La position de la
Ligue des Droits de l’Enfant est claire :
Dans les écoles qui
disent respecter les droits des élèves, il est urgent de supprimer les
notes !
Pour Claude
Lelièvre[1],
supprimer les notes est le contraire du laxisme : Il s’agit de définir l’ensemble des connaissances qu’il n’est pas
permis d’ignorer. Si ces connaissances sont jugées indispensables, il ne
devrait pas être permis de pouvoir compenser. Car ce que permettent les notes,
ce sont les moyennes. Avec une moyenne, vous pouvez passer d’une classe à
l’autre si vous êtes capable de compenser vos lacunes avec vos atouts. Ce n’est
pas être laxiste que de supprimer les notes, c’est le contraire, c’est exiger
une réelle connaissance dans toutes les matières que l’on juge essentielles.
Les autres arguments, autour de la motivation ou de la crispation engendrées
par la note, viennent polluer le débat. La vraie question est là: accepte-t-on
de valider des compétences jugées indispensables puisqu’elles font partie du
socle commun tout en permettant de ne pas les connaître puisqu’elles se
compensent?
Il est urgent de
réduire les inégalités sociales et scolaire
Selon une
étude du CNRS au cours de l’année 2014-2015, dans l’académie d’Orléans-Tours, la
suppression partielle de la notation à l’école permet de réduire de moitié les
inégalités des performances scolaires entre les élèves des différentes classes
sociales. Supprimer partiellement les notes a des résultats positifs. Les
apprentissages passent mieux, et les inégalités liées aux origines sociales se
réduiraient significativement.
Il
est urgent que l’école devienne un lieu de droits
Nous avons vu que la notation traditionnelle est aléatoire, dépendant
d’un professeur et d’un établissement à l’autre. Elle comporte de nombreux
« biais », qui sont autant d’erreurs systématiques d’appréciations
liées aux stéréotypes inconscients de chaque professeur. Rappelons-nous que les
redoublants, par exemple, sont notés plus sévèrement, les enfants de milieux modestes
sont systématiquement notés de manière plus stricte que ceux provenant d’un
milieu aisé, le genre de l’élève influera sur la cotation, les filles étant
plus « sages » que les garçons, elles seront notées de manière plus
indulgente. Par contre, en mathématique, ce sont les garçons qui seront
surcotés.
Il
faut l’école cesse d’être un lieu de souffrances.
La note est profondément injuste. Elle démotive les élèves en difficulté
scolaire. Les notes faibles provoquent le processus psychologique d’« incompétence acquise » : les
élèves ont acquis le sentiment qu’ils sont incompétents, sont découragés,
laissent tomber les bras, ce qui bloque le processus d’apprentissage. La
comparaison systématique à des élèves plus « forts », provoque l’apathie
chronique, le burn out et des phobies scolaires, le décrochage d’abord interne,
puis progressivement de l’absentéisme, ou encore de la violence résultant d’un
profond sentiment de révolte.
Il
faut une école de la réussite pour toutes et tous.
Selon que l’on est issu d’un milieu défavorisé ou non, on ressentira la
note comme injuste ou non et on sera en échec ou non. Cette reproduction des
inégalités sociales qui touche les enfants des milieux populaires et qui est
causée par les pratiques de sélection des professeurs et les écoles, est
inacceptable dans un Etat de droit, même libéral. Que les enfants de milieux
populaires finissent dans les filières de relégation alors que ceux des
familles plus aisées ont droit de faire des études supérieures, est une
ignominie sans nom. Les droits de l’enfant sont clairs, chaque enfant bénéficie
des mêmes droits que les autres. A l’école donc à veiller à ce que les droits
des enfants entre 3 et 18[2]
ans soient respectés.
[1] Claude Lelièvre, l’historien de l’éducation in
Supprimer les notes, « c’est le contraire du laxisme » – Le Figaro, 11/12/2014.
[2] Voire même au-delà de 18 ans, si le système scolaire a fait perdre injustement
une ou plusieurs années à un élève, par un ou plusieurs redoublements.
Le pourcentage de personnes âgées de 18 à 24 ans qui n’ont pas de diplôme du secondaire supérieur et qui ne suivent plus aucune forme d’enseignement ou formation. Ils sont 14,8% à Bruxelles, 6,8% en Région flamande, 10,3% en Région wallonne. Ils sont en moyenne 8,8% au niveau belge [1].
Un adolescent sur dix est en décrochage scolaire en Belgique dont 14,4% à Bruxelles. Cette problématique retient de plus en plus l’attention des pouvoirs publics. A cet effet, l’axe 4 du Pacte pour un enseignement d’excellence prévoit de lutter activement contre « l’échec scolaire, le décrochage et le redoublement » en Fédération Wallonie-Bruxelles.
Les exclus du système scolaire ont de plus grandes chances de devenir des exclus de la société. Lutter contre le phénomène devient donc urgent et nécessaire tant ses conséquences sont négatives pour l’individu et la société : les charges sociales, la délinquance, les difficultés d’insertion socio-professionnelle, les problèmes de santé, la faible estime de soi, la dépression et autre maux qu’il entraine provoquent des coûts sociaux et économiques importants.
Les exclus du système scolaire ont de
plus grandes chances de devenir des exclus de la société. Lutter contre le phénomène
devient donc urgent et nécessaire tant ses conséquences sont négatives pour
l’individu et la société : les charges sociales, la délinquance, les difficultés
d’insertion socio-professionnelle, les problèmes de santé, la faible estime de
soi, la dépression et autre maux qu’il entraine provoquent des coûts sociaux et
économiques importants.
Mais avant tout, le décrochage scolaire touche
profondément et avant tout l’individu. L’enfant, l’ado victime tend à s’intérioriser
et vit un profond sentiment de mal-être, de détresse qu’il va subir tant qu’il
n’en sort pas.
Mais d’abord, qu’est-ce que le décrochage
scolaire ?
Certains
parlent de décrochage pour parler d’élèves qui ne s’investissent plus dans leur
travail scolaire. Mais la définition la plus communément admise du décrochage
scolaire est celle qui désigne des enfants, des ados, des jeunes en âge
d’obligation scolaire, qui ont abandonné l’école et qui ne suivent aucun autre
type d’enseignement ou de formation. On estime qu’un élève est considéré en
décrochage quand il dépasse les 20 demi-jours d’absence non justifiés. Le taux
de sorties prématurées des 3èmes, 4èmes et 5èmes années secondaires est de 6,3
% en 2016-2017 en Région de Bruxelles-Capitale[1]. Il constitue le taux le plus
élevé en Fédération Wallonie-Bruxelles.
Quel est leur profil?
Il existe une multitude de profils différents. D’abord, les garçons sont plus touchés que les filles, les jeunes d’origine sociale précarisée ainsi que les jeunes d’origine étrangère dont la probabilité de décrochage et d’abandon scolaire est cinq fois plus élevée.
De nombreux facteurs comme la
relation avec les professeurs, les autres élèves, la pédagogie, la situation familiale
ont tendance à provoquer un fort impact sur l’ado et sa scolarité.
Justement quelles en sont les causes?
C’est
d’abord notre système scolaire qui en est la cause. Un système particulièrement
et profondément injuste qui se caractérise par la séparation des élèves en
fonction de leur profil socio-économique et/ou socio-cognitif, par son système
d’évaluation, ses redoublements, la relégation vers l’enseignement qualifiant
ou l’orientation vers l’enseignement spécialisé. Il contribue grandement à
accroître à moyen et à long terme les risques de décrochage scolaire.
À 16 ans, 7 % des élèves qui
appartiennent à l’indice socio-économique le plus faible sont orientés vers le
spécialisé contre seulement 2 % des élèves de 16 ans faisant partie de la
population plus favorisée.
On constate pourtant que certains enfants scolarisés dans le spécialisé ne
souffrent d’aucun trouble d’apprentissage ou d’un handicap avéré ; le seul
«handicap» de ces enfants est leur milieu social. Ils se retrouvent alors
orientés vers le spécialisé et quasi-définitivement condamné comme élève à y
rester parce qu’on estime chez eux une certaine forme de « démission ».
Par conséquent, les enseignements spécialisés de type 8 et 1 deviennent les
instruments de relégation pour les jeunes en obligation scolaire.
Cette problématique de décrochage relève
d’une série d’autres facteurs déterminants et multiples tel que le degré
d’implication des parents dans la scolarité de leurs enfants, leur rapport au
savoir, leur relation avec l’école et les enseignants, leur niveau d’études, de
connaissances de la langue parlée à l’école, de moyens de subsistance ainsi que
leur propre intégration socioprofessionnelle.
Les causes peuvent aussi et tout
simplement être dues à un retard trop important dans une ou des matières, à un
manque de confiance en soi, à des problèmes relationnels, d’apprentissage, à un
encadrement insuffisant. L’ado a un besoin énorme d’appartenance à un groupe,
besoin d’être reconnu par ses pairs pour se sentir exister et confirmé dans son
statut. S’il est laissé de côté, il perd à ses propres yeux toute légitimité et
estime de soi.
Quelles
sont les conséquences ?
D’abord, le décrochage sur l’ado se
manifeste par l’ennui, un comportement contestataire et rebelle, par une
intériorisation et une passivité totale pour les cours, par l’absentéisme, de
l’irritabilité, des phobies, par un état dépressif, …
L’ado qui ne se préoccupe plus de
l’école, perturbe bien souvent le bon déroulement de la classe parce qu’il est lui-même
perturbé et subit généralement un état de mal-être profond. Ayant décroché, il
change fréquemment d’options, voire d’école.10,2 % des élèves ayant changé
d’établissement scolaire dans le 1er degré en secondaire redoublent,
contre 6,2 % qui sont restés dans le même établissement[1].
Les enseignants et la direction proposent alors rapidement des filières moins
valorisées. Il est reconnu que l’enseignement à horaire réduit est une sorte de
filet de repêchage pour l’ado suivant un enseignement à temps plein et ne
possédant pas de diplôme ou d’attestation. Dans ce système, on retrouve hélas
beaucoup d’ados à problèmes.
Il existe de nombreuses autres conséquences
du décrochage scolaire, tel que l’alcoolémie, la toxicomanie, la délinquance et
bien d’autres situations tout aussi graves. Fréquemment, l’ado en décrochage entretient
un lien familial faible. De ce fait, il se réfugie alors auprès d’amis ayant le
même vécu. Et s’il ne rencontre personne avec le même parcours que lui, il
tombe en dépression et s’isole.
Une dernière conséquence à évoquer et
qui est de taille, c’est sa vulnérabilité sur le marché de l’emploi. Un ado ayant
connu un décrochage précoce dans l’enseignement se voit contraint de trouver un
emploi. S’il en trouve, c’est généralement un travail précaire dans lequel il
stagnera toute sa vie au même niveau de qualification parce que son employeur
investira peu dans sa formation, et sa situation restera bien souvent
incertaine.
