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INBEV : Lettre ouverte à une mère de deux enfants (23 mars 2006)

Madame Sagaert, lors de votre conférence de presse de ce mercredi dernier, vous avez tenu à préciser d’entrée de jeu que vous étiez d’abord une maman, avant d’être la directrice d’Inbev (ex Interbrew) pour la Belgique et le Luxembourg, groupe mégalo-mondial de production de bière, spécialité on ne peut plus belge s’il en est.

Au vu des énormes bénéfices réalisés ces derniers mois, Inbew brasseur international à fortes racines belges (sic) a décidé de se séparer de 300 emplois en Belgique. Objectif : maximaliser plus encore des bénéfices déjà fabuleux. Cet illogisme économique que seuls des investisseurs sans scrupules peuvent comprendre, nous les citoyens du monde, elle nous paraît profondément inique. Réduire le nombre d’emplois accessibles dans une région et paupériser sa population est monstrueux. En outre, restructurer sous le fallacieux prétexte de préserver 90% d’emplois, ou délocaliser la production d’un site vers un autre plus rentable (ex. Hoegaarden), voire un pays où les travailleurs peuvent être plus exploités et beaucoup moins bien payés, est humainement intolérable. Nous ne pouvons que nous en révolter. Apparemment, c’est loin d’être votre cas de mère.

Vous êtes d’abord et avant tout une mère de deux enfants, précisez-vous en introduction de votre conférence de presse. Fort bien ! Mais saviez-vous seulement que les 300 travailleurs à qui vous allez faire perdre leurs emplois sont aussi des mères et des pères. Le souci que vous avez de donner le maximum à vos enfants, sachez qu’ils l’ont aussi. Et s’ils pleurent aujourd’hui, ce n’est pas tant sur leur sort que sur celui de leurs enfants.

Contrairement à vos enfants qui gardent une chance appréciable de réussir dans la vie grâce à votre salaire prohibitif de cadre supérieur, les enfants de vos ex-collaborateurs peuvent probablement faire une croix sur des études supérieures par trop coûteuses. Et encore, à condition d’y arriver !!! Car leurs chances de sortir de l’enseignement secondaire avec un diplôme viennent de régresser fortement, grâce à vous. Il est prouvé que l’école amplifie les inégalités sociales et que l’accès à l’enseignement est financièrement impossible pour des familles fragilisées. Et là, en matière de fragilisation, vous avez fait fort !

Finis, les Saint-Nicolas, les habits neufs un peu trop chers, les classes de plein air ou les voyages de fin d’études, les camps Scouts et Patros. Adieu les vacances en Ardèche ou à la mer du Nord en juillet. En « lourdant » injustement leurs parents, ce sont les rêves et l’avenir de tous leurs enfants que vous avez tués !!!

Mais vous êtes mère et vous tenez à le rappeler. Une mère qui se soucie de ses enfants. Grâce à votre prestigieux (?) emploi, vos enfants ne cesseront de porter les beaux habits de la marque Machin qui sont le must dans leur école élitiste et vous leur offrirez, des années encore, des vacances familiales dans des lieux aussi idylliques qu’onéreux, loin de ces pauvres qui dérangent. Et, qui sait, si un jour vous veniez, par un effet de justice divine, à être licenciée à votre tour, vous aurez su, en bonne mère, assurer vos arrières par quelques primes outrageusement élevées dont les travailleurs d’Inbev n’auront pas eu, quant à eux, la chance de bénéficier.

Cette décision de maximalisation des bénéfices sur le dos des travailleurs touche de plein fouet des familles. Des travailleurs ne sont pas seulement des chiffres sur un graphique que l’on déplace ou jette selon les désirs d’engranger plus de bénéfices encore. Il s’agit avant tout d’êtres humains, de familles, d’enfants. Pour ces derniers – et c’est mon engagement citoyen de me soucier de leur sort – c’est tout leur avenir qui se voit compromis. En les paupérisant, vous avez jeté leurs destins aux orties. Que vous importe si, pour pouvoir acquérir, à leur tour, la veste Machin, ils tombent dans la petite délinquance ou, plus simplement, s’ils s’enfoncent dans la drogue pour oublier ?

