1. L’inclusion scolaire est un changement de paradigme
Ce changement de paradigme concerne tous les acteurs de l’École inclusive, à tous les niveaux du système scolaire. L’objectif commun sera de construire une nouvelle culture scolaire inclusive et de la mettre en œuvre concrètement sur le terrain en se basant sur des valeurs de solidarité, de coopération, d’égalité et d’entraide. Cette nouvelle culture scolaire doit être mise en place tout au long de l’enseignement obligatoire, de la maternelle à la fin du secondaire. L’enseignement supérieur adaptera, lui aussi, ses pratiques à tous les étudiants qu’il accueillera en formation, en dépassant les usages d’un système trop souvent basé sur la compétition et l’échec scolaire.
L’École inclusive repose sur des valeurs humaines et sociales (Vienneau, 2002), comme le respect des enfants et des familles ainsi que l’ouverture à la différence et la valorisation de la diversité.
Définir des valeurs ne suffit pas. Encore faut-il qu’elles soient pleinement partagées et pratiquées par tous les acteurs de l’École inclusive. Les recherches ont montré que l’attitude positive des enseignants envers l’inclusion est l’un des facteurs les plus importants qui régissent le succès de l’École inclusive[1]. De même il est démontré que transformer positivement l’attitude des enseignants augmente l’utilisation de pratiques inclusives[2]. En revanche, l’attitude négative des enseignants envers les élèves à besoins spécifiques peut, au contraire, altérer leur estime et leur image de soi[3].
2. L’École inclusive tient compte des besoins de chacun
Dans l’École inclusive, tous les élèves sont reconnus et respectés dans leurs besoins. Contrairement aux « classes à visée inclusive », les élèves à besoins spécifiques, sont ici scolarisés à temps plein dans les classes ordinaires où ils bénéficient d’un enseignement différencié et adapté à leurs besoins, tout comme leurs pairs.
Si l’École inclusive tient compte des besoins de chaque élève, elle tient compte également de ceux de tous les enseignants qui reçoivent un soutien approprié, par une formation continue adaptée, une disponibilité des ressources matérielles et humaines. Tous les acteurs de l’École inclusive sont responsabilisés à accompagner la réussite de toutes et de tous.
3. L’École inclusive repose sur un enseignement de qualité
L’enseignement inclusif est un concept polysémique[1], multidimensionnel et dynamique. La Fédération Wallonie-Bruxelles se doit de le définir de manière à rendre compte de toute sa complexité. Faute de quoi, de nombreux établissements scolaires se déclarent inclusifs sans l’être réellement. Il convient donc de s’assurer que l’École inclusive soit de qualité ; plus efficace, plus efficiente, plus adéquate, plus pertinente, plus congruente[2] avec sa communauté[3] contrairement au système scolaire actuel ; à savoir l’enseignement ordinaire, l’enseignement spécialisé, l’enseignement à domicile, les classes à visée inclusive, etc.
3.1. Le choix du type de scolarisation
Aucune école ne peut prétendre être inclusive ou sur le chemin de l’inclusion si elle ne rencontre pas tous les élèves dans leurs spécificités et leurs difficultés. La recherche en sciences de l’éducation a montré que l’inclusion scolaire était plus efficace que la scolarisation en enseignement spécialisé et c’est bien dans ce sens que doit aller l’école inclusive (Rea, McLaughlin & Walter-Thomas 2002, Peetsma, Vergeer, Roeleveld & Karsten 2001, Dessemontet, Bless & Morin (2011)).
L’École inclusive encourage tous les élèves à tisser des liens sociaux entre pairs, qu’ils soient à besoins spécifiques ou non. Elle les forme à être des Citoyens Responsables, Actif·ve·s, Critiques et Solidaires (des « CRACS »). Afin de les préparer à vivre « dans la Cité », elle applique l’article 6 du Décret Missions[1] définissant les missions prioritaires de l’enseignement, et dans ce cas-ci, plus spécifiquement son paragraphe 3 : « préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d’une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures ».
3.2. L’organisation au niveau de l’École ou comment opérationnaliser l’inclusion scolaire
Une école inclusive inscrit l’objectif « inclusion » dans son plan de pilotage. À défaut de l’avoir fait, elle le rajoute aux trois objectifs préalablement choisis.
Une École inclusive organise la mise en place d’aménagements universels qui bénéficient à tous les élèves. Il y a donc lieu de prévoir la planification rigoureuse des difficultés qui pourraient se présenter à court, moyen ou long terme. Ceci, afin de mettre en place préalablement les dispositifs pédagogiques, organisationnels et matériels qui sont indispensables pour permettre à tous les élèves d’accéder à tous les lieux de l’école, ainsi qu’à tous les apprentissages qu’ils sont capables d’acquérir en enseignement inclusif.
