Fin d’année scolaire 2020-2021

Nous appelons à la mise en place de procédures strictes

Les membres de la plate-forme de lutte contre l’échec scolaire, soutenus par d’autres associations de la société civile, appellent le Gouvernement et les Pouvoirs organisateurs à baliser strictement la fin de cette année scolaire.

Les élèves, les étudiants, les enseignants mais aussi les familles sont largement éprouvés par la pandémie et les mesures Covid qui sont prises dans les écoles. Les inégalités se creusent fortement et le nombre de personnes vivant la pauvreté s’accroit. Les enfants sont touchés. On ne compte plus les jeunes en décrochage, que ce soit de manière visible mais aussi et surtout invisible. Aux deuxième et troisième degrés du secondaire, l’enseignement hybride a montré ses limites et précarisé plus encore les élèves ayant des difficultés, ainsi que les familles non équipées ou peu habituées à utiliser l’informatique. De nombreux adolescents et jeunes adultes ont décroché. Ils ne sont pas responsables de cette situation, pas plus que les enseignants. Il y a donc lieu de soulager tout le monde en modifiant les habituelles traditions de fin d’année que sont les sessions d’examens et les échecs qu’elles entraînent.

La notion de bienveillance et le caractère « exceptionnel » n’étant pas objectivables, il convient de se prémunir des interprétations subjectives que l’on a pu connaître l’an dernier. Ainsi, devant la situation de santé psychologique des adolescents, nous demandons qu’un cadre légal spécifique à cette fin d’année soit créé. Celui-ci comprendra les balises et procédures à respecter impérativement et donnera aux équipes éducatives le moyen de se les approprier.

Dès lors, nous appelons à fixer des procédures précises pour le dernier trimestre 2020-2021

  1. Le temps et la forme des évaluations de fin d’année

Hormis pour les années certificatives (CEB, CE1D, CESS et années diplômantes du qualifiant), nous appelons à ce  que l’évaluation de l’état d’acquisition des essentiels ne passe pas par des examens de fin d’année. Cela ne doit pas empêcher des évaluations diagnostiques qui permettent de soutenir les décisions des conseils de classe, en mettant en évidence les difficultés des élèves, et ainsi de planifier l’année prochaine. Ces difficultés seront, évidemment, communiquées aux enseignants de l’année suivante.

Le temps gagné dans les années non certificatives par la suppression des examens devra être réinjecté, en tout ou en partie, dans du temps de travail pour les enseignants afin de mener ce processus évaluatif en collaboration avec l’élève et sa famille.

  • Le diagnostic

Afin de permettre aux enseignants et aux élèves de planifier le troisième trimestre, nous proposons que les enseignants réalisent individuellement avec chaque élève un diagnostic, afin d’évaluer ensemble l’état d’acquisition des essentiels, dans un dialogue constructif et pluriel. Ce diagnostic sera ensuite communiqué à l’élève et à ses parents.

Une fois ce diagnostic réalisé, nous demandons que des actions pédagogiques soient mises en place dans les écoles afin de permettre aux élèves de remédier aux lacunes, sans que cela porte préjudice aux activités liées au bien-être et entraîne une surcharge de travail à domicile. 

Le diagnostic peut, à la demande de l’élève, se faire avec un tiers associatif ou de l’école (CPMS, professeur choisi, SAS, AMO, …) qui sera également présent lors du conseil de classe, afin d’étudier les pistes pour la suite, en fonction de la réalité d’aujourd’hui.

Nous demandons qu’une attention toute particulière soit portée aux élèves issus de familles socialement défavorisées, qui ont vécu cette période à distance ou en hybridation, dans un contexte particulièrement inégalitaire (matériel, connexion, espace de vie) ainsi qu’à ceux qui sont les plus éloignés des codes scolaires. De même, il est essentiel de renouer le lien avec les jeunes qui ont décroché, notamment, en prenant contact avec les acteurs autour de l’école qui ont pour mission d’aider au lien école-familles (CPMS, AMO , Services communaux de prévention du décrochage scolaire, etc.), sans oublier les jeunes qui ne sont plus en âge d’obligation scolaire mais qui étaient inscrits à l’école en septembre 2020.

Il est indispensable qu’il y ait une approche proactive diversifiée de la part de tous les acteurs concernés (école, CPMS, éducateurs, services d’accrochage, …) afin que des démarches concrètes se fassent pour « aller vers les parents , vers les jeunes », par tous les moyens disponibles (contacts téléphoniques, courriers postaux, visite au domicile, …), en tenant compte des difficultés rencontrées par les familles liées à la langue, à l’écrit ou encore à l’informatique.

Un dialogue sera mené avec les parents afin de leur communiquer les pistes identifiées par le diagnostic et les actions pédagogiques qui sont mises en place. Un tiers associatif pourra être présent à la demande des familles, ainsi qu’un traducteur si cela s’avère nécessaire. Les résultats du diagnostic et les mesures prises seront présentés aux parents en communiquant de manière adaptée (oralement, en fixant un rendez-vous à l’école, avec l’aide de traducteurs si nécessaire).

Dans le cas où le diagnostic concerne des élèves en fin de parcours, l’élève reste en droit de connaître son niveau d’acquisition, ou pas, des essentiels attendus. A cet égard, des actions pédagogiques devront également être mises en place pour les élèves poursuivant des études supérieures[1] ou pour ceux qui se rendraient disponibles sur le marché du travail[2].

