Sep 8, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Les élèves
ne savent pas ce que signifie « apprendre une leçon ».
Les
devoirs représentent, en principe, toujours une tâche liée à une ou plusieurs
notions vues en classe. Il y doit donc toujours il y avoir un lien avec ce qui
a été appris en classe, lien qui n’est que trop rarement perçu par les élèves.
Trop souvent, des devoirs à priori ordinaires posent de gros problèmes aux étudiants. Dans l’immense majorité des cas, c’est que le travail donné n’est pas adapté, pas suffisamment expliqué, ou qu’il ne fait pas sens pour l’élève : ce sont des exercices formels dont on ne voit pas ce qu’ils permettent d’acquérir, dont on ne sait pas quels problèmes intellectuels ou concrets ils permettent de résoudre[1].
On
constate donc un malentendu entre l’attente du maître qui demande
d’« apprendre une leçon » et la compréhension de l’élève. En effet,
cette notion d’« apprendre une leçon » est vaste et regroupe de
nombreuses notions. Cela peut être d’apprendre par cœur, ou au contraire de
s’approprier un savoir pour pouvoir l’utiliser dans d’autres situations, voire
encore de comprendre une notion vue en classe et de savoir la redire avec ses
propres mots. Souvent, il s’agit d’un mélange de ces exigences, qui ne sont pour
ainsi dire jamais balisées par les professeurs.
Tout cela
fait que les élèves comprennent mal les enjeux de leurs devoirs qui, la plupart
du temps ne font pas sens avec ce qui a été fait en classe. Les cours
consistent à transmettre des notions que l’enseignant assied avec des
exercices, faisant constamment des aller-retour entre ces deux aspects de
l’apprentissage. Alors qu’en général, à la maison, les élèves se contentent
d’atteindre la tâche demandée sans se rendre compte qu’une notion y est liée et
donc, sans l’assimiler.
Les
devoirs cachent un véritable paradoxe. Afin de ne pas surcharger les parents
par des travaux trop compliqués à faire à la maison, les professeurs ont
tendance à proposer des devoirs suffisamment simples pour que l’enfant puisse
les faire seul. De ce fait, les tâches exigées sont principalement de la mémorisation
et de la répétition. Ces activités sont peu mobilisatrices et peu efficaces en
termes d’apprentissages, mais ne demandent ni réflexion, ni aide extérieure. Ce
travail n’est pas mobilisateur et encore moins efficace. Les exercices proposés
sont « uniformes, répétitifs et
monotones », disait déjà Prost en 1983. Et il ajoutait « Sous l’influence d’idéologies technicistes
qui réduisent l’apprentissage intellectuel à un processus linéaire de
transmission de connaissances, suivi d’exercices d’application, nous sommes en
train d’appauvrir les études »[2].
Le paradoxe questionne d’autant plus que la majorité des élèves estime qu’ils ne peuvent pas se débrouiller seuls pour faire leurs devoirs après l’école, sans la présence d’une tierce personne[3]. Notons, en passant que le paradoxe s’autoalimente, car si les maîtres souhaitent que les enfants fassent seuls leurs devoirs pour ne pas surcharger les parents, ils attendent néanmoins de la part de ces derniers qu’ils surveillent et vérifient les devoirs. Lorsque les familles interviennent, les professeurs considèrent qu’elles interagissent dans le « contrat » négocié entre eux et l’élève, mais si elles le laissent sans soutien, ils les taxent de démission parentale. C’est ce que Dubois appelle le « paradoxe lié à la responsabilité » ; qui ressemble fort à une injonction contradictoire[4].
On l’a vu, les devoirs
ne font pas sens pour les élèves, car les professeurs proposent généralement
des devoirs qui sont essentiellement des activités de répétition et de
mémorisation, qui ne nécessitent aucune réflexion. Ce sont des travaux peu,
voire pas mobilisateurs et qui n’ont d’efficacité que le nom[5].
Les devoirs ont un
aspect négatif pour les élèves, surtout en termes de quantité de travail et de
mauvaise répartition. Ils ne comprennent pas le sens de ceux-ci. En primaire,
seuls 16 % des élèves sont capables de donner du sens à leurs devoirs[6].
