L’école réellement inclusive est également motivée par la lutte contre toutes les discriminations à l’école.

Si l’Ecole inclusive accueille tou.te.s les élèves, elle doit notamment veiller à ce que chaque élève y soit accueilli.e sans aucune discrimination, quel.le que soit son genre ou son orientation sexuelle. Même si en 1997 on ne parlait pas encore d’Ecole inclusive, la lutte contre les discriminations basées sur le genre est la raison pour laquelle le Décret Missions a imposé l’Evras à toutes les écoles fondamentales et secondaires.

Le même Décret Missions, en son article 6[1], précise que le rôle de l’Ecole est, notamment, de :

3° préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d’une société démocratique, solidaire, pluraliste, respectueuse de l’environnement et ouverte aux autres cultures ;

4° assurer à tous les élèves des chances égales d’émancipation sociale.

Ces deux missions ne peuvent être réalisées que par des citoyen.ne.s qui ont pu se construire dans un lieu d’apprentissages tolérant, ouvert et respectueux des sexualités. Des élèves qui ont vécu dans un milieu respectueux des genres, qui sont capables d’avoir des attitudes respectueuses de l’autre face aux aspects de la sexualité et des relations amoureuses. Ainsi, ils auront aussi appris à vivre l’égalité entre partenaires, à refuser un jour de subir un mariage forcé, à refuser les mutilations génitales de leurs futurs enfants, filles ET garçons, à lutter contre l’homophobie et la transphobie.

Voilà pourquoi l’EVRAS est indissociable de l’Ecole inclusive. L’aspect « vie relationnelle, affective et sexuelle » se vit au quotidien lorsqu’on est majeur. Nous ne sommes plus au XXe siècle. Aujourd’hui femmes et hommes sont égaux par rapport au Droit et doivent bénéficier des mêmes chances d’émancipation sociale.

Mais c’est loin d’être le cas dans la réalité de la vie de tous les jours. Pensons au mouvement #metoo, mais aussi aux familles dans lesquelles les femmes ne peuvent pas travailler. A ces milieux où les filles ne peuvent pas aller jouer avec leurs amies mais doivent rester à la maison pour aider à la cuisine, au nettoyage, à la garde des petit.e.s frères et soeurs. Où l’éducation qu’elles reçoivent ne vise qu’à en faire de futures bonnes épouses et de bonnes mères. Comme pourraient-elles sortir de ces cercles vicieux si l’Ecole ne leur vient pas en aide, en les éduquant, en leur apprenant qu’elles sont les égales parfaites des hommes ? Que personne ne peut leur imposer des choix de vie qui ne sont pas les leurs, même dans un couple ?

Comment les personnes LGBT peuvent-elles vivre dans une société qui ne leur est pas ouverte ? Où les risques d’agressions sont fréquents et souvent commis par des jeunes qui sortent à peine de l’Ecole ? Preuve qu’ils n’ont rien appris de la vie relationnelle, affective et sexuelle. Ou alors une toute petite fois à gauche ou à droite dans leur cursus, parce l’école – qui a peur d’en parler – a invité une association pour les informer. Une association qui oublie parfois tout l’aspect LGBT.

L’Evras est une mission essentielle de TOU.TE.S les enseignant.e.s. Ce n’est pas parce qu’on est prof de math qu’on n’est pas éducateur. Un.e enseignant.e est d’abord et avant tout une éducatrice, un éducateur. La Convention des Droits de l’Enfant parle de « Droit à l’éducation » et non de Droit à l’école. Et un droit à l’éducation ne peut être appliqué que par des éducateurs et éducatrices, qui sont accessoirement, également professeur.e.s.

Il est important de travailler sur le climat scolaire en créant des espaces de dialogue, dès la maternelle. La pédagogie institutionnelle est un outil précieux si on évacue son aspect psychanalytique. Le Conseil de coopération permet à chacune de s’exprimer et d’apprendre à respecter la parole de l’autre, à débattre sereinement et à co-construire le vivre ensemble.

Il est indispensable de travailler également avec les familles. Le lien école-famille se doit d’être renforcé. Le fait de mettre l’EVRAS dans le projet d’établissement, en précisant bien que tous les élèves seront sensibilisés à cette dernière tout au long de leur scolarité, rassurera de nombreuses familles qui ont difficile à aborder ce sujet avec leurs enfants. Les parents, ayant signé le projet d’établissement, accepteront de fait que l’Evras soit une des priorités de l’école et sont invités à soutenir, en famille, l’éveil de leur.s enfant.s à l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle.