Que faire et
ne pas faire en tant que parent face à un ado en décrochage scolaire ?
Une chose à éviter et qui est
pourtant assez courante, c’est de comparer l’ado en décrochage avec ses frères
et sœurs. Cette comparaison ne l’aidera pas à se motiver. Bien au contraire, il
en sera encore plus frustré.
Lui supprimer des loisirs utiles
tels que le sport ou des activités artistiques par exemple n’est pas la
solution. Bien au contraire, ce sera une source supplémentaire de frustration et
de déception pour lui. A défaut de trouver la motivation pour l’école, il trouve
au moins une source de motivation dans d’autres activités qu’il aime! En
revanche, on pourra supprimer les écrans tels que les jeux vidéo qui ne sont
pas utiles pour son développement.
Ne faut-il pas mieux privilégier une
enquête approfondie pour comprendre les causes réelles du décrochage que mettre
tout sur le compte de la paresse ? Peut-être vit-il mal une déception
sentimentale, réagit-il à un conflit dans le couple et il est inquiet à l’idée
que ses parents vont se séparer ; peut-être que quelque chose se passe à
l’école, que quelqu’un l’importune, qu’il est en conflit avec un professeur et
qu’il est même en train de traverser une phase de dépression ?
Dans une telle situation, adopter en
tant que parent une attitude d’écoute et de dialogue, même si parfois c’est très
difficile, est sans doute l’approche la plus constructive. Il vaut mieux
chercher à limiter « la casse » car son problème peut encore
s’accentuer, si ce n’est déjà pas le cas, par des troubles du sommeil par
exemple, par la rumination mentale, par des problèmes de fatigue chronique, par
l’épuisement.
Dans l’imaginaire collectif, le
décrochage est souvent associé aux cancres de la classe ; pourtant il
concerne des élèves au parcours fluide et même brillant mais qui tout à coup de
mettent à angoisser et à paniquer. On parle alors de burn-out scolaire.
L’hyperparentalité est source de
grand stress aussi pour les ados qui s’investissent alors de trop, terrifiés à
l’idée de rater et de décevoir. Pour la majorité des parents, l’école a
toujours été un ascenseur social ; or, c’est loin d’être le cas : 80
% de leurs enfants auront des postes inférieurs à ceux qu’ils occupent
eux-mêmes.
Et pourtant, la pression exercée sur l’ado est
énorme et génère une anxiété profonde. Dans ce contexte, certains parents ont
tendance à diagnostiquer et à voir un décrochage de manière précoce, suite à des
résultats en baisse. Et ils vont jusqu’à en convaincre leur enfant.
Qu’un ado se désintéresse pour une
matière est tout à fait normal ! Il faut donc cesser de viser l’hyperperformance.
Le soumettre à un niveau d’exigence extrême exerce une pression qui l’empêche d’apprendre.
Il est tout aussi erroné de lui faire croire qu’une fois devenu adulte, la
réussite à l’école est synonyme de bonheur. On ne cesse de lui rabâcher que sa
réussite scolaire va lui ouvrir toutes les portes, mais en réalité avec un tel
discours, on l’enferme dans une spirale infernale.
Si cette réussite est essentielle,
il ne faut pas exclure le reste. Un ado qui réussit, c’est celui qui est
capable d’utiliser ses échecs comme une rampe pour progresser, et non celui qui
performe d’office.
Pour bien cerner le problème si votre ado est vraiment victime de décrochage scolaire, il vaut mieux privilégier la rencontre avec l’équipe pédagogique, les professeurs, le directeur de l’école pour essayer de comprendre ce qui se passe, pour avoir leur avis et ainsi pouvoir mener une action commune et collective.
C’est important aussi de veiller à
l’autonomiser. En tant que parent, vous êtes la seule personne qui se préoccupe
de lui et de sa scolarité ; peut-être de trop ! Il se peut alors qu’il
cherche de son côté à « décoller » de vous et du même coup de
l’école. Dans ce cas, ne vaudrait-il pas mieux fixer avec lui un objectif atteignable
pour chaque matière, sur deux mois plutôt que sur un mois par exemple ?
Mais surtout, il s’agit de donner du
sens à l’école. Peut-être que jusque-là, il allait à l’école pour vous faire
plaisir, pour vous rendre heureux en tant que parent. Maintenant il a grandi,
il y a des remaniements intérieurs, et la motivation, il la cherche. Il ne veut
plus travailler pour vous faire plaisir et ne sait plus pourquoi étudier. Il
vaut mieux alors lui parler comme à un grand, de l’avenir, du métier qu’il veut
faire, pourquoi on va à l’école ; bref de trouver un sens à sa
scolarité.
Il ne faut pas hésiter à changer de regard sur
lui et à ne plus le considérer comme un enfant. C’est peut-être le moment et l’occasion
de changer sa chambre, de lui proposer des activités nouvelles et de marquer ainsi
le coup en opérant un véritable changement dans le regard que vous portez sur
lui.
Comment
aider concrètement son enfant à accrocher scolairement et à reprendre goût
à l’école?
Si en tant que parent vous souhaitez
augmenter les chances d’aider votre ado à sortir d’un décrochage scolaire, il
existe des pistes de solutions concrètes pouvant contribuer à l’aider.
D’abord et comme évoqué plus haut,
pourquoi ne pas commencer à changer son espace de travail, à installer un lieu agréable
et calme pour que votre ado ait un espace destiné à l’étude et à la réalisation
de ses devoirs ? Cette initiative nécessite un minimum de ressources
financières et de débrouillardise pour préparer cet espace.
Ne serait-il pas temps de vous impliquer
autant dans l’écoute que dans l’accompagnement de ses études et devoirs,
indépendamment de la capacité de suivre les matières apprises par votre
enfant ?
Bien
sûr que cela demande de pouvoir dégager du temps pour lui mais c’est important
qu’il voie son parent s’intéresser à ce qu’il apprend à l’école. Cette attitude
suscite implicitement son intérêt pour ses cours.
Et si en tant que parent ou couple de
parents vous n’avez pas le « bagage » nécessaire pour comprendre ou
même pour partager l’expérience scolaire avec votre ado, pourquoi ne pas penser
à vous tourner alors vers un autre membre ou ami de la famille ou encore vers les
parents d’un ami de votre enfant, qui eux, ont ce bagage. Cette personne pourra
éventuellement apporter son soutien de manière ponctuelle ou régulière car il aura
peut-être plus le temps, l’espace et les connaissances nécessaires pour mieux
le faire. Il s’agit non pas de vous remplacer en tant que parent mais de
permettre à votre ado de vivre d’autres expériences et ainsi se confronter à
d’autres rapports au monde et à la scolarité.
Il
ne faut pas non plus négliger l’aide que peut lui apporter un camarade de
classe. Plus un ado partage et vit des expériences différentes plus il a de
chance de pouvoir rattacher ce qu’il apprend à l’école avec ce qu’il a déjà vécu.
Ces expériences permettront de renforcer potentiellement son accrochage
scolaire.
Justement, un des facteurs les plus
déterminants dans l’accrochage scolaire, est le rapport ludique au savoir que communiquent
les parents à leur enfant. En effet, un parent qui réussit à communiquer le
plaisir d’apprendre, le fait qu’on peut s’amuser en apprenant, augmente les
chances d’éveiller l’intérêt de l’ado pour ce qu’il apprend à l’école. Des
moments réguliers dédiés spécialement à ce partage de savoir de manière ludique
est l’une des pistes pour renforcer l’accrochage scolaire de votre enfant.
Si vous vous sentez capable, pourquoi ne pas envisager alors, une fois par semaine par exemple, avec votre ado et toute la famille, de dédier du temps à jouer, à organiser des championnats du savoir, des expériences scientifiques faites à domicile, des batailles de culture générale, etc. Les possibilités de ces jeux cognitifs sont nombreuses
Quels sont les moyens et les dispositifs existants en
faveur de l’accrochage scolaire ?
Le Pacte d’excellence qui va progressivement
être mis en œuvre cette année va tenter de parer aux problèmes existants dans
notre système scolaire en centrant l’enseignement sur l’humain. Cette réforme va
mettre les écoles en Fédération Wallonie-Bruxelles en chantier jusqu’en 2030 et
devrait en principe aboutir à un enseignement de meilleure qualité, plus
moderne, tout en privilégiant une approche personnalisée sur les acteurs de
l’enseignement en général, et sur les élèves en particulier. Le pacte prévoit
de lutter activement, entre autres,
contre le redoublement et le décrochage scolaire.
Depuis de nombreuses années, il existe des dispositifs internes d’accrochage scolaire tel que le D(I)AS au sein des établissements scolaires bruxellois, qui qui prennent diverses formes dont des cours de remédiations, donnés le plus souvent le mercredi après- midi, parfois après les cours ou sur les temps de midi le reste de la semaine ou la participation à d’activités citoyennes, culturelles, créatives et qui proposent parfois aussi aux élèves concernés d’être extraits de leur classe durant plusieurs jours/semaines et d’être pris en charge au sein de l’école par des membres de l’équipe éducative. Ils permettent aussi de favoriser et de collaborer à l’accrochage scolaire des élèves, par la lutte contre l’absentéisme, la violence et les incivilités.
Ces dispositifs apportent un réel
travail de prévention. Leur objectif est aussi de créer une dynamique autour de
l’école en rassemblant les divers acteurs sociaux et scolaires pour agir efficacement
ensemble contre le décrochage scolaire.
Il existe aussi le service de médiation
scolaire en Région bruxelloise qui met à disposition des écoles une cinquantaine de
médiateurs scolaires avec pour objectif de prévenir la violence et le
décrochage scolaires dans les établissements d’enseignement secondaire. Ce sont
généralement les premiers interlocuteurs vers lesquels on peut se tourner.
A Bruxelles, les médiateurs sont présents dans les établissements tout au long de l’année ; et bien qu’ils soient présents dans l’école même, ils ne font pas partie du personnel de l’école et ne dépendent donc pas de la direction.
Le Centre
PMS ou Psycho Medico Social ou le CPMS est à la disposition des élèves et
de leurs parents, dès l’entrée dans l’enseignement maternel et jusqu’à la fin
de l’enseignement secondaire. C’est un lieu d’accueil, d’écoute et de dialogue
où l’élève et/ou la famille peuvent aborder les questions qui les préoccupent
en matière de scolarité, d’éducation, de vie familiale et sociale, de santé,
d’orientation scolaire, professionnelle, etc.