Il faut donc se questionner sur l’opportunité de donner des travaux à domicile
aux élèves alors qu’on sait que la motivation de tout travail intellectuel ne
vient que du sens qu’on lui donne.
Quant aux leçons, c’est l’exercice pour
lequel les élèves éprouvent le plus de difficultés. Cette tâche manque
généralement de support[7].
Il s’agit généralement d’apprendre des bilans ou de préparer un contrôle, donc
en vue d’être interrogé. D’ailleurs, pour les élèves, « Les leçons, si on n’est pas interrogé, ça ne sert à rien »[8].
Le fait de donner des leçons à la maison, sans en expliquer le sens et les
objectifs fait perdre pied aux étudiants. Il y a donc un véritable « flou »
autour de l’expression « apprendre une leçon ». Les élèves n’en comprennent pas
le sens et n’en perçoivent pas la méthodologie. Il s’agit, pour eux, d’une
activité sans finalité qui ne sert qu’à leur faire perdre du temps.
Si les leçons n’ont pas de sens, c’est généralement parce que les consignes n’ont pas été éclaircies. Le langage scolaire, celui des professeurs, est composé de présupposés, ce qu’on appelle le « curriculum caché[9] », c’est-à-dire la part des apprentissages qui n’apparaît pas programmée par l’institution scolaire, du moins pas explicitement et qui peuvent poser des problèmes aux élèves, surtout ceux qui sont en difficulté et qui ne parviennent pas à établir les liens entre le cours et le travail à la maison.
Cette difficulté s’accentue lorsque les
consignes sont données au dernier moment et que le professeur ne s’assure pas
que tous les élèves présents en classe ont compris. Ceux-ci ont besoin que
le contenu des devoirs soit lisible, tout comme la méthodologie qu’on leur
demande d’adopter et la manière dont ils doivent s’organiser[10].
Au
fait, comment fait-on des devoirs ?
On n’apprend pas, sans d’abord apprendre à
apprendre ! Et cela, c’est l’affaire de professionnels. Apprendre, ce
n’est pas seulement avoir reçu des informations en classe. Celles-ci doivent
être travaillées, ce qui nécessite la mise en place de toute une série
d’activités qui permettront de traiter les informations. Il faudra savoir
quelles activités mette en place en fonction de celles-ci. C’est une difficulté
considérable que peu de parents sont capables d’apprendre à leurs enfants.
Que faut-il faire précisément ? Faut-il « la lire ? Comment ? Combien de fois ? Avec quels documents à côté de soi ? En les utilisant de quelle manière ? Avec quels outils (crayon, cahier de brouillon, surligneur, compas, etc) ? En sollicitant l’aide de qui ? A quel moment ? Et quand sait-on que l’on « sait » sa leçon ? Quand on sait définir les mots ? Dire les mêmes choses dans un autre contexte ou savoir dire la même chose avec d’autres mots ? Faut-il retrouver le plan ? Traduire le texte en schémas ? Faire un résumé ? Et, pour tout cela, comment s’y prendre pour être efficace ? (…) Ces questions sont trop importantes, trop difficiles, pour être laissées à la bonne volonté et à la compétence aléatoire des familles.»[11]
A suivre… L’externalisation des devoirs et de la remédiation
[1] Philippe Meirieu : Les devoirs à la
maison. La Découverte 2004.
[2] Prost, 1983, Les lycéens et leurs
études au seuil du 21ème siècle, CNPD
[3] Forestier M., Khan S., 1999, Devoirs d’enfants, devoirs de parents ?
L’opinion des enfants sur l’implication des parents dans les devoirs à
domicile, Mémoire de Licence, Université de Genève, Faculté de psychologie et
des sciences de l’éducation
[4] Dubois L., Dubois G., « Les devoirs à domicile. Des tâches sans taches ? », http://lesoufflecestmavie.unblog.fr/2012/10/23/les-devoirs-a-la-maison-des-taches-sans-taches-laurent-dubois-charge-denseignement-a-luniversite-de-geneve/
[5] Glasman : Les devoirs à la maison. http://www.cndp.fr/bienlire/04-media/documents/glasman01.pdf
[6] Begoc, 2002, citée par Glasman
& Besson, 2004 Ibid.
