Ce 29 avril 2022, 130 personnes se sont réunies en ateliers avec un objectif : inventer des pistes pour faire sauter les verrous qui empêchent les/des écoles à devenir plus inclusives ?

Le public était composé de professionnels de l’Ecole : Pôles territoriaux, directions, enseignants, futurs enseignants, membres des CPMS, de même que des professionnels associatifs (accompagnants d’enfants en situation de handicap, associations représentatives, …), et des familles d’enfants à besoins spécifiques.

La liste des freins avait été préalablement dressée par l’équipe éducative de l’école Decroly. Ces freins ont été répartis entre les ateliers, de manière à ce que chaque participant puisse réfléchir tant à des freins humains, qu’à des freins temporels ou spatiaux.

Cela a été extrêmement riche. Et, si tous les freins n’ont pas trouvé de réponse toute faite, d’autres freins sont apparus et des pistes sont émergées et ne demandent plus qu’à être essayées.

Atelier 1

Freins humains :  compétences professionnelles >< relationnel

  • Peur de ne pas respecter le bien-être de l’enfant, de ne pas pouvoir assurer la sécurité de l’enfant et des autres.
  • Crainte d’une surcharge de travail (conséquence des peurs).

Freins temporels :

  • Manque de temps pour les échanges avec les collègues et les personnes intervenantes.

Freins spatiaux :

  • Agencement des classes (taille, aménagement en tant que tel, mobilier).

Retour de l’atelier

Sur les freins humains, les participants ont insisté sur ces trois mots : besoins, proposer et responsabiliser.

A partir des besoins, on peut aborder les pictogrammes, choisir entre les différents actes de communication, voire la communication alternative « Sésame ».

A aussi été abordée la question du nombre d’élèves qui doit être réduit, la disposition « Arc de cercle » pour faciliter la communication et la connexion verbale, para verbale, non-verbale.

Co- enseignement = 1 enseignant + 1 personne ressource (expert, parent, stagiaires, …) à préparer, co-construction, accompagnement, encadrement.

Cellule d’appui interdisciplinaire permanente au sein de l’école : Parent, Elève, Enseignement.

Réduire la surcharge de travail en optant pour la Mutualisation des outils et bonnes pratiques – Ouverture.

Collaboration avec les Hautes Ecoles, les Organismes régionaux et fédéraux, le milieu associatif ….

Le climat : gestion des émotions, créer un espace paroles, les milieux associatifs, BALE (Bienveillance à l’école).

Le recours au numérique encadré et réfléchi.

Sur les freins temporels, ils ont relevé :

Des classes ouvertes ;

Une table ronde :  Mettre à profit les 1560’= 26 h pour le fondamental ;

Mettre en place des routines, institutionnaliser ces routines, les placer dans l’organigramme ;

Profiter des conseils de classe ;

Anticiper 1 agenda de collaboration ;

Concertation avec une personne référente par secteur (ATL (Accueil Temps Libre), …) ;

Concertation avec tous les acteurs de l’école.

Enfin, concernant les freins spatiaux, il a été relevé :

Taille des classes ;

Ouvrir l’espace aux élèves : Organiser les coins dans une classe de fonction à ne pas avoir top de coins inutiles ;

Laisser le choix aux enfants de s’approprier l’espace-classe, les responsabiliser ;

Le SAS de « décompression » ;

Mobilier modulable, flexible et travailler sur le volume (mezzanine, par exemple) ;

Raccordement pour le numérique et l’électronique adapté et conforme ;

Classe flexible.

Atelier 2

Freins humains :  compétences professionnelles >< relationnel

  • Crainte du regard porté par les enfants sur ces enfants en particulier (stigmatisation, crainte des enfants à Besoins Spécifiques) – crainte du handicap par les enseignants et les parents
  • Pression des parents qui craignent un « nivellement par le bas », de remarques diverses sur la gestion de la classe.

Freins institutionnels « Ecole » (au sens large) :

  • Complexité administrative (documents à remplir…. Dans le cadre des Pôles ???).

Freins spatiaux :

  • Agencement des classes (taille, aménagement en tant que tel, mobilier).

Retour de l’atelier

Inclure les enfants à Besoins Spécifiques dès le plus jeune âge, afin d’habituer tout le monde à vivre avec des personnes différentes. Inclure dans l’école des personnes handicapées adultes. Cela ouvre le regard et la bienveillance et démystifie le handicap. 

