La dysgraphie est un trouble spécifique d’apprentissage qui affecte le geste graphique, entraînant une lenteur importante dans la réalisation des productions graphiques et l’écriture manuscrite, entraînant une malformation des lettres. La calligraphie lente et inégale est souvent accompagnée d’une grande fatigabilité, voire de douleurs. En effet, écrire ou dessiner requiert une énorme tension et des efforts permanents chez une personne avec une Dysgraphie, alors que de tels gestes s’effectuent normalement automatiquement.

C’est en fait un trouble spécifique d’apprentissage qui se traduit par des difficultés de coordination et de la conduite du trait. Ce trouble n’est pas causé par un déficit neurologique spécifique ou intellectuel. En effet, les personnes qui en sont atteint n’ont aucun retard intellectuel ou déficit neurologique. Les enfants ne manquent pas d’attention et encore moins de volonté. C’est l’organisation même de la fonction graphique qui est touchée.

Ce trouble peut apparaître dès l’apprentissage de l’écriture, en cours de scolarité ou plus tard. En général, l’écriture, une fois maîtrisée, devient automatique. Malheureusement, chez la personne avec dune dysgraphie, les gestes appris ne s’automatisent pas, malgré une rééducation intensive faite par un professionnel. Les productions écrites restent de pauvre qualité, souvent illisible. Ces enfants se révèlent souvent incapables d’être multitâches : dans le même temps réfléchir au mot à écrire, à la manière de former les lettres et orthographier les mots.

La dysgraphie peut avoir plusieurs causes. Elle peut être la conséquence d’autres troubles spécifiques des apprentissages comme la dyspraxie, la dysorthographie ou la dyslexie, les hésitations créant des gestes inadaptés. Elle peut également être une conséquence d’une trouble de l’attention avec ou sans l’hyperactivité (TDAH) ou être liée à la précocité. Environ 70 % des enfants précoces sont touchés par une dysgraphie.

On distingue plusieurs formes de dysgraphies :

  • Les dysgraphies raides, quand l’écriture est raide et qu’il y a une crispation lors de l’écriture. Le tracé est régulier mais anguleux, les droites sont prédominantes sur les courbes avec des changements brutaux de direction. Le crayon est fortement appuyé, on sent le tracé au dos de la feuille qui peut se déchirer ;
  • Les dysgraphies molles : l’écriture de l’enfant est irrégulière dans la dimension des lettres, elle manque de tenue et donne une impression de négligence. Le tracé est petit et arrondi, peu précis, voire atrophié (diminue de volume). Les lignes d’écriture sont ondulantes et les pages peuvent paraître négligées ;
  • Les dysgraphies maladroites : Le trait est de mauvaise qualité, les lettres sont mal proportionnées et les formes sont lourdes avec parfois des pochages[1]. Les pages sont confuses et désordonnées, remplies de multiples retouches, de reprises et de soudures maladroites ;
  • Les dysgraphies impulsives : l’enfant écrit vite au détriment de la forme des lettres qui perdent toute structure ; les gestes sont rapides, parfois saccadés et non contrôlés entraînant une écriture désorganisée. L’enfant préfère la précipitation à la qualité, dès lors ses pages paraissent négligées ;
  • Les dysgraphies lentes et précises dans lesquelles, à l’inverse des dysgraphies impulsives, l’enfant parvient à écrire correctement, avec une écriture très appliquée et un excès de précision mais en fournissant un effort épuisant. L’écriture est ainsi excessivement lente, appliquée et précise. Elle a parfois un aspect calligraphique. Cela explique pourquoi c’est la dysgraphie la plus difficile à diagnostiquer, car qui penserait qu’un enfant ayant une jolie écriture puisse avoir des difficultés ?

La dysgraphie concerne environ 10 % des enfants, et surtout des garçons.

Signes qui doivent alerter

Il est de nombreux signes différents qui peuvent indiquer la présence d’un trouble dysgraphique. Ce n’est pas parce qu’un enfant présente un des signes suivants qu’il est automatiquement porteur de ce trouble. Seul des spécialistes sont à même de détecter un trouble de la dysgraphie. En général, un diagnostic de dysgraphie est posé par une équipe pluridisciplinaire: psychologue, ophtalmologiste, orthoptiste, orthophoniste, psychomotricien, … . L’avis d’un neuropédiatre sera nécessaire pour interpréter les bilans médicaux et paramédicaux établis par l’équipe pluridisciplinaire.