[7] REP Echirolles, 2001, « Les devoirs
» à la maison » en question », le bulletin du REP Echirolles,
novembre 2001
[8] REP Echirolles, 2001, « Les devoirs
» à la maison » en question », ibid.
[9] Barrère A., 1997, Les lycéens au travail, Puf
[10] REP Echirolles, 2001, Ibid.
[11] Philippe Meirieu : ibid.
Sep 8, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Evaluer le temps passé aux devoirs est extrêmement
compliqué. Les attitudes des élèves et les exigences des maîtres sont
variables. Tous les professeurs, par exemple, n’ont pas les mêmes exigences en
ce qui concerne le travail à la maison. Selon Tedesco[1], la
fréquence des devoirs est corrélée avec la quantité de travail demandé.
Certains profs donnent peu de devoirs, tandis que d’autres en donnent beaucoup
plus. Ceux qui donnent rarement de devoirs sont logiquement ceux qui en donnent
peu. Dès lors, les professeurs qui donnent souvent des devoirs sont aussi ceux
qui en donnent le plus. La charge de travail peut donc varier du simple au
triple en fin d’école primaire. Mais, de leur côté, les élèves présentent
également des rythmes différents.
L’enquête PIRLS[2]
menée en 2006 permet de se faire une idée de ce qui est demandé aux enfants de
4e primaire en Belgique. 3294
familles d’élèves de quatrième primaire ont été interrogées. 97 % d’entre elles ont répondu à la question du
temps que passait leur enfant à faire ses devoirs à la maison. 38 % déclaraient
que leur enfant avait plus de devoirs que toléré légalement (plus de 31
minutes, contre 20 autorisées) et seulement 2 % des familles disaient que leur
enfant n’avait pas de devoirs à faire à la maison.
« Faire correctement son travail semble nécessiter plus de temps que les professeurs ne
le prévoient [3]».
Le temps consacré aux devoirs à la maison tel qu’imaginé par les maîtres est
largement inférieur à celui évoqué par les enfants et leurs parents, lorsque
ceux-ci sont interrogés. Par exemple, dans une même étude[4],
un professeur a évalué le travail quotidien en CM1 (4e primaire, en
Belgique) à une demi-heure pour les « élèves les plus lents », tandis
qu’un de ses élèves « dégourdi »
dit avoir passé une heure sur des exercices de mathématique.
Autre contradiction liée au temps des travaux à
domicile est celui de la « contradiction
sur la gestion du temps »[5].
Les devoirs demandent aux enfants un temps non négligeable en dehors des heures
d’écoles. Mais, ceux-ci en demandent autant aux professeurs. La préparation,
l’explication des consignes, la correction, voire la récitation demanderaient,
selon certains maîtres jusqu’à un cinquième de leur travail hebdomadaire
pendant ou après les cours. On lira plus bas que certains professeurs ont
trouvé la parade (lire « Comment sont corrigés les devoirs ? »).
La contradiction réside dans la plainte quotidienne
des professeurs de manquer de temps pour les apprentissages. Aussi, en fin
d’année scolaire, ils se rabattent sur les devoirs pour récupérer le temps
perdu. Or, ceux-ci ne sont pas intéressants pour des activités de découverte
des apprentissages. La question que se posent les auteurs de l’étude concerne
l’utilité à vouloir consacrer autant de temps à une activité dont le sens est
critiqué.
Nous nous interrogeons, quant à nous sur l’utilité de
cette perte de temps tant pour les élèves que pour les professeurs, qui impacte
le temps de nouveaux apprentissages.
Pour le secondaire, une fois encore, il est difficile
d’avoir une évaluation chiffrée précise du temps consacré par les élèves à
faire leurs devoirs. La moyenne s’étale de 6 à 11 heures par semaine en début
de secondaire, et peut aller de 10 à 20 heures en terminale. Ici encore, les
différents acteurs n’évaluent pas de la même manière le temps nécessaire à
cette tâche et, tout comme en primaire, l’écart entre les estimations des
professeurs et la réalité des familles est énorme.