Le Centre PMS est composé de psychologues (conseillers
et assistants psychopédagogiques), d’assistants sociaux (auxiliaires sociaux)
et d’infirmiers (auxiliaires paramédicaux) qui travaillent en équipe. Un
médecin est également attaché à chaque Centre PMS.
On peut donc les contacter à tout moment.
Chaque commune dispose d’un service scolaire communal qui vise
l’intégration sociale des jeunes en favorisant l’accrochage scolaire.
Ces services sont des relais qu’on peut contacter en cas
de difficultés en lien avec la scolarité. Ce sont des lieux d’accueil, d’écoute
et d’accompagnement.
On peut contacter aussi bien le service scolaire communal de sa propre commune que
de celle dans laquelle l’ado est scolarisé.
Les services d’accrochage scolaire ou S.A.S (S.S.A.S. dans l’enseignement spécialisé) qui sont des services permettant d’accueillir et d’aider temporairement des élèves mineurs rencontrant des difficultés scolaires.
Cette aide concerne par exemple des élèves exclus d’une école et ne pouvant être réinscrits dans un autre établissement scolaire ou encore ceux qui sont inscrits dans un établissement mais qui sont en situation de crise, qui ne fréquentent pas l’école sans pour autant en avoir été exclus.
Ils apportent une aide sociale, éducative et pédagogique par l’accueil en journée et, le cas échéant, une aide et un accompagnement dans le milieu familial.
Concrètement, l’objectif de ces services est que l’enfant ou l’ado puisse être réintégré dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions possibles, dans une structure scolaire ou une structure de formation agréée dans le cadre de l’obligation scolaire.
Le tissu
associatif
Si certains parents offrent des cours particuliers à leurs
enfants, bien d’autres ne le peuvent pas, surtout en faveur de ceux qui,
pourtant, ont le plus grand besoin. Hélas, loin d’assurer la réussite de tous,
l’école produit massivement de l’échec et même du décrochage scolaire et tout
spécialement dans les milieux défavorisés qui n’ont ni les compétences ni les
codes nécessaires pour y faire face.
Fort
heureusement, il existe d’autres solutions beaucoup moins onéreuses pour tenter
de pallier à ce problème. Il y a les associations, notamment les AMO (Aide en Milieu Ouvert) qui sont un
serviced’accueil, d’écoute,
d’information, de soutien et d’accompagnement aux jeunes et les EDD (écoles de devoirs) plus connues par le grand public et qui
visent l’épanouissement global de l’enfant et du jeune jusqu’à ses 26 ans, en
plus du soutien scolaire. Elles mènent des projets qui contribuent à faire des enfants,
ados et jeunes adultes accueillis de futurs citoyens actifs, réactifs et
responsables, capables de poser un regard critique sur le monde et d’en
comprendre le fonctionnement.
Malheureusement, le secteur des EDD manque cruellement de moyens : manque de places, de subsides, d’animateurs formés, alors qu’elles jouent un rôle de cohésion sociale fondamental. Les EDD permettent à leur jeune public de garder le contact avec le milieu scolaire, de les accompagner dans leur processus éducatif à travers leçons et devoirs, mais aussi, de manière plus globale, de redonner du sens à leur parcours scolaire, de les réconcilier avec l’école, voire même avec leur avenir scolaire.
Enfin, il existe également un certain nombre d’écoles d’enseignement
spécialisé de type 5, organisées ou subventionnées par la Fédération
Wallonie-Bruxelles, qui accueillent des élèves à l’arrêt sur le plan scolaire et
qui proposent un suivi psychopédagogique qui vise à remobiliser le désir d’apprendre
et à renouer avec ses pairs dans un cadre sécurisant en :
• prenant en considération l’arrêt du jeune et
en accueillant cet arrêt ;
• proposant un temps et un espace pour
découvrir de nouvelles manières d’apprendre ;
• visant à faire émerger un projet pédagogique
et à le rendre possible.
Cf :
www.enseignement.be – circulaire 6853 du 05 19 2018
Conclusion
C’est d’abord aux pouvoirs publics de
saisir et de remédier à la problématique du décrochage scolaire en s’y
attaquant de manière multilatérale et en dégageant les moyens nécessaires. Des
moyens certainement très importants pour permettre de repenser et de
reconstruire un système éducatif défaillant en Fédération Wallonie-Bruxelles :
il est actuellement source d’élitisme, d’un déficit
de mixité et d’égalités sociales qui aboutit à plus d’exclusion scolaire et sociale,
à des compétitions entre élèves et entre écoles. Cette refonte ne peut aboutir
que par une réforme de la formation et par
la revalorisation du métier
d’enseignant, en prônant la culture de la bienveillance et de la coopération et
en renforçant l’ouverture et l’inclusion à l’école.
Le Pacte d’excellence a été justement
réfléchi et réalisé dans l’objectif d’apporter ces réformes nécessaires et
indispensables au système scolaire actuel. On peut espérer que ces améliorations qui vont bientôt être entreprises pendant
une durée de neuf ans ne seront pas vaines, qu’un réel travail en profondeur
sera réalisé. Il ne faudrait pas juste modifier le cadre, mais surtout
revaloriser l’enseignement en mettant réellement
l’accent sur la dimension humaine à tous les niveaux (élèves, enseignants, parents,
éducateurs, etc.).
Une autre piste d’action pourrait aussi se situer au niveau de la communication et du rapprochement entre toute la communauté scolaire, en privilégiant le partenariat entre les familles, l’écoleet sans oublier le monde associatif (AMO, Maisons de Jeunes, EDD). La clé étant d’être complémentaires, chacun avec sa spécificité pour viser ensemble l’épanouissement global des enfants et ados.
Mais
avant tout, il est essentiel que nos enfants et ados grandissent dans un environnement familial positif. La
famille joue un rôle très important car ce sont les valeurs et les modèles
qu’elle véhicule qui contribuent au développement de ses enfants. La
participation des familles à leur vie scolaire est en outre essentielle pour
les aider à mieux comprendre l’implication qu’ils devraient avoir vis-à-vis de
leur travail scolaire. Une participation qui
privilégie l‘écoute, suscite l’estime de soi, stimule la motivation et la
concentration, permet de créer un état d’esprit et des habitudes de travail
sains. Parallèlement, leur fournir un endroit calme et
approprié pour réaliser leur travail scolaire à des moments réguliers les
sécurise et les mets dans une dynamique de confiance.
Une telle implication
des parents permet d’agir dès les premiers signes d’échecs scolaires ;
elle permet en même temps de prévenir et de les prémunir du décrochage
scolaire.
L’Ecole est un droit de tous les enfants et nul ne peut pratiquer de discrimination à leur encontre[1]. Ce principe élémentaire était bafoué par certaines[2] écoles au moment de l’inscription. En effet, plusieurs écoles, parmi les plus demandées, pratiquaient allègrement la discrimination à l’inscription. Quoi de plus facile quand on a trop de demandes ? Elles triaient principalement leurs futurs élèves sur base de critères sociaux (les enfants issus de milieux moins favorisés étaient trop souvent refusés), mais également sur base de critères aléatoires (les résultats scolaires antérieurs) ou comportementaux (dossiers de l’élève à l’école primaire). D’autres encore acceptaient des inscriptions prématurées, parfois trois ans à l’avance, afin de réserver les places à leur public privilégié.
Le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, estimant à juste titre que ce sont principalement les personnes les moins favorisées qui avaient des difficultés à s’inscrire dans l’école de leur choix, a voulu promouvoir davantage de mixité sociale dans les écoles qu’elle subsidiait et a tenu à lutter contre cette forme de discrimination.
L’inscription n’est, d’ailleurs, pas la seule illégalité pratiquée par les directions de certaines écoles. D’autres dysfonctionnements ont entraîné l’apparition d’une logique de marché scolaire dont les parents sont les clients, et qui ont pour conséquence l’inefficacité de notre système scolaire pointé par toutes les études internationales. Citons, par exemple, Le minerval ou les frais à l’inscription ; la ségrégation durant la scolarité (de manière à éliminer les moins « scolaires », de préférence s’ils sont issus de milieux sociaux défavorisés et ce, via l’échec scolaire) ou le caractère homogène de l’offre d’enseignement (peu de choix d’options ou choix d’options « fortes » comme, par exemple le latin, car on sait que certains milieux sociaux ne choisissent pas cette option), etc.
Il fallait commencer à détricoter cet écheveau en commençant par un bout : le Politique a choisi le moment de l’inscription dans l’enseignement secondaire[3]. Il est à porter au crédit de la Ministre Marie Arena d’avoir été la première à oser s’en prendre à ce système.
Comme le rappelle Benoît Galand[4] (CGé, 2007), « on peut s’interroger sur les effets en termes de cohésion sociale du degré de mixité sociale que l’on rencontre dans les écoles d’un système scolaire (Meirieu & Giraud, 1997). Quel message transmet-on aux jeunes en les scolarisant dans des écoles où ils rencontrent une grande diversité sociale ou au contraire dans des écoles très ségrégées socialement ? Comment cette mixité sociale affecte-t-elle les représentations des différents groupes et rôles sociaux, les préjugés, les perceptions de la justice sociale, … des élèves et des enseignants ? L’école n’a-telle pas là un rôle à jouer ? Les enjeux de la mixité sociale ne sont donc pas minces. D’autant que les effets en termes d’apprentissage sont socialement déséquilibrés : ce sont généralement les élèves les moins bien préparés à la scolarité (souvent ceux d’origine populaire) qui sont le plus affectés par la qualité de l’enseignement qui leur est proposé. »
Il est évident que l’objectif politique est noble, puisqu’il vise, à terme, une société plus hétérogène et plus inclusive. Il ne peut qu’avoir le soutien de tous les démocrates, même si l’objectif de mixité sociale est loin d’être atteint. Si on veut arriver à une véritable mixité sociale cela imposera, qu’à Bruxelles, le pourcentage d’enfants prioritaires issus de quartiers moins favorisés, passe à 50 %[5].
1.2 Les objectifs pédagogiques
Le concept de mixité sociale n’est pas en lui-même porteur en termes pédagogiques. Il est plus parlant de parler de gestion de l’hétérogénéité scolaire, càd du « Comment faire face aux différents niveaux d’acquis présents au sein d’un groupe-classe? [Rudy Wattiez, Cgé].
En effet, sur le plan pédagogique, ce n’est pas de mixité sociale que l’on parle. Pour faire progresser un groupe-classe, il est important d’hétérogénéiser le public, plutôt que de tenter de l’homogénéiser. Au plus les différences d’apprentissages sont grandes, au plus il est nécessaire de mettre des pratiques pédagogiques en place. Pratiques pédagogiques qui vont bénéficier à tous les élèves, quelles que soient leurs facilités ou difficultés scolaires. L’hétérogénéité permet un véritable « nivellement » vers le haut, tandis que l’homogénéité, recherchée actuellement par les redoublements et orientations diverses, est un nivellement catastrophique vers le bas !
