Oct 7, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Vers une Ecole inclusive
Des pistes pour amener les élèves à apprendre ensemble
vendredi 29 novembre 2019
Journée organisée par la Ligue des Droits de l’Enfant et la Plate-forme pour une école inclusive, en collaboration avec le Centre d’Etude et de Formation pour l’Education Spécialisée et Inclusive – Université Libre de Bruxelles
Aujourd’hui, les élèves avec une déficience auditive ou visuelle sont les plus nombreux·ses à être intégré·e·s en enseignement ordinaire. La part des enfants inscrit·e·s dans l’enseignement de type 8 progresse pour atteindre 19,8% (1 580 élèves). Ce sont essentiellement les enfants ayant une déficience physique (T4), intellectuelle (T1 et T2) et comportementale qui sont les grand·e·s oublié·e·s de l’enseignement ordinaire. Cependant, l’intégration progresse dans tous les « types » d’enseignement, à des vitesses variables, notamment pour le type 2 qui ne parvient toujours pas à décoller. A son sujet et pour rappel, la déficience intellectuelle légère pourrait concerner entre 10 et 20 personnes pour 1 000, la déficience intellectuelle sévère est retrouvée chez 3 à 4 personnes pour 1 000 (Inserm).
Des écoles deviennent progressivement inclusives. L’axe 4 du Pacte pour un enseignement d’excellence a précisément pour objectif de développer l’école inclusive et précise que « La lutte contre la ségrégation scolaire au sein de notre enseignement est un enjeu majeur. Pour ce faire, le Pacte développe une école inclusive, basée sur le respect des rythmes de chacun et sur un accompagnement personnalisé. Il s’agit de viser la réussite pour tous les enfants, quels que soient leurs profils scolaires, leur origine sociale ou leurs types d’intelligence (…). »
Réfléchir à une école plus inclusive doit se faire avec toutes les actrices et tous les acteurs, à commencer par les premièr·e·s concerné·e·s, les élèves. L’école a, depuis trop longtemps, oublié d’inclure les élèves dans toutes les réflexions sur son évolution. Si on veut que l’école soit inclusive, il est impératif de la construire avec les élèves et les étudiant·e·s, quelles que soient leurs spécificités et les difficultés qu’ils rencontrent.
Poursuivant notre mission de réflexion et de propositions concrètes pour favoriser la meilleure intégration possible des tou·te·s les élèves dans l’enseignement ordinaire, telle que le demande la Convention des Nations Unies des Droits des Personnes Handicapées, nous souhaitons cette année considérer l’école inclusive sous l’angle des élèves et des étudiant·e·s. Ce forum, s’il s’adresse aux professionnel·le·s et futur·e·s professionnel·le·s, donnera la parole à des jeunes grâce à de petites vidéos (en effet, le 29 novembre, les enfants seront à l’école). Des professionnel·le·s de l’école et de l’intégration, ainsi que des parents, mais aussi d’ancien·ne·s élèves nous éclaireront sur les pratiques pédagogiques mises en place dans des écoles qui sont en marche vers l’inclusion. Ce sera l’occasion de débattre avec eux/elles.
Une école inclusive est une école non seulement faite pour accueillir toutes les différences, mais aussi une école qui forme de futur·e·s citoyen·ne·s à la construction d’une société plus juste, donc plus inclusive.
Ce Forum se veut un moment d’échanges autour de la thématique : « comment amener élèves à besoins spécifiques et élèves ‘ordinaires’ à coopérer et apprendre ensemble » tant dans l’enseignement fondamental que dans l’enseignement secondaire. Le Forum présentera aussi les travaux scientifiques sur les bienfaits et limites (s’il y en a ?) de l’école inclusive ainsi que la méthodologie du tutorat. Enfin, des adultes ayant passé par l’enseignement ‘ordinaire’ et spécialisé nous feront part de leurs expériences. Ces thématiques seront débattues par un panel d’actrices et d’acteurs en collaboration avec les participant·e·s au forum, et devront déboucher sur des propositions concrètes à soumettre aux divers·e·s responsables et ce, au moment où le Pacte pour un enseignement d’Excellence se met peu à peu en place et veut promouvoir une école inclusive ouverte à la différence.