Les maîtres estimeront le temps de travail en fonction de l’opinion qu’ils ont de leurs élèves. Il y aura donc de grandes différences entre les classes d’un même établissement[6]. Plus de 40 minutes peuvent être demandées par des professeurs de chaque discipline si la classe est cataloguée comme « bonne », tandis que dans des classes supposées plus « faibles », beaucoup plus d’exercices sont réalisés durant la classe. Mais, dans les deux cas, les professeurs ne pensent pas à l’élève « moyen » lorsqu’ils donnent des devoirs. Uniquement à ceux qui se sentent le plus à l’aise. Leur exigence est donc en décalage avec les possibilités de tous les élèves qui sont loin d’être uniformes. Ceci explique le temps plus élevé consacré aux devoirs que ne l’estiment les professeurs.
A suivre… Les élèves ne savent pas ce que signifie « apprendre une leçon ». Au fait, comment fait-on des devoirs ?
[1] Tedesco E., 1985, Les attitudes et
comportements des maîtres à l’égard du travail scolaire à la maison dans
l’enseignement élémentaire, INRP
[2] PIRLS 2006, Questionnaire sur
l’apprentissage de la lecture, 4e primaire.
[3] 2001REP Echirolles, 2001, « Les
devoirs » à la maison » en question », le bulletin du REP Echirolles,
novembre 2001
[4] Bobasch M., 1994, « Devoirs ou
leçons, telle est la question », Le monde de l’éducation, n°218 – septembre
1994, p 14 – 16
[5] Dubois L., Dubois G., « Les devoirs à domicile. Des tâches sans taches ? », www.edunet.ch/classes/c9/didact/
devoirs.htm
[6] Guillaume FR., Maresca B., 1995, «
Le temps de travail en dehors de la classe, vu par les enseignants », Education
et Formation, n°44 – 1995
Sep 8, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
L’implication des familles a des effets positifs sur les devoirs…
Selon une méta-analyse américaine[1], l’influence des parents sur les devoirs à la maison varie selon l’âge des enfants et leur implication. Plus les parents sont impliqués dans l’aide aux devoirs, plus les devoirs sont rendus complets et corrects. Ce n’est plus vrai en début de secondaire (collège ou middle school) mais le redevient en fin de secondaire (lycée ou high school).
… Mais pas sur les apprentissages
Ces études
ne disent rien de la qualité des apprentissages réellement faits par les élèves
pendant les devoirs à la maison. D’autres études ont mis en évidence les effets
négatifs de l’aide des parents sur les apprentissages, notamment les
difficultés rencontrées par les familles de milieux populaires vis-à-vis des
devoirs[2].
L’implication
des parents dans les études de leur enfant n’a pas d’incidence sur sa réussite.
Au contraire, révèle une méta-étude américaine menée par les professeurs de
sociologie Keith Robinson et Angel Harris et publiée dans un livre intitulé «
La boussole cassée »[3].
La plupart des formes mesurables de la participation des parents (aider les
enfants à faire leur devoir, parler avec eux, faire du bénévolat à l’école…) ne
semble pas apporter les résultats escomptés. Pire, à partir du collège (12 ans),
l’aide apportée aux enfants semble tirer les résultats scolaires vers le bas,
et ce quelle que soit la classe sociale, l’origine ethnique ou le niveau
d’éducation des parents. Les ingérences des parents ont surtout pour résultat
de rendre les enfants plus anxieux qu’enthousiastes à propos de l’école.
L’aide
parentale n’est pas toujours gage d’efficacité et n’aboutit pas forcément à un
effet positif. Celle-ci peut même s’avérer être inappropriée. Par exemple par
l’apprentissage de méthodes différentes de celles de l’école, telles que les
parents les ont apprises en leur temps[4].
Si l’engagement des parents semble positif aux enfants, plus de la moitié
d’entre eux déclarent n’aimer travailler avec leurs parents que
« parfois » ou « pas du tout ». Les raisons invoquées sont
liées aux décalages des méthodes, aux décalages de langage et aux tensions
qu’engendrent parfois les devoirs au sein de la famille[5].