Les études internationales ont démontré que, de tous les peuples de l’OCDE, les belges étaient les plus inégalitaires ! Notre enseignement est l’un de ceux où l’hétérogénéité sociale est la plus faible et, par corollaire, qui est l’un des plus inefficaces. Le niveau des élèves dépendant de l’école qu’ils fréquentent.
Selon que vous soyez puissant ou misérable… les jugements d’Ecole vous garantiront la réussite ou l’échec. En choisissant leur population scolaire, certaines écoles décident aussi de l’avenir des élèves qu’elles rejettent. En effet, l’école que fréquente un enfant influence son niveau scolaire. Les élèves issus de milieux moins favorisés, et se trouvant inscrit dans une école défavorisée, réussissent moins bien que les enfants issus de milieux favorisés, scolarisés dans des écoles favorisées.
Pourquoi ?
Parce qu’on n’apprend pas tout seul ! L’effet des pairs (élèves du même âge) est fondamental : on apprend moins vite dans un environnement où les acquis scolaires sont faibles que dans un environnement où les acquis scolaires sont élevés. Et cela, même si on a soi-même, des acquis scolaires faibles !
Cela s’explique. Dans son étude, Benoît Galand[6] relève trois raisons :
On apprend plus vite quand on est entouré d’élèves de bon niveau scolaire. Le niveau scolaire étant en partie liée à l’origine sociale, c’est dans les écoles « privilégiées » que l’on a le plus de chances de fréquenter des élèves au niveau scolaire élevé ;
Les ressources financières et humaines des écoles sont influencées par son public. Sur le plan financier, les familles favorisées peuvent contribuer aisément à l’équipement et aux frais scolaires de leur enfant. Sur le plan humain, les équipes pédagogiques (les enseignants) sont plus expérimentées et moins soumises à des rotations du personnel dans les écoles privilégiées. La qualité de l’enseignement varie donc, parfois, selon le public de l’école ;
Selon le public de l’école, l’élève sera plus ou moins exposé à la violence et à la (dé-)motivation scolaire. Le risque d’être confronté à des violences verbales et/ou physiques est plus important dans les écoles « défavorisées », contrairement aux écoles « favorisées » ou les élèves ont une attitude plus positive vis-à-vis de leur scolarité. Ces élèves, en outre, souhaitent suivre une scolarité plus longue et ont une ambition forte pour leur avenir. Rassembler les publics les moins favorisés au sein des mêmes écoles, ne fait qu’accroître les difficultés (scolaires et comportementales).
Le niveau de mixité sociale des écoles a des conséquences sur le cursus scolaire des élèves ainsi que sur le travail des équipes éducatives.
Et Benoît Galand de conclure « Les faits rappelés ci-dessus montrent que la mixité sociale apparaît comme un des éléments importants si l’on veut éviter de voir se creuser les inégalités scolaires et de voir augmenter le nombre d’élèves n’atteignant pas le niveau d’apprentissage attendu au terme de la scolarité obligatoire. »
Les effets « école » sur les élèves
Selon qu’ils sont intégrés dans une école favorisée ou non, les élèves ont une vision différente de leur scolarité (C. Piquée et M. Duru-Bellat – 2000) :
Les élèves des classes les plus défavorisées portent sur leur école des jugements moins favorables que les élèves des autres écoles ;
Certaines normes sociales sont moins intégrées par les enfants de milieux défavorisés (confusion des normes scolaires) ;
Dans les classes primaires défavorisées, l0 % des élèves envisagent un métier d’ouvrier;
Les élèves favorisés ont des ambitions moins élevées lorsqu’ils fréquentent des classes défavorisées ;
Il n’y a pas de différences d’attitudes selon que les enfants sont scolarisés dans des classes favorisées ou défavorisées ;
les élèves ont de meilleures ambitions lorsqu’ils sont scolarisés dans une école favorisée ;
Dans les classes favorisées, les élèves modestes n’envisagent jamais un métier ouvrier ;
Les élèves ont l’impression que le climat est meilleur dans les écoles favorisées.
Il va donc de l’intérêt de tous les enfants issus de milieux défavorisés d’être intégrés au sein d’un établissement scolaire favorisé. 20 % des places leur sont réservées en priorité, mais dans les faits, le nombre de familles qui choisissent de bénéficier de cet avantage est faible. Il est dans l’intérêt de tous que ce pourcentage augmente.
Tous les élèves sont-ils faits pour toutes les écoles ?
Absolument ! Croire ou faire croire que certains enfants[7] ne seraient pas capables de suivre un enseignement dans les écoles favorisées tient, ou de l’affabulation, ou de l’incompétence ! En effet, tous les élèves sont doués pour l’étude. Croire que certains élèves seraient des intellectuels tandis que d’autres seraient plutôt artistes ou manuels est absolument faux (des gens « bien mal pensants » parlent même d’ « intelligence de la main », une autre manière – ségrégationniste – de désigner les enfants défavorisés). En fait, chacun de nous a, à la fois, de grandes capacités intellectuelles et manuelles !
Cette idée archaïque, qui date du début du XXe siècle est à ranger au musée de l’histoire de la pédagogie. Jean Piaget[8] a démontré, au début des années 60, que l’intelligence se construit. Il a prouvé que TOUS les enfants devaient reconstruire les idées, les concepts ou encore les théories qui paraissent évidentes aux adultes. Bref, grâce à la théorie de PIAGET, on est convaincu aujourd’hui que tout s’apprend ou mieux, que tout se construit[9]. Ce qui distingue les élèves c’est leur vitesse d’apprentissage. Bref, la qualité de l’apprentissage réalisé n’a aucun rapport avec le temps mis pour y arriver. Depuis 50 ans, on peut affirmer que TOUS les élèves sont doués pour l’étude (cela s’appelle le « postulat d’éducabilité »).
Il n’y a donc pas d’école plus adaptée à un certain public scolaire qu’à un autre. Tous les enfants, quelles que soient leurs origines, sont capables de suivre un enseignement de qualité[10], quelle que soit l’école. Dès lors, il est fondamental que les familles les moins favorisées inscrivent massivement leurs enfants dans les écoles favorisées, afin de leur donner un maximum de chances d’atteindre un niveau scolaire de meilleure qualité.
Les effets « école » sur les enseignants
Selon qu’ils enseignent dans une école favorisée ou défavorisée, les enseignants ont une vision différente de leur métier (C.Piquée et M. Duru-Bellat – 2000) :
Tous déclarent des priorités identiques (méthodes de travail efficaces, apprendre à mobiliser et réutiliser des connaissances, …) mais dans la pratique, les différences apparaissent ;
Les pronostics de réussite sont nettement plus forts dans les classes favorisées ;
Dans les classes défavorisées, les enseignants reconnaissent le plus souvent ne pas terminer le programme ;
Les problèmes de discipline sont plus fréquents dans les classes défavorisées ;
L’exercice du métier est jugé plus agréable dans les écoles favorisées que dans les écoles défavorisées.
L’objectif de viser à une véritable mixité sociale et donc à une véritable hétérogénéité pédagogique est également de l’intérêt de tout le corps enseignant. Avec leur slogan « Toutes les écoles doivent être bonnes », les détracteurs[11] du décret inscriptions vont dans le même sens que nous. A la différence que pour nous, démocrates progressistes, une bonne école est, par définition une école socio-culturellement et pédagogiquement mixte et qui vise la réussite de tous, sans la moindre exception, loin du « chacun chez soi » que masque cette revendication « politiquement correcte ».
3. « Comment tester les limites du politiquement correct ? »
Lors de l’élaboration du Décret inscriptions, les résistances ont été virulentes. Si celles-ci sont, aujourd’hui, moins violentes, elles ne sont toujours pas éteintes. Les arguments évoqués par les « anti-décret » sont navrants, tant ils sentent la mauvaise foi. Leur objectif inavoué est de mettre des barrières aux populations les moins favorisées et garder leur « pré carré », ces écoles « forteresses » où nul ne pourrait entrer s’il n’est « bien né ». Autrement dit, s’il est d’un milieu social par trop éloigné de la clientèle privilégiée souhaitée.
Citons-en quelques-uns pêle-mêle :
« Les familles doivent pouvoir inscrire leurs enfants dans l’école de leur choix. » Cette revendication est inutile, car c’est précisément l’objectif du Décret : permettre à chaque famille d’accéder à l’école de son choix. pour autant qu’il y ait assez de place, bien évidemment. C’est le principe de la baignoire. Une fois remplie, l’eau s’écoule et doit trouver un autre endroit pour se loger. Les écoles les plus demandées ne peuvent accueillir plus de places qu’elles n’ont, et les familles non satisfaites doivent – c’est mathématique – chercher une autre école où inscrire leur enfant. Le Décret n’a donc jamais supprimé ce droit à qui que ce soit. Au contraire, il l’a étendu à tous. Et c’est précisément ce qui gène les adversaires du Décret : que celui-ci donne les mêmes droits à toutes les familles !
Ces parents revendiquent notamment « l’essentielle adhésion de l’élève et de ses parents au projet d’établissement ainsi que le partenariat famille-école nécessaire pour l’obtention d’un cadre optimal favorisant la réussite scolaire. » Sous-entendraient-ils que certaines familles n’adhèreraient pas au projet d’établissement et ne seraient pas des partenaires responsables sur lesquels l’école pourrait compter ? Voire que la réussite de leurs enfants ne les intéresse pas ? D’abord, il n’existe pas de famille qui se désintéresse de la réussite de ses enfants ! Le mythe des « Parents démissionnaires » est un fantasme qu’il est temps d’enterrer. Celui-ci s’entend, malheureusement, trop souvent dans la bouche de professionnels qui ne connaissent pas la réalité de ce que vivent les familles. Il est honteux de définir ainsi les familles défavorisées qui, tout autant et si pas plus que les autres, sont soucieuses des études et du devenir de leurs enfants.Ensuite, supposer que des élèves ou des familles n’adhèreraient pas au projet d’établissement, serait une ineptie totale. Le Décret Missions précise que Par l’inscription dans un établissement, tout élève majeur, tout élève mineur et ses parents ou la personne investie de l’autorité parentale en acceptent le projet éducatif, le projet pédagogique, le projet d’établissement, le règlement des études et le règlement d’ordre intérieur (Art 76 du Décret Mission – MB du 23/09/1997). Par définition, tous parents, en inscrivant leur(s) enfant(s) dans un établissement secondaire, acceptent les différents projets et règlements de l’école, qu’ils signent. L’argument ne tient donc pas la route !Quant au « partenariat famille-école », ne rêvons pas. Le partenariat se définissant comme « une association active de différents intervenants qui, tout en maintenant leur autonomie, acceptent de mettre en commun leurs efforts en vue de réaliser un objectif commun[12] », celui-ci n’existe que dans de rares écoles, essentiellement celles qui pratiquent une pédagogie active. En général, le seul partenariat que l’Ecole attend des parents est qu’ils veillent à ce que leur descendance soit bien sage et obéissante et ne pose ni problèmes d’études, ni problèmes disciplinaires. On a entendu des enseignants réclamer à des familles qu’ils mettent leurs enfants un peu trop « vivants » sous Rilatine (ou Ritaline en France) ou paient des cours particuliers chaque fois qu’eux ou l’école faillissent à leur mission.Sur ce dernier point, il est exact que les familles socialement les moins favorisées ne peuvent payer des cours particuliers dispendieux et prohibitifs. Rappelons cependant que chaque école a mission de faire parvenir TOUS les élèves aux savoirs et ce, sans discrimination aucune et donc, que si elle remplit enfin correctement sa mission, les cours particuliers – qui sont un vrai scandale – deviennent totalement inutiles.