La sensibilisation est fondamentale. Associer différentes associations et différents publics, afin de s’ouvrir à toutes les différences

Voir l’association impro-jeu, jeu de l’improvisation pour mieux échanger et milieux se connaitre. Faire différents types d’animations dans les classes. Par exemple des ateliers pour se mettre dans la peau d’un élève « dys », afin de voir que les aménagements raisonnables ne sont pas un avantage, mais un réel besoin.

Insister auprès des parents qu’il n’y a pas que le pédagogique qu’on apprend à l’école mais il y a des choses plus importantes, comme le social, notamment.

Le projet d’inclusion doit être clairement inscrit dans le projet pédagogique de l’école afin que les familles sachent où elles inscrivent leur enfant.

Sur la complexité administrative, il est difficile de se projeter par rapport à un projet qui n’existe pas encore. Il y a une demande que les documents soient les plus simples possible, de manière à limiter la charge administrative. De même une digitalisation des documents est essentielle, afin que d’une année à l’autre les enseignants puissent avoir accès aux documents de l’élève. De même que les documents soient les mêmes entre les 48 Pôles.

Le DaccE (Dossier d’Accompagnement de l’Elève) devrait permettre de limiter le poids de l’administratif. La question de l’intégration des conseils de classe dans les Pôles Territoriaux est importante, de manière à réduire les documents à traiter et assurer la continuité, au travers de documents communs à tous les Pôles et tous les réseaux.

Concernant l’aménagement des classes, il est important d’informer sur les besoins de tous les enfants. Par exemple, si un enfant est rassuré en restant tout le temps à la même place, il faut l’expliquer avec bienveillance à tout le monde de manière à ne pas le stigmatiser. Suivre l’évolution de l’enfant. En grandissant les besoins changent.

Pour l’aménagement des locaux, penser à la récup’ afin de permettre un meilleur aménagement pour un prix moins cher. Des classes flexibles sont chères à mettre en place.

Atelier 3

Freins humains :  compétences professionnelles >< relationnel

  • Peur de perdre le contrôle (enseignants, inspections, directions, …), angoisse de ne pas être à la hauteur du défi et pas assez soutenus.
  • Pression d’objectifs disproportionnés (en fonction des possibilités de l’enfant).

Freins temporels :

  • Difficultés à partager son temps entre toutes les attentes légitimes.

Freins pédagogiques/communication :

  • Manque de centralisation des informations concernant les enfants (clarté et lisibilité de celles-ci).

Retour de l’atelier :

Dans ce qui a été proposé, imaginé et même rêvé, les participants trouvaient important par rapport à l’arrivée d’un enfant avec un handicap ou avec des besoins spécifiques, l’information du début d’année qui est très importante, de pouvoir rencontrer l’enfant – même en dehors du cadre scolaire – pour apprendre à le connaître. De même il apparaît comme important de rencontrer ses accompagnants, dont les parents, bien avant la rentrée scolaire.

Il est important également que l’enseignant ne reste pas seul. Par exemple, il existe des ASBL qui proposent des tables rondes où les enseignants peuvent se rencontrer, des enseignants de différentes écoles avec des enfants ayant des difficultés différentes, mais l’important est de pouvoir échanger ce que l’on vit tous les jours, pouvoir échanger les outils, partager les difficultés.

Il serait intéressant que la FWB organise une plate-forme où l’on peut échanger ce qui est fait en classe, les outils qui sont utilisés. Cette plate-forme pourrait être commune aux intervenants, aux professeurs, aux parents. La communication pourrait ainsi être facilitée entre les intervenants et plus rapide qu’en temps normal. Cela permettrait la centralisation des informations. 

Intérêt de mettre en place des projets d’écoles qui prévoiraient avant l’arrivée de l’enfant quels sont les intervenants qui vont le suivre durant sa scolarité.

Le PIA devrait comporter des objectifs avec des exigences à court, moyen et long terme permettent de ne pas avoir de pression, ce qui pourrait être moins angoissants pour l’enseignant. Les projets à court terme permettent des résultats visibles qui g-permettent de guider le professeur.

Ce qui permettrait de lever les pressions est pouvoir avoir dans l’école une personne de référence : orthopédagogue, ergothérapeute, quelqu’un qui puisse coordonner entre les intervenants, le professeur et les parents.