Il semble,
en effet qu’environ 2/3 des parents apportent une aide parfois inappropriée.
Soit parce que celle-ci vise à terminer au plus vite les devoirs, soit en
tentant d’expliquer les concepts et méthodes avec des termes différents de ceux
utilisés en classe ou, enfin, parce que certains exercices mériteraient d’être
faits seul pour assurer une certaine efficacité[6].
Si
certains parents sont trop effacés par manque de confiance ou de compétence,
d’autres sont trop intrusifs[7].
Trop aider les enfants à la maison peut avoir des effets contre-productifs en
entravant l’acquisition des savoirs, en développant chez l’enfant le sentiment
qu’il est incompétent (papa ou maman sait
tout, je ne serai jamais comme lui/elle) et qu’il ne pourra jamais rien
faire seul, sans ses parents[8].
Mais, cela peut aussi, engendrer un sentiment d’obligation de réussite et créer
des tensions au sein de la famille. Les effets néfastes du phénomène de
« surparentalité » (overparenting)
sur les résultats des enfants sont connus. Les devoirs sont l’occasion pour
certains parents de réparer leurs propres échecs scolaires, ce qui génère des
dysfonctionnements familiaux, corrélés à une communication intrafamiliale de
mauvaise qualité.
N’oublions
pas les risques psychologiques de cette surparentalité : niveaux d’aide
inappropriés de la part des parents, stress et anxiété tant chez les parents
que chez les enfants, manque de confiance et de persévérance chez l’élève,
incapacité à gérer ses devoirs, à être autonome et responsable[9],
…
Philippe Meirieu précise que « Si on veut que les parents soient efficaces pour aider leurs enfants à l’école, il vaut mieux qu’ils s’intéressent moins directement au travail scolaire qu’à la vie de l’enfant dans la famille. Les recherches que nous avons menées en Belgique, en Suisse, en France ou au Canada montrent que le temps passé par les parents à faire travailler leurs enfants sur les devoirs scolaires n’a pas d’incidence directe sur la réussite scolaire. Cela ne veut pas dire que les parents ne sont pas importants pour la réussite scolaire: ce qui est déterminant, c’est moins le fait de contrôler le travail que d’avoir, en famille, des attitudes qui contribuent à la construction de l’intelligence. Saisir dans la vie familiale le prétexte de l’organisation d’un voyage, d’un goûter d’anniversaire, de la rénovation d’une chambre, ou d’une émission de télé que l’on regarde ensemble, pour échanger avec l’enfant, pour le faire anticiper, le faire réfléchir, c’est cette réalité-là qui est déterminante. Elle forme chez l’enfant des capacités d’écoute, de dialogue, d’anticipation qu’il transférera dans ses activités scolaires[10]. »
A suivre… Quel est le temps passé à faire des devoirs ?
[1] Patall et al., 2008
[2] Kakpo Séverine : Les devoirs à la maison :
Mobilisation et désorientation des familles populaires. PUF 2012
[3] Keith Robinson, Angel L. Harris. The Broken Compass, Parental
Involvement with Children’s Education. Harvard University press. 2014
[4] Van Hooris, 2003, citée par Glasman
Dominique & Besson Leslie (2004). Le travail des élèves pour l’école en
dehors de l’école. Rapport public. Paris: Haut conseil de l’évaluation de l’école. France
[5] Balli, 1998, “When mom and dad help : student reflexions on parent
involvement with homework”, Journal of research and development in education,
n°31 (3) – 1998, p 142 – 146
[6] Van Voorhis, 2003, “Interactive homework in middle school : effects
on family involvement and science achievement”, The Journal of Educational
Research, n°96 (6) – 2003
[7] Caille, 1993, cité par Glasman
& Besson,2004 – ibid.
[8] Pomerantz Eva & Eaton Missa (2000). Developmental differences in
children’s conceptions of parental control: “They love me, but they make me
feel incompetent”. Merrill-Palmer Quarterly, vol. 46, n° 1.