« La mixité ne se décrète pas ! ». Argument récurrent, cette revendication est purement doctrinale. Bien sûr que la mixité se décrète ! C’est un choix politique fort. C’est toute la différence idéologique qui existe entre les idéaux « progressistes » et les revendications « réactionnaires[13] ». Les premiers visent un progrès social qui bénéficiera en priorité aux moins nantis et aux plus fragiles, les seconds visent le retour en arrière, autrement dit, la protection de privilèges d’un autre âge.Une gestion humaniste de la société dans son ensemble repose précisément sur des liens de solidarité. Ces liens ont toujours existé et les sociétés les plus solidaires sont celles qui permettent précisément au plus grand nombre d’être intégrés activement dans tous les pans de la société. Refuser la mixité et donc la solidarité, pousse certains milieux à se communautariser, à se replier sur eux-mêmes et à se mettre en marge de notre société. Aujourd’hui, nous vivons dans une société du chacun pour soi que nul ne peut cautionner. Et certainement pas les politiques qui nous gouvernent !Les porteurs de cette revendication oublient de préciser que la « non-mixité » a, quant à elle, été décrétée par certains établissements scolaires. Si on est arrivé à un point où le Politique a dû mettre de l’ordre dans la gestion des inscriptions, c’est précisément parce que les directions et Pouvoirs Organisateurs de certaines écoles avaient unilatéralement imposé cette « non-mixité » à toute la population scolaire
« Favoriser les performances scolaires en misant tout sur la mixité sociale, c’est un leurre. » Ici, on est purement dans la désinformation. Faire croire que le Politique n’aurait eu que cette idée-là pour « favoriser les performances scolaires » travestit la vérité. Les politiques sont loin d’avoir « tout » misé sur la mixité sociale. Citons pêle-mêle et sans être exhaustif[14] : le renforcement de l’encadrement dans le maternel et dans les deux premières années du primaire ; le renforcement de l’encadrement dans les écoles de petite taille ; un CEB commun à toutes les écoles primaires, suivi d’un CE1D[15] commun ; l’amélioration de la scolarisation des primo-arrivants, un financement pour les manuels scolaires, la refonte du 3e degré de l’enseignement qualifiant, le décret intégration scolaire, le projet Décôlage afin d’éviter les redoublements en maternelle, les enseignants-relais « dyslexie » dans les écoles, etc. On peut être d’accord ou non avec les pistes explorées et les moyens proposés, mais nul ne peut nier que le Politique a mis des choses en place pour tenter de « favoriser les performances scolaires ». Dire qu’il aurait tout misé sur la mixité sociale est absolument faux !
Réclamer, lors de l’inscription « une entrevue parents – enfants – direction -école afin d’établir un contact direct et une communication réelle entre les différentes parties. » cela revient à réclamer purement et simplement le retour à la politique du « fait du prince », certaines directions se permettant de choisir leur public privilégié, comme avant le Décret inscriptions. Sous des motifs pseudopédagogiques, cela permettrait aux directions et Pouvoirs Organisateurs peu scrupuleux d’inciter les parents à chercher d’autres écoles pour leurs enfants et, de ce fait, à réserver le droit d’entrée aux plus nantis. « Notre école n’est pas faite pour votre enfant », « Ses résultats scolaires ne conviennent pas à notre niveau scolaire », Ces arguments sont vieux comme les écoles élitistes et n’ont aucune base pédagogique.
« Permettre à chaque enfant et parent de choisir l’enseignement le plus adapté à sa situation, sans tenir compte de critères comme la distance domicile/école ou même école primaire/école secondaire. » « Sous-titré …Chaque enfant est différent et a besoin d’une école qui lui convienne ». S’il devait il y avoir une école moins adaptée à un enfant qu’à un autre, celle-ci devrait perdre ses subsides pour non respect du Décret Mission. Une école est, par définition, adaptée à tous les enfants, sans la moindre distinction. Cette revendication vise à exclure certains publics : celui des communes les moins favorisées (distance domicile/école). Et surtout en refusant tous mélanges sociaux ! D’autant plus si ces enfants proviennent d’écoles moins favorisées (critère école primaire/école secondaire). Cette revendication est clairement celle qui prône le plus ouvertement la ségrégation et flirte dangereusement avec la ligne rouge du politiquement incorrect.
Ne nous faisons pas d’illusions, aucune de ces revendications n’est portée par une idéologie humaniste !Rappelons que, par définition, toutes les écoles sont faites pour tous les enfants et donc, DOIVENT convenir à tous. C’est le Décret Missions qui, en son article 6, fixe la mission de TOUTES les écoles :
La Communauté française, pour l’enseignement qu’elle organise, et tout pouvoir organisateur, pour l’enseignement subventionné, poursuivent simultanément et sans hiérarchie les objectifs suivants :
1 ° promouvoir la confiance en soi et le développement de la personne de CHACUN des élèves;
2° amener TOUS les élèves à s’approprier des savoirs et à acquérir des compétences qui les rendent aptes à apprendre toute leur vie et à prendre une place active dans la vie économique, sociale et culturelle;
3° préparer TOUS les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d’une société démocratique, solidaire pluraliste et ouverte aux autres cultures;
4° assurer à TOUS les élèves des chances égales d’émancipation sociale
[1] Voir Article 28 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant (ONU 1989)
[2] II s'agisait d'une minorité d'écoles. Il ne faut, en aucune manière, jeter l'opprobre sur l'immense majorité des directions qui ne pratiquaient nullement cette forme de discrimination. Malheureusement, c'est par la faute de cette infime minorité, que des règles d'accueil de tous ont dû être mises en place sous la forme d'un Décret.
[3] Nous noterons que les écoles fondamentales ont toujours le loisir de pratiquer la discrimination des élèves à l'inscription. Il est, aujourd'hui, impératif de penser rapidement à un futur décret inscription à l'école primaire, afin de tenter d'atteindre l'équité et de lutter contre l'injustice à tous les niveaux de l'enseignement obligatoire.
[4] Benoît Galand est actuellement assistant de recherche post-doctorat à la Chaire de pédagogie universitaire à l'UCL, Faculté de Psychologie et des Sciences de l'Education (PSED).
[5] Il est actuellement de 20 %
[6] Benoît Galand, CGé 2007, déjà cité.
[7] Nous parlons d'enfants non porteurs de handicaps mentaux. Quoique... dans le cadre de l'intégration scolaire, l'accueil de la différence - même intellectuelle, donc pas uniquement ceux qui peuvent « réussir » - fait partie de la mission de toutes les écoles !
[8] Jean Piaget (1896-1980) psychologue, biologiste, logicien et épistémologue suisse
[9] Marcel Crahay - in Actes du Congrès de l'enseignement catholique 2002 - p 32
[10] Nous entendons par « enseignement de qualité », des pratiques pédagogiques qui visent l'acquisition, par TOUS les élèves, des savoirs et compétences fixées par les programmes (socles de compétences).
[11] Encore faudrait-il qu'ils nous disent en quoi certaines écoles seraient plus « mauvaises » que d'autres !
[12] Wikipédia - 5 janvier 2013
[13] « Réactionnaire » est utilisé ici dans son sens originel « prônant et mettant en œuvre un retour à une situation passée réelle ou fictive, révoquant une série de changements sociaux, moraux, économiques et politiques » - voir Wikipédia même date.
[14] Pour plus d'informations voir sur www.enseignement.be[15] Certificat d'études du premier degré de l'enseignement secondaire (CE1D)
Un dictionnaire spécialisé nous dira qu’un échec à l’école c’est une situation où un objectif éducatif n’a pas été atteint. C’est une situation on ne peut plus ordinaire en classe et elle fait partie des apprentissages. Nous apprenons tous par essais et erreurs et peu d’entre nous sont capables de comprendre toutes les notions du premier coup. Le rôle de chaque enseignant·e est, bien entendu, de ne pas laisser cet échec se développer en y remédiant le plus rapidement possible (de préférence durant l’heure de cours). C’est ce que l’on appelle la « remédiation immédiate ».
1.2. Quand l’échec scolaire pose-t-il problème ?
Lorsque, dans ce dossier, nous parlons d’échec scolaire, nous parlons de la situation d’un nombre important d’élèves qui connaissent à l’école des situations répétées d’échec se traduisant par une mise à l’écart du groupe classe, par un ou plusieurs doublements d’années d’études ou encore par une orientation contrainte vers l’enseignement technique ou professionnel.
L’échec scolaire, dans ce cas, n’est autre qu’un objectif pédagogique non atteint que les professeur·e·s ont laissé se développer sans parvenir à y remédier, au point où l’élève est finalement
réorienté sans que ce soit son propre choix vers le technique ou le professionnel ;
doive redoubler (et donc recommencer son année) ;
est placé en 1e ou 2e complémentaire. L’année complémentaire est une manière camouflée de faire redoubler un élève – et donc quitter son groupe social. C’est précisément parce qu’aucune pédagogie différenciée n’a été mise en place par l’équipe pédagogique, que le redoublement a lieu. La différenciation – et donc la progression à son rythme – est pourtant une obligation qu’ont chaque Pouvoir Organisateur ainsi que chaque enseignant, définie par le décret « Missions » (Décret « Missions » = Art 15 : Chaque établissement d’enseignement permet à chaque élève de progresser à son rythme, en pratiquant l’évaluation formative et la pédagogie différenciée.)
2. Etat de l’échec scolaire en Communauté française
2.1. Soixante mille redoublements par an
Les chiffres datent de 2007 mais les indicateurs de l’enseignement montrent que la constante macabre est maintenue d’année en année.