Date : vendredi 29 novembre 2019
Lieu : ULB, Auditoire E. Dupréel, Avenue Jeanne,44 – 1er étage à 1050 Bruxelles
Public attendu : enseignant·e·s, directions des établissements scolaires, parents, étudiant·e·s, particulièrement ceux et celles des Hautes Ecoles, conseiller·e·s pédagogiques, CPMS, inspection, Délégué·e·s aux Contrats d’Objectifs, Directeurs·rices de Zone, personnel paramédical, psychologique et social, responsables administratif·ve·s et politiques et tou·te·s citoyen·ne·s intéressé·e·s.
Inscription par mail à
contact@liguedroitsenfant.be
P.A.F. : 35 € (25 € pour les étudiant·e·s et les familles d’enfants à besoin spécifique). A verser sur le compte compte BE76 9795 8553 0195 de la Ligue des Droits de l’Enfant, avec la communication « Inscription colloque du 29 novembre + nom de l’institution/association + nom·s du/des participant·e·s ». Afin de faciliter la gestion de ce forum, les paiements doivent parvenir au plus tard le lundi 25 novembre 2019.
La pause, le repas et les documents du colloque sont compris dans la participation aux frais.
Programme
8h30 : Accueil
9h15 : Introduction de la journée
Jean-Pierre Coenen,
Président de la ligue des Droits de l’Enfant
et de la Plate-forme pour une Ecole inclusive.
Durant toute cette journée nous donnerons la parole aux élèves,
au travers de petites vidéos introductives.
9h35 : Plans de pilotage et école inclusive.
Dominique Paquot,
Directeur de l’école Singelijn.
10h00 : Table ronde 1
« Comment amener élèves à besoins spécifiques et élèves ‘ordinaires’ à coopérer et apprendre ensemble à l’école fondamentale ? »
Différent·e·s professionnel·le·s de l’école, et des parents partageront leurs expériences dans le domaine de l’intégration et de la manière de faire progresser une école ou une classe sur le chemin de l’école inclusive. Notamment, sur ce qui est mis en place pour amener les élèves à coopérer, quelles que soient leurs différences, pour faire société, sur ce qu’apportent les aménagements raisonnables aux enfants à besoins spécifiques mais aussi à tous les autres élèves, sur la manière d’accueillir la déficience intellectuelle, etc.
La table-ronde sera suivie par un débat avec le public.
10h50 : Pause-café
11h20 : Table ronde 2
« Comment amener élèves à besoins spécifiques et élèves ‘ordinaires’ à coopérer et apprendre ensemble à l’école secondaire ? »
Ici encore, des professionnel·le·s de l’école et des parents partageront leurs expériences de l’intégration. L’enseignement secondaire est moins inclusif que l’école fondamentale. Cependant, des écoles se lancent sur le chemin de l’école inclusive. Comment font-elles ? Quelle est leur philosophie ? Que mettent-elles en place pour favoriser la collaboration entre pairs tout en évitant les orientations vers le spécialisé ? Quels sont les écueils qu’elles rencontrent et comment les surmontent-elles ? Quels bénéfices en retirent les élèves et les professionnel·le·s ?
La table-ronde sera suivie par un débat avec le public.
12h10 : Pause repas
13h10 : Bienfaits et limites de l’intégration des élèves à besoins spécifiques en écoles inclusives : qu’en disent les recherches.
Ghislain Magerotte,
Dr en Psychologie, Professeur émérite de l’UMons.
13h30 : Quelle méthodologie pour que les élèves à besoins spécifiques et les élèves ’ordinaires’ apprennent ensemble ? Le tutorat.
Gaëtan Briet,
Dr en Psychologie, Laboratoire de Psychologie, Cognition, Comportement et Communication (LP3C – EA 1285, Université Rennes 2 Haute Bretagne.
14h00 : Table ronde 3
« Partages d’expériences et parcours de vie. Quels bilans d’ancien·ne·s élèves à besoins spécifiques tirent-ils·elles de leur scolarité, que ce soit en intégration ou non ? »
Depuis des décennies, l’école ordinaire a intégré des élèves à besoins spécifiques, souvent de manière « pirate » ; d’autres n’ont connu que l’enseignement spécialisé. Ces élèves, devenu·e·s des adultes, sont aujourd’hui intégré·e·s dans la société. Leur expérience, alors que le Pacte pense à rendre l’école enfin plus inclusive, nous semble essentielle. Qu’ont-ils·elles envie de nous dire à la lumière de leur vécu ? Comment leurs expériences de l’école peu inclusive d’hier peuvent-elle éclairer le chemin de l’école plus inclusive de demain ?