[9] Segrin Chris et al. (2013). Parent and child traits
associated with overparenting. Journal of Social and Clinical Psychology, vol. 32, n° 6, p. 569-595.
[10] Bas du formulaire
Philippe
Meirieu : sur le rôle des devoirs et celui des parents dans le développement de
l’autonomie de enfants, Interview dans LE SOIR du 17 mars 2000
Sep 8, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
La réalité des devoirs à la maison n’est pas souvent radieuse :
énervement des enfants et des parents, stratégies d’évitement, problèmes
relationnels entre enfants et parents – voire des parents entre eux – temps
passé à réexpliquer des notions qui n’ont pas été comprises en classe,
malentendus voire incompréhensions autour de ce qu’attend le professeur, etc.
L’externalisation des apprentissages de l’école vers la famille pourrait
sembler être un bon compromis entre familles en demande et école heureuse de se
décharger de certaines de ses missions. En réalité, elle l’est surtout pour
l’école, celle-ci se déchargeant d’une partie des tâches pédagogiques qu’elle a
mission d’accomplir et pour lesquelles elle est financée, et les professeurs
payés.
D’un autre côté, la famille s’y retrouve, recevant enfin la possibilité
d’influer sur les apprentissages de leur enfant. Mais la réalité est-elle aussi
enchanteresse ?
Au XXIe siècle, l’institution familiale ne ressemble plus guère à celle
qui prévalait un siècle plus tôt, lors de la mise en place des devoirs et
autres travaux à faire à domicile. Elle revêt des formes diverses et
variées : mono ou biparentales, décomposées et/ou recomposées ;
enfants adoptés, sous garde alternée, voire en institution. Les mères sont
actives sur le marché du travail et ont moins de temps pour accompagner les
devoirs de leur progéniture. Les enfants sont de plus en plus pris en charge à
l’extérieur du cocon familial, ce qui a une incidence non négligeable sur
l’organisation et l’emploi des familles.
Concilier travail et temps familial est devenu plus difficile. Les temps
partiels, les horaires décalés ou les distances de plus en plus longues entre
la maison et le lieu de travail restreint le temps passé à s’occuper de ses enfants.
D’autant qu’une fois rentré à la maison, les devoirs sont dans le chemin.
Priorité au souper, aux douches, à l’entretien de la maison, à s’occuper des
plus jeunes et on verra le temps qu’il reste pour les devoirs. C’est ce que
l’école appelle « la démission parentale ». Cependant, beaucoup de
familles sont devenues des championnes de l’organisation et de la gestion du
temps que l’école et ses devoirs s’ingénient à perturber, en ajoutant une
surcharge à leurs charges hebdomadaires.
Les devoirs sont source de stress et sont au cœur des tensions entre
l’école et la famille, mais aussi au sein même de la famille[1].
Ne se contentant pas de leur « bouffer » leur temps disponible, les
devoirs engendrent des difficultés résultant de leur manque de compétence pédagogique
et de l’imprécision de leur rôle en matière de soutien aux devoirs. Pour les parents, cela amène au sein de
l’espace domestique toute une série de tensions qui traversent tous les milieux
sociaux, même si ces tensions se manifestent plus tôt et de façon plus vive
dans les milieux défavorisés.
Dans les familles dont un enfant a des difficultés d’apprentissage, les
défis sont plus grands encore. Plus celui-ci a des difficultés, plus le temps
consacré aux devoirs est allongé, moins l’enfant est autonome et plus les
problèmes sont grands. Et plus l’énervement gagne toutes les parties. Pour les
élèves en difficultés d’apprentissage, les devoirs sont une souffrance. Ce qui
est la définition même de la maltraitance !
Les études montrent un réel paradoxe : si pour 82 % des professeurs, un des intérêts du travail à la maison est de favoriser le lien famille-école, seuls 35 % des familles partagent cette idée[2]. Ce lien est remis en cause par de nombreux chercheurs car, si l’école et les méthodes d’enseignement ont beaucoup changé ces dernières décennies, les devoirs donnés à la maison restent de classiques activités de mémorisation et de répétition. En cela, ils n’illustrent en rien ce qui a été fait en classe et donnent une idée fausse des activités scolaires. On peut donc légitimement s’interroger sur la pertinence de ce lien.