  • Le parcours de l’élève

Les décisions du conseil de classe doivent être prises à la suite d’un dialogue en amont avec les parents et les élèves :

Circulaire 7594 (p. 16) : « Vu le contexte anxiogène actuel, il est important que la décision du Conseil de classe soit prise en dialogue avec les parents et les élèves, afin que la décision prise puisse être comprise et vécue de manière positive par l’élève et ses parents »

Pour les élèves pour lesquels la décision pourrait être un examen de passage ou un redoublement, le dialogue préalable avec les parents doit être obligatoire. Si la décision est l’examen de passage ou le redoublement et qu’un dialogue n’a pas été planifié avant le conseil de classe, alors le dialogue doit être obligatoire a postériori et une révision éventuelle de la décision par le conseil de classe doit être rendue possible (recours interne après conseil de classe : faciliter cette procédure).

Les motivations des décisions prises par le conseil de classe doivent être détaillées par la communication des essentiels vus en classe, le diagnostic communiqué, le dialogue entamé et notifié et la proposition d’accompagnement personnalisé pour l’année suivante.

Toute invitation au dialogue comportera toujours une notification, de manière explicite, à faire signer par les parents afin qu’ils puissent dire s’ils souhaitent se faire accompagner par un tiers associatif et/ou un traducteur.

  • Redoublements

Le redoublement doit être exceptionnel.

Toute décision de redoublement ou d’orientation doit être prise en dialogue avec les parents et les élèves. Elle doit être impérativement motivée pédagogiquement et basée sur des épreuves diagnostiques exclusivement basées sur les essentiels, et non sur des interros faites entre les apprentissages à distance. Un plan personnalisé pour l’année suivante sera élaboré avec l’élève, qui tiendra compte de ses acquis et de ses lacunes (cours entiers, unités d’apprentissage au sein d’un cours, savoir, savoir-faire, compétences) et servira de tableau de bord des apprentissages durant l’année suivante. 

  • Examens de passage (ajournements)

Les examens de passage devraient être interdits, sauf éventuellement dans les années certificatives.

Toute décision d’examen de passage doit être prise en dialogue avec les parents et les élèves, et éclairée par le diagnostic et sur base d’épreuves diagnostiques exclusivement basées sur les essentiels.

En cas d’absence de diagnostic, cela doit être notifié par écrit aux parents ou à l’élève majeur, de manière à permettre un recours éventuel.

  • Les recours
  •  internes

Dans l’hypothèse où le dialogue n’aurait pas eu lieu avant les évaluations diagnostiques ou externes, et afin d’examiner collégialement les motivations de la décision prise, l’école organisera obligatoirement une réunion à distance ou en présentiel pour les familles et les élèves qui le demandent, avec présence autorisée d’un tiers. L’objectif est de permettre aux parents qui le désirent, ou qui sont en difficulté avec l’écrit, d’introduire leur demande de cette manière.

En cas de refus de mettre en place ce dialogue, il y aura lieu de le notifier par écrit, afin de permettre aux familles et aux élèves majeurs, de joindre cette notification pour justifier la recevabilité de leur recours externe.

Les écoles communiqueront aux parents et aux élèves les coordonnées des associations susceptibles de les aider dans leur démarche de recours.

  •  externes

Nous demandons

  • que les « Essentiels et balises » soient explicitement identifiés dans un texte faisant force de loi ;
  • que les chambres de recours fondent leurs décisions en se référant aux « Essentiels et balises » identifiés par le régulateur (et inscrits dans un décret) et sur les essentiels identifiés comme vus par les équipes éducatives ;
  • et qu’elles considèrent obligatoirement les arguments présentés par les parents et les élèves majeurs portant sur les procédures exceptionnelles COVID adoptées et explicitées dans les circulaires, et que ces éléments recevables pour l’examen d’un recours externe soient communiqués clairement aux parents et aux élèves majeurs :
    • la communication des essentiels vus en classe,
    • le diagnostic communiqué,
    • le dialogue entamé et notifié,
    • la proposition d’accompagnement personnalisé pour l’année suivante, en dialogue avec les parents et les élèves.

Signataires :

Michèle Janss pour l’APED (Appel Pour une Ecole Démocratique)

Arnaud Groessens, pour ATD Quart Monde Jeunesse Wallonie-Bruxelles

Jean-Charles Wiart et Logan Verhoeven, pour Le CEF (Comité des élèves francophones)

Geoffrey Carly,pour les CEMEA (Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Éducation Active)

Annick Faniel, pour le CERE asbl (Centre d’expertise et de ressources pour l’Enfance)

Fred Mawet, pour CGé (ChanGements pour l’égalité)

Le comité de pilotage de la Coalition des parents de milieux populaires et des organisations qui les soutiennent

Alain Moriau, pour l’ASBL Compas Format, Service d’Accrochage Scolaire

Véronique De Thier, Joëlle Lacroix, pour la FAPEO (Fédération des Associations de Parents de l’Enseignement Officiel)

Marie-Hélène André et Stéphanie Demoulin, pour la FFEDD (Fédération Francophone des Ecoles de Devoirs)

François Deblander, pour Infor-Jeunes Bruxelles

Chantal Massaer, pour Infor-Jeunes Laeken

Jean-Pierre Coenen, pour la Ligue des Droits de l’Enfant

Christophe Cocu et Maxime Michiels, pour la Ligue des Familles

Cécilia Locmant et Sylvie Pinchart, pour Lire et Ecrire

Anne-Françoise Janssen et Christine Mahy, pour le Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté

Quentin Derriks, pour le Sas Brabant wallon

Jean Queriat, pour l’ASBL SENS-SAS, Service d’Accrochage Scolaire

Fatima Zaitouni, Marco Giannoni, pour SOS Jeunes – Quartier Libre AMO

Bernard Hubien, pour l’UFAPEC (Union Francophone des Associations de Parents de l’Enseignement Catholique)

Manuel Fayt, pour le SEL-SETCA

Joseph Thonon, pour la CGSP-enseignement


[1] Avec les universités, hautes écoles ou écoles supérieures des arts.

[2] Avec le Forem et Actiris


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