La table-ronde sera suivie par un débat avec le public.
14h50 : Table ronde 4
« Formation initiale des enseignants et inclusion »
Comment former les étudiants à l’école inclusive, alors que sans doute peu d’entre eux/elles ont connu une telle école durant leur cursus scolaire ? Quelles compétences les enseignant·e·s inclusif·ve·s devraient-ils·elles maîtriser pour accompagner tous les élèves vers l’accès aux savoirs et en faire des citoyen·ne·s actrices et acteurs d’une société, elle-même, plus inclusive ? Des professionnel·le·s de la formation des enseignant·e·s nous feront part de leur expérience. Enfin, quelle place est laissée à l’orthopédagogie dans la future formation initiale des enseignant·e·s ?
La table-ronde sera suivie par un débat avec le public.
15h40 : Conclusions et perspectives
Jean-Pierre Coenen
Président de la Ligue des Droits de l’Enfant
et de la Plate-forme pour une Ecole inclusive
Sep 27, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Une nouveauté qui mérite un coup de chapeau
Le Gouvernement s’engage à garantir à chaque enfant un potage gratuit à l’école. Ça mérite d’être relevé et salué car c’est un levier important pour la santé d’un nombre croissant d’enfants issus de familles vivant dans la grande pauvreté.
Une DPC tiraillée entre des visions très différentes de ce qu’il faut changer
Cette DPC apparait clairement comme un compromis entre différentes formations politiques qui n’ont pas le même projet de société et donc pas la même vision des changements fondamentaux qu’il faut absolument introduire dans notre système scolaire pour qu’il soit plus émancipateur et moins inégalitaire.
Est-ce que les compromis politiques à la Belge permettent de porter une réforme aussi ambitieuse pour l’enseignement que celle qui est profilée dans le Pacte ? Nous ne le pensons pas.
Sentiment pour conclure, qu’on n’a pas avancé mais plutôt reculé avec cette DPC.
Lire ces 14 pages laisse un petit goût amer d’inventaire à la Prévert2…
De longues énumérations de petites mesures ne font pas un projet politique fort.
Et pourquoi certains éléments du Pacte y sont textuellement repris, d’autres y sont exprimés mais différemment et d’autre encore sont complètement omis ?
Différentes hypothèses peuvent être posées : A-t-elle été trop vite écrite ? Ou rédigée par des négociateurs croyant bien faire et pas au fait des multiples enjeux incontournables du changement de l’école ? Ou est-elle révélatrice d’un recul déjà par rapport aux ambitions du Pacte ?
Il va falloir que les partis clarifient rapidement les zones d’ombre.
Pour qu’on puisse y croire encore.
Pour la Plate-forme de lutte contre l’échec scolaire :
Fred Mawet, CGé (Changement pour l’Egalité)
2. Nous faisons référence au poème de Jacques Prévert nommé « Inventaire »
Retour vers la conférence de presse du 27 septembre 2019
Sep 27, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Une autre mauvaise surprise de la déclaration de politique communautaire réside dans la volonté du Gouvernement de maintenir une épreuve externe obligatoire en fin de sixième primaire et ce pour tout élève. Cette évaluation serait « je cite » certificative et l’octroi du certificat d’études de base (CEB) serait lié à sa réussite. Voilà qui nous étonne déjà. Là où la mesure devient inacceptable c’est quand on apprend que le Gouvernement renforcera le niveau d’exigence du CEB.
Cette idée ne peut sortir que de la tête de quelqu’un qui ne connait pas vraiment l’école et ses réalités actuelles, ou pire, qui ne connait qu’un type d’école : celle qui est élitiste ou qui travaille avec un public homogène issu des catégories les plus aisées.
C’est tout le contraire de ce que nous voulons. En effet, les études sont nombreuses pour démontrer que trop d’évaluation tue l’évaluation. Le véritable tronc commun (qui plus est polytechnique et pluridisciplinaire) est celui qui permet à TOUS les élèves d’acquérir des compétences en leur donnant le temps.
Ces évaluations « sanction » engendre du stress inutile chez les élèves et surtout les plus faibles qui se sentent sans cesse « traqués », observés, jugés et, osons le terme « classés » et pire « cassés ». C’est le meilleur moyen de reléguer les élèves. Tout le contraire de ce qui est envisagé dans le Pacte pour un enseignement d’excellence qui s’appuie sur un pilier essentiel : une véritable mixité sociale.
