L’efficacité des devoirs est une vieille question qui anime les acteurs de l’école et les familles depuis de nombreuses années.

Comme on l’a vu, nombre de parents et de professeurs tiennent aux devoirs parce qu’ils croient que ceux-ci influencent positivement les résultats scolaires. La question qu’il faut se poser maintenant est « Ces bienfaits ont-ils été démontrés ? »

Que dit la recherche scientifique concernant les effets des devoirs sur l’apprentissage des élèves ? La relation entre le travail à la maison et une meilleure réussite n’a toujours pas été clarifiée par la recherche. Cependant, la vaste majorité des études tend à montrer que le temps consacré aux devoirs influence positivement les résultats scolaires au secondaire[1].

Il en va autrement au primaire. Selon la méthode d’analyse retenue, l’effet des devoirs peut être soit :

– faible et donc négatif ;

– positif, mais si faible qu’il n’est pas significatif sur le plan statistique[2].

Autrement dit, il est au pire contre-productif et au mieux inefficace.

Certains chercheurs parlent même d’absence de corrélation entre le travail personnel et les performances scolaires[3]. Ils vont à l’encontre du discours de l’Ecole primaire qui encense le travail personnel, ce qui est  une manière de se disculper et de faire porter le poids de la réussite sur l’élève et sa famille. Cette vision (erronée) est très fortement liée au concept de méritocratie scolaire[4].

John Hattie[5] a réalisé une méta-analyse qui s’est notamment penchée sur les travaux à faire à la maison. Selon celle-ci, les devoirs n’ont qu’un impact limité sur les résultats scolaires en primaire. Ce sont les facteurs pédagogiques et relationnels entre élèves et enseignants qui sont les plus efficaces. Certains chercheurs font l’hypothèse que les enfants plus jeunes ont une capacité moindre de concentration, ou que leurs habitudes de travail sont moins efficaces, entraînant une utilisation moins optimale du temps consacré aux devoirs.

Cependant, les devoirs à la maison peuvent être efficaces au secondaire, mais sous certaines conditions :

− l’impact sur les résultats scolaires est plus important pour les niveaux les plus élevés (après 15 ans). Les devoirs semblent donc plus adaptés au niveau de l’école secondaire supérieure que primaire et secondaire inférieur (Bonasio & Veyrunes, 2014 ; Cooper et al., 2006). En effet, un apport positif des devoirs a pu être montré au collège pour… les mathématiques ;

− les directives données doivent être à la fois claires et explicites, et ne doivent pas contrevenir au rythme des élèves ;

− le type de devoirs influe sur leur efficacité : les devoirs de pratique sont les plus fréquents, mais leur efficacité est très limitée du fait de l’ennui qu’ils suscitent. Les devoirs de prolongement sont plus motivants, mais leurs effets sur l’apprentissage ne sont pas avérés. Les devoirs créatifs sont plus stimulants, mais ils risquent de creuser les inégalités sociales[6] ;

Un devoir démocratique, c’est une activité que l’élève peut mener de façon autonome, sans être dépendant du soutien de ses parents, qui sera à l’évidence très inégal selon leur disponibilité physique et mentale, mais aussi leur niveau d’instruction, leur rapport à l’école et aux savoirs scolaires[7].       

Enfin, pour terminer, il vaut mieux éviter des comportements familiaux qui imposent une multiplication des devoirs et leçons avec la conviction que c’est là la solution à tous les problèmes[8].

A suivre… Comme enseignant, ai-je le droit de donner des devoirs ou suis-je hors-la-loi ?



[1] Cooper, Harris, Jorgianne Civey Robinson and Erika A. Patall (2006). “Does Homework Improve Academic Achievement? A Synthesis of Research, 1987-2003”. Review of Educational Research, vol. 76, no. 1, p. 1-62.

[2] Cooper, Harris (2007).The Battle over Homework: Common Ground for Administrators, Teachers and Parents.

3rd ed. Thousand Oaks, Calif.: Corwin Press, 117 p.

[3] Meuret Denis & Bonnard Claire (2010). Travail des élèves et performance scolaire. Revue d’économie politique, vol. 120, n° 5, p. 793-821.

[4] Brown et al., 2010 ; Duru-Bellat, 2006.

[5] Hattie John: Visible learning: A synthesis of over 800 meta-analyses relating to achievement. New York : Routledge 2008

[6] Glasmnan et Besson, ibid. cités par Rémi Thibert dans le Dossier de veille de l’IFÉ, Représentations et enjeux

du travail personnel de l’élève, juin 2016

[7] Philippe Perrenoud (2004).  » Est-ce que tu as fait tes devoirs ?  » : une question inégalement persécutante.  http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_2004/2004_14.html

[8] Philippe Meirieu, Ibid.

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