Obligations des écoles en matière d’inclusion

Tant les textes internationaux que nationaux obligent chaque citoyen.ne, entreprise, association, école, etc. à tout mettre en œuvre de manière à ce que les personnes en situation de handicap puissent bénéficier de la plus grande inclusion possible. A commencer par la Constitution belge qui, en son article 22ter affirme que « Chaque personne en situation de handicap a le droit à une pleine inclusion dans la société, y compris à des aménagements raisonnables. »

Décret anti-discrimination de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Depuis 2008, le refus de mettre en place des aménagements raisonnables en faveur d’une personne en situation de handicap constitue une discrimination. Il y a donc obligation, sauf si ces aménagements sont déraisonnables (exemple : placer un ascenseur dans un bâtiment pour permettre à un.e élève d’accéder à un local de cours). Les aménagements raisonnables participent de l’ « intégration » (cfr Décret « Aménagements raisonnables »). Ils doivent répondre aux besoins spécifiques d’un.e élève.

De même, le Décret définit des « Critères protégés » pour laquelle aucun discrimination n’est acceptable : la nationalité, une prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, l’âge, l’orientation sexuelle, la conviction religieuse ou philosophique, un handicap, le sexe et les critères apparentés que sont la grossesse, l’accouchement et la maternité, ou encore le changement de sexe, l’état civil, la naissance, la fortune, la conviction politique, la langue, l’état de santé actuel ou futur, une caractéristique physique ou génétique ou l’origine sociale.

Les établissements scolaires sont donc tenus de respecter ce Décret et de s’abstenir à tous niveaux de discriminer un.e élève sur base d’un des critères ci-dessus. Le refus d’inscription ou de mise en place d’aménagements raisonnables, par exemple, constitue bien une discrimination sur base de l’un de ces critères et est donc bien une ségrégation punissable.

La Convention des Droits des Personnes handicapées.

En ratifiant la Convention internationale des Droits des personnes handicapées en 2009, la Fédération Wallonie-Bruxelles s’est engagée à « adopter toutes mesures appropriées d’ordre législatif, administratif ou autre pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la présente Convention [2]». Et donc, son article 24 oblige les Etats à faire en sorte que le système éducatif pourvoie à l’insertion scolaire à tous les niveaux et offre, tout au long de la vie, des possibilités d’éducation qui visent la participation effective des personnes handicapées à une société libre.

Dès lors la FWB – et toutes les institutions qu’elle subsidie – doit veiller à ce que les personnes handicapées ne soient pas exclues, sur le fondement de leur handicap, du système d’enseignement général et à ce que les enfants handicapés ne soient pas exclus, sur le fondement de leur handicap, de l’enseignement primaire gratuit et obligatoire ou de l’enseignement secondaire et, sur la base de l’égalité avec les autres, avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif, de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire (également inclusif).

Les États Parties veillent à ce que les personnes handicapées puissent avoir accès, sans discrimination et sur la base de l’égalité avec les autres, à l’enseignement tertiaire général, à la formation professionnelle, à l’enseignement pour adultes et à la formation continue. À cette fin, ils veillent à ce que des aménagements raisonnables soient apportés en faveur des personnes handicapées.

L’école doit donc être inclusive pour tous les élèves.

Dans les faits, les écoles visent-elles l’inclusion ?

Si l’on veut se faire une idée de la volonté des écoles de devenir inclusives, c’est dans le projet d’établissement ainsi que dans le projet pédagogique qu’il faut chercher. L’objectif d’être inclusive doit y figurer dans les détails. Ici, nous sommes loin d’un simple paragraphe inséré dans deux textes obligatoires. Il s’agit, non pas d’y inscrire un roman, mais à tout le moins un projet qui se décline en de multiples aspects qui évoluent d’année en année. Comme nous le décrivions ci-dessus, l’inclusion est un processus. Il n’est jamais terminé. D’année en année, les projets d’établissement et pédagogique doivent être adaptés et décrire les avancées de ce processus.

Mais si l’on veut se faire une idée rapide de la volonté d’inclure tou.te.s les élèves dans un établissement, le plus simple sera de prendre le règlement des études. Ce dernier qui, en général est pensé par une direction avec ou non l’équipe enseignante, nous permettra de voir la place que l’école réserve à ses élèves. Sont-ils partenaires de ce règlement ? Ont-ils pu le travailler au travers de Conseils de participation coopératifs ? La place de chacun.e sans discrimination aucune est-elle garantie ? Quelles sont les systèmes de concertation, les lieux de dialogue, les personnes ressources, … ? Le point sur les tenues est-il co-construit avec les élèves ou imposé par le bon ou mauvais vouloir d’une direction ?


[1] Code de l’enseignement livres 1 et 2 : CHAPITRE 1er. – Des missions prioritaires, Article 1.4.1-1

[2] Article 4 a

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