  • Une mauvaise connaissance de son schéma corporel, c’est-à-dire de sa morphologie (ses limites dans l’espace), de ses possibilités motrices (souplesse, rapidité, …), de ses possibilités d’expression à travers le corps (attitudes, mimiques, …). L’enfant n’arrive pas à utiliser le vocabulaire corporel, à se représenter correctement sur un dessin, à assembler les morceaux d’un pantin. L’enfant ne se perçoit pas comme un tout ;
  • Une mauvaise organisation spatiotemporelle : l’enfant a des difficultés à écrire correctement ou à écrire sur la ligne, ses opérations mathématiques ne sont jamais alignées correctement, il est dans l’incapacité de comprendre une carte de géographie. Il est vite perdu dans l’organisation, dans la méthodologie, il ne sait plus où il en est dans un apprentissage, il fait les choses dans le désordre ou à l’envers. Les notions de temps, d’heure, de chronologie, de suites logiques lui sont incompréhensibles. La lecture et l’écriture sont touchées : il s’embrouille, inverse les lettres, perd la structure et la syntaxe de la phrase, … On constate une lenteur et des difficultés à l’école dans les exercices réclamant un passage à l’écrit. De même, des difficultés persistantes dans la reproduction de formes. Il a difficile à visualiser la page et ne parvient pas à écrire sur les lignes ;
  • Des difficultés de latéralisation : l’enfant est malhabile, gauche, a une démarche souvent raide et lourde. Il ne sait pas comment « bien bouger ». Il n’’investit pas les activités sportives ;
  • Un retard dans le développement psychomoteur ou des troubles praxiques (difficultés dans l’enchaînement automatique, c’est à dire l’élaboration, la planification et l’automatisation de mouvements volontaires et de gestes précis), mauvaise tenue persistante des outils (ciseaux, règle, crayon). Crispation dans la tenue du crayon, l’enfant peut trouer la feuille sur laquelle il écrit, tellement il appuie fort ;
  • Des difficultés de concentration entraînant une écriture plus irrégulière, saccadée. Les automatismes sont plus difficiles à intégrer. Le rythme d’écriture est inadapté : l’enfant peut être très lent et faire beaucoup d’efforts pour obtenir un résultat plus ou moins correct ou à l’inverse écrire trop rapidement de façon impulsive. L’écriture peut être peu lisible : l’enfant colle les lettres, les superpose, juxtapose des lettres trop grandes à d’autres plus petites, il y a des télescopages, des tracé trop légers ou trop écrasés, le geste tremble ou est très mal maîtrisé, les lettres sont de mauvaises dimensions, le sens de la graphie n’est pas respecté, le travail semble très peu soigné. En grandissant, le jeune adopte souvent une écriture scripte[2] ;
  • Des enfants hypertoniques ou hypotoniques. Leur geste graphique manque de contrôle et produit une écriture maladroite. Il y a souvent fatigue et des crampes peuvent survenir lors de l’écriture. Le poignet est rigide ;
  • Des problèmes d’ordre psychologique tels que le manque de confiance en soi, anxiété à l’approche de l’écriture, le refus d’écrire ou le désir de non-communication, voire encore le désir de ne pas grandir.

Aménagements raisonnables pouvant être mis en place (liste non exhaustive)