Enfin, cela fait 300 emplois en moins pour les travailleurs de demain. 300 jeunes de plus qui connaîtront le chômage. Priver une région d’emplois pour le seul intérêt de quelques nantis est criminel. Aujourd’hui, plus que jamais sans doute dans l’histoire de l’humanité, l’argent et les moyens financiers énormes de groupes internationaux permettent d’acheter des êtres humains et de les rejeter dans le caniveau, du jour au lendemain, selon le bon vouloir du prince.

Il est temps de mettre un nom sur ces pratiques, toutes légales qu’elles soient. Il s’agit clairement de crimes économiques commis contre des être humains. Voler les pauvres pour donner aux riches est le principe de base de l’économie mondialiste. Crime légal, protégé par des lois faites par un monde politique depuis longtemps aux ordres du monde économique. Il est temps que l’on criminalise les décisions économiques qui touchent les travailleurs dans leurs droits économiques et sociaux et les paupérisent dans l’unique intérêt d’investisseurs sur-nantis ou de petits actionnaires qui se soucient très peu du côté éthique des placements que l’on fait en leur nom.

Qui pardonne au crime devient complice, disait Voltaire. Que les décisions proviennent d’actionnaires mégalomanes ou soient vôtres, ne change en rien vos responsabilités dans la perte d’avenir de ces enfants. Etre mère et l’assumer est une chose, pouvoir regarder ses enfants dans les yeux en est une autre. Pour cela, il faut avoir l’âme propre. Je vous laisse face à votre conscience. Moi, toute ma pensée va aux enfants des travailleurs.

Jean-Pierre Coenen

Président de la Ligue des Droits de l’Enfant

BHV au frigo ?  Et si on enterrait le communautaire à jamais ?

BHV au frigo ? Et si on enterrait le communautaire à jamais ?

Depuis des décennies, les problèmes communautaires empoisonnent la politique et la vie sociale. Ils ont poussé des gens que tout devait rassembler à ne plus voir en l’autre qu’un étranger, un concurrent, un ennemi, celui qui veut le mal. Notre fédéralisme est bâti sur le rejet de l’autre. Il doit, au contraire, devenir source de rapprochement.

Pourquoi détruire toujours un peu plus ce qui nous permet de vivre ensemble. Il est temps de choisir une autre route. Passons de la coexistence difficile à plus de ‘vivre ensemble’. La gestion d’un pays, d’une communauté n’a que faire de la haine et de la discrimination. Le politique se doit de travailler dans l’intérêt de la population et non à ses intérêts propres, électoraux et avides de pouvoirs supplémentaires.

Plutôt que de restreindre les droits des citoyens, allons vers plus de droits pour les gens. Chacun a le droit de vivre sa culture et de parler sa langue, où qu’il vive, dans le respect de la langue et de la culture de l’autre. Seul ce respect mutuel peut amener aux rencontres, au rapprochement et, finalement, au ‘vivre ensemble’

Des francophones vivent en Flandre et des flamands vivent en Wallonie. La frontière linguistique, furoncle de la démocratie belge, les empêche de vivre pleinement leur culture et de parler leur langue dans leurs relations avec l’administration, avec la Justice et de voter pour des partis représentant leurs sensibilités. Ce sont des dénis de droits. Jamais une frontière ne supprimera définitivement des droits. Elle peut les réprimer et les interdire mais ils sont, à jamais, universels.

Nous appelons le monde politique à entrer enfin dans un XXIe siècle des Droits de L’Homme. Les Citoyens belges n’ont que faire d’hommes et de femmes ‘politiques’ qui marchent sur la voie du séparatisme. Nous avons besoin de femmes et d’hommes ‘d’Etat’ qui se préoccupent exclusivement de l’intérêt de nos concitoyens ! Les défis à relever sont énormes pour assurer, aux enfants d’aujourd’hui, un avenir radieux dans une société tolérante pour tous.

Nous rêvons d’un guichet bilingue dans chaque maison communale de notre pays, dans chaque administration. Nous rêvons d’écoles flamandes en Wallonie et francophones en Flandre, ouvertes à la culture de l’autre et encourageant à sa découverte, à des centres culturels bilingues de Virton à Westende, à des panneaux indicateurs dans nos deux principales langues nationales, à des traducteurs dans chaque tribunal, à des émissions communes de nos deux grandes chaines communautaires, à mille et mille choses qui rapprochent…

Nous appelons à un projet de société nouveau. Un projet positif, un projet d’avenir. Dans l’intérêt des enfants de ce pays.

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