Quel est le but recherché par un renforcement du niveau d’exigence à ce moment de la scolarité ? La véritable évaluation est celle qui permet le diagnostic pour l’élève et le pilotage pour le système. Pour cela, pas besoin d’épreuve compliquée à la fin de la sixième primaire.
Tous les professionnels s’accordent pour dire que l’échec et le redoublement ne résolvent pas les difficultés.
Comment dès lors imaginer que l’on puisse certifier avant l’issue de ce tronc commun ? Pour nous, une seule épreuve certificative est nécessaire et indispensable : celle de fin de parcours.
Il est grand temps que nos décideurs politiques revoient leur copie à ce sujet sinon ils prennent le risque de détruire le système pour lequel tous les acteurs se sont accordés. Ils seront responsables de la prise en otage de toute une génération d’élèves.
C’est dans le même esprit que nous sommes étonnés de voir l’entrée en vigueur de la formation initiale repoussée d’un an. Pendant ce temps, le Gouvernement demandera à l’ARES d’examiner la capacité opérationnelle de la mise en oeuvre de la réforme par les établissements d’enseignement supérieur, d’adapter la réforme quant à ses modalités de mise en oeuvre, d’évaluer le coût d’organisation de la réforme et son intégration dans la trajectoire budgétaire. On se pince pour vérifier qu’on ne rêve pas quand on sait le temps et l’énergie déployés par les acteurs du terrain pour préparer cette réforme. C’est comme si rien n’avait été fait ! C’est une injure aux professionnels qui se sont employés à réfléchir cette réforme pas seulement dans ses aspects organisationnels.
Permettez-moi donc d’analyser le choix fait par le nouveau Gouvernement dans le contexte qui nous préoccupe aujourd’hui, celui de la lutte contre l’échec scolaire.
Cette lutte contre l’échec passe aussi par un renforcement des compétences des enseignants, dans des outils de renforcement de français comme langue d’enseignement, de remédiations immédiates, de gestion de l’hétérogénéité des classes et d’inclusivité, avec ou sans le support du numérique.
C’est ce que le PACTE souhaite mettre en place et dans une certaine mesure, la réforme de la formation initiale tente de répondre à ces objectifs. Elle ne pourra le faire seule, la formation continue jouant également un rôle déterminant dans le déploiement d’expertises à ce niveau.
La réforme de la formation initiale ainsi que le PACTE sont très ambitieux, il est donc vital de mettre les moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs.
Ainsi, même si la réforme de la formation initiale prévoit de mieux outiller les nouveaux enseignants pour lutter contre l’échec au travers d’un renforcement de la formation telle qu’elle avait été souhaitée au départ en 5 ans par le GT4O, le passage à 4 ans les préparera essentiellement à travailler dans de nouveaux empans et de nouvelles disciplines.
S’il est vrai que la formation sera aussi plus développée au niveau de la lutte contre l’échec avec un renforcement de la remédiation au sein même des disciplines et de la prise en compte d’un renforcement du français comme langue de scolarisation, c’est surtout au travers des spécialisations techno-pédagogiques, dans la différenciation et dans l’orthopédagogie que les nouveaux enseignants seront véritablement préparés à ces nouveaux défis. Ces spécialisations ne se développent réellement que lors de la 5ème année d’étude qui est le master de spécialisation en enseignement.
Le risque, induit par la DPC, serait de demander à la formation initiale de renforcer l’ensemble des axes et des besoins des nouveaux enseignants, dont le PACTE a besoin, dans un temps de formation trop court et avec des moyens réduits, ce qui conduirait indubitablement à une formation trop généraliste et superficielle.
Les études montrent que la majorité des enseignants débutants qui quittent la carrière, le font par manque de formation et de préparation à la gestion de classes hétérogènes (étude Saint Louis). Une formation qui ne se préoccuperait pas du coeur du métier d’enseignant qui est d’accompagner tous les enfants pour les amener le plus loin possible ne pourrait que conduire à l’accentuation de la pénurie et à une diminution de la qualité de l’encadrement pensé par le PACTE.
Enfin, il y a le bouquet final … Que vont coûter toutes ces mesures. Si l’on connait la trajectoire budgétaire du Pacte (qui repose en grande partie sur le tronc commun) nous n’ignorons pas les difficultés que connait la Fédération Wallonie-Bruxelles en matière de finances.