  1. Au niveau de l’écrit
  • Eviter les pressions. Un élève dysgraphique ne sait pas écrire plus vite, ne pas culpabiliser l’enfant sur l’état de ses cahiers et de ses productions écrites, ne jamais obliger un élève à recommencer un travail écrit jugé non-satisfaisant ;
  • Veiller à ce que son crayon ou le stylo soit correctement tenu. Pour les dysgraphiques, l’écriture manuelle n’apporte rien sur les apprentissages, pire elle peut même les retarder ;
  • Faites attention à ce qu’il n’ait pas tendance à écriture trop vite ;
  • Veiller à ce qu’il soit attentif au sens de rotation des lettres rondes, continuer l’entraînement graphique (via des séquences courtes) ;
  • Dans les petites classes, privilégier les lettre mobiles (façon Montessori ou autre) ;
  • Privilégier des productions écrites courtes ET lui donner du temps supplémentaire, mais rester exigent sur la qualité de l’apprentissage lui-même ;
  • Adaptez les exercices pour limiter la quantité d’écrits ;
  • Privilégier l’oral à l’écrit ;
  • Inviter l’élève à montrer ses connaissances et à ne pas se focaliser sur l’écrit ;
  • Privilégier la qualité du travail à sa quantité. On peut souvent faire aussi bien en faisant moins. L’école à tendance à multiplier les mêmes exercices alors que ce n’est pas nécessaire ;
  • Organisation spatiale et temporelle
  • Veiller à lui fournir des cours complets et exploitables (photocopies, …) ou veillez à ce que ceux qu’il a copiés soient clairs et compréhensibles. En échange, exigez qu’il sache possède la matière ;
  • Soyez attentif à ce qu’il soit correctement installé. Son banc ou sa table doit être adaptée à ses difficultés. Elle doit être large et à la bonne hauteur. De même, sa chaise doit être adaptée à sa taille et qui lui permettre d’avoir un bon appui sur le sol ;
  • S’il lui en manque, veillez à lui fournir les outils nécessaires et adaptés aux apprentissages (stylo, latte, crayon, feuille, etc.) ;
  • Via le tutorat, proposer une tournante dans la classe afin qu’un élève puisse lui servir de secrétaire ou de relecteur ;
  • Les solutions techniques
  • Passer au clavier. L’école est presque exclusivement axée sur l’écrit. L’enfant va écrire pratiquement jusqu’à 6 heures à 8 heures par jour selon son niveau de scolarité. Il est indispensable de soulager l’écriture manuelle et de proposer un passage au clavier (tablette, ordinateur, imprimante) ;
  • Privilégier les outils de dictée vocale ;
  • Fournissez-lui des photocopies pour chaque cours[3], afin qu’il ait la possibilité de les revoir et de les étudier ;
  • Avant l’évaluation
  • S’assurer de la mise en place de remédiations immédiates (ou de tutorat) dans chaque cours. Sans remédiation l’élève se décalerait de plus en plus par rapport à la vitesse et la qualité d’écriture de son âge.
  • Au niveau de l’évaluation
  • Privilégier l’oral, quel que soit le niveau d’études pour vérifier les connaissances ;
  • Se focaliser sur les connaissances et non sur l’orthographe, évaluer la réponse et non la manière dont elle a été écrite ; 
  • Accepter les productions faites au clavier, avec correcteur orthographique.

De manière générale, les aménagements raisonnables que l’on met en place pour un élève doivent être généralisés à tous les autres élèves, qu’ils aient ou non un ou des troubles spécifiques des apprentissages. Tel est l’idée de l’enseignement inclusif. En permettant à tous les élèves de bénéficier des mêmes facilités, on évite non seulement la stigmatisation (risque important quand on différencie dans une classe) mais cela permet à tous les autres élèves, sans besoins spécifiques mais qui ont des difficultés d’apprentissage, d’en bénéficier. C’est aussi introduire un peu de justice dans les apprentissages.  

En période de stage ou en enseignement en alternance

Même lorsqu’une prise en charge a été correctement mise en place dès le plus jeune âge, les difficultés de graphie persistent et ne disparaissent jamais. Les troubles orthographiques demeurent. Le jeune aura toutes les difficultés du monde à rédiger un texte graphique (vitesse), sera difficilement lisible et fera régulièrement des fautes d’orthographe qui peuvent avoir des conséquences dans le cadre professionnel, voire dans la vie quotidienne. Cela peut se révéler pénalisants pour un adulte dans l’emploi.

Lorsqu’un jeune ayant une dysgraphie entre en stage dans une entreprise, ou quand un jeune travailleur commence un premier (ou un nouvel) emploi, il est nécessaire de mettre des aménagements raisonnables en place.  Par exemple (ceci est loin d’être exhaustif) :

  • Privilégier l’oral à l’écrit. La relation entrepreneur/travailleur doit se faire de vive voix ;
  • Eviter de lui demander de prendre des notes. En cas de nécessité, mettre à la disposition du travailleur des stylos-billes ergonomiques (qui améliorent la préhension et réduisent la fatigue de l’écriture) et ou des crayons triangulaires qui fatiguent moins l’écriture ;
  • Informatique : mettre en place un outil de dictée vocale ;
  • Durant les formations, fournir un syllabus suffisamment explicite pour que les prises de notes soient inutiles et permettre l’enregistrement par la personne qui suit la formation.

Pour plus d’informations, prendre contact avec l’Aviq (Wallonie) ou avec Phare (Bruxelles).


[1] Lettres teinte à l’encre.

[2] L’écriture scripte est une écriture manuscrite dans lequel les lettres ne sont pas liées les unes aux autres et dont le tracé correspond approximativement, en le simplifiant, à celui des caractères typographiques utilisés en imprimerie.

[3] Sur les photocopies, voir notre fiche sur la dyslexie et la dysorthographie.

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