La Ligue des Droits de l’Enfant et sa Plate-forme Inclusion scolaire a organisé une conférence de presse à l’occasion de la rentrée scolaire. La scolarisation des enfants avec une déficience intellectuelle est un véritable parcours du combattant.

Jean-Pierre Coenen, Président de la Ligue des Droits de l’Enfant :

L’enseignement « spécial », devenu par la suite l’enseignement « spécialisé », date de 1970. Cela fait aujourd’hui 48 ans que les enfants avec handicap y sont accueillis, loin des autres enfants et souvent loin de leur milieu de vie habituel. Parfois au bout de longs trajets en bus scolaire, dans des lieux prétendument adaptés, mais qui sont surtout ségrégués. On y est entre enfants handicapés, cachés aux yeux de tous et oubliés de tous les bien-mal-pensants pour qui l’Ecole avec un « E » majuscule, la grande, la noble « Ecole » n’est destinée qu’à ceux qui peuvent prétendre d’un quotient intellectuel moyen à supérieur.

La question n’est pas de nous positionner pour ou contre l’enseignement spécialisé mais de rappeler que la place des enfants ayant un handicap n’est pas dans un enseignement spécialisé, mais dans l’école ordinaire : l’école du quartier, l’école du village avec les enfants « ordinaires » qui partagent le même lieu de vie. Ce Droit fondamental est défini par la Convention ONU de 2006 qui précise que les enfants porteurs d’un handicap doivent « avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif, de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire également inclusif NDLR[1] »

Depuis 2004, l’intégration dans l’enseignement ordinaire d’enfants relevant de l’enseignement spécialisé a été mise en place. Si, initialement, ce sont les handicaps physiques qui étaient privilégiés, depuis 2009 et grâce à ratification par notre pays de la Convention ONU sur les droits des Personnes handicapées, ce sont tous les enfants, quels que soient leurs handicaps – et donc également ceux qui ont une déficience intellectuelle – qui peuvent bénéficier d’un processus d’intégration dans l’enseignement ordinaire.

Si l’intégration d’enfants avec un handicap progresse en FWB, ce sont – comme vous le voyez sur ce graphique – surtout les handicaps « nobles » qui bénéficient de ces processus. Les enfants ayant des déficiences visuelles ou auditives sont respectivement 26 et 21 % à être intégrés dans l’enseignement ordinaire. Les enfants issus de l’enseignement spécialisé de type 8 qui ont principalement un « handicap social » et qui ne devraient de ce fait pas être dans l’enseignement spécialisé suivent avec 17 %. Mais ce sont les enfants issus du T2, c’est-à-dire ceux qui ont une déficience intellectuelle modérée à sévère, qui ferment le peloton. Ils sont un tout petit pourcent à se trouver intégrés dans une école ordinaire.

Comme vous le voyez et principalement pour les enfants avec une déficience intellectuelle, ce droit est largement bafoué. Les bien-mal-pesants de l’Ecole continuent à leur interdire l’accès à l’enseignement ordinaire. Pire, la Fédération Wallonie-Bruxelles, dans son Pacte pour un enseignement d’excellence, ne consacre que 4 malheureuses pages à un enseignement inclusif, ce qui démontre qu’elle n’a pas une vision claire de ce qu’est l’école inclusive. De plus, celle-ci réserve  l’enseignement inclusif aux enfants de milieux populaires injustement orientés vers les T1, 3 et 8.

Pourtant, la Belgique et chacune de ses composantes se sont engagées dans l’idée de construire une école véritablement inclusive.