2.2. Dix-sept mille orientations précoces
En 2006-2007, un peu plus de 17 000 élèves avaient reçu une attestation d’orientation B (passage d’année accepté mais avec une restriction dans certains branches) qui oriente vers l’enseignement technique ou professionnel. Cette décision n’émanait pas de leur propre choix, mais était imposée par le conseil de classe qui décidait de l’avenir (ou du non avenir) de ces élèves ou de leurs parents. Même si, parfois, un choix leur était demandé, celui-ci a toujours été fait par défaut, le premier choix de l’élève étant de continuer normalement le parcours scolaire commencé dans l’enseignement général.
2.3. Vingt mille abandons scolaires
Dans le tableau ci-dessous, sur la cohorte d’élèves entrés en 3e secondaire en 2003, plus de 30 % vont décrocher et quitter l’école avant d’entrer en sixième année.
Ces élèves qui arrêtent entre la 3e secondaire et l’entrée en dernière année ont 20 000 parcours différents. Si d’aucuns disparaissent dans la nature, d’autres se retrouveront dans les CEFA ou en apprentissage. Quoiqu’il en soit, ils passent dans un choix par défaut ; choix qu’ils n’auraient pas fait (ou du moins pas ainsi) s’ils ne s’étaient pas retrouvés en échec scolaire.
L’Ecole en Communauté française maltraite,
chaque année, 100 000 élèves !!!
3. Qu’est-ce que la maltraitance ?
3.1. Définition juridique :
La Convention internationale des Droits de l’Enfant donne une définition juridique de la maltraitance en son article 19 :
« Toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalité physique ou mentale, d’abandon, de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle. »
3.2. Définition psychopédagogique
La Communauté française de Belgique a défini la maltraitance de manière psychopédagogique :
« Est maltraitant tout comportement et/ou attitude qui ne tient pas compte de la satisfaction des besoins d’un enfant et constitue par le fait même une entrave importante à son épanouissement. Une attitude ou un comportement maltraitant peut-être intentionnel ou le résultat de la négligence, ou de défaillances sociales ».
in « L’aide aux enfants victimes de maltraitance – guide à l’usage des intervenants auprès des enfants et des adolescents « – Communauté française 2002
3.3. En quoi le redoublement et l’orientation précoce relèvent-ils de la maltraitance ?
3.3.1. « Défaillances sociales »
L’Ecole est une Institution publique institutionnalisée par l’Etat[1] pour remplir ses devoirs à l’encontre des enfants et des jeunes. Ceux-ci sont définis par la Convention internationale relative aux Droits de l’Enfant (ONU 1989).
L’éducation (voir articles 28 et 29 de la Convention internationale des Droits de l’Enfant) est un droit, égal pour tous. Il n’est donc pas « à mériter ». Chaque enfant a droit à un système éducatif, basé sur l’égalisation des chances et qui remplisse les missions que s’est assignée la Communauté française, à savoir poursuivre simultanément et sans hiérarchie les objectifs suivants :
1° promouvoir la confiance en soi et le développement de la personne de chacun des élèves;
2° amener tous les élèves à s’approprier des savoirs et à acquérir des compétences qui les rendent aptes à apprendre toute leur vie et à prendre une place active dans la vie économique, sociale et culturelle;
3° préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d’une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures;
4° assurer à tous les élèves des chances égales d’émancipation sociale.
L’Etat a bien défini la mission de son Ecole. Malheureusement, l’institution scolaire n’a jamais voulu faire siens ces objectifs humanistes. Les écoles « élitistes » continuent à pratiquer la sélection dans le seul but de se positionner en tête des établissements situés sur le même territoire captif. Et les écoles techniques et professionnelles n’ont, dès lors, d’autre choix que d’accueillir des élèves cassés, révoltés ou brisés par les établissements du haut de la liste. Dans ce quasi-marché scolaire, les élèves sont quantité négligeable. Leurs intérêts – et encore moins leurs droits – ne sont en aucune manière au centre du dispositif éducatif. Les écoles ne sont pas là pour éduquer les élèves mais uniquement pour gagner par tous les moyens la compétition entre elles. Celle qui vaincra sera celle qui cassera le plus d’enfants. Ce sera aussi celle qui, nous le verrons, pratiquera le plus la maltraitance institutionnelle.
Refusant de remplir la mission que lui a fixée le politique, l’institution scolaire faillit ! Nous pouvons affirmer qu’il s’agit bien d’une défaillance sociale. Celle-ci touche des dizaines de milliers d’élèves chaque année.
[1] Dans ce cas-ci, la Communauté française de Belgique.
3.3.2. « Violence, atteinte ou brutalité mentale »
La violence à l’Ecole fait souvent les gros titres de la presse. Chaque fois qu’un enseignant est agressé il n’est pas – à juste titre – un média qui reste silencieux. La violence, sous quelque forme que ce soit, et à l’égard de qui que ce soit est totalement inacceptable. A fortiori, lorsqu’il s’agit d’un professionnel de la fonction publique (enseignement, justice, police, services d’urgence, …). Il faut donc la combattre par tous les moyens possibles.
Par contre, la violence DE l’Ecole fait rarement les gros titres des journaux. Pourtant, elle est très souvent à l’origine de la première. Elle est sournoise parce qu’elle ne sort pas des classes ou des écoles. Et l’élève est culpabilisé : l’échec est, forcément, de leur faute. Il est étonnant que personne ne se demande pourquoi certains élèves deviennent soudain incontrôlables, violents envers leurs éducateurs ou suicidaires ?
A chaque agression, on met en avant le milieu social, on extrapole des raisons familiales, des problèmes psychologiques[1]. S’il est évident que de nombreux enfants vivent des situations de vie difficiles, l’origine scolaire des violences n’est jamais mise en avant. Et pourtant… qui peut prétendre qu’elle n’en est pas, parfois… voire souvent, la cause première ?
L’Ecole est devenue, dans nos sociétés, la plus importante source de reconnaissance pour les jeunes, sinon la seule. Priver un enfant de réussite à l’école, c’est donc le priver de ce pain psychologique qu’est pour lui, bien plus encore que pour l’adulte, la reconnaissance des autres[2]. Qu’attendre d’un enfant, d’un jeune qui est privé de ce qui est socialement le plus important pour lui ? Il est normal qu’il se révolte. S’en étonner est manquer de la plus élémentaire psychologie. Et plus la douleur sera profonde, plus la réaction sera incontrôlable. Elle pourra aller de la violence extrême contre les autres à la violence extrême contre soi-même. Combien d’enfants se sont-ils suicidés à la suite de cette fameuse goutte de trop qu’est la profonde souffrance scolaire ?
En orientant précocement[3] des élèves qui pouvaient réussir[4] si l’institution avait daigné mettre en place les dispositifs de remédiation adéquats, l’école empêche l’élève de faire un véritable choix de vie. Elle décide pour lui de l’orientation qu’aura, non seulement sa propre vie, mais également celle de ces enfants[5]. Il faut savoir que plus de 90 pourcents des élèves orientés ne voulaient pas du choix qui avait été fait pour eux (ou avec eux, mais dont ils n’avaient pas de véritable choix) ! Il s’agit d’une violence grave à l’égard de ces jeunes, mais également à l’égard de leurs générations futures.
Le redoublement (et l’orientation précoce) sont institutionnalisés. Ils auraient pour « vocation » de remédier aux difficultés d’apprentissage des élèves. Il n’en est rien. De multiples études l’ont amplement démontré, et ce, depuis des dizaines d’année[6]s. Prétendre le contraire aujourd’hui revient à affirmer que c’est le Soleil qui tourne autour de la Terre. Il s’agit de croyances d’un autre âge. Le redoublement, au mieux, ne sert à rien ; au pire annonce d’autres redoublements et contribue à l’abandon scolaire. C’est, aujourd’hui, une vérité scientifique établie et incontestable (lire les annexes) ! Ils induisent chez le jeune qui en est victime, des effets psychologiques graves qui relèvent de la brutalité mentale. Ces souffrances sont bien connues des psychologues et autres services pluridisciplinaires qui oeuvrent dans le domaine des phobies scolaires et des pathologies psychiatriques.
Ce sont principalement (mais pas seulement) les élèves issus des classes sociales les plus fragiles qui sont victimes du redoublement et de l’orientation précoce vers les filières techniques et professionnelles[7]. De ce fait, le redoublement amplifie les inégalités sociales. Le redoublement donne, aux yeux des autres élèves, une image négative de l’élève qui en est victime. Ceci est d’une grande violence sociale et relève de la cruauté mentale en refusant à ces jeunes tout espoir de pouvoir sortir de leur condition sociale.
Enfin, en induisant chez les autres élèves – ceux qui ont la chance d’être en réussite[8] – une image négative de l’élève victime de l’échec scolaire. On le sait, les enfants ont un réel besoin de reconnaissance[9] de leurs parents, leurs enseignants ET LEURS CONDISCIPLES. Les en priver relève de brutalité mentale.
[3] Avant la cinquième secondaire, soit avant l’âge de 17 ans.
[4] Tous les élèves sont capables de réussir (Voir annexe 8). Contrairement aux affirmations répandues, c’est l’école qui fait rater les élèves, et non ceux-ci qui sont responsables de leur(s) échec(s).
[5] Les enfants de cadres et d’enseignants sont 80 % à faire des études supérieures, contre 30 % seulement pour les familles d’ouvriers. Décider du futur niveau social d’un élève hypothèque indubitablement l’avenir de ses futurs enfants.
Le redoublement ne sert à rien[1]. Toutes les études démontrent que le redoublement est inefficace. Au mieux permet-il aux élèves d’évoluer comme ils auraient évolués sans redoubler, mais avec une année de plus. Peut-on, dès lors accepter, que l’Ecole contraignent les enfants à perdre une année de leur vie, et ce pour rien ? En faisant ce choix, l’institution scolaire est responsable de négligence. Elle ne met pas en place les pratiques pédagogiques indispensables à la réussite de ceux qui ont besoin de plus de temps, de plus d’explications, de plus de confiance : remédiation immédiate (durant l’heure de cours…. et non trois jours plus tard sur le temps de midi), différenciation (permettre à chaque enfant d’apprendre à son rythme), attention positive, refus du postulat d’éducabilité, ….
L’abandon scolaire[2] est, souvent, la conséquence de l’échec scolaire[3]. Jeter les jeunes sur la rue est la meilleure manière de favoriser la délinquance.
Enfin, en ne se préoccupant que de leurs seuls intérêt[4], les établissements scolaires délaissent leur mission qui est d’éduquer TOUS les jeunes. En sélectionnant et orientant précocement dans le seul objectif de préserver leur réputation, les écoles méprisent les droits des jeunes et particulièrement ceux des plus fragiles, tant socialement que psychologiquement. C’est plus que de la négligence. Il s’agit d’une réelle volonté de nuire à ces jeunes et à leur avenir, au nom d’une idéologie d’un autre âge, celle qui fait la sélection de classes !