L’idée du co-enseignement dans l’idée d’avoir 2 enseignants et un nombre réaliste d’enfants. En imaginant aussi de pouvoir préparer ensemble le travail et de pouvoir aller aider par moments dans la classe parallèle. Cela permet d’avoir le regard extérieur de la collègue qui vient une ou deux heures sur la semaine.

Pouvoir se faire aider par les collègues, avec une mise en commun des outils, de ce qui est mis en place.

L’intérêt d’avoir parfois des stagiaires de troisième année en ergothérapie et orthopédagogie. Cela permettrait d’être en lien avec la nouveauté, de voir ce qui se fait ailleurs, d’avoir des énergies différentes.

Au niveau des formations continuées ou initiale, ainsi que les formations en école, former à évaluer sans points et de former sans devoirs. Les évaluations externes mettent une pression sur les professeurs. Il serait imaginable de mettre en parallèle à ces évolutions, une évaluation de compétences afin que ces enfants puissent passer dans le secondaire général avec les compétences qu’ils ont acquises. Ils ont des compétences, ils savent faire de choses – pas toujours tout ce qu’on leur demande – et ces compétences sont très peu valorisées.

Dans certaines écoles il existe des groupes de parents et d’enseignants qui réfléchissent à la mise en place d’aménagements raisonnables pour les élèves à besoins spécifiques. Ces personnes font les liens entre les enseignants et les autres parents et permettent de chercher des outils.

Importance de se focaliser sur les réussites plutôt que sur les difficultés.

Atelier 4

Freins humains :  compétences professionnelles >< relationnel

  • Peur de ne pas arriver à gérer les apprentissages (angoisse de ne pas être à la hauteur du défi et pas assez soutenus).
  • Démultiplication des intervenants et difficultés de rassembler tous les intervenants en même temps.

Freins institutionnels « Ecole » (au sens large) :

  • Attentes sociétales en termes d’apprentissages.

Freins pédagogiques / communication :

  • Manque de centralisation des informations concernant les enfants (clarté et lisibilité de celles-ci).

Retour de l’atelier

Donner aux enseignants un sentiment de compétence. Trop d’enseignants se sentent dévalorisés ou pas prêts à remplir toutes les missions auxquelles il est confronté. Autre concept qui a surgi, c’est que la diversité est un avantage.

A partir de ces deux concepts, une série d’idées ont émergées. Il faut permettre un changement de lecture aux enseignants, et pour permettre ce changement de grille de lecture, il faut changer le système dans lequel il est. Par exemple, une enseignante débutant dans le spécialisé s’est dit qu’il suffirait de supprimer les années et au niveau des épreuves, ne les faire que quand l’enfant est prêt. Cela simplifierait beaucoup de choses au niveau de la vie de tous les jours. Il y a donc lieu de changer de mode de fonctionnement et d’évaluer progressivement, selon le rythme de l’enfant. C’est voir l’élève et non plus voir la classe.

L’enseignant n’est pas tout seul, c’est une équipe avec toute une série de gens qui gravitent autour de l’école. C’est parfois un peu difficile de s’y retrouver. L’idée d’un référent permettant la mise en lien avec tous les intervenant est certainement intéressante.

L’importance de mettre l’accent sur la diversité a été relevée.

Si on veut que l’enseignant change de posture, il faut modifier la formation initiale des enseignants. Il faut également changer de pratiques : par exemple le tutorat est un outil très intéressant.

Un des rôles principaux de l’école est de ne pas décevoir. De ne pas décevoir ses collègues en disant « je ne vais pas arriver à telle chose et de ne pas décevoir les enfants en disant « je suis incapable de… ». Il faut que l’école soit un lieu où l’enseignant puisse être heureux de faire toute une série de choses.

Au niveau de la gestion du quotidien, il s’agit d’anticiper toutes les rencontres. Plutôt que de convoquer à des moments impromptus, il vaut mieux que ce soit planifié. Cela permet de respecter les différents partenaires qui interagissent dans l’école.

Atelier 5

Freins humains :  compétences professionnelles >< relationnel

  • Peur de notre propre échec (inclusion) (angoisse de ne pas être à la hauteur du défi et pas assez soutenus).
  • Crainte des interventions des parents qui ont un enfant en inclusion (sous-investissement ou surinvestissement).

Freins institutionnels « Ecole » (au sens large) :

  • Côté normatif de l’Ecole (CEB, …).

Freins matériels :

  • Matériel spécifique en nombre par classe.

