Nous souhaitons revenir sur une problématique qui est trop marginalement répercutée dans la presse et sur les réseaux sociaux, mais que nous pensons important de relancer largement – si possible – dans le domaine public. Il n’y a que de cette manière que nous parviendrons à mettre fin à la maltraitance institutionnelle dont sont victimes certains enfants porteurs de handicaps physiques et/ou mentaux en Région wallonne et à Bruxelles.

Actuellement, les enfants porteurs de handicaps sont scolarisés au sein d’établissements spécialisés. Ces établissements, que ce soit au niveau primaire ou secondaire, ne sont pas légion et, souvent, ces enfants doivent faire des dizaines de kilomètres pour intégrer l’école la plus proche de leur domicile.

Afin de garantir l’obligation scolaire, les Régions organisent un système de bus gratuits qui conduisent les enfants depuis leurs domiciles vers leurs établissements scolaires et les en ramènent sitôt les cours terminés. Pour ce faire, la Région wallonne met en place, quotidiennement, entre 700 et 800 circuits différents (pour l’enseignement spécialisé et l’enseignement ordinaire) qui sont effectués, la plupart du temps, par des transporteurs indépendants.

Unia, la Ligue des Familles et le Délégué général aux Droits de l’enfant organisaient un après-midi d’échanges consacrés au transport scolaire des enfants de l’enseignement spécialisé. Leurs constats rejoignaient ceux que la Ligue des Droits de l’Enfant dressait déjà en 2004. Quatorze ans après avoir dénoncé la discrimination que vivaient les enfants handicapés – donc les plus vulnérables – contraints à fréquenter une école loin de leur domicile en passant des heures dans un bus scolaire, rien n’avait fondamentalement changé ! Il s’agit encore et toujours d’une maltraitance institutionnelle gravissime.

Si pour la majorité de ces enfants (71%) ces trajets en bus sont parfaitement vivables, pour un certain nombre d’entre eux (29%), la durée des déplacements peut aller jusqu’à représenter trois à cinq heures par jour. Autrement dit, certains enfants passent quotidiennement plus de temps dans le car qu’ils n’en ont pour eux, à la maison (hors période de sommeil).

Lorsqu’un enfant est contraint de passer plus de deux heures chaque jour (et jusqu’à six heures), sans bouger, sans pouvoir aller aux toilettes, sans boire ni manger, par tous les temps – en été dans une chaleur étouffante et en hiver dans le froid (lorsque le chauffage du bus est en panne et ne fonctionne que pour le chauffeur), qu’il en perd le sommeil et n’est plus en état de suivre les cours, que son handicap s’en trouve aggravé, etc., nous estimons qu’il s’agit clairement de maltraitance grave. N’oublions pas qu’il s’agit d’enfants ayant un handicap qui les pénalise déjà lourdement.

Les familles attendent – et ce ne serait que justice – que dans la recherche de solutions, l’on donne priorité à l’humain, quelle qu’en soit l’impact budgétaire inévitable. Quant à nous, il nous semble impensable que l’on ne puisse solutionner, le plus rapidement possible, cette maltraitance institutionnelle grave. Cela va faire 21 ans que nous dénonçons cette situation dramatique et rien n’a encore évolué. Est-ce parce que « ce ne sont que » des enfants handicapés ? La société accepterait-elle longtemps que l’on traite ainsi les élèves favorisés de nos écoles élitistes ? Il est temps que l’on considère, enfin, l’enfant handicapé comme un citoyen à part entière.

La vie à bord d’un bus

La vie à bord d’un bus se résume à… pas de vie du tout. Tout enseignant qui est parti une fois au moins en voyage scolaire connaît les règles de vie dans un bus : on ne peut pas se lever, il faut s’attacher, on ne peut ni boire ni manger, ne pas faire de bruit qui pourrait déranger le/la conducteur/trice et l’accès aux toilettes est interdit… car il n’y a pas de toilettes dans la plupart des bus scolaires. Quant à s’occuper, ce n’est pas un problème : les enfants peuvent lire et écouter de la musique. Mais les enfants de maternelle comme ceux qui ont une déficience intellectuelle ne savent ni lire, ni utiliser un GSM. Ils ont juste le droit de s’embêter.

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