Aucune mesure proposée par le Gouvernement n’est chiffrée.
Comment seront-elles financées ? La Déclaration est particulièrement muette. Nous l’avons déjà dit et nous le redirons probablement encore, sans une politique de refinancement, l’enseignement (et plus particulièrement l’enseignement secondaire) risque de payer dans quelques années les frais des politiques actuelles. Que les politiques n’agissent pas pour cette matière comme ils le font pour le climat. N’attendons pas qu’il soit trop tard.
Pour la Plate-forme de lutte contre l’échec scolaire :
Roland Lahaye, CSC-enseignement
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Sep 27, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Sur le problème de l’école inclusive, la DPC est une fois encore mi-chèvre, mi-chou. Mais commençons par nous réjouir de ce qui est très positif. Le Gouvernement s’engage à Accompagner les enfants qui connaissent des troubles de l’apprentissage et (à) garantir une école inclusive qui prend en compte les besoins spécifiques des enfants. C’était déjà un engagement du Pacte, et le Gouvernement s’engage à le mettre en oeuvre. Nous rappelons que chaque année plusieurs milliers d’enfants n’ayant aucun handicap autre que social ou ayant un ‘DYS’ sont orientés vers l’enseignement spécialisé.
Autre point très positif de la DPC est le projet d’Améliorer significativement l’accessibilité des infrastructures et des cursus (supports de cours, aides à la communication, accompagnement, etc.) afin de favoriser l’inclusion scolaire de tous les élèves. Les aménagements physiques ne suffisent pas à permettre l’intégration de nombreux élèves ayant une déficience. Les aménagements raisonnables nécessitent souvent des supports de cours adaptés (Police de texte adaptée aux ‘Dys’, feuilles de couleurs, programmes informatiques, …), ainsi qu’un accompagnement spécialisé, souvent fourni par l’enseignement du même nom.
Voilà pour le très positif. Avant de passer à ce qui nous inquiète, il y a l’entre deux : une proposition floue, à l’instar du Pacte dont elle reprend le manque de clarté. La DPC envisage de Diminuer le nombre d’élèves fréquentant l’enseignement spécialisé en favorisant l’inclusion dans l’enseignement ordinaire chaque fois que cela s’avère possible et en dégageant les moyens nécessaires à leur inclusion. On pourrait trouver cela formidable. Seulement tant la DPC que le Pacte ne précisent pas de quels enfants on parle. Sont-ce les élèves avec un ‘Dys’, des enfants de familles populaires ou des enfants ayant une déficience physique ou intellectuelle ? On sait que le Pacte envisage de ramener le nombre d’élèves de l’enseignement spécialisé au niveau de celui de 2004 (soit 6 000 de moins) sans plus de précisions. L’analyse que nous en faisons est que cela concernera surtout le type 8 et un peu le type 1 qui reçoivent essentiellement des enfants sans le moindre handicap. Pour les enfants vivant avec un handicap, c’est le flou total. C’est un problème : la conception même de l’école inclusive concerne essentiellement les enfants en situation de handicap. Alors, de quoi parle-t-on ?
Parler d’école inclusive sans envisager l’intégration d’enfants en situation de handicap, c’est parler de tout, sauf d’école inclusive. Pour rappel, la Charte de Luxembourg la définit comme une école qui comprend tout le monde avec une structure administrative commune pour l’enseignement spécifique et ordinaire et la collaboration entre les enseignants ordinaires et spécifiques. Une Ecole inclusive est donc une école où tous les élèves qu’ils soient ‘ordinaires’ ou ‘à besoins spécifiques’, se retrouvent dans les mêmes classes et apprennent ensemble (des choses parfois différentes, mais c’est le fait d’apprendre ‘ensemble’ qui est fondamental).
La Convention des Personnes handicapée, signée et ratifiée par la FWB stipule que « Les Etats veillent à ce que les enfants handicapés ne soient pas exclus, sur le fondement de leur handicap, de l’enseignement primaire gratuit et obligatoire et de l’enseignement secondaire. » et que “ Les personnes handicapées puissent, sur base de l’égalité avec les autres, avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif, de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire ». J’en viens donc à ce qui nous inquiète.