Pour les familles, c’est un chemin de croix ! Un vrai parcours du combattant. Il ne leur suffit pas de trouver une école qui accepte leur enfant en intégration – ce qui est déjà extrêmement compliqué – mais il faut également trouver une école spécialisée partenaire. Deuxième obstacle ! Pire : les deux CPMS – celui de l’école ordinaire et celui de l’école spécialisée doivent être d’accord. Et là, cela revient trop souvent…. 99 fois sur 100 si on en croit ce graphique, à « mission impossible ». Le Droit de l’enfant est bafoué par des professionnels qui sont pourtant tenus de le respecter. Mais ce ne sont « que » des enfants handicapés et par malchance pour eux, ils ont un « mauvais » « handicap » pour l’école. Car, pour l’Ecole, il y a de « bons » et de « mauvais » handicaps. Il y a ceux qui ont un handicap « noble », qui ont toutes leurs fonctions cognitives et puis les autres, ceux qui ont un « handicap mental ». Celui qui empêche d’apprendre comme les autres… Comme si – et c’est ce que l’on pense encore trop souvent dans les écoles – tous les enfants apprenaient de la même façon. L’Ecole est faite de traditions, de croyances archaïques, de fantasmes, de lubies et de peurs ; pas de désirs de progrès, de rêves, et d’espoirs. C’est le malheur de ces enfants.

Mais… va-t-on nous demander… ces enfants ont-ils leur place en enseignement ordinaire, puisqu’ils ne savent pas apprendre comme les autres ? La réponse est dans le Droit ! Tout comme le droit à l’information est garanti à tous les citoyens – et c’est pour cela que nous faisons une conférence de presse – ces enfants sont des êtres tout ce qu’il y a de plus humains et bénéficient de droits, eux aussi. Et ces droits doivent être respectés !

La question n’est plus de se demander si ces enfants, puisqu’ils ne savent pas marcher, entendre, voir ou penser comme tout le monde, ont droit à une place pleine et entière dans la société, ni s’il faut les cacher au fond d’écoles et, par la suite au fond d’institutions prétendument spécialisées, derrière des murs, toute leur vie. La question est de savoir si nous voulons construire une société qui doit permettre à chacun de s’y intégrer et d’y trouver une place de citoyenne ou de citoyen actif et pleinement reconnu comme tel !

Si la réponse est « Oui » – et dans une société démocratique elle ne peut être que « Oui » – alors il n’y a qu’une étape scolaire possible : celle qui apprend au vivre ensemble, à vivre avec les différences que nous avons toutes et tous : c’est l’école inclusive. Un lieu où l’enfant ayant une déficience pourra apprendre à vivre avec les autres et où ceux-ci pourront à leur tour apprendre à vivre avec toutes les différences. Dans l’espoir que, plus tard et ensemble, ils contribuent à la construction d’une société réellement inclusive.

Le Pacte ne l’a pas compris. Si la mise d’un tronc commun est incontournable pour lutter contre l’échec scolaire, il est insuffisant. Seul un enseignement réellement inclusif peut permettre à chaque enfant, quelles que soient ses difficultés scolaires, sociales, physiques, intellectuelles, … d’acquérir les savoirs que ses capacités lui permettent d’acquérir. Et même, de se sublimer !

Nous voulons une Ecole inclusive. C’est un Droit fondamental de l’enfant handicapé ! Et c’est un droit des autres enfants aussi d’apprendre à vivre avec la différence. La Belgique s’y est engagée, la FWB aussi. Cette dernière se doit de la mettre en place. Nous exigeons donc le respect de cet engagement, à commencer par faire respecter par tous les intervenants l’obligation de respecter ce droit, et donc, de ne plus avoir la possibilité de refuser l’intégration d’un enfant quels que soient son handicap. Le Décret intégration permet trop facilement aux acteurs institutionnels de refuser l’intégration d’un enfant sur base de son handicap. Il s’agit d’une discrimination inacceptable et ce, même s’il existe un enseignement spécialisé. Séparer des enfants sur base de leurs différences physiques ou intellectuelles est, tout simplement, de la discrimination et doit être interdit dans les textes et poursuivi en justice ! Il en va de même pour les parents. Par méconnaissance de l’intégration ou souci de surprotection, des familles refusent des projets d’intégration proposés par des CPMS ou des écoles et qui vont pourtant dans l’intérêt des enfants.