Les enseignants de l’ordinaire possèdent peu d’expertise pour adapter leur enseignement à des élèves ayant des besoins spécifiques différents. Le co-enseignement en partenariat avec l’enseignement spécialisé est la meilleure manière d’opérationnaliser l’inclusion scolaire. Cela permet de maintenir tous les élèves dans le même groupe grâce à un travail de différenciation qui profitera à tous les élèves de la classe.
La formation continue de l’équipe enseignante aux pratiques pédagogiques efficientes pour les élèves à besoins spécifiques doit être une priorité de chaque école. La plupart des pratiques efficaces pour les élèves à besoins spécifiques représentent un caractère universel.
3.3. Les pratiques enseignantes doivent viser la réussite de tous
Dans la Classe inclusive, les pratiques mises en place visent la participation et la collaboration de chaque élève, afin de favoriser la réussite de tous. Ces pratiques se doivent d’être pertinentes, adéquates, efficaces, validées par les recherches en éducation. La préoccupation de baser les pratiques sur des preuves empiriques est récente en Fédération Wallonie-Bruxelles et de façon générale dans le monde de l’éducation. Cependant, il importe de mettre en place des pratiques dont l’efficacité pour les élèves à besoins spécifiques a été prouvée ou réfléchie et concertée avec les partenaires concernés.
La recherche en sciences de l’éducation a montré une dizaine de pratiques enseignantes universelles qui sont bénéfiques pour tous les élèves. Elle a démontré que les pratiques enseignantes efficaces pour les élèves à besoins spécifiques sont tout aussi pertinentes pour les élèves qui n’ont pas de besoins spécifiques. Citons notamment l’enseignement explicite, la CUA (Conception Universelle de l’Apprentissage), l’apprentissage coopératif, le tutorat, l’évaluation formative, les interventions précoces, la pédagogie institutionnelle, … (Forness, 2001 ; Hattie, 2009 ; Slavin et Lake, 2008 ; Slavin, Lake, Davis et Madden, 2010 ; Mitchell, 2008 ; Bissonnette, Richard, Gauthier et Bouchard, 2010).
L’École inclusive évalue ses pratiques en partenariat avec les universités et les hautes écoles afin d’être systématiquement en adéquation avec les besoins de tous.
Dans un enseignement inclusif, l’éducation vise le bien-être des apprenants. Elle se fonde donc sur le concept de bienveillance éducative qui s’articule autour de deux axes prioritaires : d’une part l’accueil de toutes et tous et d’autre part les attentes positives à l’égard de tous les élèves, quelles que soient leurs spécificités. Inciter chaque élève à oser, le stimuler à faire et à réaliser… mais aussi à réfléchir. Cette approche est exigeante ; elle encourage le débat d’idées car il est source de développement citoyen, en ce qu’il oblige à entendre les autres, à réfléchir, à argumenter, à reconsidérer son point de vue. Elle impose de pousser chaque élève au-delà de lui-même pour lui permettre de s’élever.
Une École inclusive inscrit l’objectif de l’inclusion, non seulement dans son plan de pilotage, mais également dans son projet d’établissement et dans son projet pédagogique.
Les enseignants se basent davantage sur l’analyse du fonctionnement de l’élève, de ses besoins et de ses ressources, plutôt que sur le diagnostic posé.
Au contraire du corps médical et des services psycho médico sociaux, les enseignants ne sont pas soumis au secret professionnel. Cependant, dans une École inclusive, tous les professionnels sont amenés à collaborer autour des enfants et des difficultés rencontrées. Les enseignants inclusifs respectent leur devoir de discrétion. Ils se souviendront que celui-ci est une obligation de prudence qui s’impose à tous de ne pas révéler inutilement ou de manière préjudiciable des faits ou des informations dont la diffusion est susceptible de nuire à un individu d’une manière ou d’une autre[1]. Par ailleurs, l’article 1382 du Code civil stipule que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
[1] T. MOREAU, « Le code de déontologie des psychologues et le respect des dispositions légales relatives au secret professionnel » in Journal du Droit des Jeunes, n°340, décembre 2014, p. 34. www.aemtc.be/userfiles/files/Commentaires%20r%C3%A8gles%20d%C3%A9ontologiquesdu%20%20psychologue(1).pdf
[1] Code de l’enseignement, CHAPITRE 1er. – Des missions prioritaires, Article 1.4.1-1.
[1] Qui a plusieurs sens ou significations différentes.
[2] En accord avec…
[3] Tremblay P., Inclusion scolaire : dispositifs et pratiques pédagogiques. De Boeck : Bruxelles, 2012.
[1] Sharma, Forlin et Loreman, 2007.
[2] McFarlane et Wolfson, 2013.
[3] Bhatnagar et Das, 2014.