« Ane bâté, nul, idiot, incapable…. », autant de qualificatifs qui désignent l’élève en échec, tant aux yeux de ses condisciples, que des enseignants, voire encore de leurs parents. Quel drame pour ces jeunes qui n’ont d’autre particularité que d’avoir besoin de plus de temps pour apprendre ; temps que souvent refuse de leur donner l’institution scolaire. Pourtant, on sait que cela permettrait à tous ces élèves de réussir mais également aux autres élèves d’encore progresser un peu plus.
Faire passer, aux yeux de tout leur environnement social, des enfants pour des incapables relève de mauvais traitements. Personne n’est incapable. Les recherches en sciences de l’éducation l’ont amplement démontré [1]. Le redoublement, l’orientation précoce stigmatisent ces jeunes aux yeux de leur entourage et de leur réseau social.
3.3.5. « Entrave importante à l’épanouissement »
Empêcher un jeune de faire un véritable choix de vie en l’orientant trop tôt[2] est une véritable entrave à son épanouissement personnel futur. L’orienter vers une filière dont il ne veut pas, ou qui soit un choix par défaut est contraire à son intérêt.
Qui peut prétendre qu’une pratique institutionnalisée (ou individuelle) qui encourage l’abandon scolaire et jette des jeunes dans les rues, générant de la délinquance[3], favoriserait cet épanouissement personnel ???
On le sait, l’échec scolaire vise principalement (mais pas seulement) les élèves issus des classes sociales les plus fragiles[4]. En amplifiant les inégalités sociales, l’Ecole permet-elle à ces jeunes d’atteindre un véritable épanouissement ?
Nous avons parlé de l’image que l’échec scolaire véhicule auprès des autres élèves[5], tout comme le manque d’intérêt des établissements qui utilisent l’échec scolaire à leur seul profit[6]. Autant d’entraves importantes à l’épanouissement de tous ces jeunes.
[2] Il est important de laisser mûrir un jeune afin qu’il puisse faire un véritable choix de vie, non restrictif. Avant 16 ans, c’est beaucoup trop tôt.
Etant donné que nous sommes dans le champ du Droit, ne peuvent être incriminés ceux qui bénéficient de ce droit. En aucun cas, les bénéficiaires d’un droit n’ont à le mériter. Dès lors, chaque enfant a droit à la réussite scolaire [1] et il ne peut lui être reproché son échec à l’école.
Le fantasme « on ne peut pas faire réussir ceux qui ne travaillent pas » est faux. Tous les élèves travaillent lorsqu’ils sont en situation de réussite, dans un cadre pédagogique motivant et dynamique. Ce qui décourage les élèves, ce sont les cours frontaux et la sélection continue. C’est un cocktail mortel.
Les écoles doivent donc mettre en place et former leurs enseignants aux pédagogies actives qui, seules, stimulent et motivent les élèves, et visent à la réussite de tous, et donc, au respect du Droit de tous !
4.2. Les familles ?
L’Ecole n’a pas à se reposer sur les familles des élèves. Celles-ci ne sont pas sensées connaître les modes de fonctionnement de l’Ecole pas plus qu’elles ne doivent être formées aux matières et aux pédagogies afin de jouer à l’enseignant après les heures d’école.
En outre, l’école ne peut attendre d’elles qu’elles investissent financièrement dans la remédiation externe (cours particuliers, stages de vacances, …)[2]. Le seul lieu d’apprentissage étant la classe, les parents n’ont pas à pallier au rôle de l’Etat, donc à la mission de l’Ecole.
Cependant, certaines (nous avons bien dit « certaines ») familles socialement favorisées mettent la pression sur le système pour qu’il continue à discriminer les élèves de milieux socialement différents. Elles cherchent l’ « entre-soi », décrétant sans oser le dire que les écoles élitistes sont « leurs » écoles et que les autres ne doivent pas y avoir leur place, en tout cas pas jusqu’au bout, c’est à dire « empêchez-les d’arriver à l’université avec NOS enfants ». Pour ces familles de tendance libérale (voire néolibérale ou plus à droite encore) l’école doit rester le lieu de sélection qui formera le plus faiblement possible les serviteurs de leurs enfants, demain : postièr·e·s, mécanicien·ne·s, jardinièr·e·s, boulangèr·e·s, caissièr·e·s, … institutrices/teurs, … L’école ne peut pas être un ascenseur social, au risque de voir les enfants de « barakis » prendre futurs les emplois bien payés, de leur progéniture.
4.3. Les enseignant·e·s ou les « profs » ?
Nous postulons que l’immense majorité des enseignant·e·s ne pratiquent pas l’échec scolaire et donc, n’ont pas ou prou d’élèves en échec dans leurs classes. Il est des écoles qui sont de vrais îlots de paix (essentiellement en maternelle et en primaire, mais il existe quelques écoles secondaires qui ne pratiquent pas la sélection et visent la réussite de tou·te·s [3]) qui fleurent bon la pédagogie et où tout est mis en place pour faire accéder tous les élèves à la réussite.
Nous croyons dans les enseignant·e·s. Ils sont les secondes victimes de l’échec scolaire [4]. En effet, nombre d’entre eux-elles sont confronté·e·s à des élèves cassé·e·s par l’échec scolaire en d’autres lieux, et qui le leur font « payer » à eux. Ils subissent l’échec et l’orientation précoce décidés ailleurs, dans les écoles élitistes (voir point 4.4.). L’échec scolaire broie prioritairement les élèves mais n’oublie pas un nombre important d’adultes dont la vocation était la plus noble qui soit : éduquer !
Nous faisons cependant une différence entre « enseignant·e·s » et « profs ». Les premier·e·s se sont formé·e·s en pédagogie, sont expert·e·s en didactique et savent comment transmettre les savoirs à tous les élèves, quelles que soient les difficultés d’apprentissages rencontrées. Ils-elles pratiquent la coopération entre élèves, mettent en place une pédagogie active, favorisent l’inclusion, adaptent leurs pratiques aux élèves et visent la réussite (= l’acquisition des savoirs) de tou·te·s. Les « profs », eux, ne prennent pas la peine de se former (encore moins de s’informer), donnent leurs cours du haut de l’estrade (ils ont un siècle de retard sur les grands pédagogues comme Freinet, Montessori, Piaget, Freire, Illich, Oury, Vygotsky, Wallon, Korczack, Decroly, … ), ils-elles sont pédagogiquement incompétent·e·s (ne mettent au point aucune pédagogie active) et pratiquent la sélection des élèves par la compétition, sans se soucier des dégâts immenses qu’ils-elles commettent en brisant l’avenir des élèves qui ont le plus de difficultés. Ce sont des « donneurs et donneuses de leçon », sans plus.
Nous croyons dans les enseignants car eux-elles seul·e·s seront capables de changer l’Ecole. La plupart d’entre elles-eux exècrent l’échec scolaire et se battent au jour le jour pour la réussite de tou·te·s. Ce sont des professionnel·le·s remarquables qui visent la réussite de tous.
Malheureusement, pour qu’un système dysfonctionne, il lui faut des collaborateurs zélés : les « profs ». Il s’agit d’une minorité de professionnel·le·s – probablement toujours les mêmes – qui portent haut l’étendard de la sélection [5]. Ceux-ci et celles-ci discréditent l’ensemble de la profession et sont responsables, à la fois des échecs des élèves, mais également de la souffrance de leurs collègues.
4.4. Les pouvoirs Organisateurs [6] et les réseaux ?
Cherchons à qui profite le crime…
Ce sont les P.O. qui ont mission de faire réussir TOUS les élèves. Ils reçoivent les subsides de la Communauté française (provenant des impôts de TOUTES les familles) et doivent donc atteindre les objectifs fixés par le Décret Mission (article 6), à savoir :
1° promouvoir la confiance en soi et le développement de la personne de chacun des élèves;
2° amener tous les élèves à s’approprier des savoirs et à acquérir des compétences qui les rendent aptes à apprendre toute leur vie et à prendre une place active dans la vie économique, sociale et culturelle;
3° préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d’une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures;
4° assurer à tous les élèves des chances égales d’émancipation sociale.
Ils doivent donc – et l’article 6 du Décret Missions est clair – faire réussir TOUS les élèves.
Pourtant, nous connaissons tous les écoles « élitistes » (dites aussi écoles traditionnelles – càd sans pédagogie et sans états d’âme). Le premier Décret « inscriptions » a eu le mérite de les dévoiler : ce sont celles où des parents ont fait la file afin d’être les premiers à y inscrire leurs enfants.
L’enseignement en Belgique est régi par un système de quasi-marché scolaire. Les établissements scolaires font leurs « courses » au sein de la société, décidant quel public ils souhaitent voir accéder à leur école. Les écoles élitistes ont fait le choix de viser le public le plus favorisé. La raison en est simple : les enfants de ces familles sont confrontés à des découvertes, des apprentissages depuis le plus jeune âge. Ils possèdent la langue de l’enseignement et n’attendent qu’à pouvoir un jour aller à l’école. Leurs parents les ont naturellement préparés à apprendre, leur en ont donné l’envie depuis le plus jeune âge. En somme, ils leur ont inculqués les codes de l’école et pourront les aider, les soutenir durant toute leur scolarité, même sur le plan financier. L’école ne doit donc plus remplir sa mission éducative, les parents ayant la capacité d’y pallier. Il lui reste à pratiquer la sélection, éliminant les plus faibles (de préférence ceux issus de familles plus modestes) au nom d’une idéologie d’un autre âge.
Ces établissements scolaires (et donc ces Pouvoirs Organisateurs) ont comme seul objectif de se positionner par rapport aux établissements environnants. Être le meilleur (donc celui qui casse le plus d’élèves) est la place la plus prisée. Cela nécessite d’entrer en compétition avec les écoles voisines. Pour ce faire, ils instrumentent leurs enseignants et les force à pratiquer la sélection (un « bon » enseignant étant un enseignant qui a beaucoup d’échecs).
Ces écoles sont « pyramidales ». Autrement dit leur base est plus large que leur sommet. On peut compter jusqu’à trois fois plus de classes de première secondaire que de classes de terminale. Autrement dit, chaque étage (chaque année) est plus étroit que le précédent. Dès lors – et c’est la logique des cases – il y a chaque année moins de places à attribuer pour les élèves. En résumé, à chaque fin d’année, et quelles que soient les compétences acquises par les élèves, il y a un nombre précis d’élèves à éliminer. C’est la mission qu’imposent ces P.O. à leur équipe pédagogique.
Ce n’est, évidemment possible, que parce que des enseignants-collaborateurs acceptent de renier leur mission en jouant le jeu.