Par ailleurs, le Pacte prévoit que les futurs Pôles territoriaux mutualisent les moyens consacrés à l’accompagnement des enfants en intégration, mais cela ne concernera que les enfants orientés en fonction d’un « handicap social ». Le Pacte ne tient pas compte des enfants porteurs de handicaps physiques et encore moins intellectuels. Nous condamnons cette discrimination et attendons de la CF/FWB qu’elle corrige le tir afin d’amener progressivement l’enseignement spécialisé à évoluer dans sa conception, dans ses prérogatives, dans son rôle, au service des besoins éducatifs de l’enfant. Toutes les ressources qu’il contient doivent être mises  au service de tous les élèves ! ». Autrement dit, pour aller progressivement vers un système scolaire inclusif.

Annette Teutsch, maman et membre de la Plate-forme Inclusion scolaire

Nous avons une fille de 14 ans avec trisomie 21. Notre vision pour sa vie, c’est qu’elle ait sa place au sein de notre société, qu’elle soit pleinement acceptée et respectée, non pas « malgré » son handicap mais avec son handicap. Comment veut-on apprendre à un enfant à vivre au sein de notre société si on l’enseigne à côté de notre société ? C’est pour ça que nous avons dès le début opté pour une scolarité dans l’enseignement ordinaire.

Nous avons eu la grande chance de trouver une école maternelle et primaire ordinaire INCLUSIVE qui était prête à accueillir notre fille – comme j’ai déjà dit – pas malgré son handicap, mais avec son handicap. La philosophie de cette école à pédagogie active : « Tout le monde est différent ». Notre fille pouvait donc apprendre avec tout le monde au sein d’une classe ordinaire. Elle pouvait participer à tout – avec du soutien, bien sûr, et avec des adaptations et aménagements là où c’était nécessaire. Il fallait, surtout, toujours adapter les objectifs pédagogiques.

Notre fille avait donc des objectifs adaptés, mais toujours en travaillant sur les mêmes thèmes que les autres enfants de la classe et ensemble avec eux. Et il y avait du soutien. En plus des enseignantes de sa propre classe, très motivées, il y avait une accompagnatrice venant d’une asbl mobilisée par nous, les parents, en fonction de deux périodes par semaine, ainsi qu’une institutrice venant d’une école spécialisée du type 2 (handicap mental sévère à modéré) pour 4 périodes par semaine. C’était donc un projet d’intégration conforme au décret de 2004.

Avec la pédagogie pratiquée dans cette école, notamment la différentiation des objectifs pédagogiques, et avec le soutien de l’extérieur, ce projet était une belle réussite : Notre fille évoluait de manière impressionnante tant sur le plan social que sur le plan d’apprentissages. Et c’était une vraie richesse pour tout le monde. On a eu beaucoup de retours positifs des autres enfants, de leurs parents et des enseignantes. Notre fille faisait pleinement partie de sa classe.

Après les années en primaire les choses sont devenues plus compliquées. Notre fille n’a pas fait son CEB en fin de sixième, vu ses difficultés intellectuelles. Heureusement il y avait une école secondaire ordinaire, de nouveau à pédagogie active, qui était prête à l’accueillir en première année différenciée De nouveau avec une adaptation des objectifs et une pédagogie différenciée. Notre fille a tout de suite trouvé sa place au sein de sa nouvelle classe dans la nouvelle école et elle y a continué à bien progresser.

Mais on avait du mal à trouver le soutien prévu par le décret pour cette première année. Nous nous sommes adressés à plusieurs écoles spécialisées pour monter un projet d’intégration avec eux. A chaque fois les écoles semblaient assez ouvertes, mais plus d’une fois le projet a été bloqué par l’avis négatif du CPMS du spécialisé. On nous disait notamment : « Les intégrations ne se font pas avec les élèves qui n’ont pas une chance réelle d’obtenir un certificat de l’enseignement ordinaire ». Comment voulez-vous obtenir un certificat de l’enseignement ordinaire ayant un handicap mental ? Pour nous ceci est un point de vue discriminatoire. Parce qu’il exclut automatiquement tout enfant avec handicap mental de l’intégration. Et nous trouvons que ceci ne correspond ni aux décrets de la Communauté française, ni à la Convention des Nations-Unies.