La DPC veut Encourager le développement de classes d’enseignement spécialisé au sein d’établissements de l’enseignement ordinaire afin de permettre l’inclusion effective dans les temps libres et informels. En cela les concepteurs de la DPC comme ceux qui ont élaboré le Pacte n’ont rien compris à l’école inclusive et ne respectent pas les droits fondamentaux des enfants ayant un handicap. Les « classes spécialisés1 » sont une autre manière de faire de la ségrégation. Si les enfants qui y sont accueillis peuvent bénéficier de moments informels – ou pédagogiques – avec les enfants ‘ordinaires’ (La DPC prévoit Le cas échéant, envisager l’inclusion des enfants de l’enseignement spécialisé dans certains cours de l’enseignement ordinaire), ils restent stigmatisés. Ce n’est pas de l’inclusion. Tout au plus de l’intégration, mais surtout cela ne gomme en rien la stigmatisation. Ces enfants sont différents et on le montre bien à tous les autres. Ce n’est pas comme cela qu’on fait société et qu’on forme des citoyennes et des citoyens soucieux des autres.
Autre point qui peut paraître de prime abord comme étant positif dans la PDC est que le Gouvernement veut réduire la problématique du transport scolaire. Sur ce point, soyons clair. Le transport scolaire n’est pas une simple ‘problématique’. Ce n’est ni moins ni plus qu’un système maltraitant. Il doit être interdit ! Mettre des enfants en situation de handicap dans un bus pendant plusieurs heures par jour est scandaleux. La seule solution au transport scolaire est l’école du village, l’école du quartier. Bref, l’Ecole inclusive.
La Charte de Luxembourg, citée plus haut, définit l’école inclusive comme comprenant tout le monde. Or, aujourd’hui encore, notre Ecole discrimine les élèves sur base de leurs origines sociales et culturelles. Elle entretient, voire amplifie les inégalités. Ce n’est en aucune manière une Ecole qui comprend tout le monde du début à la fin des cursus scolaires.
L’Ecole inclusive, au contraire, si elle accueille des élèves en situation de handicap physiques et mentaux, prouve par là qu’elle accueille tout le monde. Si les plus fragiles sont accueillis, si on met en place pour eux des aménagements raisonnables et des pratiques pédagogiques qui vont leur permettre d’apprendre à leur rythme sans être rejetés et orientés, alors par définition, l’Ecole inclusive accueillera tout le monde. Elle sera « formatée » à toutes les difficultés d’apprentissages et pourra accompagner sans les rejeter, tous les élèves, quelles que soient leurs origines, leurs handicaps, leurs difficultés d’apprentissages.
L’Ecole inclusive est l’école pour Tou·te·s par définition. C’est donc aussi l’école sans échec. L’école qui permet à tous les élèves, quelles que soient leurs difficultés de vie, d’acquérir tous les savoirs de base ou, pour ceux qui vivent avec une déficience intellectuelle, tous les savoirs qu’ils sont capables d’emmagasiner. C’est une Ecole qui ne met pas les élèves en compétition et qui permet à chacun·e d’avancer le plus loin possible.
J’ai gardé un point important, qui nous réjouit, pour la fin. Le Gouvernement rappelle que l’enseignement spécialisé s’adresse à des publics à besoins spécifiques. Il souhaite décloisonner enseignement ordinaire et enseignement spécialisé et propose de mettre en place une table ronde de l’enseignement spécialisé afin d’analyser globalement le système en réunissant les spécialistes du secteur. C’est une initiative positive, mais elle ne le sera pleinement que si la société civile y est invitée. Nous appelons donc la Ministre à intégrer à cette table ronde les associations qui portent la lutte contre les orientations abusives d’enfants sans handicap vers le spécialisé et celles qui portent le combat de l’Ecole inclusive pour toutes et tous.
1 Le Décret parle de “classes à visée inclusive”. Cap 48, dans ses publicités radio sucre le « à visée » pour ne parler que de « classes inclusives », ce qu’elles ne sont évidemment pas.
Pour la Plate-forme de lutte contre l’échec scolaire :
Jean-Pierre Coenen, Ligue des Droits de l’Enfant
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Sep 27, 2019 | Ecole - Education - Inclusion
Avant les élections, le MR s’était fait le champion des opposants au tronc commun. Non parce qu’il jugeait, comme nous, le projet insuffisant, mais au contraire, parce qu’il estimait qu’il allait déjà trop loin. Il a donc obtenu de : « … renforcer les activités orientantes en troisième année de l’enseignement secondaire… » .