Retour de l’atelier

Afin de soutenir les enseignants, il faudrait qu’il y ait une cellule inclusion au sein de l’école qui soit le relai entre les familles et les enseignants. Cela doit être un soutien de proximité, quelqu’un d’accessible dans l’école. Et quelqu’un qui a la même identité professionnelle permet de sortir de la solitude, cela donne un sentiment que ce soutien est accessible et permet de se sentir en sécurité.

Rendre le travail collaboratif comme faisant partie de la culture de l’école. Etre plusieurs dans la classe, dans le co-enseignement, le mentorat (soutien d’un jeune par un enseignant plus chevronné).

L’intérêt des pédagogies alternatives, parce qu’elles transposent une partie de la réussite à l’élève qui devient, en partie, responsable de ses apprentissages. Il y a donc partage de la responsabilité de la réussite entre les deux parties, même si l’essentiel reste à charge de l’enseignant ?

Permettre le compagnonnage et l’échange d’expériences. Permettre à des enseignants d’aller voir ailleurs ce qui se fait. Plutôt que de faire une journée pédagogique, pourquoi ne pas fournir la possibilité d’aller voir dans une autre école.

S’accorder le temps de l’observation. S’arrêter pour se regarder marcher. Prendre le temps de se demande ce qu’on a fait avec sa classe et comment on a avancé.

Ne pas faire porter la charge de l’activation du réseau sur le seul enseignant mais se dire que dans une école il y a des ressources, de même qu’autour de l’école, il y a un monde associatif qu’il est important d’activer. Faire le répertoire de ces ressources-là.

Apporter un soutien à la parentalité pour les parents d’élèves à besoins spécifiques. Communiquer avec un parent d’élève à besoins spécifique c’est autre chose que communiquer avec un parent d’élève sans besoins spécifiques. Il y a de l’inquiétude, il y a de la fragilité car le parent se sent aussi porteur du trouble de son enfant. L’école inclusive a le souci de s’adapter à l’élève, mais elle doit également s’adapter aux parents de l’élève.

Reclarifier le rôle des CPMS auprès des parents, qui ne voient dans le CPMS qu’un organisme orienteur et, de ce fait, ils préfèrent l’éviter.

La barrière de la langue pose parfois problème. Le parent doit pouvoir se faire accompagner par un interprète de son choix.

Il faut un apprentissage de la communication envers les parents au sujet des difficultés de leur enfant. Cela ne s’improvise pas. Comment communiquer quand cela se fait par personne interposée (via un éducateur d’une institution spécialisé, par exemple) ? Il serait intéressant d’inviter les parents à d’autres moments que lorsque c’est pour parler des difficultés ? Des moments de prises de connaissances, de moments de repas culturels, etc., afin que lorsque les parents viennent à l’école ils sachent qu’on sera bienveillant et pas nécessairement pour le parler des problèmes.

Le côté normatif de l’école laisse des possibilités. Le Conseil de classe a la possibilité d’octroyer le CEB à un élève. Il faut penser de mettre les aménagements raisonnables en place durant la passation des épreuves, matériels et organisationnels qui leur assure un maximum de chance de réussite. L’idée du chef d’œuvre devrait être explorée pour tous les élèves.

Concernant l’outillage pour les aménagements matériels, il y a moyen de trouver de la débrouille. On peut, par exemple, mieux communiquer avec les familles qui peuvent aider à recycler du matériel de leurs entreprises ou de leurs connaissances.

Conclusion

Il y a une réelle volonté, tant dans les nouveaux Pôles territoriaux que dans des écoles, dans des classes, au seins de CPMS, pour faire avancer l’inclusion dans les écoles. Les échanges ont été d’une grande richesse et de beaucoup d’inventivités.

Les écoles normales, formatrices de futurs enseignants, pensent de plus en plus à former leurs étudiants à être inclusifs.

Mais le chemin va être long. 130 personnes c’est à la fois peu et beaucoup. Peu si on les comptabilise par tête, mais la plupart d’entre elles représentent une école, un Pôle territorial, un CPMS.

L’inclusion est un chemin qui n’a pas de fin. Les défis sont constants, ils se renouvellent avec de nouveaux élèves qui ont de nouveaux besoins. Nous continuerons à porter ce combat pour les plus fragiles. Fort heureusement, nous ne sommes pas seuls. Au contraire, nous sommes de plus en plus nombreux. Les Pôles territoriaux seront des outils très précieux pour rendre l’Ecole plus inclusive et, par là-même, vers une société également plus soucieuse de toutes les différences.

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