Pour cette année scolaire, la bonne nouvelle, c’est que nous avons réussi à établir une coopération entre notre école ordinaire et une école spécialisée – et les Centres PMS respectifs. Mais il y a une chose qui ne correspond pas vraiment à notre vision : Cette intégration vise clairement à préparer la transition de notre fille vers l’enseignement spécialisé en fin d’année scolaire.

Pendant cette année, elle passera trois jours par semaine dans la deuxième différenciée de l’école ordinaire pour continuer à travailler les compétences de base comme le français, la mathématique. Et elle passera deux jours dans l’école spécialisée pour commencer à travailler des aspects professionnels. L’idée derrière, c’est que l’année prochaine elle passera pleinement en spécialisé. Vu notre vision de la vie de notre fille, nous aurions préféré continuer un projet d’intégration dans une école professionnelle ordinaire, soutenu par une école spécialisée.

Nous entendons souvent qu’on arrive à un âge bien difficile et que les enfants dans l’enseignement professionnel ordinaire avaient souvent déjà un parcours scolaire bien difficile, venant d’un milieu bien difficile. Donc pas le bon milieu pour l’intégration d’un élève « plus fragile ».

Notre fille aimerait bien un jour travailler dans une école maternelle en s’occupant des petits – pas comme institutrice, bien entendu, mais comme une « aide surveillante ». Elle a déjà fait des petits stages dans son ancienne école et ça s’est bien passé. Elle l’adore, et les enfants l’aiment beaucoup. Donc ça serait logique de l’orienter vers l’enseignement professionnel filière « Service aux personnes ». Dans le spécialisé, ça existe aussi, mais c’est une formation professionnelle plutôt logistique, ça ne prépare pas au travail AVEC des personnes. Elle sera donc bien freinée dans la réalisation de son rêve de projet de vie.

On nous a parlé de la possibilité d’une réorientation vers l’enseignement ordinaire plus tard, quand les élèves ont passé le cap de l’adolescence et la situation dans l’enseignement professionnelle se calme un peu. C’est effectivement une option que nous allons essayer de poursuivre quand le moment arrivera. Mais est-ce que c’est vraiment nécessaire de la retirer de l’ordinaire pendant quelques années, sans jamais avoir essayé de mettre en place un beau projet bien soutenu, comme on l’a toujours pu faire jusqu’à présent?

Il y a surement du bon dans le projet visé. Mais c’est dommage que la mise en place d’un projet d’intégration d’un enfant ayant un handicap mental dans l’enseignement secondaire ordinaire soit si difficile, même impossible. Nous ne disons pas que ça sera facile. Mais nous connaissons des projets similaires en Flandre et dans d’autres pays européens qui marchent. Pourquoi alors pas ici en Communauté française ?

Il y a suffisamment d’expériences qui indiquent que c’est faisable si tous les partenaires sont prêts à s’ouvrir et à penser à des pratiques innovantes. Mettre en place l’inclusion, c’est du travail. Il faut y croire et il faut finalement s’y mettre.  Pour que tous les enfants aient leur place dans notre société et dans nos écoles !

Mouvement Personne d’abord : L’école inclusive est-ce possible ?

Vanessa, membre du conseil de gouvernance, antenne de Liège

Nous, les personnes qui présentent une déficience intellectuelle, nous voulons aller dans les écoles ordinaires. Nous voulons être avec tout le monde. Nous ne voulons pas qu’il y ait de différences entre les élèves.  Nous ne voulons pas qu’on stigmatise l’élève qui a besoin d’aide.

Il faut pour cela des services adaptés, pour aider toute la classe.