A suivre… L’implication des familles a des effets positifs sur les devoirs… mais pas sur les apprentissages
[1] Cooper, Harris, Jorgianne
Civey Robinson and Erika A. Patall (2006), ibid.
[2] Begoc F., 2001-2002, « Les devoirs à la maison », http://florent.begoc.pagesperso-orange.fr/
Sep 8, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Les études le démontrent, le niveau de diplôme
de la mère est un des meilleurs prédicteurs de la réussite des enfants[1].
En effet, ce sont essentiellement les mamans[2]
qui investissent le plus dans l’accompagnement du travail scolaire à la maison
et ce, quel que soit le milieu social. Au passage, cela déconstruit la doxa des
parents démissionnaires, chère à de nombreux professionnels peu avertis et qui
se dédouanent de leurs responsabilités en invoquant cet argument erroné.
Nombreuses sont les familles qui s’impliquent fortement dans les devoirs de leurs enfants. Même dans les milieux populaires. Comme les autres familles, celles-ci souhaitent avoir le contrôle sur le parcours scolaire de leur enfant. La réussite scolaire est devenue importante pour s’insérer socialement et professionnellement[3]. Cependant, au vu de la diversité des familles, la mobilisation peut être très inégale, selon le milieu social : plus de 90 % des parents bacheliers aident leurs enfants, tandis qu’ils ne sont que 65 % chez les non bacheliers[4]. Dans les familles aisées, une partie de la vie familiale est tournée vers la scolarité et s’organise par rapport à elle, même en surinvestissant parfois l’enfant avec des activités périphériques à l’école. Cela ne veut pas dire que les familles d’autres milieux démissionnent puisque, quel que soit le milieu social, le suivi scolaire est fort.
La sous-traitance du travail scolaire a des
limites. Les élèves qui fréquentent les mêmes écoles n’ont pas tous les mêmes
accès et les mêmes opportunités[5].
Toutes les familles n’ont pas les outils pour aider leur enfant. Soit à cause
de leur faible niveau scolaire qui les empêche de comprendre les tâches
demandées, soit parce que les savoirs et compétences enseignés à l’école ont
fortement évolué depuis leur propre scolarité.
Les parents ayant fait peu d’études sont de plus en plus rapidement confrontés
à l’impuissance. Ils ne comprennent plus ce qu’attend le professeur. Ils se
contentent donc faire le travail au mieux, selon leurs valeurs : un
travail propre et une leçon apprise par cœur, sans que celle-ci ne soit
nécessairement comprise. Parfois même, le devoir est détourné au profit de
nouveaux objectifs qui semblent plus importants à leurs yeux, comme savoir lire
un texte avec expression, alors que celui-ci devrait être compris, ou encore inculquer
une autre méthode de résolution d’exercices, telle celle qu’ils ont apprise
durant leur scolarité.
De nombreux parents disent ne pas comprendre les devoirs de leur enfant, même s’ils passent malgré tout plus de deux heures par semaine à tenter de les aider. 54% des parents interrogés sont en difficulté. Les sujets des devoirs ne leur sont pas familiers, devenant source d’embarras, de frustration et d’une fort sentiment d’incompétence[6].
A suivre… Les devoirs, sources de tensions familiales
[1] Séverine Kakpo – Les devoirs à la maison,
mobilisation et désorientation des familles populaires – PUF 2012
[2] La mère interviendrait dans 69% des cas
(Ufapec, 2000).
[3] Voir aussi Thibert, 2013, 2014
[4] Géry C., 2004, Les représentations des
enseignants de l’élémentaire par rapport au travail scolaire à la maison,
Mémoire de Maîtrise, Sc. de l’éducation, dir. M.
Derycke, Univ. Jean Monnet, St-Etienne
[5] Hancock J., avril 2001, “Homework : a literature review”, Center
for Research and Evaluation
[6] Etude de la BBC (publiée en mai 2000 dans
Independant)