série de stéréotypes
négatifs : bête, idiot, têtu, lent, mauvais, médiocre, faible, nul, paresseux,
fait le pitre, indiscipliné, lent d’esprit, travaille mal, méchant, pas
développé, étranger, …
Ils vivent dans la
peur des sarcasmes des camarades, voire des enseignants. La perte des tissus
sociaux établis n’est pas la moindre des souffrances. Se retrouver dans une
classe avec de plus jeunes élèves fait perdre le lien qui existait avec les
copains d’avant. Il faut tout recommencer avec, en plus, une étiquette très
lourde à porter.
Les élèves qui ont
vécu un redoublement ressentent divers sentiments : de honte, de tristesse, de
gêne. Ils vivent un véritable malaise intérieur, ont des sentiments
d’incapacité et d’infériorité. Le doute s’installe, la confiance s’étiole,
l’auto-dévalorisation se développe[8].
La loi du silence est générale. Ces élèves taisent leur souffrance, leur honte
vis-à-vis de leurs condisciples. La plupart ne savent même pas pourquoi ils
redoublent. A l’école, tout est fait pour faire taire les redoublants. Rien
n’est mis en place pour rencontrer leurs difficultés propres.
Il semble que ce
n’est qu’à la maison que l’on parle du redoublement. Le plus souvent c’est
l’engueulade, alors que l’élève n’y est pour rien. Mais la pression de l’école
et le discours culpabilisant des enseignants et des directions font retomber,
aux yeux des parents, la faute de l’échec sur le dos de l’élève. Il ne faut pas
oublier la souffrance et la honte des familles qui sont importantes. Non
contente de maltraiter l’élève, l’Ecole met des dizaines de milliers de
familles en souffrance et les culpabilise de ses propres manquements.
Le redoublement
engendre, chez les élèves qui le subissent, ce que les psychologues appellent
le sentiment d’incompétence acquis[9].
L’élève se résigne à ne pas être compétent. Ses expériences ainsi que les
messages envoyés par l’école lui ont démontré qu’il « ne savait pas », qu’il
était incompétent et que rien ne pouvait modifier cet état. Le sentiment
d’incompétence acquis est difficilement modifiable chez l’enfant qui le
ressent. Il a le sentiment de ne pas avoir le contrôle des causes qui l’ont
amené à cet échec et qu’elles ne pourront jamais changer. Il est persuadé
d’être bête et incapable, une fois pour toute[10].
En outre, les
recherches ont démontré qu’un élève qui redouble son école maternelle ou en
début d’école primaire a toutes les chances de redoubler une seconde, voire une
troisième fois dans la suite de leur scolarité. Les élèves qui ont redoublé
durant leurs primaires ou au début de l’école secondaire abandonnent plus
souvent l’école que leurs condisciples confrontés aux mêmes difficultés
scolaires mais qui n’ont jamais redoublé. Bref, le redoublement appelle
d’autres redoublements et augmente le risque de décrochage scolaire.
L’origine sociale
des familles influe sur le risque de redoublement. Au plus la famille d’un
élève est défavorisée, au plus le risque d’échec scolaire augmente. A titre
d’exemple, on redouble plus à Charleroi qu’ailleurs. Les derniers chiffres
disponibles, pour l’année 2017-2018 le montrent clairement. Le taux d’échec, y
est le plus élevé, avec 14,5% d’échecs. Alors que le Luxembourg a le plus bas
taux de redoublement avec moins de 10%, et que la moyenne de la Région
Wallonie-Bruxelles est à 12,5%. Charleroi est deux points au-dessus, comme
Bruxelles et Mons[11].
On observe le même
effet à l’échelle d’une implantation ou d’un établissement, un élève défavorisé
voit sa probabilité de redoubler augmenter si l’implantation qu’il fréquente
est fréquentée par un public plus défavorisé[12].
Enfin, les
orientations consécutives à un échec scolaire augmentent les discriminations
sociales. Ce sont essentiellement les enfants issus de milieux les moins
favorisés qui sont orientés vers les enseignements qualifiant et professionnalisant.
Certaines filières regroupent davantage d’élèves en retard que d’autres, comme
l’indique la figure ci-dessous. Notez qu’en général, les filles sont moins en
retard que les garçons. En 2011-2012, dans le primaire, 19 % des garçons et 16
% des filles étaient en retard scolaire d’au moins un an ; dans le secondaire,
c’étaient 53 % des garçons et 49 % des filles qui étaient en retard scolaire
d’au moins un an[13] ».
[1] Baye Ariane, Chenu Florent, Crahay Marcel, Lafontaine Dominique,
Monseur Christian – Le redoublement en Fédération Wallonie-Bruxelles 2014
[2] La doxa est l’ensemble des opinions reçues sans discussion, comme
évidentes. La salle des profs est un lieu où règnent des idées reçues et où
leur remise en cause est taboue. Les remettre en cause serait se remettre en
cause, remettre en cause ses pratiques et faire le constat de son incompétence
éventuelle, une impossibilité pour la plupart des professeurs.
[4] Sur le terme « réussir », il s’agit, bien entendu, non pas de « donner les points » comme pourraient le penser certain·e·s qui ne connaissent rien à l’enseignement, mais de « faire acquérir tous les savoirs ».
[5] Pour la liste des écoles élitistes, se référer à celles qui ont eu des files lors de la première année de la mise en place du Décret Inscription/mixité. Mais nous vous la déconseillons, ces écoles étant tout, sauf des écoles.
[6] Il est prévu que cette formation passe en 4 ans, ce qui sera mieux mais restera incomplète.
[7] L’échec et l’abandon des étudiants qui entament des études supérieures en première année est en moyenne de 60%! Autrement dit, le taux de réussite moyen est de 40%. C’est ce merveilleux exemple que les licencié·e·s qui arrivent dans l’enseignement vont tenter de reproduire dans leurs classes. « On a toujours fait comme cela, mon bon monsieur… ».
[8] Crahay 2003 : Peut-on lutter contre l’échec scolaire p 228 et suivantes.
[9] Learned helplessness aussi appelée théorie de la résignation apprise (Seligman, Maier & Solomon 1969).
[10] Tous les élèves sont capables – Lire notre dossier sur le Postulat d’éducabilité. Un élève ne devrait donc jamais être persuadé qu’il est incompétent puisque, précisément, il est parfaitement doué pour l’étude. C’est l’Ecole en CF qui n’est pas capable.
[11] TéléSambre, 7 juin 2019 – A Charleroi, on redouble plus qu’ailleurs, mais on travaille contre l’échec scolaire
[12] Baye Ariane, Chenu Florent, Crahay Marcel, Lafontaine Dominique, Monseur Christian – Le redoublement en Fédération Wallonie-Bruxelles 2014
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