Pour nous permettre de réussir cet objectif, nous avons besoin d’aide, l’école a besoin d’aide pour permettre la réussite de ce projet.  Il faut que l’enseignant soit partie prenante du projet.  Il faut que toute l’école soit partie prenante de la démarche.

Ainsi le professeur sera à l’aise pour dire aux élèves que chacun doit pouvoir s’accepter.  Que chacun a sa place.  Que tous les enfants sont égaux.  Pour aider l’enseignant et tous les élèves, il faut aider le professeur titulaire de la classe.

Il faut faire pour cela des animations ensemble pour apprendre à la classe comment être solidaire, s’entraider. Nous avons beaucoup de choses à apporter aux autres de la classe.

Nous sommes une personne d’abord.

Xavier Lacroix : président du conseil de gouvernance et membre de l’antenne de Verviers.

J’ai mon expérience de l’enseignement spécialisé.  Ce n’était pas une bonne expérience.  Chaque année, j’ai appris la même chose.  Tout le temps on voulait m’apprendre la même chose.  C’est toujours la même chose qui revient.  C’est enfantin.  Je me cachais aussi dans l’école, les autres élèves n’étaient pas plus gentils.  Nous sommes nombreux à avoir vécu cette expérience.  Et nous disons que si nous étions  dans les écoles ordinaires on saurait plus évoluer.

Pour que les choses se passent bien il faut sensibiliser tous les élèves de la classe pour qu’il y ait de la solidarité entre les élèves.  Pour que nous soyons acceptés comme on est.

Si on est dans les écoles ordinaires, cela nous permettra d’évoluer dans notre tête, car je remarque que les personne dans l’enseignement ordinaire pensent et réfléchissent autrement.  Ils parlent autrement.  Et cela m’aurait aidé à évoluer.  Si je peux en parler, c’est parce que j’ai eu des amis qui n’avaient pas de déficience intellectuelle.  Ils m’ont aidé à évoluer.  En se parlant.  En m’expliquant des choses qu’ils ont faites.

Pour que cela soit une réussite, il faut donner les moyens à l’école.  Les moyens en personnel.  Il faut une ouverture des esprits.  Il faut communiquer, dialoguer.  C’est ça aussi l’apprentissage.

Dominique Paquot, Directeur de l’école primaire Singelijn

L’école Singelijn, une école inclusive.

Les valeurs fondamentales d’ouverture à la différence sont depuis de nombreuses années une des priorités de l’école Singelijn. Pour atteindre cet objectif, elle s’implique activement dans des projets spécifiques d’intégration d’enfants en situation de handicap quelles que soient ces situations.

Chez nous, l’intégration coule de source.

Elle est d’ailleurs inscrite dans notre projet d’établissement.

Les parents savent donc qu’en inscrivant leur enfant  à l’école Singelijn, il rencontrera vraisemblablement dans son cursus scolaire des enfants en situation de « handicap. »

De même, les enseignants qui postulent dans l’école savent qu’il pourrait y avoir dans leur classe un enfant à besoins spécifiques.

Intégrer un enfant n’est pas simplement l’accepter dans l’école, mais c’est être capable de le mener le plus loin possible en lui proposant une approche pédagogique qui se veut active, coopérative et citoyenne. C’est l’école qui s’adapte à l’enfant et non l’enfant qui s’adapte à l’école.