Quant aux fédérations de P.O. (les réseaux), certains roulent pour leurs écoles élitistes. Cela s’est vu spécifiquement lors des Décrets inscriptions où certains P.O. ont fait de la résistance.
Les P.O. sont les premiers bénéficiaires de l’échec scolaire. Ils l’instrumentalisent à leur seul profit. Ils en sont donc les premiers et principaux responsables de l’échec scolaire et de la maltraitance que celui-ci génère chez les jeunes et dans les familles.
4.5. Le politique ?
L’Ecole est l’institution mise en place par l’Etat (dans ce cas-ci, la Communauté française) pour remplir ses obligations en matière d’éducation au sens large.
On l’a vu, l’éducation est un droit qui doit bénéficier à chaque enfant sur base de l’égalité des chances (elle doit bénéficier à chaque enfant d’égale manière en terme d’égalité finale des résultats). Dès lors, la Communauté française a le devoir de donner à tous ces enfants cette égalité finale des résultats (soit à 18 ans [7]!!!).
Le phénomène de l’échec scolaire est connu depuis de nombreuses années. Les solutions [8] sont également connues depuis très longtemps. Pourtant, bien peu de choses changent. Plutôt que de démonter et reconstruire l’Ecole sur des bases nouvelles, ce sont des décrets cosmétiques qui y sont apportés. Il est évident que sans une révolution copernicienne, notre Ecole continuera à maltraiter plus de 100 000 élèves chaque année !
La peur d’agir, d’affronter les Pouvoirs organisateurs (pour rappel, la C.F. en est un), les enseignants qui sont une masse d’électeurs importante [9], ainsi que les familles socio-culturellement favorisées qui sont les grandes bénéficiaires du système, fait que le monde politique a peur de changer le système en profondeur. Et les enfants, malheureusement pour eux, ne votent pas.
Le monde politique préfère donc fermer les yeux sur une maltraitance institutionnelle gravement répandue – et donc s’en fait complice – plutôt que de se positionner clairement sur le système de société qu’elle veut : une société équitable et solidaire ou une société élitiste et discriminative.
Les femmes et les hommes politiques n’étant pas, dans leur grande majorité, issus de milieux socialement moins favorisés, ils ne se sentent que peu concernés par la misère des enfants et des familles souffrant de l’échec scolaire.
Etonnement, ces politiques ferment les yeux et accréditent un système dysfonctionnant de sélection et d’orientations basées sur la discrimination. Bref, sur un système fasciste. Pourtant, ce sont des partis (donc des femmes et des hommes) démocratiques. Cherchez l’erreur !
4.6. Les médias ?
Quand, en 2008, nous interpellions la RTBF[10] afin de demander un travail de mise en débat des enjeux éducatifs, c’est une fin de non recevoir qui nous fut renvoyée. La RTBF ne se différencie pas, en cela, des autres médias[11].
Les médias, dans leur ensemble, abordent régulièrement les problèmes de l’Ecole, mais toujours en rapport avec l’actualité ou le fait divers. On n’y trouve que (trop) peu de débats de fond. Pourtant, c’est leur rôle – et il est essentiel – de lancer les débats sociétaux, de porter des valeurs citoyennes, d’informer les citoyens et de leur apporter les éléments d’analyse indispensable. La violence à l’école est régulièrement traitée et à juste titre, mais la violence de l’Ecole, d’un système qui maltraite 100 000 enfants chaque année, n’est quasiment jamais abordée.
La lutte contre l’échec scolaire passera inévitablement par un grand débat au sein de notre société, qui ne peut être porté que par l’ensemble des médias démocratiques.
Malheureusement, on en est encore loin de la coupe aux lèvres.
4.7. L’associatif ?
L’échec scolaire est abordé de deux manières radicalement différentes selon que l’on s’adresse au monde de l’éducation permanente (et ses satellites) ou aux associations à vocation plus… « économique ».
Pour le premier, l’échec scolaire est un combat à porter pour la réalisation d’une société plus équitable, plus fraternelle, plus citoyenne. La plateforme de lutte contre l’échec scolaire (01/09/2003 à …), que coordonne la Ligue des Droits de l’Enfant [12], rassemble une quinzaine d’associations, les syndicats d’enseignants, des chercheurs en sciences de l’éducation et s’implique réellement contre l’échec scolaire par des actions citoyennes visant tous les publics. Cette plateforme dont la vocation est un changement d’Ecole (et donc un vrai projet visant une société équitable) est très peu soutenue par les médias et le politique.
L’échec scolaire est très rentable ! Dans son sillage sévissent nombre d’associations qui lorgnent sur la manne financière des familles des enfants en échec. Que ce soit au niveau des cours particuliers (coach) ou des stages de vacances (stages de langue, de remise à niveau, d’échec à l’échec, …), on trouve tout et n’importe quoi dans ce créneau. Prétendant être plus fiable que les enseignants, ces associations, par leur publicité, accréditent plus encore l’idée que l’échec est « normal » et inévitable.
[1] La réussite scolaire, selon nous, n’est nullement affaire de points. Il s’agit d’amener tous les élèves à une égalité finale des résultats (appelée aussi égalité des acquis). L’égalité finale des résultats dans l’absolu est évidemment impossible et donc peu opérationnelle. L’égalité des résultats doit se concevoir comme l’égale accession à un niveau commun minimal et est alors habituellement appelée égalité des acquis. C’est la 2e conception présente dans le décret Missions et dans le décret École de la réussite. Il s’agit de permettre à tous les enfants d’une même classe d’âge, indépendamment de leurs caractéristiques de départ, d’atteindre un minimum commun (les socles de compétences par exemple, ou plus ambitieux, les compétences terminales pour tous). Jacques Cornet – Cgé 2003
[2] Les stages de vacances et autres cours particulier sont prohibitifs. Ils coûtent extrêmement cher. Et les résultats obtenus sont très loin de valoir ces prix. En outre, les familles ne sont jamais remboursées en cas d’échec.
[3] Par exemple Pédagogie Nomade à Limerlée, mais aussi toutes les écoles à pédagogie institutionnelle ou à pédagogie active.
[4] Quatre enseignant sur neuf abandonnent l’Ecole avant la fin de leur septième année d’enseignement.
[5] Pour rappel, ce sont les idéologies d’extrême droite qui ont fait la part belle à la sélection des individus au sein de leurs régimes fascistes, allant – dans les cas extrêmes – jusqu’à l’élimination physique des « plus faibles ». Dans une société démocratique, les citoyens sont égaux en dignité et en droits. Ils bénéficient donc des mêmes droits et ce, sur base de l’égalité des chances.
[6] Le P.O. (Pouvoir Organisateur) est le Conseil d’administration de l’école. Il en est le « patron » et l’employeur des enseignants. C’est lui qui engage les enseignants, qui décide du projet pédagogique et du projet éducatif de l’école et qui la gère sur le plan financier. Le projet pédagogique définit les visées pédagogiques et les choix méthodologiques qui permettent à un pouvoir organisateur (P.O.) ou un organe de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs de mettre en oeuvre son projet éducatif (article 64 du décret Missions). Le projet éducatif, quant à lui, définit l’ensemble des valeurs, des choix de société et des références à partir desquels un pouvoir organisateur (P.O.) ou un organe de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs définit ses objectifs éducatifs (article 63 du décret Missions).
[7] Art 1 de la CIDE : Au sens de la Convention relative aux Droits de l’Enfant, un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable.
[8] Lire le Mémorandum de la plateforme de lutte contre l’échec scolaire
[9] Environ 100 000 électeurs potentiels. Autant que d’élèves maltraités…
[11] Exception faite de l’émission de Martine Cornil « Tout autre chose » RTBF – La Première – qui, une fois par mois, aborde les problèmes de l’Education avec Jacques Liesenborghs.
[12] L’Education, on l’a vu, est un droit de l’Enfant.
Chaque année, l’institution scolaire maltraite plus de 100 000 élèves
60 000 enfants sont poussés au redoublement ;
17 000 élèves subissent une orientation contrainte ;
20 000 jeunes décrochent et quittent l’école sans diplômes ;
2 600 à 3000 élèves sont exclus ou subissent un refus d’inscription ;
Un millier d’enfants socialement défavorisés sont orientés vers l’enseignement spécialisé.
L’éducation est un Droit pour tous les enfants et doit s’exercer sur base de l’égalité des chances[1]. A ce titre, chaque enfant a le droit d’accéder aux mêmes savoirs que les autres élèves et à recevoir une formation citoyenne de la même qualité sans échec, redoublement ou orientation précoce (au moins avant 16 ans). L’Ecole a pour mission d’assurer l’accès à ce droit fondamental pour TOUS les enfants, quelles que soient leurs origines sociales ou économique, leurs difficultés d’apprentissage, leurs qualités scolaires, etc.
L’échec scolaire doit être considéré comme un mauvais traitement. Il engendre des effets psychologiques graves qui relèvent de la brutalité mentale[2]. En reproduisant, voire amplifiant les inégalités sociales, il est une entrave importante à l’épanouissement personnel[3] des jeunes et, en ne mettant pas en place les pratiques pédagogiques indispensables à la réussite de tous, les écoles sont responsables de négligence.
Il a été largement démontré que TOUS les élèves sont capables d’apprendre[4]. Mais toutes les écoles ne sont pas capables d’enseigner à tous les élèves. Choisir d’enseigner de manière frontale, en mettant les élèves en compétition et pratiquant la sélection, est un choix politique et idéologique que font ces « fabriques d’échecs ». Il s’agit de maintenir un système social qui ne profite qu’aux classes sociales les plus nanties.
Il est tout-à-fait possible d’atteinte la « réussite » de tous[5] les élèves. Il faut, pour cela, changer de paradigme et passer aux pédagogies actives qui favorisent la coopération plutôt que la compétition. Dans un système scolaire efficace, càd à pédagogie active, l’échec scolaire est rare.
[1] Article 28 de la Convention internationale des Droits de l’Enfant traitant de l’éducation.
[2]Est maltraitance « Toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalité physique ou mentale, d’abandon, de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle. » Article 19 de la Convention internationale des Droits de l’Enfant
[3]Est maltraitant tout comportement et/ou attitude qui ne tient pas compte de la satisfaction des besoins d’un enfant et constitue par le fait même une entrave importante à son épanouissementL’aide aux enfants victimes de maltraitance – guide à l’usage des intervenants auprès des enfants et des adolescents – Communauté française 2002. http://www.yapaka.be/files/ta_guide.pdf
[4] Piaget, Bloom, les systèmes à tronc commun ont démontré que tous les élèves étaient capables d’apprendre.
[5] Par le terme de « réussite », il ne faut pas entendre « avoir les points », mais « avoir acquis tous les savoirs ».
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