Désormais, pour la troisième année, on ne parle donc plus de tronc commun mais de « tronc commun modalisé ». Ainsi, les écoles secondaires qui organisent des filières qualifiantes pourront commencer à y préparer leurs élèves dès la troisième et proposeront une offre en fonction de leurs propres sections.
Cette liberté donnée aux établissements est dangereuse : par rapport à ce que prévoyait initialement le Pacte, on n’ira donc pas vers un tronc commun davantage structurel mais, au contraire, vers un renforcement de la division entre les filières, avec, en prime, une vision utilitariste de celles-ci.
En effet, on revient avec cette obsession de l’orientation professionnalisante qui serait tellement nécessaire et urgente à réimposer avant la fin du tronc commun. C’est un non-accord sur le fond du projet que le gouvernement veut porter pour cette législature.
La dimension polytechnique, c’est à dire de compréhension globale, est comprise comme utile, une aide à l’orientation. Mais avant 15 ans, ce n’est pas le temps du choix d’une orientation professionnelle, c’est le temps de mettre en place des bases solides qui devront permettre d’apprendre plus aisément ultérieurement, quel que soit le métier visé.
Des 13.349 élèves orientés en 3P en 2014, il y en a, en 2017, 25% en 6P, 6% en alternance et 48% d’entre eux sont sortis sans aucun diplôme (autre que le CEB s’ils l’avaient). Et des 11.443 élèves orientés en 3TQ en 2014, il y en a, en 2017, 37% en 6TQ, 3% en alternance et 18% d’entre eux sont sortis sans aucun diplôme (autre que le CEB s’ils l’avaient).
L’un des aspects de cette réforme concernera l’enseignement en alternance, dont le gouvernement souhaite ouvrir l’accès aux jeunes dès 15 ans (donc sans avoir terminé le tronc commun). Pour qui ? pour ceux qui sont en difficultés à l’école ? On voit mal comment cette relégation, pourrait être compatible avec la promesse de « faire de l’alternance un parcours d’excellence »…
Qui oserait prétendre que c’est une solution quand on y regarde de plus près ? Les chiffres disponibles sur ce que produit la formation en alternance sur Bruxelles sont jalousement gardés parce qu’ils ne sont pas brillants : malgré un tri des élèves à l’entrée, en 2018, 63% seulement sont allés au bout de leur année (ce qui ne veut pas dire qu’ils l’ont réussie) et 30% d’entre eux n’avaient pas trouvé de patrons parce que leur formation de base était insuffisante, aux dires de ces mêmes patrons.
L’idéal serait d’ apporter à tous une formation théorique et pratique ambitieuse et polytechnique, c’est à dire qui mène à une compréhension globale de notre société.
Vision utilitariste et marchande de l’école
Or, depuis plus de vingt ans, les politiques éducatives sont dominées par une vision utilitariste et marchande. Ce processus de marchandisation et de rationalisation de l’enseignement implique d’élargir le champ des compétences de base aux langues étrangères, au numérique et aux STEM (sciences, technologies, engineering et mathématiques). La DPC insiste sur la nécessité absolue de renforcer ces filières, afin de développer l’économie.
Cette adéquation école-travail n’a pourtant qu’un impact marginal et individuel sur l’accès à l’emploi et ne tient pas compte de la situation de terrain (la pénurie des enseignants se fait lourdement sentir, précisément en langues, math, sciences… )
Cette vision reflète les intérêts du monde économique et des grandes entreprises, pas celui de nos élèves. Le mérite de la DPC est d’avoir clarifié cela.
Ce gouvernement dopé par l’idéologie MR veut une « réforme de l’enseignement qualifiant en concertation avec les acteurs » et « revoir l’offre d’options en mettant en avant celles qui sont le plus porteuses d’emplois » (notamment celles « s’inscrivant dans la transition sociale et écologique » a fait ajouter Ecolo). Il n’y a là rien de critiquable en soi. Mais cela participe d’une conception qui réduit l’enseignement qualifiant à une fabrique de main d’oeuvre, sans grande ambition de formation générale.
Nos élèves ont besoin qu’on les forme, qu’on les éduque, qu’on les instruise, afin qu’ils puissent comprendre. Une école progressiste exige l’émancipation et la citoyenneté critique.
Pour la Plate-forme de lutte contre l’échec scolaire :
Michèle Janss, APED (Appel Pour une Ecole Démocratique)
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