Pour réussir une école inclusive :

  • Il faut un vrai travail d’équipe autour des élèves et donc une communication régulière et de qualité entre toutes les parties (parents, élèves, écoles ordinaires et spécialisées, logopèdes,…). Les conseils de classe au nombre de trois/an réunissent tous les partenaires impliqués dans le projet.
  • Il faut une implication de l’ensemble des partenaires. Pour y arriver, il est indispensable que l’équipe pédagogique et les parents ainsi que l’enfant y participent activement. Le rôle de la direction est aussi primordial car c’est elle qui va soutenir le projet et encourager son équipe à pratiquer l’intégration au quotidien dans les classes.
  • Il faut que l’adaptation et l’individualisation correspondent au mieux aux besoins et objectifs de l’élève car chaque élève est différent. Certains aménagements sont nécessaires qu’ils soient organisationnels, pédagogiques ou physiques. Mais attention, ces aménagements, ces adaptations, nous les pensons pour tous les enfants. Il n’y a pas dans l’école deux pédagogies, mais une seule accessible et disponible pour chaque élève. Par contre, en fonction des besoins spécifiques de certains élèves, nous créons un projet individualisé pour  leur permettre de franchir une étape d’apprentissage, de vaincre le « sentiment d’échec » et de progresser à nouveau. C’est un véritable défi pour chaque enfant et pour l’équipe pédagogique !
  • Il faut une adhésion de l’ensemble de l’équipe pédagogique de l’école ordinaire pour favoriser la cohérence et la continuité.

Ce dernier point n’est pas anodin car le manque de cohérence et de continuité peut évidemment engendrer des difficultés majeures pour la mise en place d’un projet d’intégration.

Pour répondre aux objectifs d’une « école pour tous » il faut, j’en suis convaincu, repenser en profondeur  le système pédagogique dont les méthodes sont souvent plus que dépassées, voire inadéquates afin qu’aucun enfant ne soit laissé pour compte, que tous les élèves puissent trouver dans l’école le chemin de la réussite.

C’est en partant de ce postulat que nous avons modifié et mis en place une autre méthodologie, un autre type d’enseignement permettant de créer une école pour tous, hétérogène, qui permet à chaque enfant de progresser, de grandir, d’évoluer selon son rythme, ses capacités, ses qualités, ses défauts.

Cette approche dépasse la question de l’intégration d’enfants à besoins spécifiques, elle s’inscrit dans la philosophie  « d’école pour tous », celle qui accueille une diversité d’élèves  quelles que soient leurs faiblesses, leurs forces, leurs intelligences, dans une école de la réussite qui rejette compétition et exclusion. Le plaisir d’apprendre plutôt que la pression et la performance.

Je peux affirmer maintenant que l’école Singelijn est devenue une vraie école inclusive. Et je peux aussi affirmer, sans me tromper, que cela porte ses fruits.

A l’école Singelijn, côtoyer un enfant en chaise roulante, un enfant porteur de trisomie, un enfant avec une canne, un enfant avec un appareil auditif, fait partie du quotidien sans que cela n’apparaisse différent, particulier.

C’est une richesse pour l’enfant porteur d’un « handicap » car il est lui aussi confronté à des projets ambitieux, il construit son image et son estime de soi et mène une vie sociale avec les autres enfants. Il apprend à s’adapter aux règles sociales du groupe.

Mais c’est aussi une richesse pour les autres enfants car l’inclusion permet à chaque enfant  de comprendre que la différence entraine bien souvent un « handicap ». Elle l’amène donc à élargir sa vision du monde, à intégrer les différences des uns et des autres. Nous constatons alors que le climat de classe se modifie grâce à l’écoute des besoins, à la tolérance.

L’inclusion permet aussi de réfléchir sur l’identité au-delà des apparences. Elle permet de développer son sens de l’empathie vis-à-vis de l’autre qui rencontre des difficultés et donc de l’autre en général.

Un jour, un élève est venu dans mon bureau. «  Dominique, tu t’es trompé ! Tu nous as dit que Léna avait de la chance d’être dans notre classe, mais c’est nous qui avons la chance de l’avoir ! »

Pour conclure, le jour où nous serons tous bien persuadés que l’élève vient à l’école pour apprendre au lieu d’y venir pour réussir, nous aurons fait un grand pas vers l’école de demain, c’est-à-dire l’école pour TOUS.

[1] Voir texte anglais : Persons with disabilities can access an inclusive, quality and free primary education and secondary education on an equal basis with others in the communities in which they live

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